Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Essayons de comprendre

J'ai été surpris de voir au zapping d'une célèbre chaîne cryptée un de mes confrères marseillais, ayant pourtant un certain passif au pénal, exposer face aux caméras de télévision son impuissance à expliquer à ses clients la décision du juge des libertés et de la détention de Marseille de placer sous contrôle judiciaire le policier qui conduisait le véhicule qui a tué un garçon de 14 ans qui traversait sur un passage piéton. Il est vrai qu'il n'était pas présent lors du débat contradictoire qui se tient à huis clos, hors la présence de l'avocat des parties civiles.

Ayant un peu moins d'années de métier que lui, et étant d'une confraternité qui a fait ma réputation jusqu'au tribunal d'instance de Gonesse, je me propose de le lui expliquer, et en même temps à vous, chers lecteurs, avant que des mauvais esprits ne vous soufflent que seule la profession du mis en examen explique une telle décision. Elle a joué, sans nul doute, mais elle seule n'explique pas tout.

A titre préalable, je vous propose une piqûre de rappel : j'avais proposé fut un temps un petit jeu de rôle vous permettant de vous glisser dans la peau d'un juge des libertés et de la détention (JLD), et la solution réelle donnée à ces cas se trouve ici. Ces billets vous apprendront tout ce que vous avez à savoir sur une audience de JLD.

Maintenant, essayons de nous mettre à la place de ce juge.

L'affaire est grave : un adolescent de 14 ans est mort. Le procureur de la république a ouvert une information judiciaire, confiée au cabinet de votre collègue le juge Machin, qui vient de mettre le policier en examen. C'est d'ailleurs le juge Machin qui vous demande d'envisager le placement en détention du policier, car il estime, comme le procureur qui a pris des réquisitions en ce sens, que le contrôle judiciaire est insuffisant. D'ailleurs, le parquet est présent dans votre bureau pour vous le rappeler et vous demander le placement sous mandat de dépôt.

Le JLD a lu le dossier ; pas nous. Nous en savons ce que la presse a pu révéler : le véhicule roulait fort vite, largement au dessus de la vitesse autorisée en ville. Il se rendait sur un lieu d'intervention, mais l'enquête de police a révélé que cette intervention ne revêtait aucune forme d'urgence qui pouvait justifier que le véhicule s'affranchisse des règles normales de conduite. La victime traversait sur un passage piéton. Le feu gardant le passage était-il rouge ou vert ? Les témoignages divergent sur ce point. Le conducteur a-t-il fait usage de sa sirène pour signaler son arrivée ? Là aussi, les témoignages divergent.

Le JLD a devant lui le mis en examen, il peut l'interroger, il l'entend parler des faits ; pas nous. Nous ne pouvons donc nous reposer là dessus. Tout ce que nous savons est qu'il a 22 ans, est policier stagiaire, c'est à dire en fin de phase de formation. On peut aisément en déduire qu'il n'a aucun casier ni même de signalement négatif au STIC.

Rappelons ici la règle :

La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que si elle constitue l'unique moyen :
1º De conserver les preuves ou les indices matériels ou d'empêcher soit une pression sur les témoins ou les victimes et leur famille, soit une concertation frauduleuse entre personnes mises en examen et complices ;
2º De protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de prévenir son renouvellement ;
3º De mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé.

« L'unique moyen » : s'il y a un autre moyen, il ne faut pas décerner mandat de dépôt.

Alors, voyons. Peut-on craindre que ce jeune homme aille maquiller les preuves ? Non, les constatations ont déjà été faites sur place, cette affaire étant considérée comme prioritaire. Qu'il fasse pression sur les témoins ? Un policier stagiaire de 22 ans ? Alors que les témoins ont déjà été entendus pendant la garde à vue ? Ca peut paraître douteux, non ?

Pression sur la victime, sans commentaire, hélas. Concertation frauduleuse avec ses complices ? Il était seul au volant, il est seul responsable.

Protéger la personne mise en examen ? Quelle que soit la douleur de la famille de la victime, ce serait lui faire injure que de soupçonner qu'elle pourrait exercer des représailles. Tout indique que c'est une famille sans histoire et honnête.

Garantir son maintien à disposition de la justice ? Peut-on sérieusement redouter que ce jeune homme prenne la fuite à l'étranger pour échapper aux conséquences de son acte ? Mettre fin à l'infraction ? Trop tard, hélas. Prévenir son renouvellement ? Là encore, qui peut croire qu'il va recommencer à conduire imprudemment en ville après ce qui s'est passé ?

Reste le dernier argument, et je parie que c'est autour de celui-ci que le débat a été le plus animé : mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Là, on est en plein dedans. Il y a un trouble à l'ordre public, car il y a eu mort d'homme, à cause de l'imprudence d'un policier, dépositaire de l'autorité publique ; ce fait divers a attiré l'attention des médias nationaux, et l'émotion publique est forte. Il est même possible que la décision de requérir un mandat de dépôt vienne du chef du parquet en personne, j'ai nommé Madame Rachida Dati, Garde des Sceaux. La détention provisoire est-elle le seul moyen de mettre fin à ce trouble ? Oui ! a dû s'exclamer le procureur, pensant aux caméras et micros qui l'attendent et à la famille de la victime. Non ! a dû clamer l'avocat de la défense : outre les obligations pouvant assortir le contrôle judiciaire, il y a en plus les mesures administratives qui ont été prises : le policier est mis à pied, et se verra probablement interdire l'accès aux fonctions de policier. Il ne ressortira pas comme si de rien n'était reprendre le volant d'une voiture de police. Le trouble public aura donc pris fin, conclura l'avocat de la défense.

Vous voyez, il n'y a pas de solution évidente. Le mandat de dépôt ou le contrôle judiciaire étaient deux solutions envisageables. Que la liberté l'emporte dans ce cas est tout à fait normal.

Mais surtout, il y a un ultime argument, qui a dû je pense être soulevé par l'avocat de la défense et qui était de nature à faire basculer définitivement l'esprit du juge en faveur de la liberté.

C'est qu'une loi du 5 mars 2007, tendant à renforcer l'équilibre de la procédure pénale, entre en vigueur le 1er juillet, c'est à dire dimanche prochain, qui modifie ce fameux 3° de l'article 144 du code de procédure pénale. Dimanche à zéro heure, ce texte deviendra le suivant :

La détention provisoire ne peut être ordonnée ou prolongée que s'il est démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure, qu'elle constitue l'unique moyen de (...) Mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé. Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l'affaire. Toutefois, le présent alinéa n'est pas applicable en matière correctionnelle.

A partir de dimanche, la loi ne permet plus de placer quelqu'un en détention provisoire à cause du trouble à l'ordre public, cet argument n'étant valable qu'en matière criminelle. Bref, si le JLD avait placé sous mandat de dépôt en raison du trouble à l'ordre public, qui est le seul motif qui pourrait être valablement retenu, la chambre de l'instruction saisie par la voie de l'appel n'aurait pas eu d'autre choix que de remettre ce policier en liberté, à cause de la disparition du fondement légal de l'emprisonnement.

Qu'un juge rechigne à prendre une décision privant un homme de sa liberté, décision qui six jours plus tard sera devenue illégale, est-ce vraiment incompréhensible ? Fallait-il emprisonner quand même ce jeune homme, en se disant "tant pis, légalement, c'est border line mais ça soulagera peut être la famille de la victime ?"

Il est loisible à chaque citoyen de commenter voire critiquer une décision de justice. Personne n'est obligé d'approuver le JLD de Marseille. Mais reconnaissons lui quand même à l'unanimité qu'il a très probablement bel et bien statué en droit, et n'a pas été aveuglé par la profession de l'auteur des faits.

Commentaires

1. Le mardi 26 juin 2007 à 17:01 par Emilie

Maitre, merci pour ces explications.
Puis je me permettre toutefois de vous suggérer une idée prochaine de note: je n'entends rien ou pas grand chose à la réforme des Universités dont parlent tant les médias. Moi même étudiante, je m'interroge sur les tenants et aboutissants de cette dernière. Eclaireriez vous ma pauvre lanterne ?

Non, c'est un domaine dans lequel je ne suis absolument pas compétent. Les blogs d'universitaire sont nombreux, ils aborderont sans nul doute le sujet.

Eolas

2. Le mardi 26 juin 2007 à 17:12 par Gastiflex

Le confrère en question est tout de même Me Collard, qui nous a habitué à faire dans le spectaculaire. Tel qu'il l'a présenté devant les caméra, il s'indignait que l'assassin d'un garçon de 14 ans soit encore en liberté. Il nous présentait le policier limite comme un tueur en série, et il ne se souciait guère de l'ordre public ou de la sécurité du mis en examen.
C'est une triste affaire, mais ce n'est "que" un accident de la route de plus, qui prend cette dimension parce que le chauffeur est un policier.

3. Le mardi 26 juin 2007 à 17:18 par CLS

@Me Eolas: merci et chapeau pour la réactivité...

