Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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dimanche 28 février 2010

dimanche 28 février 2010

Les PG flingueurs

Par Gascogne et Eolas (très aidés par un certain Monsieur Audiard)


Suite au changement de loi concernant la procédure pénale, la Ministre de la Justice de Framboisy madame Chimère Mariole-A-Ri, apprend que, conformément au texte (« Si la chancellerie s’aventurait à donner des ordres de non-poursuites d’une affaire, le procureur général (PG) - qui est nommé en conseil des ministres - pourrait s’y opposer. De même, le procureur pourra s’opposer à des instructions qui seraient “contraires à la recherche de la vérité” de son PG. Un substitut pourra agir de même à l’égard de son procureur », selon Le Monde.), un procureur, nommé Gascogne, à choisi de désobéir et de poursuivre des siens amis. Furieuse, elle se rend au tribunal du magistrat, accompagnée de son procureur général Sub Lege, bien décidée à régler ses comptes. La joyeuse équipe arrive, alors que les magistrats et avocats locaux sont en plein buffet de l’audience solennelle de rentrée.

Dans la salle des pas perdus


MAITRE EOLAS : Charmante soirée, n’est ce pas ? Vous savez combien ça va nous coûter ? 200 dossiers d’AJ. Tarif 2010.
 
LE PROCUREUR GASCOGNE, jetant un œil aux procédures d’amendes forfaitaires : Y’en a qui gaspillent, et y’en a d’autres qui collectent … Hein ? Qu’est ce que vous dites de ça ?
 
LE JUGE PAXATAGORE, pensif près du buffet : Faudrait encore des dossiers en CRPC, ils partent bien ceux-là.
 
LE PROCUREUR GASCOGNE,  tendant un gros sac à Maître Eolas : Voilà vos copies de pièces en retard … et avec quelques unes en avance en plus. (Maître Eolas avise un trou dans la robe du procureur Gascogne) La ministre et le proc’ général ont essayé de flinguer mon juge d’instruction, oui, maître.
 
MAITRE EOLAS : Ce n’est pourtant pas leur genre.
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Et ben ça prouve qu’ils ont changé de genre. Voilà.
 
LE JUGE PAXATAGORE, sortant d’une boîte à biscuit un code de procédure pénale 2010 : Quand ça change, ça change, faut jamais se laisser démonter.
 
MAITRE EOLAS :Vous croyez qu’ils oseraient venir ici ?
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Les politiques ça ose tout ! C’est même à ça qu’on les reconnaît.
 
La ministre et le procureur général entrent au tribunal.


LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : T’es sûre que tu t’es pas gouré de crèche ?
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI: J’me goure jamais, en rien.
 
FANTOMETTE, les accueillant à la porte en titubant (de joie) : Bonjour, justiciables. Avocat choisi ou commis d’office ?
 
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : Rien !
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Si c’est notre budget qu’ils sont en train d’arroser les petits comiques, ça va saigner ! … Dites donc mon brave.
 
LE JUGE PAXATAGORE : Madame ?
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Il est là, l’taulier ?
 
LE JUGE PAXATAGORE : Qui demandez-vous ?
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Le procureur Gascogne.
 
LE JUGE PAXATAGORE : Le procureur Gascogne… ?
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : … Gascogne l’emmerdeur, Gascogne le malhonnête, c’est comme ça que j’l’appelle moi.
 
LE JUGE PAXATAGORE : Ah, lui. Si ces messieurs-dames veulent bien me suivre …
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Et comment. (au procureur général) Alors, tu viens dis !
 
LE JUGE PAXATAGORE,indiquant la salle des pas-perdus : Si vous voulez bien vous donner la peine d’entrer.
 
 
Dans la salle des pas-perdus



LA MINISTRE MARIOLE A RI : Bougez pas ! Les mains sur la table. J’vous préviens qu’on a la puissance politique d’un Taser® et des députés de calibre 49-3. L’IGSJ est avec nous.
 
LE JUGE PAXATAGORE, dégainant l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme : Si ces messieurs-dames veulent bien me les confier…
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Quoi ?
 
