Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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lundi 23 janvier 2012

Quelques mots sur l'affaire Megaupload

Sans prétendre à l’exhaustivité, d’autant que je n’ai accès qu’aux informations publiées, voici un petit topo sur l’affaire Megaupload, qui a généré beaucoup de questions de mes lecteurs (☹) et lectrices (♥).

Megaupload, pour ceux qui ne le savent pas, est le nom d’une société basée à Hong Kong, fondée par un ressortissant ayant les nationalités allemandes et finlandaises, Kim Schmitz, qui offrait au public un vaste espace de stockage en ligne, permettant de partager des fichiers très volumineux, par la technique du upload/download, ou téléchargement acendant/descendant (un utilisateur A envoie un fichier du disque dur de son ordinateur sur le serveur de Megaupload, un utilisateur B peut le télécharger du serveur Megaupload sur son disque dur.

La popularité du service proposé par cette société est due au fait que l’on pouvait trouver sur ses serveurs des fichiers audio et surtout vidéo de films et de séries récentes, en bonne qualité, permettant un visionnage dans des conditions de confort satisfaisantes, mais évidemment mises là sans l’accord des ayant-droits. Le service était à la base gratuit, mais limité (un seul téléchargement à la fois, après un temps d’attente de 45 secondes) tandis que des utilisateurs payant (dit premium) pouvaient télécharger plusieurs fichiers simultanément à une vitesse supérieure. Outre ces comptes premium, les revenus du site étaient liés à la publicité qui s’affichait à chaque téléchargement non payant.

Le 19 janvier 2012, Kim Schmitz, connu aussi sous le nom de Kim Dotcom (qui veut dire “point com” en anglais comme à la fin d’un nom de domaine), a été arrêté dans un manoir près d’Auckland, en Nouvelle Zélande, aux côtés de Finn Batato, directeur marketing, Mathias Ortmann Directeur technologique, tous trois allemands, et Bram van der Kolk, ressortissant hollandais. Dans le même temps, le site Megaupload (et ses déclinaisons thématiques, formant “la galaxie Mega”), ont été fermés.

Qui est à l’origine de cette arrestation ?

Tout a commencé par une enquête de la police fédérale américaine (le FBI), puisque la contrefaçon est en elle-même un délit fédéral (en outre, le caractère international de l’affaire donnait de toutes façons compétence au FBI). Cette enquête a réuni des éléments à charge contre les fondateurs de Megaupload, qui ont été présentés, comme la loi l’exige, à un Grand Jury (en français dans le texte), composé d’au moins 16 personnes, qui vote pour dire s’il y a lieu de prononcer une inculpation (indictment). C’est une procédure non contradictoire (la défense n’est pas entendue, et la plupart du temps, les suspects ignorent qu’ils font l’objet d’un Grand Jury). Le Grand Jury a prononcé cette inculpation, qui permettait au FBI d’engager des poursuites judiciaires et surtout exercer des actes de contrainte sur les personnes suspectées (sans indictment, seule une garde à vue est possible, et une très courte détention provisoire, le temps nécessaire au Grand Jury de se prononcer sur l‘indictment).

Sur la base de cet indictment, le FBI a saisi un juge fédéral de Virginie qui a émis un mandat d’arrêt international. Ce mandat d’arrêt international oblige tous les pays liés aux États-Unis par des accords internationaux d’arrêter les personnes visées et de les tenir à disposition des autorités américaines (certains États, comme la France, refusent d’extrader leurs nationaux, mais à la place les jugent sur leur territoire).

Les quatre suspects étaient en Nouvelle Zélande sans qu’aucun d’eux en ait la nationalité, la question ne se posait donc pas. La police les a arrêtés le 20 janvier dans un manoir luxueux loué par Kim Scmitchz qui y fêtait sont 38e anniversaire (il est né le 21 janvier). Comme le prévoit la loi néozélandaise, ils ont été présentés à un juge qui a décidé de les placer en détention le temps que les mérites de la demande d’extradition soient examinés (c’est ce qui est arrivé à Julian Assange en Angleterre et à Roman Polanski en Suisse). La procédure en est toujours là au moment où j’écris ce billet.

Quelles sont les suites prévisibles ?

Soit la justice néozélandaise estime le mandat d’arrêt illégal au regard de la loi kiwie, et ils seront remis en liberté, mais toujours sous le coup d’un mandat d’arrêt exécutable s’ils quittent le pays. Soit elle valide la procédure et les quatre suspects seront escortés jusqu’aux États-Unis où ils seront présentés à un juge qui statuera sur leur sort : remise en liberté sous caution (bail) ou placement en détention (remand in custody) en cas de risque de fuite avéré. S’ouvrira ensuite une phase judiciaire classique. En attendant, toujours à la demande de la justice américaine, les autorités chinoises de Hong Kong ont gelé les avoirs de Megaupload sur le territoire du Port aux parfums, là aussi en exécution des engagements internationaux unissant les deux pays, que la Chine a dû contracter pour entrer dans l’Organisation Mondiale du Commerce (le piratage en ligne a fait plus pour le rapprochement entre la Chine et les États-Unis que 50 ans de diplomatie durant la Guerre Froide).

Que risquent-ils ?

D’après les qualifications retenues, jusqu’à 50 ans de détention dans une prison fédérale (les peines se cumulant aux États-Unis).

Pourquoi est-ce un juge provincial de Virginie qui a ordonné cette arrestation ?

Ce n’est pas un juge provincial. D’abord, la Virginie est un État, pas une région, et ce n’est pas un juge de Virginie qui a ordonné cette arrestation mais un juge fédéral en poste en Virginie, c’est à dire un juge relevant du gouvernement des États-Unis d’Amérique. Deux systèmes judiciaires cohabitent aux États-Unis : le système de l’État fédéré, qui applique les lois dudit État (ici la Virginie) et où les juges sont généralement élus par les citoyens du Comté où ils exercent, et le système fédéral, qui applique la loi fédérale, et où les juges sont nommés par l’exécutif après validation par le législatif. La répartition des compétences entre les États fédérés et l’État fédéral est une question fondamentale aux États-Unis, et c’est là la véritable séparation entre les deux grands partis, Républicain, favorable à l’autonomie des États fédérés et préférant un État fédéral limité au minimum, et Démocrate, favorable à un États fédéral aux compétences élargies. Mais un juge fédéral de Virginie est aussi important et puissant qu’un juge fédéral à New York ou à Los Angeles.

En l’occurrence, c’est tombé en Virginie parce que Megaupload était hébergé entre autres sur des serveurs situés en Virginie, à Dulles (625 serveurs selon l’acte d‘indictment), de la société Carpathia. Cela donnait compétence à la justice américaine, même si la société était basée à Hong Kong, car les actes de contrefaçon avaient ainsi lieu en partie sur le territoire américain. Aucun autre État ne pouvait être compétent.

Comment les États-Unis ont-ils pu mettre hors ligne un site situé à Hong Kong et hébergé partout dans le monde ?