4. Le mardi 26 juin 2007 à 17:19 par CLS

@Me Eolas: merci et chapeau pour la réactivité... Je me suis brûlé les doigts! ;)

5. Le mardi 26 juin 2007 à 17:19 par Florent

Merci pour ces éclaircissements.
Malheureusement dans cette affaire, je plains le juge dans son travail. Peut-il juger sereinement alors qu'il sait qu'à la sortie son jugement sera maintes et maintes fois critiqué, débattu... Le travail du juge est, je pense, vraiment un fardeau dans ce genre d'affaires où la vindicte populaire et la tristesse commune tendent à effacer le travail du droit et de la justice. Il est regrettable que "les micros et caméras" (pour ne pas dire médias) soient ainsi devenus un pouvoir si importants. Rapidité, subjectivité, inattention, sont les mamelles des médias.
Je souhaite de bonnes nuits au juge ! (tout en n'oubliant pas la douleur de la famille, avec laquelle je compatis tout à fait).

6. Le mardi 26 juin 2007 à 17:30 par Alain

Merci pour cet éclaircissement, et surtout la mise en parallèle avec "dans la peau d'un JLD".

Une petite question : la phrase "Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l'affaire." deviendra effective le 1er juillet, elle n'existe pas aujourd'hui ? A-t-on une idée du pourquoi de cette clause ?

7. Le mardi 26 juin 2007 à 17:34 par Juge du siège

@5: le juge a dû se dire que:
-s'il ne plaçait pas le policier en détention provisoire, il devrait faire face à l'incompréhension la plus totale de la part des proches de la victime, et à l'accusation que la justice couvre les turpitudes de la police,
- s'il plaçait le policier en détention provisoire, il devrait faire face aux réactions virulentes des syndicats de police, qui n'avaient pas manqué de se cadenasser au tribunal de Nanterre lorsqu'un policier avait été mis en détention provisoire il y a quelque temps.
Bref, l'avantage de ces affaires médiatiques, c'est que quelque soit la décision on est lynché dans les médias, et que par conséquent, le résultat étant le même, il n'y a aucune raison de de prendre en compte le contexte...

8. Le mardi 26 juin 2007 à 17:56 par Pantin-Lilas

Mais que s'est-il passé au TI de Gonesse ? private joke ? je ne vous lis que depuis peu...

Sinon, j'imagine que la parquet exprimera son mécontentement par un appel de la décision de ce JLD ?

9. Le mardi 26 juin 2007 à 18:15 par Lancelot

Petite question maître :
le stagiaire était-il tout seul dans sa voiture ? Si oui, est-ce normal qu'un stagiaire soit tout seul dans une voiture pour une intervention ? Si non, la responsabilité des policiers présents dans la voiture n'est-elle pas engagée ?
Dans tous les cas, son caractère de stagiaire n'est-il pas de nature à influer le jugement (dans un second temps) et pourquoi pas la décision du JLD ici commentée ?

10. Le mardi 26 juin 2007 à 18:19 par Will

Vous dites: "Tout ce que nous savons est qu'il a 22 ans, est policier stagiaire, c'est à dire en fin de phase de formation. On peut aisément en déduire qu'il n'a aucun casier"

Car, comme je le pensais aussi, l'accès aux concours, puis l'exercice de la profession de policier, tout comme celle de gendarme, suppose l'existence d'un casier judiciaire vierge.

Pourtant, le gendarme Norbet Embrosse,récemment abattu en opération, était toujours chef d'escadron d'active, bien que condamné le 11 janvier 2002 à une peine de deux ans d'emprisonnement, dont six mois fermes, dans l'affaire des paillotes corses, par le tribunal correctionnel d'Ajaccio...Alors même que l'ancien militaire qui lui a tiré dessus avait, lui, été renvoyé de l'armée en 2006 raison justement d'une condamnation judiciaire! Qu'en penser?

11. Le mardi 26 juin 2007 à 18:27 par Jean Meyran

Bonjour,

Habitant à moins de 10 kilomètres des lieux du drame, j'entends depuis cette remise en liberté quelques "bons citoyens" craindre un début d'émeute. Quelques données à l'usage de TF1 :

Quartier très populaire
Un flic libéré
Des caillasseurs anti-sarkosiens en cabane (dans un autre contexte, il est vrai)
Un gamin décédé
La famille du défunt a priori sans histoire (avec de plus une réaction digne)
Un avocat (de la télé) qui en rajoute

Je pense donc qu'il faut avoir de sacrées c... pour libérer (à juste titre, selon moi) le gamin survivant (désolé à 22 ans, on est un peu un gamin) surtout dans l'ambiance sécuritaire ambiante.
Imaginons que le quartier réagisse mal, ce sera la faute du juge, non ?

Le libellé "aggravée" dans la mise en examen me laisse perplexe ; quel sens doit-on lui donner ? (pastis ou autre)

Bonjour chez vous
Jean Meyran

12. Le mardi 26 juin 2007 à 18:30 par Appuleius

@Gastiflex: Vous dites "(...) ce n'est "que" un accident de la route de plus, qui prend cette dimension parce que le chauffeur est un policier.
Mais ce n'est pas "qu''un simple accident" car ici c'est justement un jeune policier qui est au volant censé montrer l'exemple, faire respecter la loi et protéger des gens comme le jeune Nelson. Cela donne à ce drame une dimension extraordinaire, tout comme les pouvoirs exorbitants de la police. Du reste pour ce qui est du feu rouge ou vert la loi Badinter (corrigez moi si je me trompe) fait fi de cet aspect matériel.
- Concernant la libération du jeune chauffard l'explication de maitre Eolas est très clair et convainquante... pour ses lecteurs (assidus comme moi) où les initiés. Je pense cependant qu'il sera difficile d'échapper au discours de "la justice à deux vitesses" car tous ne sont pas lecteurs du Blog ou initiés à la procédure pénale.

13. Le mardi 26 juin 2007 à 18:30 par Damien

@Juge du siège #7 : "Bref, l'avantage de ces affaires médiatiques, c'est que quelque soit la décision on est lynché dans les médias, et que par conséquent, le résultat étant le même, il n'y a aucune raison de de prendre en compte le contexte..."
Quand bien même une seule des décisions amènerait la foudre des médias, je ne pense pas que cette conséquence soit à prendre en compte par le juge. C'est sûrement plus facile à dire qu'à faire j'en conviens.

14. Le mardi 26 juin 2007 à 18:51 par Erwan

Maitre,
je ne comprends pas beaucoup votre dernier point. Je croyais que la loi ne pouvait etre retro-active. Mais il semble a vous lire que ca aurait ete le cas (l'appel aurait ete juge sur la nouvelle loi, pas sur l'ancienne).
Imaginons un cas de figure ou un meutre est commis par un mineur (disons 15 ans), et le meutrier condamne. Si une nouvelle loi est votee et promulguee avant la fin de l'appel, ou les mineurs de 15 ans peuvent etre condamnes a perpetuite, notre malfrat risque-t-il cette peine? meme si au moment des faits ca n'aurait pas ete possible?
Merci.

En droit pénal, l'application de la loi dans le temps obéit à des règles particulières, qui font les nuits blanches des étudiants de deuxième année. Ici, la disparition de la loi qui fondait la privation de liberté rend cette privation de liberté illicite, et il doit y mettre mis fin immédiatement. Cette loi n'est pas rétroactive : elle est d'application immédiate. Nuance : elle s'applique au présent, pas au passé.

Eolas

15. Le mardi 26 juin 2007 à 18:55 par trust

si vous vouliez être juge cet année il fallait répondre à ces questions:

Sujet de culture G :le corps (5H)
droit civil : l'équilibre contractuel (5H) c'était aujourd'hui ;)
droit pénal.... c'est demain :)

16. Le mardi 26 juin 2007 à 18:58 par matthieu

Si mes souvenirs sont exacts, la loi pénale est rétroactive si elle est plus douce. COmme c'est le cas ici.

17. Le mardi 26 juin 2007 à 18:59 par trust

@Erwan

si si la loi pénal plus douce est rétroactive, seule une loi plus sevère ne peut l'être (art 8 DDHC)

18. Le mardi 26 juin 2007 à 19:02 par jean

Non content d'être le pénaliste le plus à jour, le plus prolixe, le plus technophile, le plus fort, le plus beau, le plus jeune... de l'histoire du droit - ces clients doivent être contents - on peut dire aujourd'hui que Me Eolas est l'avocat qui tire plus vite que son ombre (sans jeu de mots). En effet, au milieu du traitement de ces nombreux dossiers, il trouve le temps de regarder le zapping... Bravo et mes respects!

PS: on murmure quand même qu'il a des esclaves!

Merci, merci... Mais... Le plus jeune ???

