Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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jeudi 23 avril 2009

jeudi 23 avril 2009

Pourquoi elle me manquera

Extrait de France Info, ce matin.

Je me permets de proposer à son équipe de campagne le poster suivant, pour continuer dans le fun.

Poster de type “motivation”, très à la mode dans les années 90. La photo représente une Rachida Dati hilare ; le titre est “LOLPOLITICZ” et le sous-titre : “I can haz parlement europé1 ?”


Désolé pour l'humour de geek. Si vous ne comprenez pas le poster, voyez ici.

Anthropologie judiciaire

Par Gascogne


Ah, qu'il était doux le temps où l'on se posait la question de l'accession des femmes à la magistrature...Car si aujourd'hui 75 % des auditeurs de justice sont des auditrices (pour plus de précision, voir ), sachez, Mesdames, que la magistrature entièrement composée d'hommes n'est pas si lointaine.

Des projets personnels et familiaux m'ayant conduit à faire un peu de ménage dans mes archives, j'ai retrouvé un discours de rentrée judiciaire que je ne peux que vous faire partager. En effet, le procureur général près la cour d'appel de Liège, en Belgique, M. Delwaide, se posait le 27 mai 1946 cette difficile question de l'accès des femmes à la magistrature, la France ayant permis cette évolution sociale quelques temps plus tôt.

Et je ne résiste pas au plaisir de vous faire partager quelques extraits de cette Mercuriale, que vous pourrez lire en intégralité ici. L'on y devine très rapidement que M. le procureur général, sous une plume fort alerte, est très opposé à cette idée. Pourquoi donc ? Parce que cela serait totalement contre la nature même de l'art de juger, nous explique-t-il. En effet, celui-ci impose calme et détermination, alors que comme chacun le sait, "les femme sont incapables de garder leur sang-froid dans les discussions et ne sont pas faites pour le métier de juge".

Bien au delà, les femmes sont dépourvues des capacités pour exercer ce métier. Mieux, elles le savent, puisque "si les femmes réussissent dans l'art dentaire, et même dans la médecine, elles s'abstiennent volontairement de toucher à la grande chirurgie, sentant bien que cet art à responsabilité énorme les dépasse. Or, il y a certaines analogies entre la chirurgie et la justice. Dans les deux cas, il faut savoir avec sang-froid et parfois sur l'heure prendre les décisions dont dépend toute l'existence d'un sujet". Nous voilà avertis.

Pour bien faire comprendre à l'auguste assemblée masculine que l'échec serait patent si la porte de la magistrature était ouverte, le procureur général prend alors appui sur "l'échec" que constitue l'accession des femmes à la profession d'avocat[1] : "Nous constatons que généralement, les femmes prennent les affaires par le détail et que les grandes lignes leur échappent. Puis, elles n'ont pas la puissance. Ce qu'elles font est souvent gentil, mais elles manquent de ce qui fait l'orateur : le pectus[2]. Il y a dans l'existence de la femme avocate, une indication qu'en général, la femme n'est pas faite pour la vie du Palais. Et c'était à prévoir, puisque la vie du Palais est une lutte perpétuelle, et que dans toute la nature, physiquement et psychiquement, le mâle seul, à l'exclusion de la femelle est fait pour la lutte". (il ne connaissait pas encore Arlette Laguiller).

Car finalement, le problème qui se pose, "c'est au tréfonds, une question de glandes" (je vous assure que c'est dans le discours, je n'invente rien). "Chez l'homme de quinze à vingt ans, l'esprit s'illumine et prend son radieux élan. Il s'enrichit progressivement. A cinquante ans, l'homme est dans toute sa force intellectuelle renforcée de son expérience. A la fin de sa carrière, il vit de son acquis puis vient l'âge de la retraite vers soixante dix ans...Pour la femme, le processus est analogue, mais le mariage et la maternité constituent une nouvelle étape de son évolution, et vers les quarante-cinq ans, la vie sexuelle se retire, lui laissant le sentiment intime d'une diminution de son être et, souvent, un sentiment de modestie qu'elle n'avait pas antérieurement. La femme à ce moment engraisse et devient matrone. Ne faudrait-il pas dés lors, avancer de quinze ans l'âge de la retraite pour les femmes magistrats ?".

Je vous ai dit que sa plume était alerte, je n'ai pas dit légère...Rajoutez à cela que "de même, à la ménopause, sans aller jusqu'à l'entière irresponsabilité, une grande partie des femmes subit, dans une certaine mesure, des troubles psychiques..." Classe, on vous dit.

S'en suit tout un développement sur le fait que la gent féminine ne s'intéresse finalement qu'à la mode, dans le but de plaire aux hommes, et qu'une telle frivolité est incompatible avec la lourde tâche du juge. Il manque à la femme pour exercer les fonctions judiciaires la sérénité : "Il faut que la justice soit sans passion, modérée et sage. Or, cela est congénitalement contraire au tempérament de la femme. La femme est un être subjectif, émotif, passionnel, extrême en tout, se décidant avant tout pour des motifs de sentiments..." Et comme le disait un "savant professeur d'économie politique...après s'être apitoyées sur la victime, elles s'apitoieraient sur le condamné...Tranchons le mot, la femme est une personne antijuridique" (ah, on fait moins les malignes, là).