Un jeu d’enfant pour eux, privilège d’être le berceau du net. Les serveurs situés à l’étranger sont probablement intacts à l’heure où j’écris. Simplement, le juge fédéral américain a ordonné à VeriSign, l’établissement situé en Virginie (comme c’est commode) qui gère au niveau mondial ce qu’on appelle les résolutions de noms de domaine en .com notamment, de bloquer les DNS (Domain Name Systems) du site, c’est à dire de faire en sorte que si le nom de domaine http://megaupload.com ni les adresses IP auxquelles renvoyaient ce nom de domaine ne répondent. En somme, les serveurs existent toujours, mais ils ne peuvent plus être joints, ils n’ont plus d’adresse valide.

Comment puis-je me faire rembourser mon abonnement premium à vie ?

Nemo auditur propiam tupritendinem allegans[1] : nul ne peut invoquer en justice sa propre turpitude. Vous ne pouvez exiger l’application d’un contrat illicite.

Megaupload est un service mettant à disposition de l’espace mémoire sur des serveurs. Je pouvais ainsi y sauvegarder mes photos personnelles ou ma comptabilité. Pourquoi ne retient-on que l’aspect contrefaçon, et les dirigeants ne peuvent-ils plaider qu’ils ne peuvent surveiller le contenu de leurs serveurs ?

Ce sera probablement leur axe de défense. Cependant, l’argumentation du FBI tient en 8 arguments :

1. La durée de conservation des données dépend de leur popularité en nombre de téléchargements. La plupart des fichiers disparaît rapidement, les seuls les fichiers durables étant de fait les fichiers d’œuvres contrefaites.

2. Une faible proportion des utilisateurs paye pour le stockage. L’affaire repose donc essentiellement sur la publicité, qui s’affiche en cas de téléchargement. Donc l’affaire repose non sur la capacité de stockage louée mais sur le nombre des téléchargements. À rapprocher du point 1 ci-dessus.

3. Les inculpés ont personnellement donné des instructions à des utilisateurs pour localiser des fichiers violant le droit d’auteur et ont eu des échanges démontrant qu’ils avaient connaissance de cet usage très répandu, ce qui exclut qu’ils invoquent leur ignorance.

4. Les inculpés ont en outre personnellement recherché dans les bases de données internes pour trouver des liens vers des contenus illicites. Bref ils utilisaient eux même leur service pour visionner des films et des séries, et l’ont fait non comme utilisateurs mais en utilisant leur accès interne au site. Pas malin.

5. Le site a un système permettant de signaler des contenus pédopornographiques, mais pas des contenus contrefaisants.

6. Les utilisateurs uploadant des contenus contrefaisants ne voyaient jamais leur compte supprimé, mais juste le contenu signalé comme contrefaisant par les ayant-droits retiré. Les inculpés n’ont fait aucun effort pour identifier les contenus contrefaisants et tenter d’empêcher leur chargement sur les serveurs du site.

7. Un système de rémunération a été mis en place pour récompenser les chargements de contenus populaire donnant lieu à beaucoup de téléchargements.

8. Les inculpés ont explicitement discuté entre eux de problèmes de contrefaçons et de comment se mettre à l’abri, notamment une tentative de télécharger et stocker tout le contenu de Youtube.

Est-ce la fin de la circulation en ligne de films et de séries ?

Ah ! Ah ! Ah !

Est-ce qu’une offre légale similaire va se développer rapidement proposant un service aussi souple permettant un accès à un tel catalogue pour des prix raisonnables ?

Ah ! Ah ! Ah !

Si vous avez des questions ou des rectifications à apporter, les commentaires vous sont ouverts : vous avez tous un compte premium à vie ici.

Note

[1] En Français “Vous l’avez dans l’os”.

lundi 23 mai 2011

Post coïtum animal triste

Après une semaine haletante de ce qui restera comme une des plus spectaculaires affaires de la vie politique française, avec des audiences filmées, du suspense, des images choc, des théories du complot (mais ce siècle connaîtra-t-il un événement notable sans sa théorie du complot ?) et bien sûr, du sexe, ce qui fait toujours vendre, l’excitation va retomber, si j’ose dire, et une accalmie médiatique va s’imposer par la force des choses.

Or le juriste n’aime rien plus que le calme et la sérénité, qui sont propices à la réflexion.

Avec une semaine de recul, voici quelques commentaires que le traitement de cette affaire a suscités dans mon for intérieur.

Tout d’abord, la prédominance de cette affaire dans l’actualité va marquer une pause, par la force des choses. Enfin, diront certains masochistes qui en ont soupé de cette affaire mais lisent quand même cet article qui lui est consacré.

Dominique Strauss-Kahn a été remis en liberté (très) surveillée, ce dont je me réjouis au-delà de toute considération sur sa culpabilité éventuelle. Toute personne devrait en principe pouvoir attendre son procès en liberté, la détention devant être vraiment exceptionnelle, ce qu’elle n’est pas en France. Ce principe est mieux appliqué aux États-Unis qu’en France, particulièrement pour les affaires criminelles. Rappelons qu’avant 2000, l’accusé devant une cour d’assises qui était libre devait obligatoirement se constituer prisonnier la veille de l’audience.

Les conditions auxquelles cette liberté a été accordée (dépôt d’une caution d’un million de dollars, outre une garantie de 5 millions qui sera exigée si Dominique Strauss-Kahn ne se présentait pas à l’audience, interdiction de quitter la ville de New York, où il vivra dans un appartement vidéosurveillé, avec un garde armé devant la porte, payé par l’accusé lui-même, et portera en permanence un bracelet électronique, à ses frais là aussi) ont suscité des commentaires sur une justice de riches (l’accusé a dû mobiliser 6 millions de dollars et dépenserait environ 200.000$ par mois pour assurer sa propre surveillance. Une chose doit être bien comprise.

Si bien sûr, et aux États-Unis sans doute plus qu’ailleurs parmi les pays démocratiques ayant un système judiciaire indépendant, une personne qui pourra mettre les moyens nécessaires à sa défense sera forcément bien mieux défendue qu’une personne ne le pouvant point, ici, ce n’est pas la justice new yorkaise qui a imposé des conditions draconiennes à la libération de DSK. C’est la défense de DSK qui a proposé ce qu’on appelle un bail package en béton armé : elle est venue avec cette liberté surveillée clefs en main, en disant : “voilà ce qu’on vous propose”. Le juge s’est pour l’essentiel contenté de dire “D’accord, ça me va”. La défense a sorti l’artillerie lourde, très lourde, car elle savait que le bureau du procureur (District Attorney, DA) ferait tout son possible pour garder ce gros poisson très médiatique dans son vivier de Rikers Island. Le procureur étant élu à New York (contrairement aux juges, qui sont nommés, si quelqu’un pouvait le signaler à Alain Duhamel, merci), il a tout à gagner en montrant qu’il était sévère avec les puissants, surtout si ce puissant est étranger. Le bureau du procureur a joué à fond la carte Polanski : le flight risk, le risque de fuite (en droit français, on parle “d’absence de garanties de représentation”), en soulignant que l’accusé a été arrêté dans un avion au moment où il se préparait à quitter le territoire. La défense avait prévu cela et bien anticipé : elle a démontré que le billet avait été acheté bien avant les faits, et est arrivée avec une proposition qu’aucun juge n’aurait sans doute osé exiger tant elle est coûteuse et contraignante. Ajoutez à cela l’argument soulignant que le Directeur général du FMI peut être considéré comme un homme honorable, et la décision a été emportée.