Eolas

19. Le mardi 26 juin 2007 à 19:03 par v@lerie

bonjour Maître,

« 2º (...) ou de prévenir son renouvellement ; »

Cela signifie-t-il que si le conducteur avait été un civil ET si le feu était bien au rouge, il y aurait eu plus de probabilités qu'il fut placé sous mandat de dépôt ?
Le renouvellement de l'acte du policier-stagiaire étant plus incertain : mise à pied donc pas de possibilité de circuler à bord d'un véhicule de police.

Alors que pour un civil, le renouvellement à bord de tout autre véhicule est plus probable.
v.a.

Oui, si le conducteur avait été un "civil" (les policiers sont des civils) qui avait déboité et doublé une voiture à vive allure en plein centre ville, le mandat de dépôt aurait été plus probable (mais pas certain) car le fait qu'un policier inexpérimenté se croit - à tort- fondé à conduire comme un furieux sous prétexte qu'il a un gyrophare et se rend en mission ne révèle pas une dangerosité qui fait craindre la réitération. Un simple citoyen qui s'absout du code de la route sans avoir comme excuse à son imprudence d'être chargé d'une mission de service public peut faire montre d'une telle dangeoristé. Mais concrètement, en matière d'homicide involontaires routiers, la prison ferme est rare s'il n'y a pas en plus un problème d'alcool ou de stupéfiants.

Eolas

20. Le mardi 26 juin 2007 à 19:04 par Juge du siège

@13: nous sommes d'accord évidemment.

21. Le mardi 26 juin 2007 à 19:12 par anne L

Pauvre J.L.D. quelle que soit la décision, il a le droit à une volée de bois vert... Peut on espérer, un jour, que les avocats qui crient avec les loups soient rappelés à l'ordre par leur batonnier... La majorité des avocats pénalistes, notamment après les décisions des cours d'assises, font un effort de pédagogie et jouent, souvent remarquablement, leur rôle d'auxiliaire de l'institution judiciaire en ayant un rôle de modérateurs et de pédagogues.
Imaginons que Maître C. ait été l'avocat du jeune policier. La main sur le coeur, il aurait insisté sur la sagesse de la décision.... Je ne suis pas sûre que la surenchère médiatique soit la meilleure manière d'aborder une affaire humainement aussi tragique.

Amen.

Eolas

22. Le mardi 26 juin 2007 à 19:14 par Apokrif

"Il est loisible à chaque citoyen de commenter voire critiquer une décision de justice."

Encore votre modestie qui vous fait oublier le lien:
maitre.eolas.free.fr/jour...

23. Le mardi 26 juin 2007 à 19:50 par Carl

@12 : sauf erreur de ma part, la loi Badinter n'a de portée que civile ; elle dit que si vous renversez un cycliste, c'est vous qui lui payez ses nouvelles jambes (quand bien même il se serait chafouinement jeté sous vos roues). En revanche, ça n'implique pas que vous irez en prison. La raison en est simple : vous êtes assuré, pas lui.

@21 : Ne peut-on imaginer que les avocats, comme d'autres (les juges d'instruction en particulier, me semble-ils), aient l'obligation de se taire en dehors de l'audience ? Leur travail est d'assister leurs clients devant la justice, pas de faire causette sur les marches du palais dans leur plus belle robe en brandissant des enveloppes. Si ces clients veulent faire la une des journaux, ils peuvent toujours embaucher un attaché de presse.

24. Le mardi 26 juin 2007 à 20:17 par Le Chevalier Bayard

Une décision "équitable" c'est-à-dire équilibrée donc légalement juste.

En effet, s'il s'agit d'être juste dans la décision rendue, chacun sait bien que l'application de la règle de droit s'accommode mal avec une équité qui serait conçue comme la recherche systématique de l'humain dans les conséquences que provoque toute décision de justice.

L'équité, au sens de la "sensibilité généreuse et hardie", que dénonçait déjà le doyen Gény n'a pas sa place dans la notion de décision équitable, car les bons sentiments en matière de justice, la sensiblerie, mènent au déséquilibre et à l'inégalité entre les justiciables.

Il faut donc dissiper toute ambiguité, l'équité dont il est question, ici, n'est pas celle qui s'oppose au droit ; ce n'est pas le dépassement du droit au nom de principes supérieurs.

En l'espèce, le mot équité vient du latin "equus" qui signifie équilibre; les deux termes sont équipollents.

C'est donc davantage la racine equus, l'idée d'équilibre qu'il faut retenir pour comprendre ce que peut représenter aujourd'hui un jugement équitable c'est-à-dire d'assurer à tout justiciable qu'un tel jugement se rattache à la notion très générale et générique de garanties fondamentales d'une bonne justice.

Pour ma part, je doute que Maître Collard (pour ne pas le citer) spécialiste patenté et habile "procureur médiatique", maniant à merveille toutes les stratégies minimalistes du risque judiciaire et de la quérulence processive, soit impuissant à traduire la décision du JLD à ses clients, en raison même de son expérience (ayant un doute sur son passif ?) du pénal.





25. Le mardi 26 juin 2007 à 20:22 par Juge du siège

@23: interdire à un avocat de "faire causette" sur les marches du palais serait bien dangereux pour les libertés publiques...et puis, certains d'entre eux sont tellement plus à l'aise devant une caméra que devant un tribunal...
En revanche, j'aimerais bien que parfois, les procureurs mettent leur toque sur le fameux principe de l'obligation de réserve et aillent eux aussi commenter sur les marches des palais les décisions que nous rendons. Plutôt que d'avoir 30 secondes pour la défense au journal TV, on aurait 15 secondes pour la défense et 15 secondes pour le ministère public: de quoi faire mieux comprendre au public quels intérêts contradictoires étaient en jeu dans l'affaire en cause.

Je contresigne vos propos. Je me souviens fort bien comment le procureur Eric de Montgolfier, lors du procès OM-VA, avait formidablement réussi à démonter la machine médiatique qu'essayait d'utiliser le prévenu en organisant lui aussi des conférences de presse et en allant parfois rappeler à l'ordre le prévenu sur les marches du palais. Mais il faut pour cela les qualités d'un Montgolfier... et les défauts aussi, ajouteront certains de ses collègues.

Eolas

26. Le mardi 26 juin 2007 à 20:28 par Carl

Et moi qui me prenait à rêver que les journalistes puissent assister à l'audience, lire les attendus, se renseigner, et relater le tout de façon impartiale et objective.
Bon, tant pis.

27. Le mardi 26 juin 2007 à 20:43 par Maitre A... de B.....

allez je mets le b.....l (lupanar?):

4 mois fermes avec MD pour un pavé dans les mains jamais lancé, pas de victime, casier vierge, insertion sociale

CJ pour un jeune de 14 ans mort, casier vierge, insertion sociale (remise en question vu la suspension...)

vous allez me dire: peut-on réellement comparer ?

vous aurez raison de ne pas vouloir mettre ces affaires sur le même plan

en plus, on ignore quelle sera la peine du policier mais je doute qu'il y ait du ferme avec MD

Romain a été jugé en comparution immédiate (affaire correctionnelle), le policier aura droit à une instruction (affaire correctionnelle aussi semble-t-il et pas si compliquée)

les témoignages divergeaient dans les 2 cas

il est vrai que c'est délicat de comparer, mais bon je suis comme ça, ça me dérange, moi

pas que le policier bénéficie d'un CJ mais que Romain se soit pris 4 mois fermes

à Chevalier Bayard (d'avance): je ne suis pas en colère saine , je suis en colère persistante

je sais, je sais, je suis pugnace (comme une mule...)

Le policier est mis en examen, donc présumé innocent. Romain est déclaré coupable. Il y a une sacrée nuance.

Eolas

28. Le mardi 26 juin 2007 à 21:04 par Le Chevalier Bayard

Chère Maître A...de B...

C'est comme cela que je vous préfère... en colère.

Mais attention elle est toujours mauvaise conseillère.

Confidence pour confidence je m'enorgueillis toujours de demander pardon lorsque j'ai pu heurter.

Pour autant, n'être d'accord sur rien c'est l'assurance de ne pas se disputer sur grand chose.





29. Le mardi 26 juin 2007 à 21:38 par dura lex sed lex

La différence entre l'affaire de Romain et l'affaire du jeune policier ? Voyons... Peut être le fait que dans l'affaire du policier, il y ait eu mort d'homme justifiant le fait d'une enquête. Il n'y a donc pas de comparaison possible, ni à faire non plus.
Quant à la comparution immédiate, le maître des lieux à déjà précisé que Romain a eu ce mode de jugement parce qu'il l'a bien voulu.

Pas tout à fait : c'est le procureur qui l'a voulu. Il y a aussi une autre différence : dans le cas de Romain, c'est un délit volontaire ; ici c'est un délit involontaire.

Eolas

30. Le mardi 26 juin 2007 à 21:46 par le chafouin

Vous avez tout à fait raison, merci pour cette note une nouvelle fois éclairante...
La question est désormais : est-il vraiment légitime de supprimer cette condition de la détention en matière correctionnelle? Je sens confusément que cette mesure a pour but de désengorger les prisons, mais à mon sens, ce ne peut être une raison valable de légiférer ainsi. Enfin. Ce qui est fait est fait, n'est-ce pas?