Je passe sur l'inévitable grossesse de la femme juge, pour laquelle "il faudra aussi installer au Palais une pouponnière avec nurse, et suspendre les audiences aux heures de tétée". "Et que fera-t-on quand une Présidente grosse de huit mois devra précéder son tribunal à l'audience, voir au Te Deum, avec le tangage d'une frégate désemparée ?" (oui, mesdames, je vous le demande, que fera-ton ? Chérie, si tu me lis...). "Il est certain qu'en raison des nécessités du service, on ne peut songer à nommer magistrat une femme mariée. Avec l'actuelle crise des domestiques, quand donc, mon Dieu, aurait-elle le temps de s'occuper des dossiers ?".

Et puis, que voulez vous, la femme "reste toujours dans une certaine mesure une proie destinée à être subjuguée". Seule solution qu'entrevoit notre haut magistrat, "la loi admettant les femmes dans la magistrature devrait prescrire formellement que seules pourront être nommées les vieilles qui sont laides". Cela évitera que les hommes magistrats ne succombent aux succubes...

Voilà mesdames un condensé de ce que l'on pouvait penser de vous il y a quelques 60 ans. Heureusement, aujourd'hui, les choses ont bien évolué, et plus personne n'oserait dire "Mais qui va garder les enfants ?"...

Notes

[1] allons, Fantômette, tu ne croyais quand même pas t'en tirer comme ça en te moquant de tes coloc' féminines...

[2] Poitrine, Coeur, selon le Gaffiot...Eloquence, au figuré

Touche pas à mon clet’che !

Par Sub lege libertas


Entendant l’autre matin, l’esprit encore embrumé par un réveil incertain, qu’il faut ôter la cagoule, je pensais écouter distraitement un bulletin météorologique prometteur, quand le surgissement des mots “bande” et “manifestation” me fit craindre une distorsion temporelle : Eugène Deloncle et ses sbires étaient-ils de retour ? la République est-elle menacée ?

Mais oui, la patrie est en danger et il s’agissait bien de mon cache-nez qui se transformait en outil prohibé de rébellion. Et martial, le ministère de l’Intérieur laissait exposer que : « Tout participant à une manifestation publique, en dissimulant volontairement son visage dans le but de ne pas être identifié, serait puni de l'amende prévue pour les contraventions de 5ème classe: 1.500 euros. En cas de récidive dans un délai d'un an, l'amende peut être portée à 3.000 euros » (source AFP).

Alors les belles âmes me diront que lutter contre les casseurs, avant qu’ils ne cassent et ne se cassent, est une intention louable. L’enfer étant pavé à fouler en cortège de bonnes intentions, pour permettre une identification parfaite des manifestants et prévenir la dissimulation de tout objet contondant ou briseur, le gouvernement devrait exiger des manifestants qu’ils défilassent nus (mais là, ils tomberaient sous le coup de l’article 222-32 du Code pénal qui interdit, hélas même pour être parfaitement reconnaissable en bande et en public, d’y paraître nu).

Mais ce texte annoncé ne prévoit pas du tout de pénaliser de suspects manifestants aux mobiles sournois. On n’y trouve même pas la formule ahurissante imaginée pour l’appartenance à une “bande” selon laquelle ce participant dissimulant son minois manifesterait “en ayant des visées agressives sur les biens et les personnes”. Non, relisez le texte envisagé, selon l’AFP, et maintenant ébaudissez-vous de l’application qu’un parquetier vous propose ci-après.

Non, je ne m’attarde pas sur certaines femmes paraissant lors de défilés de mode, très maquillées, les yeux outrageusement couverts de lunettes de soleil la nuit ou par temps de pluie, qui pourraient être verbalisées, mais paradoxalement ainsi volontairement dissimulées, elles espèrent être mieux identifiées, notamment par les lecteurs de grands hebdomadaires spécialisés dans la publication judiciaire imposée en Une. Holà ! Voici, ici (à) Paris, une application exclue.

Mais d’un maquillage à l’autre, “participant à une manifestation publique”, un carnavaleux dans les rues de Dunkerque lors de la bande des Pêcheurs me convient parfaitement comme sujet.“Dissimulant volontairement son visage dans le but de ne pas être identifié”, le même carnavaleux met son “clet’che” (son déguisement, en version locale) exactement pour cela ! Alors ami procureur de Dunkerque, prépare-toi à faire siéger ton Tribunal de Police en continu ! Au fait, sans vouloir dénoncer les petits camarades, il te faudra poursuivre vraisemblablement quelques collègues (enfin, je ne les ai pas reconnus).

Le texte proposé est-il même applicable? Il est peu probable que les membres des Compagnies Républicaines de Sécurité ou de la Gendarmerie Mobile casqués, encadrant une manifestation publique en cortège pacifique mais très masquée, reçoivent l’ordre d’interpeller de tels contrevenants, en nombre. Dès lors, comment vont-ils dresser le procès verbal d’infraction ? S’ils doivent constater qu’un individu, qu’ils ne peuvent identifier (puisque la dissimulation du visage doit être faite pour cela, c’est un élément constitutif de l’infraction) a participé masquant volontairement son visage à ladite manifestation, je connais la destination du procès verbal transmis au Parquet (et oui, c’est une contravention de cinquième classe dont la poursuite échet au procureur) : classement sans suite auteur inconnu ! Allez ! Personne n'est démasqué, mais la République est sauvée.


Sub Lege Libertas est un magistrat du parquet.

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