On m’a souvent posé la question, alors je l’anticipe : cette somme sera rendue à DSK s’il est présent à l’audience jusqu’au jour du délibéré, peu importe qu’il soit déclaré coupable ou reconnu innocent.

À présent s’ouvre une phase qu’en droit français on appellerait “mise en état”, comprendre “mise de l’affaire en état d’être jugée”. En effet, le droit américain de manière générale et new yorkais en particulier ignore l’instruction criminelle menée par un juge, propre au système inquisitoire, c’est un système accusatoire, où le juge reste en retrait et a un rôle d’arbitre.

Ah, oui, une précision de vocabulaire : le système accusatoire anglo saxon n’a jamais voulu dire que c’était à l’accusé de prouver son innocence. Il ne s’oppose pas au système innocentoire, mais au système inquisitoire, où c’est le juge qui mène l’enquête et prend l’essentiel des inititiatives. Les systèmes ne sont pas incompatibles : en France, la procédure civile est accusatoire, et la procédure pénale, inquisitoire, avec des parties accusatoires (la procédure devant la chambre de l’instruction par exemple).

Les deux parties — je dis bien deux parties, car en droit américain, la plaignante n’est pas partie au procès pénal — vont présenter leurs motions au juge qui tranchera, essentiellement sur l’admissibilité de telle preuve qu’une partie veut produire et dont l’autre ne veut pas entendre parler (par exemple, si un test ADN désigne l’accusé, mais que la chain of custody a été brisée, c’est à dire qu’à un moment, l’intégrité de l’échantillon n’a pas été préservée avec certitude, s’il a été oublié une nuit dans la voiture de l’officier de police, ce qui a pu permettre sa contamination ou sa substitution, le juge écartera cette preuve, et l’accusation ne pourra en faire état). Ils ont 45 jours pour ce faire. Les audiences auront lieu dans le cabinet du juge, sans aucune publicité, pour que le jury n’ait pas connaissance de ces éléments. Si le DA faisait fuiter l’information qu’un test ADN a été écarté, la défense pourrait demander un mistrial, c’est-à-dire considérer que le droit de l’accusé à un procès équitable a été irrémédiablement compromis et que l’affaire doit être définitivement classée (dismissed). Et pour ceux qui se poseraient la question, si c’était la défense qui était à l’origine de cette fuite, cela permettrait au DA d’en faire état devant le jury. Ça rigole pas.

En somme, jusqu’à l’ouverture du procès, l’affaire va se préparer en secret, sans plus d’audience filmées ni de suspense haletant. Au revoir donc, ces scènes désopilantes d’envoyés spéciaux devant le palais de justice live from New York moins bien informés de ce qui se passe que les journalistes à Paris qui ont accès à Twitter. Ça me manquera.

À ce propos, un mot de déontologie journalistique, qui peut et doit s’appliquer aussi aux amateurs publiant sur l’internet. Mener une enquête sur un crime se justifie à mon sens dans deux cas seulement. Soit la justice se désintéresse de faits qu’elle estime non établis ou subit des pressions pour s’en désintéresser. Le journaliste fait alors éclater la vérité, prenant l’opinion publique à témoin, ce qui contraint la justice à agir. Soit la justice a statué mais s’est trompée ou a volontairement mal jugé. C’est la contre-enquête. Mais vouloir se livrer à une enquête parallèle quand l’affaire est en cours et que rien ne semble indiquer que la procédure soit dévoyée est dangereux : cela peut interférer avec le bon déroulement de l’enquête officielle, nuire à la défense ou à l’accusation, et expose au risque de manipulation par une des parties, quand ce n’est pas les deux. Les lecteurs sont intelligents, ils peuvent comprendre qu’on ne peut pas encore savoir si Untel est coupable et qu’on ne le saura pas avant plusieurs mois. L’explication du déroulement de la procédure est une information utile et suffisante. Il n’est que voir dans cette affaire le nombre de rumeurs, de fausses informations ensuite démenties, et d’approximations publiées pour se rendre compte que la course au scoop fait toujours des ravages dans le camp de la vérité. La sagesse s’impose.

J’ai entendu les déclarations optimistes d’un des avocats de DSK. J’avoue ma surprise. Ce type de déclarations, même prudentes, n’est pas fréquent de manière générale, et est une première pour cet avocat, qui a désormais beaucoup à perdre en cas de plaider coupable ou de condamnation. Je ne puis que supposer qu’il a dans la manche de quoi être aussi affirmatif.

Ce qui m’amène naturellement à la présomption d’innocence. J’ai tout entendu cette semaine, et cette affaire a d’ores et déjà fait une victime identifiée : la langue française.

J’ai déjà parlé ici de la présomption d’innocence. En résumé : c’est avant tout une règle de preuve (c’est à l’accusation de démontrer la culpabilité), auquel nous avons, en France, ajouté un aspect protection de la réputation : il est interdit de présenter une personne faisant l’objet d’une enquête ou de poursuites comme coupable tant qu’elle n’a pas été définitivement condamnée. Ce n’est pas facile, même un avocat comme l’actuel président de la République se plante régulièrement.

Le respect de la présomption d’innocence est donc à la fois un principe fondamental du procès, un pilier de notre république (il est posé par la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, article 9, car ce principe, en 1789 n’avait rien d’évident) et une règle limitant la liberté d’expression.

Alors pour éviter de torturer la langue française et d’employer ce pauvre mot de “présumé” à toutes les sauces, mettons les choses au point.

Parler de Dominique Strauss-Kahn comme d’un suspect, d’un inculpé ou d’un accusé est tout à fait correct. Juridiquement, le terme le plus exact à ce stade est accusé, puisque l’indictment a été prononcé par le Grand Jury. Le désigner comme “violeur” serait une atteinte à la présomption d’innocence. Mais le désigner comme “violeur présumé” est lourd, inélégant et imprécis, le terme présumé, sans doute inspiré par présomption d’innocence, ayant le sens de “Qui est supposé par hypothèse, par conjecture”. Soit l’inverse de ce qu’on veut dire, en somme. Un violeur présumé n’est pas un innocent présumé.

Là où l’auditeur risque la migraine, c’est quand la victime devient à son tour présumée. Diable ! Si le violeur est présumé innocent, la victime est-elle présumée menteuse ? Non, bien sûr, mais on la rétrograde au rang de victime présumée. Ce qui fait beaucoup de présumés.

Le mot français pour “victime présumée” est “plaignante”. Le terme de “victime”, qui étymologiquement renvoie au religieux, puisqu’il désigne ce qui est offert en sacrifice aux dieux (victima en latin), n’est juridiquement adéquat qu’une fois que le crime est établi, soit après la condamnation. Bref, le terme de victime est incompatible avec la présomption d’innocence. Vous comprendrez pourquoi l’usage intensif qui est fait de ce terme par les gouvernements successifs pose problème.

Ce qui m’amène à ma remarque finale.

Dominique Strauss-Kahn est une personnalité de premier plan, qui a des amis qui peuvent être sincères dans l’affection qu’ils lui portent, peu importe qu’elle soit parfois mâtinée d’arrières pensées politiques. À chaque fois qu’une personne est accusée de quelque chose d’incroyablement grave, ses proches ont le réflexe naturel de refuser de croire que c’est seulement possible. Le premier réflexe est de protéger, de voler au secours, parfois maladroitement, telle cette épouse croyant voler au secours de son mari accusé de braquage et qui ne trouva rien de mieux à dire à la barre de la cour d’assises : “Assassin, peut-être, mais voleur, sûrement pas !”