31. Le mardi 26 juin 2007 à 21:55 par Intime Conviction

Une simple question, le raisonnement que vous pensez avoir été tenu par le JLD, ne l'a t-il pas également été par le Parquet qui requiert le dépôt, avant d'annoncer qu'il ne fait pas appel du placement sous CJ?
Bizarre, non?

www.intimeconviction.com/...

Le parquet a une hiérarchie de qui il prend des ordres et à qui doit rendre des comptes.

Eolas

32. Le mardi 26 juin 2007 à 22:05 par Judge Dredd - Avocat provincial

Bravo, mon Cher Confrère... Encore une fois, je ne peux que partager votre brillante analyse. Je pense en effet que la détention provisoire ne se justifiait absolument pas dans cette affaire. Pourtant, il y a quelques semaines, un chauffeur de poids lourds responsable d'un accident mortel en région parisienne (son véhicule s'est renversé sur un arrêt de bus, je crois) a été écroué dans le cadre d'un mandat de dépôt. Je pense que dans cette affaire là, il n'y a que le trouble à l'ordre public qui a été visé, puisque les autres critères ne pouvaient pas être retenus. Si en matière correctionnelle, le critère de l'ordre public disparaît, ne risque t'on pas de voir les JLD tirer sur la ficelle et forcer les autres critères ?

Pour conclure, même si j'approuve dans ce dossier la mise sous contrôle judiciaire , je ne suis pas certain qu'un citoyen lambda aurait bénéficié du même traitement que ce jeune policier... Preuve en est, le cas de ce chauffeur que j'ai évoqué plus haut.

Cela me rappelle une affaire qui a eu lieu dans ma ville il y a quelques années. Un parquetier de service a demandé à des policiers de lui amener en quatrième vitesse un gardé à vue pour le déférer. C'était le soir de Noël. Les policiers se sont donc rendus toute sirène hurlante vers le palais de justice. Non loin de sa destination finale, le véhicule de police, toutes sirènes hurlantes et girophare en action, a renversé une mère et son jeune enfant sur le passage protégé. L'expert désigné a pu déterminer que le véhicule roulait en pleine ville à près de 120 km à l'heure. Les deux victimes ont été grièvemment blessées et l'une d'elle restera je crois handicapée. Le policier conducteur ne sera même pas mis en examen : il ne fera au cours de l'enquête que minimiser les faits et contester la vitesse excessive. Il est clair par ailleurs que le magistrat qui leur a demandé de se dépêcher a une part de responsabilité. Bilan de cette affaire : un mois d'emprisonnement avec sursis... Un jugement véritablement clément, le procureur ayant fait en sorte, je ne sais d'ailleurs comment, que la composition du Tribunal soit pro-police.

Personne n'a bien entendu parlé de cette affaire toute aussi dramatique que celle de Marseille. Peut-être d'ailleurs que les causes du drame sont indentiques (un ordre ?)

Quant à Collard, quand est-ce qu'il cessera de nuire ?

pour votre poids lourd, y avait-il de l'alcool dans cette affaire ?

Eolas

33. Le mardi 26 juin 2007 à 22:06 par serge

dans notre bonne ville du morbihan nous venons d'avoir un mari en instance de divorce qui vient de trucider son épouse d'une quinzaine de balles de fusil automatique et s'est ensuite suicidé. ce monsieur avait été précédemment inculpé pour viol aggravé et autres babioles sur la dite épouse. le juge des liberté avait jugé opportun de le laisser en liberté sous contrôle judiciaire. le parquet avait appel. c'est un sacré métier juge des libertés doivent se dire les trois enfants du monsieur et de la dame..............!

34. Le mardi 26 juin 2007 à 22:29 par Atreyuh

Bienvenue au café du commerce Serge

35. Le mardi 26 juin 2007 à 22:29 par Senso

Eolas: "Il était seul au volant, il est seul responsable"
Si le policier était effectivement stagiaire il ne pouvait se trouver seul en mission, il devait donc être sous la supervision d'un gradé. Que l'on passe sous silence le fait que ce gradé (en tant que gradé) est pleinement responsable des faits et gestes du stagiaire me semble étrange.
Deux cas se présentent:
1) le stagiaire roulait à cette allure de son propre chef: que faisait donc le gradé? N'avait-il pas les facultés nécessaires pour s'apercevoir du comportement dangereux de son subalterne. Que n'y a-t-il mis le "Ho la"?
2) le gradé en avait donné l'ordre au stagiaire. Qui est alors responsable?

La dernière fois que j'ai vu une voiture de police, il n'était possible que de tenir un seul à la fois au volant. Quant à ses collègues et supérieurs dans la voiture, on ne peut être complice par inaction, surtout d'une infraction involontaire.

Eolas

36. Le mardi 26 juin 2007 à 23:17 par patrick trick

Belle ligne de défense de dire que si il roulait vite c'était car il suivait les ordres. Vous adopterez ça maître comme stratégie?
J'aurais pris personnellement la même decision que le JLD.

Je n'établis de stratégie qu'après avoir pris connaissance du dossier et parlé avec mon client. C'est facile de faire de la stratégie après la bataille.

Eolas

37. Le mardi 26 juin 2007 à 23:28 par didier Schneider

2 : "Tel qu'il l'a présenté devant les caméra, il s'indignait que l'assassin d'un garçon de 14 ans soit encore en liberté. "

Comme l'indique Eolas dans sa réponse 35, il s'agit d'un acte involontaire. Donc il ne peut s'agir d'un assassinat , mais d'un meurtre.

La remise en liberté peut se comprendre par le fait qu'il ne s'agit pas de violence volontaire. Tel aurait été le contraire s'il s'était agit d'une mort pendant un contrôle de police ou après une course poursuite d'un "jeune bien connu des services de police". Ou le côté involontaire aurait pu être au conditionnel par certains commentateurs.

La, il n'est pas sur que les racailles d'un quelconque quartier miséreux manifeste sa désapprobation , du fait que la victime n'est pas "un des leurs"...

Un meurtre n'est pas un acte involontaire, c'est le fait d'ôter VOLONTAIREMENT la vie à autrui. L'assassinat est le meurtre avec préméditation. Ici, on n'a qu'un homicide involontaire, aggravé par l'inobservation d'obligations de sécurité imposées par le code de la route.

Eolas

38. Le mardi 26 juin 2007 à 23:33 par Hervé Dicky

"le véhicule roulait fort vite, largement au dessus de la vitesse autorisée en ville."
"Quant à ses collègues et supérieurs dans la voiture, on ne peut être complice par inaction, surtout d'une infraction involontaire."

le supérieur de ce stagiaire n'avait donc aucun moyen de le faire ralentir ? ça me rappelle je ne sais plus quel ministre des transports qui, repéré à une allure abusive, s'était défaussé sur son chauffeur.

Ce qui n'enlève rien d'ailleurs à l'intérêt de votre analyse qui m'évitera (pour une fois) mes réactions de révolté professionnel.

Trois possibiliutés : soit son supérieur lui ordonnait de ralentir, et il n'en faisait rien. Il aurait alors commis une faute professionnelle pouvant entrainer des poursuites disciplinaires. Soit son supérieur ne disait rien, bien content d'arriver plus vite et voyant là un exercice de conduite sportive pour son stagiaire. Il n'est pas complice, faute de comportement actif, mais risque des sanctions disciplinaires. Soit il encourageait son stagiaire voire lui a donné l'ordre de doubler la voiture arrêté au feu tricolore, et là, il serait coauteur de l'homicide par instructions et aurait été mis en examen.

Eolas

39. Le mercredi 27 juin 2007 à 00:09 par stellar

Pour les collègues et le gradé présents dans la voiture , la complicité d'homicide involontaire me semble exclue. En revanche, une sanction disciplinaire devrait pouvoir être engagée.

A propos de ces conduites de fous furieux par des policiers qui semblent se prendre pour des cow-boys : il y a quelques années avait eu lieu un accident à Rennes. Deux voitures de police s'étaient violemment entrées dedans à un carrefour. Je m'étais dit à l'époque que si cela avait été une voiture de police et celle d'un quidam, ce dernier aurait été forcément dans son tort et aurait passé un mauvais moment.

Quelques rappels du code de la route pourraient être utile, ou le probème est plus profond? Ces accidents semblent rarissimes mais ils sont commis par des personnes qui sont censées être exemplaires.

40. Le mercredi 27 juin 2007 à 00:25 par Contra

@ Me Eolas

"Quant à ses collègues et supérieurs dans la voiture, on ne peut être complice par inaction, surtout d'une infraction involontaire."

Il faudrait peut-être préciser qu'il s'agit apparemment d'une conception très française du droit pénal (au cas où certains de vos lecteurs voyageraient ...).

En Suisse, en tout cas, on ne se poserait pas cette question sous cet angle (art. 11 al. 1 et 2 litt. c ou d CP) ? :)

Lien: www.admin.ch/ch/f/rs/311_...

