Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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vendredi 9 février 2007

vendredi 9 février 2007

La date de sortie du 7e tome de Harry Potter officiellement annoncée

Ce sera le 21 juillet prochain, à 00h01 heure de Londres, soit 01h01 à Paris.

Je vous annonce d'ores et déjà que mon blogue sera en inactivité totale tout le week-end le temps que je dévore ce livre à l'abri des spoilers d'internet. Et tant pis pour mes clients en garde à vue. Ce sera l'avocat de permanence pour eux.

Soyez le juge des comparutions immédiates, le délibéré

Le tribunal, après en avoir délibéré, a déclaré le prévenu coupable et en répression l'a condamné à quinze jours d'emprisonnement sans mandat de dépôt. Le prévenu a donc été aussitôt remis en liberté, dans l'attente d'une convocation devant le juge d'application des peines.

Les travaux d'intérêt généraux, proposés par beaucoup d'entre vous, ont été écartés du fait des maladies invalidantes du prévenu. Faire effectuer les TIG est déjà assez difficile, car la législation sociale s'applique aux TIG, et on est en présence d'un invalide. Ce serait refiler un casse tête au JAP.

Deux commentaires sous le billet original méritent d'être repris. Ils sont rédigés par des magistrats, ou du moins se présentant comme tels mais leur qualité me paraît crédible ; le premier est très drôle à condition de n'être que le fruit de l'imagination de l'auteur, et le second, rédigé par un juge d'application des peines, est je crois exactement le raisonnement tenu par le tribunal.

Voici le premier.

Les suites:

1/ l'audience est levée, je rentre dans la salle des délibérés en multipliant les protestations outrées et théâtrales devant mes assesseurs contre le choix de la compa faite par le parquetier de permanence (sauf si le parquetier en question est cette belle brune aux yeux bleus du bureau 4, qui elle n'est que la victime de la hiérarchie parquetière).

L'auditeur de justice m'approuve car je le note, le juge de proximité m’approuve également car de toute façon il approuve tout ce qui porte une robe, l'assesseur, prénommé Averell, s'en fout car son vrai métier c'est JAF.

2/ j’ouvre en soupirant le dossier de la procédure, me tourne vers les assesseurs en leur demandant : « bon, vous en pensez quoi ? ».

L’auditeur : « quelles sont les sanctions possibles ? » (qu’est-ce que j’en sais, c’est toi qui viens de l’ENM, je comptais sur toi pour me le dire, ah vraiment on est pas aidé !)

Le juge de proximité : « mais pourquoi les gens sont-ils aussi méchants, quand je raconte les audiences à mes amis du Rotary ils n’y croient pas ?»

Averell : « A quelle heure on mange ? »

3/Instruit par ces avis, j’avance prudemment l’idée de 3 mois SME pendant 2 ans, avec obligation de soins psychologiques, et obligation d’exercer une activité professionnelle ou de suivre une formation. Averell est partant, l’auditeur aussi, le juge de proximité également car il approuve tout ce qui porte etc…

Donc va pour 3 mois SME sur 2 ans avec obligation de soins psychologiques, et obligation d’exercer une activité professionnelle ou suivre une formation, avec exécution provisoire.

4/Nous reprenons l’audience.

5/Je lance d’un ton grave et sévère-mais-juste les multiples informations et notifications qui doivent désormais être réalisées par le président d’audience : durée du suivi, risque en cas de nouvelle infraction, date et heure de convocation au SPIP, température au sol, gonflage manuel des gilets de sauvetage présents sous le siège, obligations générales 132-44, obligations particulières 132-45. Ma voix se perd dans le brouhaha de la salle, les escortes qui passent, les pensées du condamné qui opine du chef avec un grand sourire à tout ce qu’on lui dit car il n’a compris qu’une chose : il ne dormira pas à la maison d’arrêt ce soir. Il est 17h45, le dossier suivant de comparutions immédiates arrive, l’audience « normale » commencera à 20 heures et se terminera à minuit. Averell attendra pour manger.

Ce qui m'a d'autant plus fait sourire est que le tribunal ayant jugé comportait bien un juge de proximité, et que la procureur de permanence était en effet charmante.

Une explication : à Paris et dans les grosses juridiction, il y a une chambre spécialisée dans les comparutions immédiates qui ne fait que ça (A Paris, la 23e). En province, des audiences correctionnelles peuvent juger des comparutions immédiates au milieu de dossiers plus classiques. D'où le "l’audience « normale » commencera à 20 heures et se terminera à minuit" à la fin qui contrarie l'estomac d'Averell.