Des réactions maladroites, voire complètement idiotes ont eu lieu. La plupart de ceux qui les ont tenues se sont rétractés ou ont exprimé leurs regrets en réalisant l’absuridté de leurs propos. Mais il y a une réaction à la réaction qui me paraît totalement déplacée et qui fleure bon son Tartuffe. C’est le refrain du “vous n’avez pas eu un mot pour la victime”. La palme revient sans doute à Laurent Joffrin, opportunément soutenu par Franz-Olivier Gisbert s’en prenant à Robert Badinter jeudi soir sur France 2. On sent les éditorialistes qui savaient que DSK avait un problème relationnel avec les femmes et qui tentent de se racheter une virginité en jouant les sycophantes.

Le terme de ‘politiquement correct” est souvent galvaudé, mais là on est plein dedans.

Oui, il est permis, quand on a des sentiments d’amitié pour quelqu’un qui est accusé d’un crime, de se soucier de lui, de rappeler qu’il est présumé innocent, et par conséquent de ne pas verser des larmes de crocodile sur la personne qui l’accuse. On peut être convaincu, irrationnellement puisque sans se reposer sur des éléments objectifs dont on ignore tout, de l’innocence d’un ami. Ce qui implique de penser que la plaignante n’est pas et ne sera jamais une victime. La décence invite uniquement à ne pas accabler cette personne dont on ne sait rien, parce qu’on peut se tromper sur un ami, et le mieux à faire pour cela est de ne pas parler d’elle. Cette attitude est tout à fait morale et même recommandable. Et le fait d’interpréter ce silence comme la preuve irréfutable d’un mépris ne mérite que ce dernier sentiment en retour.

Quand j’appelle une mère pour lui annoncer que son fils est à Fleury, elle n’a jamais un mot pour le plaignant éventuel. Elle ne se soucie que de son fils. Dois-je donc l’engueuler, monsieur Joffrin ?

Les avocats sont souvent confrontés à ce type de situation, on est même en première ligne, quand on plaide la relaxe ou l’acquittement de faits contestés qui supposent forcément que l’accusé ou la victime mente (faits de violences ou sexuels, essentiellement). J’ai obtenu des relaxes dans des affaires de violences conjugales, ce qui supposait de laisser entendre que la plaignante mentait. Je l’ai même démontré à plusieurs reprises. Heureusement que la pudeur ne m’a pas interdit de me lancer sur ce chemin difficile, j’aurais laissé condamner des innocents, et en matière de violences conjugales, les peines sont sévères. Je ne vous parle même pas des affaires de viol où il faut, devant une cour d’assises, confronter la plaignante avec ses contradictions, avec les incohérences du récit, avec la trouille au ventre de se tromper et d’accuser une femme violée de mentir.

Prendre position, c’est prendre le risque de se tromper, et cela implique d’être cohérent. Que penseriez-vous d’un avocat qui clamerait “mon client est innocent, mais toutes mes pensées vont bien sûr à la victime ?” Sans doute la même chose que j’ai pensé de ceux offrant ce désolant spectacle sur le plateau de France 2.


Nota : le titre de ce billet est tiré du titre du film éponyme de Brigitte Roüan (1996), lui même tiré d’une citation d’Ovide : post coitum anima tristis : “après le coït, l’ame est triste”.

mardi 29 septembre 2009

Quelques mots sur l'affaire Polanski

Les plus attentifs de mes lecteurs auront peut-être entendu parler de cette affaire dont les médias se sont discrètement fait l’écho : un cinéaste français a été interpellé en Suisse et placé en détention, à la demande des États-Unis d’Amérique, en raison d’une affaire de mœurs remontant à la fin des années 70.

Un petit point juridique sur la question s’impose pour mes lecteurs qui n’étant pas ministre de la culture désireraient avoir un point de vue éclairé sur la question.

Roman Polanski a été arrêté en vertu d’un mandat d’arrêt international délivré par la justice américaine. Un mandat d’arrêt international est une demande émanant forcément d’une autorité judiciaire (en France, un juge d’instruction ou une juridiction répressive) et relayée par voie diplomatique, s’adressant à tous les autres États, d’interpeller telle personne et de la lui remettre. Le vocabulaire juridique parle d’État requérant et d’État requis.

En principe, un mandat d’arrêt international, restant un acte interne à l’État requérant, ne lie pas les autres États requis. Mais de nombreuses conventions internationales, bilatérales (liant deux États entre eux) ou multilatérales (liant plusieurs États : il y en a une en vigueur en Europe, en Afrique de l’Ouest, au sein de la Ligue Arabe, en Amérique du Nord, etc…), dites de coopération judiciaire, sont intervenues pour rendre obligatoire l’exécution de ce mandat par l’État requis. Ces conventions ne sont pas signées avec n’importe quel État : la France n’a par exemple pas de convention d’extradition avec l’Iran ou avec la Corée du Nord. Dans notre affaire, il s’agit du Traité d’extradition entre les États-Unis d’Amérique et la Confédération Helvétique signée à Washington le 14 novembre 1990 (pdf).

Concrètement, le mandat est notifié aux autorités du pays où se trouve la personne visée, ou enregistrée dans une base de données internationale, la plus connue étant celle de l’Organisation Internationale de police Criminelle, plus connue sous le nom d’Interpol. Quand une personne se présente à la frontière, la police vérifie sur la base de son passeport si la personne est recherchée (les passeports actuels permettent une lecture optique, le contrôle ne prend que quelques secondes). En cas de réponse positive, la personne doit être interpellée, la police n’a pas le choix.

Le droit interne s’applique alors. Je ne connais pas le droit suisse en la matière, mais on peut supposer qu’il est proche du droit français en la matière. Le mandat d’arrêt vaut titre provisoire d’incarcération, généralement de quelques jours, le temps pour les autorités de notifier à la personne le mandat d’arrêt dont elle fait l’objet, qu’elle sache qui a ordonné son arrestation et pourquoi. C’est capital pour les droits de la défense et le non respect de ce délai entraîne la remise en liberté immédiate. Le détenu a naturellement droit à l’assistance d’un avocat. 

Le détenu est ensuite présenté à un juge qui va s’assurer que la notification a été faite et demander à l’intéressé s’il accepte d’être remis à l’État requérant (auquel cas son transfèrement est organisé dans les délais prévus par la loi, là aussi sous peine de remise en liberté immédiate. S’il refuse, le juge statue sur une éventuelle remise en liberté surveillée, et l’intéressé peut contester le mandat d’arrêt. 