:o)

@ 37, Didier Schneider

Je précise, j'élargis un peu le débat.

Est-ce que le droit français connait le dol éventuel ? soit lorsque l'auteur tient pour possible la réalisation d'une infraction et l'accepte au cas où celle-ci se produirait, voire qu'il s'en accommode.

Explication audio (3 première minutes) :
www.roadcross.ch/fr/actua...

Non, il n'y a pas de dol éventuel. Le droit français analyse la faute d'imprudence comme un dol général : c'est volontairement que le prévenu a pris le risque, commis l'imprudence qui a aboutit au dommage.

Eolas

41. Le mercredi 27 juin 2007 à 03:44 par Tremblay

Bien entendu, Maître, vous avez raison. D'un point de vue strictement juridique, cette remise en liberté sous contrôle judiciaire s'explique parfaitement. Du point de vue du droit international encore plus. Et puis rappellons que la préventive doit être quelque chose d'exceptionnel, quand vraiment on ne peut pas faire autrement, et surtout pas la norme.
Mais là où je rejoindrais votre collègue Me Collard, c'est que cela va être compliqué à expliquer à nombre de clients d'avocats actuellement enfermés dans les geôles de la République alors qu'ils sont présumés innocents, pour des faits infiniments moins graves.

Bien-sûr que dans l'absolu cette décision est juste. Mais dans le relatif, elle a de quoi faire tiquer : on enferme pêle-mêle, en attendant procès, les cyberdélinquants sexuels (une nouvelle cible privilégiée des fanas de la préventive), certains soupçonnés d'abus de bien sociaux, les banlieusards qui brûlent des voitures, les tueurs d'enfant par balle perdue (là aussi, c'est un crime involontaire, c'est un "tragique accident") de la Courneuve, quiconque est accusé de viol, j'en passe et des meilleures... mais on laisse en liberté le meurtrier d'un enfant de 14 ans.

Les délits des cyberdélinquants sexuels ou des fraudeurs au sein de leur entreprise sont certes volontaires par opposition au tragique accident (en même temps, quand on fait le con en bagnole, on sait le risque qu'on prend, même à 22 ans). Mais ils n'ont pas la mort d'un enfant sur la conscience, eux.

C'est pourtant eux que l'on enferme systèmatiquement. Pourquoi ? Pourquoi les enfermer eux, si vraiment on s'en tiens aux lois qui définissent quand même très strictement qui peut être placé en détention provisoire ?

Je suis d'accord avec Me Collard : il y a quand même des décisions qui sont difficiles à expliquer. Non-pas parce qu'elles ne correspondent pas aux textes. Mais parce qu'elles sont en totale contradiction avec ce que l'on constate, concrêtement, chaque jour. Et moi, je souhaite qu'on m'explique pourquoi on l'a relâché lui et on m'a mis 4 mois à moi (j'avais des garanties de représentation et tout ce qu'il faut).

Je ne suis peut-être pas un ange, mais je n'ai pas la mort d'un enfant de 14 ans sur la conscience, moi !

Dois-je déduire de vos propos que vous avez fait de la prison pour avoir téléchargé des images pédopornographiques ?

Eolas

42. Le mercredi 27 juin 2007 à 04:22 par Esurnir

"Le plus jeune" Étonnamment le maximum que je puisse vous donne c'est 35 ans, vous n'allez pas nous faire croire que votre physique tiens plus de Philippe Bilger que de Bruno Julliard (excusez moi pour les exemples, c'est le seul "jeune" qui me vient a l'esprit).

43. Le mercredi 27 juin 2007 à 06:50 par Passant

"Qu'il fasse pression sur les témoins ? Un policier stagiaire de 22 ans ? Alors que les témoins ont déjà été entendus pendant la garde à vue ? Ca peut paraître douteux, non ?"

Bien entendu, comme toute la pratique de l'administration de la justice en atteste, l'esprit de corps n'existe pas dans la police. Ne saurait jamais exister.

Car comme chacun sait, la collaboration entre policiers a toujours pour objectif la recherche de la vérité et de la justice.

Je suis allé faire assez de garde à vue rue Hénard au siège de l'IGS pour vous dire que les flics complices des flics, c'est tout juste bon pour les téléfilms de TF1. Et pour vous, semble-t-il.

Eolas

44. Le mercredi 27 juin 2007 à 07:41 par Maitre A... de B.....

je corrige les fautes de réveil difficile:

le policier est présumé innocent, certes mais le jeune n'est pas présumé mort, le policier n'a pas nié être le conducteur et personne ne conteste l'absence d'élément intentionnel (c'est pour cela que le CP prévoit aussi le délit de mise en danger délibérée).

pensez-vous peut-être que l'autopsie révèlera une autre cause de la mort ?

ou l'enquête une faute d'imprudence de la victime qui aurait traversé alors qu'elle n'y était pas autorisée ? j'ai déjà vu une relaxe dans un cas comme celui-ci, auj définitive (mais dans notre affaire, le policier allait trop vite, ce qui n'était pas le cas de ma conductrice et il pleuvait en plus)

je n'ose pas imaginer la réaction des syndicats de policiers si un jeune avec la BMW offerte par papa avait renversé et tué un policier (en tenue "bourgeoise") sur un passage piéton....

mais vous avez raison, si nous sommes tous égaux devant la Justice, on peut difficilement comparer

je maintiens que 4 mois fermes pour Romain, c'est injuste

alllez je vais bosser et essayer d'éviter la prison à de méchants présumés innocents

Mais arrêtons de dire n'importe quoi : Romain n'a pas été condamné parce qu'on a présumé qu'il allait lancer un pavé : il n'y a pas de tentatives de violences volontaires. Il a été condamné car un gendarme a dit qu'il en avait lancé trois. Il en avait un à la main au moment de son interpellation. Sa défense est : "c'était pour avoir un souvenir". Version que tout le monde gobe : le gendarme a menti, il a commis un faux témoignage pour faire condamner un innocent pris au hasard. Sans rien connaître au dossier. Si c'est sur internet, c'est que c'est vrai.

Eolas

45. Le mercredi 27 juin 2007 à 08:13 par Maitre A... de B.....

oui, si c'est vous qui le dites, c'est sûr que c'est vrai...
n'est-ce pas ?

je me souviens de 2 policiers (le 3ème était pas venu) qui en confrontation juraient que c'était mon client qui avait mis le feu à la poubelle le 01 JANVIER 2004...

heureusement qu'on ne s'est pas contenté de les croire, c'est grâce à la partie civile qu'on s'est rendu compte que les policiers s'étaient trompés de personne ....

relaxe (sans appel du parquet)

Romain a-t-il blessé quelqu'un ?

résultat hypothétique = 4 mois ferme avec MD,
résultat avéré = on verra....

Alors là, vous m'avez convaincu. Ces policiers s'étaient trompés, donc Romain est innocent. (PS : une confrontation pour un feu de poubelle ???)

Eolas

46. Le mercredi 27 juin 2007 à 08:23 par Juge du siège

@46: Maître A.... de B...., je ne doute pas de la sincérité de vos idées, mais vos plaidoires 27, 44 et 45 sont un peu brouillonnes, non?

47. Le mercredi 27 juin 2007 à 08:42 par Jabiru

Bravo pour la clarté et la précision de vos billets qui permettent à des non-spécialistes de comprendre les motivations sur lesquelles se fondent les décisions judiciaires.
Comme aurait dit Louis Leprince-Ringuet dans ses brillants exposés ,je fais toujours en sorte que mon jardinier comprenne ce que j'expose !
Bel exemple à suivre

Hé hé... Je ne connaissais pas cette phrase, mais la fais mienne sans réserves. Sachant qu'en plus, le jardinier qui s'occupe du parc de mon château ne parle pas bien le Français.

Eolas

48. Le mercredi 27 juin 2007 à 09:01 par Onurb

A Maître Eolas (en réponse à 44): vous savez, sur internet, on peut dire n'importe quoi.

49. Le mercredi 27 juin 2007 à 09:12 par Maitre A... de B.....

il y a eu plusieurs feux de poubelle et le mis en examen niait en être l'auteur, une confrontation a été ordonnée par le Juge (je l'avais même pas demandée, je me doutais que les policiers maintiendrait)

j'étais "mal" après mais j'ai continué à explorer, à croire mon client, pourquoi, je sais pas

à Juge du siège: je ne plaide pas , je blogue (vos collègues rendent souvent des Jugements brouillons, voir le nombre de requêtes en rectif d'erreur matérielle, sans parler du fond, même quand je gagne -souvent- en pénal, ils sont même rarement motivés)

moi je doute, si Romain a nié avoir lancé des pavés, je crois qu'un doute est permis

le doute, le doute (même après une condamnation), le doute...

Et pour les (nombreux) cas que vous avez gagnés, vous doutez aussi ?