Voici le commentaire de JAP.

Bon, voyons si je peux faire du "tuning de la peine" selon l'expression de Me Eolas. Tout d'abord, ce cas n'est pas facile. Apparemment, pas de demande de délai. L'infraction est constituée, et je constate que l'on n'est pas sur un "coup de tête" (temps passé, choix des mets, du resto, trajet...), et très loin d'un état de nécessité. Pas de difficulté sur la culpabilité. Reste la peine... J'écarte le TIG. Pour faire un TIG, il faut déclarer le condamné à la sécurité sociale comme travailleur bénévole et qu'il fournisse un certificat d'aptitude au travail. Bien que dans l'absolu, il ne soit pas impossible de faire travailler une personne handicapée, concrètement, cela me semble difficile, à moins que le JAP local ne dispose d'un poste adapté. On court à l'inexécution du TIG dans ce type de dossier.

Je passe sur la production du STIC à l'audience, qui a le don de m'agacer et que je ne regarde pas. Coté antécédents, il a déjà été averti par un sursis et un SME va être pris en charge. Donc, je n'opterai pas pour un empilement de SME, peu utiles, d'autant que le JAP peut ralonger le suivi du 1er le cas échéant, qu'il a engagé des soins, et qu'il n'y aura pas de victime à indemniser. J'avais bien pensé à une expertise psy, mais là aussi, le JAP pourra toujours en ordonner une si ça lui paraît nécessaire. J'écarte l'amende et les jours amende, il en a déjà eu une il y a 15 jours qui ne l'a pas dissuadé de commettre de nouvelles infractions et a de faibles revenus.J'opte plutôt pour une peine ferme, dont j'espère qu'elle provoquera une prise de conscience. Le quantum ne peut pas être très élevé car la peine maximale encourue n'est que de 6 mois et il faut tenir compte de sa personnalité qui me semble fragile. Je prosose 15 jours. Le mandat de dépôt à l'audience ne m'apparaît pas utile car il vaut mieux lui éviter une incarcération et le passage en comparution immédiate est souvent un "électrochoc" suffisant. Il aura donc 15 jours à faire + le sursis révoqué (mais je ne serais pas opposée à une dispense partielle de révocation si ce sursis est important). S'il respecte bien son SME, suit des soins, ne commet plus d'infraction, bref s'il fait des efforts d'insertion, le jour où il le convoquera, le JAP pourra envisager un aménagement de peine, au vu de son état de santé, par exemple sous surveillance électronique.

Reste une difficulté : on ne sait rien des autres procédures en cours (mêmes faits ? dates ? sont elles audiencées ?) car on aurait pu envisager un renvoi, sans mandat de dépôt, pour joindre tous les dossiers à la même audience.

Il me manque quelque chose : l'avis des collègues car, soyez en sûrs, le délibéré est un moment important.

A quand l'exercice "soyez le Jap" ?

Que dire de plus ? La bonne solution, et exactement le raisonnement que j'attribuais au tribunal.

A quand un "Soyez le JAP" ? Pas tout de suite ou alors il me faudra de l'aide. En effet, je ne veux pas parler de mes dossiers sur ce blog. Mes clients n'apprécieraient pas. Or les seuls dossiers de JAP que je connais sont ceux de mes clients, faute d'audiences publiques (voire d'audience tout court). De plus, expliquer les peines principales, complémentaires, les sursis, mises à l'épreuve et autres peines alternatives est déjà complexe. Expliquer les placements en milieu ouvert, fermé, le calcul de la mi-peine pour une liberté conditionnelle, et expliquer les pouvoirs d'appréciation du JAP serait un casse-tête. Si vous voulez vous frotter à l'exercice, be my guest.

Monsieur le procureur, pas d'autres réquisitions ?

Alors, l'audience est levée. Averell, réveillez vous, il est l'heure d'aller dîner.

Procès Charlie Hebdo : délibéré au 15 mars

ha, zut, j'ai tout dit dans le titre.

Ha, non. Le procureur a requis la relaxe, ce qui ne préjuge pas de la décision, mais est un indice sur les probabilités. Je vous mettrai le texte de la décision dès que j'aurai pu me la procurer.

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