Les arguments que l’on peut soulever sont divers. La régularité de forme, tout d’abord : le mandat d’arrêt international doit être conforme à la convention internationale liant l’État requérant à l’État requis, sinon ce n’est pas un mandat d’arrêt international. Classiquement, il doit indiquer l’autorité émettrice, la date d’émission, la nature des faits qui le fondent, et les textes de loi interne réprimant ces faits. Un État requis peut refuser une extradition pour certains motifs, qui généralement figurent dans la convention d’exclusion. Classiquement, ce sont les délits politiques (terrorisme exclu) et les faits qui ne constituent pas une infraction dans la loi de l’État requis, ainsi que le fait pour le détenu d’avoir déjà été jugé par un autre État pour ces mêmes faits : c’est la règle non bis in idem : on ne peut être jugé deux fois pour les mêmes faits (l’appel n’est pas un deuxième jugement mais une voie de recours). L’intéressé peut également soulever que le châtiment auquel il est exposé est illégal. L’Europe n’extrade pas quelqu’un exposé à la peine de mort, mais elle extrade si l’État requérant fournit des garanties que cette peine ne sera pas prononcée ou exécutée. Et oui, les États requérants (vous vous doutez que je parle surtout des États-Unis) tiennent parole, sous peine de se voir refuser toutes leurs futures demandes d’extradition.

Je passe sur le droit français qui est encore plus compliqué puisqu’il connait une phase judiciaire et une phase administrative, la cour de cassation et le Conseil d’État pouvant connaître du même dossier d’extradition (Cesare Battisti a fait le tour des juridictions françaises avant de faire le tour du monde).

Enfin, il existe un principe fondamental : un État n’extrade jamais ses ressortissants. C’est contraire à la protection qu’il doit à ses citoyens. Ce qui ne veut pas dire qu’ils sont l’abri de poursuites dans leur État d’origine.

J’ajoute que depuis 2004, le droit européen (de l’UE s’entend) a créé le mandat d’arrêt européen, qui exclut toutes les règles de l’extradition, notamment l’interdiction d’extrader un national. Il est de fait plus proche du mandat d’arrêt interne que du mandat d’arrêt international. Ce qui est conforme à la logique d’intégration européenne. Je me méfie autant des juges espagnols et allemands que Français, mais pas plus (c’est assez suffisant comme ça).

Et je crois nécessaire d’ajouter qu’aucune loi ni convention internationale ne prévoit d’immunité pour les artistes, oscarisés ou non.

Ah, une dernière précision ,décidément, on n’en a jamais fini : l’extradition ne se confond pas avec le transfèrement : ce terme concerne des personnes purgeant une peine dans un État autre que le leur, et prononcé par cet État. Le transfèrement vise à permettre au condamné d’être rapatrié dans son pays pour y purger sa peine. C’était le cas des condamnés de l’Arche de Zoé.

Revenons-en à notre cinéaste.

Il est de nationalité française (et polonaise, mais ici cela n’a aucune incidence). Il est visé par un mandat d’arrêt international émis par la justice de l’État de Californie pour une affaire remontant à 1977. Il a à l’époque eu des relations sexuelles avec une mineure âgée de treize ans après lui avoir fait boire de l’alcool et consommer des stupéfiants. Si mon confrère Dominique de Villepin me lit, qu’il ne s’étouffe pas d’indignation en invoquant la présomption d’innocence : celle-ci a expiré peu de temps après les illusions de cette jeune fille, puisque Roman Polanski a reconnu les faits en plaidant coupable. La culpabilité au sens juridique de Roman Polanski ne fait plus débat. Roman Polanski, après quelques jours en prison, a été remis en liberté dans l’attente de l’audience sur la peine. Il en a profité pour déguerpir et a soigneusement évité le territoire américain pendant trente ans.

Au départ, l’accusation contenait cinq chefs d’accusation, dont une qualification de viol. À la suite d’un accord passé avec le parquet, comme la loi californienne le permet, Roman Polanski a plaidé coupable pour un chef unique d’abus sexuel sur mineur (unlawful sexual intercourse with a minor), code pénal californien section 261.5., délit puni de 4 ans de prison maximum. 

Le mandat d’arrêt vise à le faire comparaître pour prononcer la peine, la comparution personnelle du condamné étant obligatoire pour la loi californienne. 

La victime a été indemnisée et a retiré sa plainte. Cela faisait partie probablement de l’accord passé avec le parquet (la victime n’est pas partie au procès pénal en droit américain). Cela ne fait pas obstacle à la poursuite de l’action publique.

Tant qu’il résidait en France, il était tranquille : la France n’extrade pas ses nationaux. Et il ne pouvait être poursuivi en France, bien que de nationalité française, les faits ayant déjà été jugés aux États-Unis. C’est la règle non bis in idem dont je vous parlais plus haut.

C’est la vanité qui a piégé notre cinéaste : invité en Suisse pour y recevoir une récompense pour l’ensemble de son œuvre (il ne se doutait pas qu’en effet, c’est bien l’ensemble de son œuvre qui allait recevoir ce qui lui revenait), il s’est rendu dans la sympathique confédération fédérale. Fatalitas : à l’aéroport, le contrôle de son passeport donne un ping Mise à jour : D’après la presse suisse, ce serait le cinéaste qui a donné l’alarme lui-même en demandant à la police suisse une protection, attirant ainsi l’attention des autorités sur sa venue : elles ont constaté que ce monsieur était l’objet d’un mandat d’arrêt international émis en 2005 (je vais revenir sur cette date curieuse de prime abord), il n’était pas suisse, il pouvait être arrêté. Et le voici qui goûte la paille humide des cachots helvètes, où il est en cellule individuelle, confiné 23 heures par jour. Ça vous choque ? À la bonne heure. Les prisonniers en France sont traités de la même façon en maison d’arrêt, sauf qu’en plus, ils sont dans une cellule surpeuplée. Pensez-y aux prochaines élections.

La Suisse va notifier par voie diplomatique l’arrestation de Roman Polanski. Les États-Unis ont 40 jours pour demander officiellement l’extradition à compter de l’arrestation (article 13§4 de la convention de 1990), soit jusqu’au 5 novembre 2009 à 24 heures, faute de quoi Roman Polanski sera remis en liberté. Ce dernier a indiqué qu’il refusait l’extradition et compte porter l’affaire devant le Tribunal pénal Fédéral (Bundesstrafgericht) et le Tribunal fédéral (Bundesgericht), la cour suprême suisse, le cas échéant. L’affaire est désormais dans les mains de la justice suisse et de mon excellent confrère Lorenz Erni.

Enfin, dernier point, sur l’ancienneté de cette affaire. Tous les soutiens au cinéaste invoquent à l’unisson l’argument que cette affaire est ancienne (à l’exception de Costa Gavras, qui lui soulève que cette jeune fille de 13 ans en faisait 25 ; il est vrai que 13 minutes d’un de ses films en paraissent 25, mais je doute de la pertinence juridique de l’argument). Se pose en effet la question de la prescription.

Je ne reviendrai pas sur le magistral exposé des règles en la matière (sans oublier la deuxième partie) par Sub lege libertas, règles qui sont à l’origine d’une grande partie de la consommation de paracétamol par les juristes. J’ajouterai simplement une précision : la loi californienne prévoit une prescription de 6 10 ans pour des faits de la nature de ceux reprochés à Roman Polanski (Code pénal de Californie, section 801.1). Cela dit sous toutes réserves, je n’ai pas accès à l’évolution du droit pénal californien depuis 1977.