Eolas

50. Le mercredi 27 juin 2007 à 09:26 par vache qui pête

Bonjour;
Il y a quelque chose qui m'angoisse un peu là-dedans.
Imaginons le même cas de figure, mais disons dans un mois, et que le jeune policier renverse un ou deux "jeunes des cités" (et non un jeune homme sans histoires). Qu'il y ait mort d'homme également.
Les émeutes suivent, et le troisième paragraphe de l'article 144 du code pénal, entré en application, empêche l'incarcération, même très temporaire, dudit policier...?
Vous imaginez bien que les émeutes de 2005, à coté...

Non, là, le JLD aura beau jeu de motiver la détention par le risque de réitération et la protection du mis en examen.

Eolas

51. Le mercredi 27 juin 2007 à 10:04 par Damien

@Tremblay #41:
La 3eme condition ("De mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction, les circonstances de sa commission ou l'importance du préjudice qu'elle a causé.") semble justifier la détention provisoire pour un cyberdélinquant sexuel non?
Le policier a été mis à pied, mettant fin au trouble à l'ordre public comme le dit Eolas dans son article.
En revanche, s'il n'est pas mis en détention provisoire, rien n'empêche le cyberdélinquant de poursuivre ce pourquoi il est inculpé.

52. Le mercredi 27 juin 2007 à 10:05 par Gavot

Je m'inquiète (un peu), à la lecture de plusieurs commentaires sur ce blog dont le caractère informatif et pédagogique n'est pourtant plus à démontrer (j'aurais pu rajouter brillant mais c'était friser la flagornerie) de constater que la plupart des non-professionnels du droit persistent à mettre en avant les conséquences de l'acte délictueux (la mort d'une personne) pour justifier un placement en détention provisoire tout en voulant ignorer la nature du délit qui est bien un délit non intentionnel.

Je m'inquiète encore plus de lire des commentaires de confrères qui insistent pour comparer l'incomparable : délit intentionnel/non intentionnel mais aussi, tout aussi grave, détention provisoire/peine à purger.

Je m'inquiète enfin de ce que cela révèle de la méconnaissance de la justice pénale, pas seulement s'agissant des commentateurs de faits divers sur lci.fr (un must en matière de beauferie) mais aussi s'agissant des personnes qui tiennent à imposer une nouvelle réforme de cette justice pénale qui n'a même pas commencé à digérer les précédentes.

Devant de telles réactions, je suis très pessimiste quant à la possibilité de faire comprendre aux premiers concernés (les justiciables actuels et potentiels, donc tout le monde) l'inutilité d'une création telle que le "juge des victimes" ou le caractère pernicieux des peines planchers et de la volonté de remettre en cause la spécificité de la justice des mineurs, projets qui ne font que conforter le public dans son sentiment que les juges sont laxistes... avec les autres.

53. Le mercredi 27 juin 2007 à 10:27 par Damien

@Gavot #52:

Il ne faut pas s'inquiéter, c'est toujours enrichissant de lire ces commentaires et les réponses rédigées par Eolas et autres professionnels.

54. Le mercredi 27 juin 2007 à 10:33 par Maitre A... de B.....

réponse à Me Eolas: oui quand je gagne, je doute mais pas longtemps

quand je perds, je doute ...plus longtemps.

mais/et je ne cherche pas à vous convaincre (vous êtes déjà suffisamment convaincu par vous même... moi aussi d'ailleurs .. par vous)

55. Le mercredi 27 juin 2007 à 10:36 par Maitre A... de B.....

je maintiens,j'ai pas de scrupules quand un dossier ne permet pas une déclaration de culpabilité

chacun son travail, je suis avocat, pas Proc

il vaut mieux hasarder de sauver un coupable que de condamner un innocent (c'est pas de moi bien sûr, mais je suis avocat parce que c'est une des 1ères pensées qui m'ait "parlé")

56. Le mercredi 27 juin 2007 à 10:52 par urchin

@Eolas: vous dites qu'on ne peut être complice par inaction. Or la non dénonciation de crime est punie par la loi, c'est-ce pas la même chose?

Non, ce n'est pas la même chose. La complicité complice à faciliter la commission du délit, la provoquer ou faciliter la fuite de l'auteur. La non dénonciation est un délit autonome.

Eolas

57. Le mercredi 27 juin 2007 à 11:48 par bardabu

Merci pour ce complément aux JT vaseux qui aiment à mettre des points de suspension pour laisser aller l'humeur au détriment de la raison.

J'aime beaucoup votre clarté d'observation, à la fois de la situation réelle et des méandres législatifs.

58. Le mercredi 27 juin 2007 à 12:00 par Sébastien

@ 52

C’est que le grand public ne connaît que peu les différentes procédures pénales, ni le rôle de chaque intervenant hormis les plus connus (procureur, avocat, juge), le JLD est une fonction qui ne parle pas à tous. De même, beaucoup regarde les conséquences pratiques avant les qualifications. Ainsi garde à vue = cellule (donc prison), détention préventive = prison, incarcération suit à une condamnation = prison, d’où garde à vue = détention préventive = incarcération.

Et en effet, beaucoup regarde plus les conséquences de l’acte (décès d’un mineur sur un passage protégé) que la qualification de l’acte.

J’ai pu vérifier ceci sur de nombreux sites/forums sur lesquels je navigue, et où peu on des connaissances juridiques autres que Navarro et Julie Lescaut.

59. Le mercredi 27 juin 2007 à 12:12 par v@lerie

« Non, ce n'est pas la même chose. La complicité complice à faciliter la commission du délit, la provoquer ou faciliter la fuite de l'auteur. La non dénonciation est un délit autonome. »

Ah ! Et bien encore une chose que je n’avais pas bien saisie, je pensais que le simple fait d’être au courant d’un délit -du moins de savoir qui a commis ce délit (je pense surtout à un proche, conjoint, famille)- faisait de nous un complice.

60. Le mercredi 27 juin 2007 à 12:57 par Fred

je viens de lire dans la presse que JM Villemin demande sa réhabilitation.
Apparemment le parquet général ne s'y oppose pas, j'en conclus donc que la demande est fondée en droit

mais là où je ne comprends pas c'est comment on peut être réhabilité pour un crime que l'on a commis. C'est pas contradictoire?

merci

Juge du siège vous répond ci-dessous. J'ajoute simplement que vous devez confondre réhabilitation et révision. La réhabilitation n'implique pas dénégation de la culpabilité, la révision, oui.

Eolas

61. Le mercredi 27 juin 2007 à 13:17 par Jabiru

Je me pose même question que Fred au motif que le crime a été reconnu par l'auteur si je ne m'abuse

62. Le mercredi 27 juin 2007 à 13:20 par Juge du siège

@60: La réponse à votre question est ici, dans un article ancien mais qui explique bien les origines, le principe et les effets de la réhabilitation.
ledroitcriminel.free.fr/l...
Il ne s'agit pas d'innocenter un condamné, bien au contraire puisqu'il faut avoir accompli sa peine pour être réhabilité. En quelque sorte, réhabiliter, c'est "passe l'éponge" du point de vue du casier judiciaire et des incapacités.

63. Le mercredi 27 juin 2007 à 13:26 par Damien

en complément à Fred:
Si le JLD a justifié sa décision sur le fait que le policier était mis à pied, la réhabilitation du policier ne remettrait pas en cause sa décision?

Petite question au passage: un homicide involontaire comme celui-ci est un délit ou un crime?

64. Le mercredi 27 juin 2007 à 13:28 par Damien

Merci Juge du siège j'ai eu droit à la réponse avant la question ;)

65. Le mercredi 27 juin 2007 à 13:38 par Jabiru

Merci Juge du siège. J'aurai du relire mes cours ( anciens malheureusement)
Passer l'éponge est bien l'expression la plus claire , pour moi et mon jardinier

66. Le mercredi 27 juin 2007 à 13:56 par Tremblay

En l'occurence Maître, la réponse est non. Mais cela aurait pu et mon argumentation n'aurait pas changé d'un iota. J'ai vu en prison des détenus pour des raisons diverses et variées. L'immense majorité n'avait pas de mort sur la conscience, encore moins de mort d'enfant sur la conscience. Alors certes, pour un certain nombre, le délit n'était pas non-intentionnel... Certes, pour un certain nombre, ce n'était pas dans l'exercice de fonctions qu'ils ne pourraient plus pratiquer (argument un peu fallacieux je trouve... vous auriez osé le sortir pour Marcel Lechien ? Pas moi), encore que dans le cas de cyber-délinquance (sexuelle ou pas d'ailleurs) en général la mise en examen est précédé d'une perquisition du matériel informatique rendant compliqué la récidive.

Reste que je persiste à dire qu'un certain nombre de détenus en préventive, qui n'ont tué personne voire qui n'ont pas touché à de l'humain (délits purement financiers), doivent l'avoir mauvaise, et que je les comprend largement. Moi aussi, j'aurais du mal à leur expliquer. Et je ne crois pas que les arguments que vous avez développé dans votre billet suffirait à les convaincre. Moi en tout cas, ils ne m'ont pas convaincu.