LE JUGE PAXATAGORE : Allons vite, quelqu’un pourrait venir, on pourrait se méprendre, et on jaserait à Strasbourg. Nous venons déjà de frôler l’incident avec l’arrêt Medvedyev.
 
Le ministre et le procureur général, tout penauds, remettent leurs instructions écrites et leurs projets de loi à Maître Eolas.

LE PROCUREUR GASCOGNE, au ministre : Tu sais ce que je devrais faire ? Le tweeter, rien que pour le principe …
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Tu ne trouves pas que c’est un peu trop fréquenté ?
 
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : (Au ministre) J’te disais que cette démarche ne s’imposait pas. (Au procureur) Au fond maintenant, les diplomates prendraient plutôt le pas sur les hommes d’action. L’époque serait aux tables rondes et à la détente. Hein ? Qu’est ce que t’en penses ?
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : J’dis pas non. (Il s’assoit et commence à trier des procédures arrivées au courrier)

LA MINISTRE MARIOLE A RI : Bé dis donc, on est quand même pas venu pour faire du chiffre ?
 
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : Pourquoi pas ? Il n’y a plus de substitut placé pour ça. Au contraire, les tâches ménagères ne sont pas sans noblesse. Surtout lorsqu’elles constituent le premier pas vers des condamnations fructueuses. Hein ? … (Maître Eolas lui donne une pile de dossiers) Merci.
 
Les yeux du ministre sont attirés par un exemplaire du Rapport Léger trainant sur la table, ouvert à la page suppression du juge d’instruction).

LE PROCUREUR GASCOGNE : Maître Eolas, vous avez oublié de planquer les motifs de fâcherie.
 
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : Oh, procureur Gascogne…
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Tu connais la vie monsieur Sub Lege…. Mais pour en revenir au travail manuel, ce que vous disiez est finement observé. Et puis, ça reste une base.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Ça, c’est bien vrai. Si on connaissait mieux la réalité du terrain, on aurait moins souvent la tête aux bêtises.
 
Fantômette fait irruption en titubant (de fatigue) dans la salle des pas-perdus …

FANTOMETTE : Bonjour. Mais il est où le juge Paxa ?
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Qu’est ce que vous lui voulez ?
 
FANTOMETTE : Y’a plus de prévenus au dépôt et y’a plus de mises en examen !
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Maître Eolas, donnez lui des CI, allez …
 
FANTOMETTE : Pas d’AJ ! Des prévenus solvables ! Vos CI vous pouvez vous les…
 
MAITRE EOLAS :… Allons cher confrère ! Monsieur le procureur Gascogne vous dit qu’il n’y a plus que des compas, un point c’est tout.
 
FANTOMETTE : Vous n’avez qu’à m’en donner, en me recommandant à vos clients… (elle tend la main vers les dossiers de Maître Eolas)

MAITRE EOLAS : Touche pas au grisby, salope !!
 
Elle ressort en titubant (de surprise).

LE PROCUREUR GENERAL : Des clients persos, à c’t’âge là !
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : C’est un scandale hein ?
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Nous par contre, on est des adultes, on pourrait peut être se faire un petit dossier médiatique ?
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Ça, le fait est. Maître Eolas ?
 
MAITRE EOLAS : Seulement, le tout-venant a été piraté par les mômes commis d’office. Qu’est ce qu’on fait, on s’risque sur le bizarre ? (Il sort un dossier de la nouvelle loi sur l’inceste). Les faits datent des années 80. Ça ne va rajeunir personne.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Ben nous voilà sauvés !
 
MAITRE EOLAS : Sauvés… Faut voir.
 
LE JUGE PAXATAGORE, de retour d’audience, avisant le dossier : Tiens, vous avez sorti le formol ?
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : Pourquoi vous dites ça ?
 
MAITRE EOLAS, goguenard : Eh ! (Il lui tend un PV d’audition du prévenu)

LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : Il a pourtant un air honnête.
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Sans être franchement malhonnête, au premier abord, comme ça, il a l’air assez curieux.
 