Mais il faut garder à l’esprit que la prescription n’est pas un laps de temps intangible qui une fois qu’il est écoulé fait obstacle aux poursuites. Il peut être interrompu, et repart dans ce cas à zéro. Il faut six ans d’inaction des autorités judiciaires pour acquérir la prescription. Or les autorités judiciaires californiennes ne sont pas restées inactives depuis trente ans et ont toujours interrompu la prescription. La preuve ? En 2005, elles ont délivré un nouveau mandat d’arrêt international, acte qui interrompt la prescription : ce n’était en l’état actuel des choses qu’en 2011 que la prescription aurait éventuellement pu être acquise (sauf éléments du dossier que j’ignore, bien sûr).

Enfin et j’en terminerai là-dessus, je trouve choquant deux choses dans le tir de barrage du monde artistique. 

Je trouve honteux d’entendre des artistes qui il y a quelques semaines vouaient aux gémonies les téléchargeurs et approuvaient toute législation répressive et faisant bon cas de droits constitutionnels pour sanctionner le téléchargement illégal de leurs œuvres crier au scandale quand c’est à un des leurs qu’on entend appliquer la loi dans toute sa rigueur. Quand on sait que pas mal de téléchargeurs ont dans les treize ans, on en tire l’impression que les mineurs ne sont bons à leurs yeux qu’à cracher leur argent de poche et leur servir d’objet sexuel. Comme si leur image avait besoin de ça. Et après ça, on traitera les magistrats de corporatistes.

Et je bondis en entendant le ministre de la culture parler de « cette amérique qui fait peur ». Ah, comme on la connait mal, cette amérique.

Tocqueville avait déjà relevé il y a 170 ans, la passion pour l’égalité de ce pays. Elle n’a pas changé. Il est inconcevable là-bas de traiter différemment un justiciable parce qu’il appartiendrait à une aristocratie, fut-elle artistique. Il y a dix ans, l’Amérique a sérieusement envisagé de renverser le président en exercice parce qu’il avait menti sous serment devant un Grand Jury. Quitte à affaiblir durablement l’Exécutif.

Une justice qui n’épargne pas les puissants et les protégés des puissants ? On comprend qu’un ministre de la République française, qui a soigneusement mis son président et ses ministres à l’abri de Thémis, trouve que cette Amérique fait peur.

PS : billet mis à jour, merci à nemo pour ses lumières sur le droit du Golden State.

lundi 28 septembre 2009

Prescription, vous avez dit prescription...? (chapitre II)


par Sub lege libertas


Je vous ai conté il y a peu les aventures de Samantha avec le temps judiciaire, pour confirmer l’analyse lapidaire de Maître Kiejman, avocat de Roman Polanski quand il affirmait : “en France une affaire de ce type était prescrite au bout de 15 ans”. Je vous ai promis une suite car la généralité du propos rapporté ci-avant est trompeuse : une petite Vanessa pourrait presque faire mentir l’illustre Georges Kiejman. Ce qui suit est très rigoureusement inspiré d’un cas réel.[1] Mais qui est cette Vanessa ?

Vanessa est née le 11 mars 1976, première enfant d’une mère célibataire âgée de 16 ans et va être élevée jusqu’à ses quatre ans par ses grands parents maternels qui vont la recueillir de façon permanente, avant que sa mère âgée de 20 ans ne se mette en ménage avec un homme qui reconnaîtra Vanessa. Son grand père est né le 10 juillet 1940 et sa grand mère le 6 juin 1944.[2]

Aujourd’hui donc, le Parquet reçoit un courrier de Vanessa dénonçant son grand père pour lui avoir introduit plusieurs fois un doigt son sexe[3] dans l’anus et le sexe lors du mois d’août 1979, alors qu’il la gardait seule, sa grand mère étant hospitalisée. Elle explique déposer plainte car elle a été alarmée par l’attitude de son grand-père qui avait des gestes équivoques à l’égard de sa propre fille Cindy âgée de 7 ans lors des grandes vacances de cette année, ce qui a causé cette réminiscence de son propre passé. A nouveau, après un rire panique, Sub lege libertas s’interroge avec vous : est-ce prescrit ?

Je vous rappelle que trois éléments vont guider notre réflexion : la date des faits, la date de la majorité de la plaignante et la qualification possible de l’infraction. La plaignante est majeure depuis le 11 mars 1994. Les faits ont eu lieu en août 1979. La qualification possible des faits des faits : viols sur mineur de quinze ans par ascendant ou personne ayant autorité.

Interlude

Comme Eugène Pierre me l’a rappelé, le sexe et la loi sont un couple inconstant. Il a effectivement fallu attendre le 24 décembre 1980 pour que la loi définisse le viol comme

tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu'il soit, commis sur la personne d'autrui, par violence, contrainte ou surprise.

Le Code pénal de 1810 promulgué le 27 février 1810, ne définissait pas le crime de viol. On y lisait ceci :

ARTICLE 331. : Quiconque aura commis le crime de viol, ou sera coupable de tout autre attentat à la pudeur, consommé ou tenté avec violence contre des individus de l'un ou de l'autre sexe, sera puni de la réclusion.

ARTICLE 332 : Si le crime a été commis sur la personne d'un enfant au-dessous de l'âge de quinze ans accomplis, le coupable subira la peine des travaux forcés à temps.

ARTICLE 333 : La peine sera celle des travaux forcés à perpétuité, si les coupables sont de la classe de ceux qui ont autorité sur la personne envers laquelle ils ont commis l'attentat, s'ils sont ses instituteurs ou ses serviteurs à gages, ou s'ils sont fonctionnaires publics, ou ministres d'un culte, ou si le coupable, quel qu'il soit, a été aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes.

Observons d’ailleurs qu’en ce temps, le viol et les attentats à la pudeur sont de toute façon criminels. Aussi la loi du 28 avril 1832 a-t-elle séparé les deux notions considérant que seul le viol devait rester criminel, notamment car il pouvait résulter de cette conjonction sexuelle un enfant et désormais, on lisait dans le Code pénal :

ARTICLE 332 : Quiconque aura commis le crime de viol sera puni (des travaux forcés[4]à temps) de la réclusion criminelle à temps de dix à vingt ans .

ARTICLE 333 : Si les coupables sont les ascendants de la personne sur laquelle a été commis l’attentat, s’ils sont de la classe de ceux qui ont autorité sur elle, s'ils sont ses instituteurs ou ses serviteurs à gages des personnes ci-dessus désignés, s'ils sont fonctionnaires ou ministres d'un culte, ou si le coupable, quel qu'il soit, a été aidé dans son crime par une ou plusieurs personnes, la peine sera celle (des travaux forcés[5] à perpétuité) de la réclusion criminelle à perpétuité.

Le viol n’était donc que la conjonction sexuelle forcée entre un homme et une femme, l’homme étant l’agent, la femme la victime. Il n’y avait viol que lors de l’intromission par violence du sexe viril dans le sexe d’une femme. R. Garraud parlait “du fait de connaître charnellement une femme sans la participation de sa volonté”. Emile Garçon disait “le coït illicite avec une femme que l’on sait n’y point consentir”.

Tout le reste n’était qu’attentats à la pudeur. Ainsi Vanessa se plaindrait-elle que son grand père lui eût imposé des fellations ou introduit des doigts dans le sexe ? Comme la cour de cassation l’a jugé, il ne s’agirait que de délits atteints par la prescription. Avec la loi de 1980, les intromissions anales forcées, les pénétrations digitales, les introductions dans le sexe d’objet et les fellations imposées, tombent dans le “champ du viol”. Il est même légalement reconnu qu’un homme peut être violé.