Le titre du billet est "essayons de comprendre". Il ne vise qu'à vous donner une grille de lecture, pas à vous convaincre. Quand bien même vous pensiez toujours après lecture que ce policier aurait dû être placé sous mandat de dépôt, du moment que vous en ressortiez en comprenant que le juge n'a pas statué ansi pour couvrir un policier, considérez moi satisfait.

Eolas

67. Le mercredi 27 juin 2007 à 14:01 par Raph

@Fred et Eolas :
On parle bien de réhabilitation pour M. Villemin. Pour info : le parquet ne s'y est pas opposé.

Pour revenir au sujet initial :
Avant tout, je trouve inadmissible qu'un fonctionnaire de police ait allumé son deux-tons et la guirlande pour aller à un cabanon (garde de détenu malade).
De plus, le vrai sujet ne doit pas être centré sur le fait de savoir s'il était allumé ou non. En effet, l'usage des avertisseurs sonors et lumineux ne dispense pas le conducteur de son obligation de prudence (je n'ai pas l'article en tête, mais c'est dans la partie règlementaire).

Mais ce que je trouve choquant, bien qu'habituel : le fait que lorsqu'un police commet une faute, ça fait la une des médias.
Je ne connais que trop bien la douleur de la famille et la coleur qu'elle peut avoir, mais si c'était un conducteur lamda, on en aurait à peine parler dans la presse locale, dans un entrefilet de deux lignes, entre la fête du machin et les 90 ans de l'autre.
Quand on voit ce batage médiatique, je me demande juster si la victime d'un policier à plus de valeur que la victime de quelqu'un d'autre...

Autre info : un stagiaire est, en théorie, formé. Il attend juste que le ministère approuve sa titularisation, donc la confirmation de son emploi. Il est en période "probatoire".
Les fonctionnaire en formation ont le grade d'élève. La différence se remarque sur les uniformes : un gardien titulaire à deux sardines, un stagiaire n'en n'a qu'une et un élève n'en a pas.
Un titulaire est APJ (normalement), un stagiaire et un élève sont AJPA..

Attention à vous relire : vous tapez semble-t-il très vite, et vos doigts se mélangent parfois, ce qui laisse beaucoup de fautes de frappe. Le fait que le comportement de l'élève policier soit fautif ne laisse guère de place au doute. Il a été mis à pied et risque de devoir faire une croix sur sa titularisation. Ce que vous appelez sardine, c'est le chevrons sur le galon ? Et l'article que vous citez, c'est l'article R.432-1 du code de la route.

Eolas

68. Le mercredi 27 juin 2007 à 14:19 par Gavot

@66 Tremblay

Vous illustrez parfaitement les craintes que j'exprimais en 52.

Essayez encore de comprendre la différence essentielle entre un délit "classique" c'est à dire comportant l'intention de le commettre et un délit non intentionnel : non, le policier n'avait l'intention de tuer personne, pas plus que les autres délinquants de la route, pas plus que les chefs d'entreprises qui ne respectent pas la règlementation en matière de sécurité, pas plus qu'un médecin qui fait une erreur de diagnostic ou de traitement etc. Cette liste est une caricature en elle même puisqu'elle masque des disparités énormes de gravité de la faute ou du manquement à une obligation de sécurité mais toutes ces situations ont un commun le fait que le but poursuivi n'est jamais de blesser ou tuer.

Si la différence avec des violences volontaires, un meurtre ou un assassinat ne ne vous saute pas aux yeux, je ne peux plus rien pour vous.

Par ailleurs, je comprends peut-être mal vos propos, mais j'espère que vous ne cherchez pas à convaincre qui que ce soit que la "cybercriminalité" sexuelle ne toucherai pas à l'humain, ou alors il faut que vous vous interrogiez sérieusement sur les conditions dans lesquelles sont prises les photos et les vidéos échangées par ces délinquants particuliers (qui, contrairement à ce que vous laissez entendre peuvent parfaitement récidiver alors même que leur ordinateur est sous scellé... qu'est ce qui les empêcherait d'en acquérir un autre ? la mise sous scellé de ce matériel permet la recherche et la conservation des preuves du du délit commis, ce n'est pas une confiscation)

69. Le mercredi 27 juin 2007 à 16:31 par Frédéric BASTIAT

Bonjour Maitre.

Pouvez-vous nous indiquez depuis quand un Gardien de la Paix stagiaire peut conduire un véhicule administratif ???

Enfin .. je ne me fais pas de souci... l'Administration, monstre froid, va encore nous expliquer comment elle peut s'assoir sur les règles qu'elle a elle-même édictées !

Quand à la responsabilité du chef de bord, puisque c'est comme cela qu'on appelle celui qui est à la "place du mort", elle est évidemment engagée. Pas peinalement bien sur, mais administrativement, des comptes lui seront demandés.

70. Le mercredi 27 juin 2007 à 17:36 par parquetier

Ces dernières années on en a pris plein la figure, des coups d'outreau, des coups de plancher, des coups de couteau... mais j'aime toujours ce boulot et je me demande parfois si vous n'y êtes pas un poil pour quelque chose, Maître...
Nous sommes très nombreux, juges du siège et parquetiers, à rêver qu'on nous débarrasse une fois pour toutes du critère du trouble à l'ordre public, même pour les affaires criminelles d'ailleurs, à défaut de pouvoir se débarasser complètement de la détention provisoire ("on", c'est à dire le législateur, c'est à dire vos députés, c'est à dire vous, ô peuple souverain).
Ce qu'il faut comprendre, chers commentateurs perplexes, c'est que les gens qui vont en détention provisoire n'ont pas été encore jugés, et ne vont pas l'être avant plusieurs mois puisqu'il y a encore des investigations à faire. La détention provisoire est donc en soi une aberration. On pourrait même imaginer de la supprimer complètement, sauf que dans certains cas la personne mise en cause pourrait perturber les investigations, voire disparaître... et voilà pourquoi on ne peut s'en débarasser complètement. Mais ça n'a RIEN A VOIR avec une peine. Il faut que l'opinion publique s'habitue (et Maître Collard pourrait l'y aider s'il n'avait pas d'autres préoccupations plus personnelles) à ce que les personnes contre lesquelles il existe une accusation sérieuse, et même très grave, restent libres (avec si nécessaire des mesures de sûreté adaptées telle que remise du passeport, consignation etc) en attendant d'être jugées... plus tard. En 15 ans on a déjà fait beaucoup de progrès en ce sens. Je dirais qu'à stock égal, il y a presque deux fois moins de mis en examen détenus aujourd'hui que dans un cabinet d'instruction d'il y a 15 ans.
Il faut parallèlement que les juges s'habituent à prononcer des peines fermes lorsque c'est justice, même si l'intéressé n'a pas fait de détention provisoire et comparaît libre à l'audience. Il y a là un blocage psychologique bien naturel, qu'il faudra vaincre si on veut rester cohérent.
Pour ceux qui s'interrogent sur le point de savoir pourquoi le parquet, qui a requis le placement en détention provisoire, n'a pas fait appel, je répondrai que cela arrive assez souvent. On le requiert parce que la question se pose sérieusement et qu'il faut un débat, on soutient ses réquisitions pendant le débat si on estime devoir le faire, mais c'est le juge qui prend la décision et on s'en tient là, c'est sa responsabilité. Disons que la décision n'est pas si aberrante qu'il faille soumettre la question aux magistrats de la Cour.
Quand on fait appel ce n'est pas juste parce qu'on a pas eu gain de cause, mais parce que la décision est -selon nous - sérieusement inadaptée.

71. Le mercredi 27 juin 2007 à 17:42 par Damien

@parquetier : "Mais ça n'a RIEN A VOIR avec une peine."
Est ce que le temps passé en détention provisoire est soustrait de la peine si une personne est condamnée à de la prison ferme?

72. Le mercredi 27 juin 2007 à 17:59 par Juge du siège

@71: oui.

73. Le mercredi 27 juin 2007 à 18:03 par parquetier

à Damien, 71: oui. Et si la peine finalement prononcée est moindre, il sort tout de suite. On essaie donc de juger rapidement les personnes détenues, et d'autant plus rapidement que la peine qu'elles encourent "objectivement" se rapproche du temps déjà passé en détention. D'où un doute souvent chez les avocats: si mon client a eu 6 mois, c'est parce qu'il a fait 6 mois de DP, sinon il aurait eu moins. Ce qui n'est pas toujours vrai, mais n'est pas non plus forcément toujours faux. Par définition on ne le saura jamais.
Encore un élément qui milite pour la limitation drastique de la DP.

74. Le mercredi 27 juin 2007 à 18:33 par Raph

@Eolas :
Désolé pour les fautes de frappes... Je suis entrain de relire 97 projets de jugement sur les permis à point... A force les lettres se mélangent.... Et on ne sait plus si c'est le L223-3 du code de la route qui exigent que les prescriptions du L223-2 soit indiquées au titulaire ou si c'est l'inverse...