MAITRE EOLAS :Il date du Périgourdin, du temps des grandes heures ; seulement on a dû modifier la fabrication des magistrats depuis, y’a des piou-pious qui devenaient indépendants. Oh, ça faisait des histoires.
 
Ils lisent le Code pénal actualisé de la loi sur l’inceste, sur la répression des violences de groupe et sur la prévention de la récidive criminelle (trois lois votées en moins d’un mois)

LA MINISTRE MARIOLE A RI : Faut reconnaître, c’est du brutal !
 
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE : Vous avez raison, il est curieux hein ?
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : J’ai connu un roi de Pologne qu’en promulgait des pareils au petit déjeuner.(Un temps de réflexion) Faut quand même admettre que c’est plutôt un Code gaulois. (Il tousse)

Ils continuent à lire.

LA MINISTRE MARIOLE A RI : Tu ne sais pas ce qu’il me rappelle ? C’t’espèce de drôlerie qu’on instruisait dans une petite taule du Ch’Nord, pas tellement loin d’Hazebrouck. Les codes rouges et la taulière, une blonde komac. Comment qu’elle s’appelait, non de dieu ?
LE PROCUREUR GASCOGNE : Lulu la nantaise.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : T’as connu ?
 
LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE, le nez dans le Code : J’lui trouve un goût de démagogie.
 
MAITRE EOLAS : Y’en a.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI,continuant sa discussion avec le procureur Gascogne : Et bien c’est devant chez elle que Clems le cheval s’est fait dessouder.
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Et par qui ? Hein ?
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Ben v’la que j’ai pu mon CASSIOPEE.
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Par Ed, un fondu qui travaillait qu’à la dynamite.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Toute une époque !
 
MAITRE EOLAS, perdu dans ses pensées : D’accord, d’accord, je dis pas qu’à la fin de sa carrière, Anatole, il avait pas un peu baissé. Mais n’empêche que pendant les années terribles, sous Besson, il faisait sauter des procédures à tout va. Il a quand même vidé tout un centre de rétention.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI : Ah ? Il était avocat?
 
MAITRE EOLAS : Non, JLD. Soit à c’qu’on t’dit !
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI, fondant en sanglots : J’ai plus ma tête …
 
MAITRE EOLAS : Il avait son secret, le loup.
 
LA MINISTRE MARIOLE A RI (se lève précipitamment) : C’est où, le dépôt ?
 
LE JUGE PAXATAGORE : A droite, au fond du couloir.
 
MAITRE EOLAS, visiblement ému : Et … Et … Et … une ramette de 500 pages, une cartouche de toner, il te sortait 250 refus de maintien en rétention ; un vrai magicien, Anatole. Et c’est pour ça que je me permets d’intimer l’ordre à certains préfets salisseurs de réputation qu’ils feraient mieux de fermer leur claque-merde ! (Il regarde en coin le reste des convives pour juger de l’effet de sa plaidoirie)

LE PROCUREUR GENERAL SUB LEGE, toujours dans son Code : Vous avez beau dire, y’a pas seulement que de la démagogie, y’a autre chose. Ce serait pas des fois de l’amateurisme ? Hein ?
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Si, y’en a aussi.
 
Un peu plus tard ; maitre Eolas s’est endormi pendant la lecture d’un assommant rapport de synthèse. On pose le tome 2 sur la table.

LE PROCUREUR GASCOGNE, repoussant le dossier en soupirant : J’prendrais bien quelque chose de consistant moi !
 
LE MINISTRE MARIOLE A RI, revenant dans la salle des pas-perdus : Dis donc, elle est maquée à un jaloux la Fantômette ? Je faisais un brin de causette, le genre réservée —tu me connais : j’suis pas celle d’avant. V’là tout à coup qu’un p’tit chroniqueur judiciaire est venu me chercher ! Les gros mots : « indépendance de la justice », « secret professionnel », « droits de la défense » et tout !
 
LE PROCUREUR GASCOGNE : Quoi ! Monsieur Specq ! Ça suffit pas de lui faire franchir les portes du prétoire, faut p’t’être le faire passer au travers !
 
LE JUGE PAXATAGORE, philosophe : Je serais pas étonné qu’on ferme notre tribunal…

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