Par Dadouche
Non, ce billet n'est pas destiné à évoquer à l'élection triomphale du nouveau président russe ou les merveilleuses conférences de presse du porte parole de la Ministre de la Justice, mais à vous informer d'une réalité méconnue.
Sachez le, les magistrats sont l'un des remparts de la démocratie.
Non ?
Si.
Dans les communes de plus de 2500 habitants pour les élections municipales et dans les circonscriptions électorales pour les élections cantonales sont instituées des commissions de propagande composées d'un magistrat (qui la préside), d'un fonctionnaire désigné par le préfet, d'un fonctionnaire désigné par le trésorier-payeur général et d'un fonctionnaire désigné par le directeur départemental des postes et télécommunications.
Leur rôle est d'assurer l'envoi et la distribution de tous les documents de propagande électorale.
Mais si, vous savez, cette grosse enveloppe maronnasse qui contient les professions de foi et bulletins de chaque candidat.
La commission doit d'abord s'assurer, avant la mise sous pli, que les bulletins et circulaires sont conformes au code électoral. Puis, une fois la mise sous pli effectuée par les petites mains de la mairie, s'assurer que lesdits plis contiennent bien les documents de propagande de chaque candidat.
Pour la plupart des élections, cette tâche est dévolue aux juges d'instance, spécialistes du contentieux électoral.
Mais comme il y a beaucoup de communes et de cantons, cette année, les autres sont mis à contribution dans certaines juridictions.
Depuis quelques jours, de nombreux magistrats français se baladent donc dans les trous les plus reculés du départementles joyaux de nos belles provinces. Enfin, ceux qui sont assez bêtes consciencieux pour réunir vraiment la commission plutôt que conférer par téléphone avec les autres membres.
Imaginez vous petite souris dans la salle des mariages de la mairie de Framboisy[1].
Gascogne, président de la Commission, est assisté de Mr Rondecuir, représentant du Préfet, Mr Timbré, postier de son état, et de Madame Cheik-Amblan, émissaire du TPG.
Après avoir mesuré la taille du bulletin (article R30 du Code Electoral), vérifié qu'il est imprimé d'une seule couleur sur papier blanc (même article), étudié les couleurs employées dans la circulaire (la profession de foi), qui ne doit pas comprendre une combinaison des trois couleurs bleu-blanc-rouge, à l'exception de l'emblème d'un parti (article R 27 du Code Electoral), et pesé le tout (grammage entre 60 et 80 grammes au mètre carré), la commission vérifie les mentions figurant sur les bulletins et circulaires.
Et là, c'est le drame.
Face à la liste d'ouverture « Framboisy en Rose et Vert » qui rassemble Fantômette, Langelot, les Cinq Jeunes Filles et les Six Compagnons, deux autres listes ont déclaré leur candidature.
Le Furet a décidé en effet de se lancer en politique sous l'étiquette « Fantômette, Go Home », flanqué de ses comparses habituels Alpaga et Bulldozer.
Il a malheureusement confié à ce dernier le soin de s'occuper de l'impression du bulletin de vote. Et Buldozer, qui a des lettres, a trouvé que c'était bien plus logique de faire une liste alphabétique. C'est ainsi qu'Alpaga se retrouve tête de liste, contrairement à l'ordre de présentation déclaré à la Préfecture de Marne et Oise.
Le bulletin, non conforme aux dispositions de l'article R 117-4 du Code Electoral, est écarté de la mise sous pli et ne sera donc pas expédié aux électeurs.
De son côté, le Masque d'Argent dirige d'une main de fer la liste « Avec le Sire de Framboisy » et son pseudonyme figure donc tout en haut du bulletin. Patatras et Fatalitas ! Il a déclaré sa candidature sous son réel patronyme : de Maléfic.
Si rien n'empêche de déclarer sa candidature sous son patronyme en indiquant le pseudonyme qui figurera sur le bulletin, encore faut-il le préciser.
Les bulletins ne peuvent en effet comporter d'autre nom de personne que celui des candidats (article R 30 du Code Electoral).
La Commission hésite longuement, sous l'oeil menaçant d'Eric, représentant du candidat qui assiste à ses travaux avec voix consultative. Finalement, le bulletin est lui aussi exclu de la mise sous pli.
Les procès verbaux sont signés, et la commission prend le chemin de Moucheton-Nay pour le même cérémonial, avant d'achever son périple à Goujon-Sur-Epuisette.
Dans quelques jours, la Commission reviendra pour une autre tâche d'une haute technicité : prendre au hasard des enveloppes maronnasses dans les cartons remplis par les employés de la mairie pour vérifier si le bulletin de la liste «Framboisy en Rose et Vert » et les circulaires des trois listes y ont bien été insérés.
Le jour de l'élection, Lulu prendra le relais de Gascogne pour présider la commission de contrôle des opérations de vote, qui circule dans les bureaux des communes de plus de 20,000 habitants pour vérifier que tout se passe bien.
Bon, c'est pas tout ça, maintenant il va falloir les lire, les circulaires qui remplissent l'enveloppe maronnasse.
PS : Reconnaissance éternelle à ma marraine, qui m'a offert mon premier « vrai » livre Fantômette et le Régent, qui, en plus d'une envie irrépréssible de visiter le Louvre pour voir le Régent « en vrai », m'a donné le goût de la lecture, ce qui a indiscutablement contribué à mes cinq années d'études supérieures, à ma réussite au concours de l'ENM et par voie de conséquence à l'octroi du privilège de vérifier la couleur des bulletins de vote.