Fin de l’interlude

Avec Samantha vous avez (ré-)appris que le principe général de prescription criminelle est fixé par l’article 7 alinéa 1 du Code de procédure pénale qui à la date des faits est à lire dans la version issue de la loi n°57-1426 du 31 décembre 1957 entrée en vigueur le 8 avril 1958, publiée au JORF [6] le 8 janvier 1958. On y lit que s’il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite, la prescription est acquise dix ans après la commission des faits. Pour Vanessa, la prescription intervient fin août 1989

Vous savez également que des règles spéciales pour les faits sexuels commis sur mineur ont été apportées par la loi n°89-487 du 10 juillet 1989 publiée le 14 juillet 1989 qui a introduit un alinéa 3 dans l’article 7 du Code de procédure pénale :

Lorsque la victime est mineure et que le crime a été commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif ou par une personne ayant autorité sur elle, le délai de prescription est réouvert ou court à nouveau à son profit, pour la même durée à partir de sa majorité.

La jurisprudence (classique) précise que cet alinéa ne s'applique qu'à des faits non encore prescrits lors de son entrée en vigueur le 14 juillet 1989. Donc dans notre cas, les faits étant prescrits en août 1989 soit après l'entrée en vigueur de ce nouvel alinéa, il s'applique. La prescription est acquis dix ans après la majorité de Vanessa donc le 11 mars 2004.

L’ article 121 de la loi du 4 février 1995 n°95-116 (publié au JORF le 5 février 1995) a introduit une nouvelle rédaction de l'alinéa 3 de l'article. 7 du Code de procédure pénale :

Lorsque la victime est mineure et que le crime a été commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif ou par une personne ayant autorité sur elle, le délai de prescription ne commence à courir qu'à partir de sa majorité.

Pour Vanessa, cela ne change rien; la prescription reste acquise le 11 mars 2004. Mais la loi du 17 juin 1998 n°98-468 du 17 juin 1998 par son article 25 (publié au JORF le 18 juin 1998) a encore modifié la rédaction de l'alinéa 3 de l'article 7 du Code de procédure pénale. On y lit désormais ceci :

Le délai de prescription de l'action publique des crimes commis contre des mineurs ne commence à courir qu'à partir de la majorité de ces derniers.

Le suspens est immense mais non cela ne change rien pour Vanessa : prescription acquise le 11 mars 2004. J’en vois déjà qui m’imaginent prenant mon bic administratif pour cocher la case n°34 (extinction de l’action publique) sur un formulaire de classement sans suite à agrafer sur la lettre de Vanessa. Mais le législateur veille...

Et par l’article 72 I de la loi du 9 mars 2004 publiée au JORF 10 mars 2004 et entrée en vigueur le 10 mars 2004, nos parlementaires ont fixé la rédaction actuelle (ouf!, enfin pour l’instant) de l'alinéa 3 de l'article 7 du Code de procédure pénale. Et çà alors, il y a du changement :

Le délai de prescription de l'action publique des crimes mentionnés à l'article 706-47 et commis contre des mineurs est de vingt ans et ne commence à courir qu'à partir de la majorité de ces derniers.

Bigre, quel est donc ce 706-47 ? Et bien c’est un article qui liste les infractions sexuelles commises sur mineur pour lesquelles des tombereaux de règles procédurales particulières s’appliquent. On y découvre notamment que cela concerne les crimes réprimés par l’article 222-24 du Code pénal, c’est à dire notamment le viol sur mieur de quinze ans par ascendant ou personne ayant autorité. Euréka ! Eh non je veux dire Vanessa ! Donc pour elle la prescription est acquise le 11 mars 2014, puisqu'à un jour près les faits ne sont pas prescrit le 10 mars 2004 lors de l’entrée en vigueur de la loi du 9 mars 2004.

En conclusion, le parquetier qui reçoit la lettre de Vanessa aujourd’hui doit faire recevoir sa plainte ! Et pour achever de nous distraire, si Vanessa le souhaite elle peut différer sa demande de justice jusque au début du mois de mars 2014. Le magistrat du Parquet aura alors quelques jours pour signer un soit- transmis pour enquête qui interrompra la prescription. Mais, s’il traite son courrier avec retard ... attention au dysfonctionnement du service public de la Justice.

Folle perspective :

L’enquête est menée durant l’automne 2009 par une Brigade des mineurs et le grand-père de Vanessa, désormais âgé de 69 ans, reconnaît en garde à vue avoir introduit son doigt sexe[7] dans l’anus ou le sexe de sa petite fille, tous les matins du mois d’août 1979, soit 30 ans auparavant... Il sort de garde à vue et le dossier est transmis par courrier au procureur, car le grand-père habite hors ressort du Parquet compétent à raison du lieu des faits où est toujours domiciliée la plaignante.

En février 2010 un réquisitoire introductif criminel est pris pour saisir le juge d'instruction -s'il n'est pas supprimé. Et en septembre 2010, le grand-père, retraité âgé de 70 ans, convoqué par courrier est mis en examen et conteste ses aveux, son avocat faisant état de troubles psychiques liés à son âge qui ont pu influer sur ses déclarations en garde à vue. Il est placé sous contrôle judiciaire.

L’expertise psychiatrique révèle que le mis en examen a commencé à avoir des symptômes discrets de la maladie d’Alzheimer depuis deux ans, qui peuvent influer sur ses déclarations. L’expertise relève aussi une problématique sexuelle complexe depuis 1979 à la suite de la découverte chez sa femme d’un fibrome utérin ayant conduit à une hystérectomie en août 1979 (la fameuse hospitalisation qui laisse le grand-père seul avec la petite Vanessa). Par ailleurs, le magistrat instructeur a la chance de retrouver aux archives de l’hôpital un dossier attestant que Vanessa avait été hospitalisée en septembre 1979 pour des problèmes urinaires et selon le médecin expert, les pièces quoique parcellaires du dossier médical évoquent des lésions compatibles avec l’introduction répétée d’un doigt membre viril de petite taille en érection[8] dans le sexe d’un fillette...

La clôture de l’information criminelle intervient en novembre 2011 avec renvoi aux assises. Et l’audience devant la Cour d’assises n'a lieu qu’en janvier 2015 soit plus de 35 ans après les faits. A 75 ans passés, le grand-père de Vanessa est condamné à 6 ans d’emprisonnement avec mandat de dépôt. Bien entendu, il est inscrit au FIJAIS pour 30 ans ! Il fait appel et obtient sa remise en liberté avant examen de l’appel qui intervient en mars 2016[9].

Il est acquitté ? Hélas, son avocat m’indique qu’il n’est pas présent à l’ouverture des débats : il produit un certificat médical attestant qu’à raison de la dégradation de sa maladie, il est désormais hébergé dans une unité de psychiatrie gériatrique. Affaire renvoyée !



La discussion se poursuit sous le billet initial : cliquer et commenter.



Post-scriptum : non, je ne glose pas sur le cas précis de Roman Polanski, car j'ai déjà mal au crâne avec le droit français en la matière ; alors, pour ce qui est du droit américain, voire du droit suisse de l'extradition...

Notes

[1] Les étudiants en droit et autres amateurs de diptérosodomie aérienne me sauront gré de leur offrir par ce cas pratique, la version exacte des textes applicables à la date concernée, nos amis Dalloz et Litec n'ayant plus laissé figurer sous les articles du Code les versions très antérieures du texte actuel alors que ces versions sont encore utiles... Mais comme le député Warsmann le sait les procureurs ne sont pas foutus de savoir si un texte est en vigueur ou abrogé, mais parfois applicable.

[2] certaines dates ont leur importance... enfin, même pour notre histoire.

[3] Comme mes lecteurs sont rigoureux, l'un d'entre eux m'a rappelé à l'ordre en me renvoyant à la lecture du Code pénal dans sa version antérieure à la loi n°80-1041.

[4] L’article 8 de l’ordonnance n°60-529 du 4 juin 1960 a supprimé et remplacé cette peine par la réclusion.

[5] Voir note précédente.

[6] Journal Officiel de la République Française

[7] voir note 3

[8] voir note 3, et l'on apprend par la même que la nature ne prend pas de mesure pour l'égalité des sexes, le grand père de Vanessa ne démentant pas avoir été peu gaté

[9] et non 2012 nos lecteurs auront corrigé d'eux même, comme dirait min 'tiot Didier Specq dins sin journo

Prescription, vous avez dit prescription...? (chapitre I)


par Sub lege libertas


Avant d’être au même diapason d’émotion que Frédéric Mitterrand et le Président Nicolas Sarkozy, selon ce ministre réagissant à l’arrestation de Roman Polanski, je me suis rappelé que toutes les semaines, je participais au jugement d’atteintes sexuelles sur mineurs et qu’il n’était pas si rare que les faits remontassent à plus d’une décennie, voire nous remissent en mémoire la France du Président Mitterrand, l’autre. Alors, sans émotion, remontons le cours du temps avec un petit cas pratique, toute ressemblance avec des personnages réels ou des faits ayant eu lieu n’étant pas fortuite.

Samantha est née le 28 février 1964. En mars 1977 elle a donc treize ans. Ses parents déposent alors plainte pour viol sur mineur de quinze ans, car elle leur dit avoir été ce mois-là droguée par un photographe né en 1933, qui l’a obligée dans cet état à avoir des relations sexuelles. Ses parents l’avait confiée à cet artiste de la chambre noire pour plusieurs séances, pour coucher sur papier argentique et mettre en lumière la beauté naissante de leur princesse. Une enquête de police commence. Le photographe est entendu, il reconnaît avoir couché avec la donzelle qu’il dit avoir pensée plus âgée et consentante. En septembre 1979, la procédure est clôturée et transmise au Parquet qui la classe sans suite.

Le Parquet reçoit ce jour un courrier de Samantha demandant que sa plainte soit reconsidérée. Elle est perturbée car elle croise de nouveau son agresseur devenu célèbre à ses yeux : il expose ses tirages dans le salon de coiffure chic où elle travaille. Elle “ne veut pas qu’un pédophile comme lui reste en liberté”. Sub lege libertas, votre procureur favori avec Gascogne, après un moment de rigolade nerveuse, s’interroge avec vous : est-ce prescrit ?

Trois éléments vont guider notre réflexion : la date des faits, la date de la majorité de la plaignante et la qualification possible de l’infraction. Les faits ont eu lieu en mars 1977. La qualification possible des faits est viols sur mineur de quinze ans par ascendant ou personne ayant autorité. La notion d’autorité sur la victime paraît de prime abord pouvoir être retenue puisque les parents confiait la mineure à l’artiste... La majorité de la plaignante intervient le 28 février 1982.

Le principe général de prescription criminelle est fixé par l’article 7 alinéa 1 du Code de procédure pénale qui à la date des faits est la version issue de la loi n°57-1426 du 31 décembre 1957, entrée en vigueur le 8 avril 1958, publiée au JORF [1] le 8 janvier 1958 . On y lit ceci :

En matière de crime, l'action publique se prescrit par dix années révolues à compter du jour où le crime a été commis si, dans cet intervalle, il n'a été fait aucun acte d'instruction ou de poursuite.
S'il en a été effectué dans cet intervalle, elle ne se prescrit qu'après dix années révolues à compter du dernier acte. Il en est ainsi même à l'égard des personnes qui ne seraient pas impliquées dans cet acte d'instruction ou de poursuite.

Donc dans notre cas, le dernier acte d’instruction ou de poursuite est le procès verbal de clôture et de transmission de la procédure au Parquet en septembre 1979. À compter de cette date, la prescription est donc acquise dix ans plus tard soit en septembre 1989. Mais, des règles spéciales de prescription pour les faits sexuels commis sur mineur ont été introduites par la loi du 10 juillet 1989.

L’article 7 du Code de procédure pénale dans sa rédaction issue de la loi n°89-487 du 10 juillet 1989 publiée au JORF le 14 juillet 1989 contient désormais un alinéa 3 :

Lorsque la victime est mineure et que le crime a été commis par un ascendant légitime, naturel ou adoptif ou par une personne ayant autorité sur elle, le délai de prescription est réouvert ou court à nouveau à son profit, pour la même durée à partir de sa majorité.

La jurisprudence (classique) précise que cet alinéa ne s'applique qu'à des faits non encore prescrits lors de son entrée en vigueur le 14 juillet 1989. Donc dans notre cas, les faits étant prescrits en septembre 1989 soit après l'entrée en vigueur de ce nouvel alinéa, il s'applique : ainsi la prescription de dix ans se calcule à compter de la majorité de la plaignante et est donc acquise après le 28 février 1992. Bien sûr des lois depuis ont modifié encore cette règle, mais elles sont toute postérieures à la date à laquelle la prescription est acquise. Donc Sub lege libertas comme Gascogne peut s’exclamer avec Maître Kiejman, avocat d’un certain Roman Polanski qui croisa lui aussi en mars 1977 une Samantha qu’ “en France une affaire de ce type était prescrite au bout de 15 ans"[2] : 1977-1992.

Mais Sub lege libertas vient pour autant dire à Maître Kiejman que l’affirmation très générale “une affaire de ce type” est source de confusion. D’abord, car tout le raisonnement précédent ne tient que si une action judiciaire (instruction) n’a pas été ouverte après la plainte, sinon la prescription ne courrait qu’à l’issue de dix années après le dernier acte.

Et si ce dernier acte avait été un renvoi aux assises suivi d’un arrêt de condamnation par contumace (à l’époque), l’accusé étant en fuite, la situation vécue avant hier soir par Roman Polanski dans les alpages suisses serait la même en France si l’arrêt de condamnation par contumace était intervenu après le 23 septembre 1989 (prescription de la peine criminelle de vingt ans qui ne commence à courir que cinq jours après le prononcé).

Ensuite, cher maître Kiejman, votre affirmation ne se vérifie pas toujours pour des faits de cette nature datant d’avant les eighties, si nous faisons varier quelques données. Ceci est une autre histoire que je vous conterai par la suite.

(À suivre)



La suite est à lire dans ce billet-là. Les commentaire se poursuivent ci-après.

Notes

[1] Journal Officiel de la République Française

[2] Libération du 28 septembre 2009, page 33.

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