Les sardines sont les chevrons. J'ai oublié le grade de sous-brigadier : 3 chevrons, grade que l'on obtient au bout de 12 ans de service, de manière automatique.

75. Le mercredi 27 juin 2007 à 19:33 par Passant

à 01h30 du matin, le 3 juin, Annelise Frayard, et Jérémie Losson, tétraplégique sortent d'un bar à Nancy. La police embarque Annelise Frayard. Laissé sur place, Jérémie Losson est parvenu à contacter un tiers pour le ramener chez lui.

Selon la Police, Jérémie Losson a refusé l'aide que lui a proposé la Police. Ils déclarent d'ailleurs avoir même essayé de joindre ses proches. Leur talent d'enquêteur est enviable, si on considère qu'ils n'ont pas relevé l'identité de Jérémie Losson.

Source : le Canard Enchainé de ce matin, p.8

76. Le mercredi 27 juin 2007 à 20:02 par Tremblay

@Eolas : Mais je suis DÉJÀ convaincu que ce policier n'avait rien à faire en détention provisoire. Je vous l'ai dit dès le départ, dans l'absolu vous avez entièrement raison : rien ne justifie sa détention. Non, ce que je critique, c'est le fait qu'il fasse presque figure d'exception (bien entendu je caricature). Rappellez-vous du drame de la Courneuve ! A-t-on eu droit à une telle magnanimité ? Pourtant, je suis persuadé que les coupables de cette balle perdue n'avaient pas l'intention de tuer un enfant de 11 ans. C'était non-intentionnel là aussi. Mais je crois me souvenir qu'il n'avait pas eu droit aux mêmes faveurs que ce policier.

Et il en va de même pour tellement de monde... Enfin quoi, soyons sérieux. Vous êtes avocat ! Vous le savez bien, vous, qu'il y a énormément de gens en détention provisoire qui n'ont rien à y faire ! Vous le savez bien, que les procureurs n'hésitent pas à charger la mule et à demander la détention avec des arguments parfois fallacieux ! Vous ne l'ignorez pas, que des gens qui ont certes des choses à se reprocher, mais qui tout de même avaient à la fois des garanties de représentation, n'avaient pas de complices ou de témoins avec qui bavarder, et dont le trouble à l'ordre public réel est très subjectif et souvent surévalué, se retrouvent régulièrement en détention provisoire !

Si vous l'ignorez, je me dois de vous l'apprendre. Je me souviens de ce petit jeune d'à peine 19 ans qui partageait notre cellule (une cellule de 9), accusé d'avoir cramé les poubelles de la moitié du village. Il vivait chez ses parents, il était le seul accusé. Quel était le danger réel à le laisser dehors ? Il a fait quelques semaines de provisoire, avant d'être jugé assez rapidement.

Et quand on pense en plus que la préventive se fait en maison d'arrêt, alors que les reconnus coupables ont une chance d'aller en Centre de Détention assez rapidement, on mesure toute l'injustice de ces mesures...

Je partage très largement l'avis de parquetier. Mais je suis surpris de l'entendre de la bouche d'une telle personne, parce que pour ce que j'en ai vu, les parquetier ne sont pas vraiment les derniers à réclamer de la détention provisoire parfois à tort et à travers. Au fond j'entend souvent les juristes râler après le législateur qui serait trop sévère... Mais qui force les magistrats à appliquer cette sévérité avec un tel zèle ?


PS: @68: Pour les délits ne touchant pas à l'humain, je parlais des délits financiers, du genre abus de bien sociaux. Eux aussi, parfois, font de la détention provisoire. J'en ai connu un (ouais dans une cellule de 9 on rencontre beaucoup de monde en maison d'arrêt), un bon père de famille, qui n'avait rien à faire dans ce monde affreux... On me rétorquera qu'il risquait de complotter avec un éventuel complice. Mouais... le risque était effectivement supérieur à zéro. Mais alors enfermons tout le monde à ce compte là. Desfois que même celui qui a les meilleures garanties de représentation s'évade vers la Chine un beau jour, le risque n'est pas nul non-plus.

Et la présomption d'innocence, dans tout ça ? Et même quand le délit/crime est avoué. Quid de la possibilité que ces individus méritent moins qu'une sanction de prison ferme ? Le fait d'être finalement condamné à du sursis ne retirera rien au traumatisme qu'ils auront vécu en prison.


Alors vraiment, tant mieux pour ce policier. Mais et les autres ?

77. Le jeudi 28 juin 2007 à 00:45 par yves

Pourquoi cette histoire d'inaction me rappelle les trois lois de la robotique? Je dois avoir été mordu par un chien robot.

Le supérieur qui constate que son stagiaire roule trop vite et qui ne rien, il n'est pas coupable de rien? Même pas un petit manquement à une obligation de réagir face à une mise en danger d'autrui ?

78. Le jeudi 28 juin 2007 à 09:55 par ma conscience personnelle

voici un blog passionnant, que je recommande immédiatement autour de moi.
Une petite remarque aux commentateurs (je sais, ce n'est pas mon rôle). Méfions-nous de la "téléfootisation" de la langue (je me permets le terme, eu égard aux centres d'intérêts que manifestent les rubriques de ce blog) : inutile de "se devoir de faire ceci ou cela", autant se contenter de "devoir faire ceci ou cela". A moins que l'obligation morale ait plus de poids que l'obligation juridique et qu'il faille rendre davantage de comptes au tribunal de la conscience qu'à nos juridictions. Je me devais de le signaler (hi, hi...)

79. Le jeudi 28 juin 2007 à 17:08 par PEB

Note: La suspension est en réalité une protection du fonctionnaire. Ca n'a aucun rapport avec l'insertion sociale. C'est, comme son nom l'indique, une décision provisoire en attendant que l'Administration puisse fixer le fonctionnaire sur son sort.

Il n'est plus payé car il n'est pas en état d'exercer ses fonctions en attendant les résultats d'une enquête administrative et/ou pénale. En revanche, s'il n'y pas lieu de le sanctionner, ou le cas échéant dans la limite de la sanction administrative (non exclusive de la sanction pénale et inversement), le fonctionnaire est réintégré dans tous ses droits comme s'il n'avait jamais été suspendu.

Bref, du fait de la gravité de la matière des faits reprochés, la carrière du fonctionnaire est "mise sur pause."

80. Le jeudi 28 juin 2007 à 20:09 par aymard

Bonjour MaÎtre,
Je n'ai pas épluché la totalité des réactions ci-dessus, mais il me saute aux yeux votre 2° : "Protéger la personne mise en examen". Certes, l'unique moyen de le protéger contre les réactions d'autrui n'est pas la mise en détention, mais avez-vous songé que cela peut être l'unique moyen de le protéger contre lui-même ? A-t-on envisagé l'éventualité (que je ne souhaite pas) du suicide ?
Cordialement

81. Le vendredi 29 juin 2007 à 18:54 par Apokrif

"-t-on envisagé l'éventualité (que je ne souhaite pas) du suicide ?"

Pourquoi réserver cette forme de protection aux personnes mises en examen, et ne pas l'appliquer à tous les suicidaires ?

"? Fallait-il emprisonner quand même ce jeune homme, en se disant "tant pis, légalement, c'est border line mais ça soulagera peut être la famille de la victime ?""

Vous voulez dire que les JLD statuent sur l'action civile ?

"il y a eu mort d'homme, à cause de l'imprudence d'un policier"

A ce stade de la procédure, on n'en sait rien, puisqu'il n'y a pas eu de jugement sur la culpabilité.

82. Le samedi 30 juin 2007 à 00:22 par Marcel

Accessoirement, un homme peut parfaitement se suicider en prison. Proportionnellement c'est même assez courant. La prison a plus tendance à pousser au suicide qu'autre chose.

@81 : Les JLD sont humains, la justice est humaine. Je n'arrive pas à imaginer un JLD appliquant froidement le contenu du CPP sans prendre en compte certaines considérations bassement humaines comme la souffrance des victimes, la culpabilité apparente (sur intime conviction) du mis en examen, le dégoût ou pas que suscite son acte... Dans le cas contraire, remplaçons les JLD par des robots.

83. Le samedi 30 juin 2007 à 11:57 par Un citoyen curieux

@Eolas et d'autres:
(Je vous rassure d'abord: mon propos ici n'est absolument pas de défendre la pédophilie.)

Je ne suis pas sûr que les délits de la plupart des cyberdélinquants sexuels touchent effectivement à l'humain. L'humain, dans ces affaires, ce sont les enfants qui sont maltraités, violés, pour la réalisation de photographies ou de films.

Pour que le cyberdélinquant sexuel ait effectivement nui à ces enfants, il faut qu'il ait filmé ou ait figuré dans ces scènes, ou qu'il ait payé directement ou indirectement pour ces photographies ou ces films (d'où existence d'un circuit économique).

En revanche, le rapport entre, par exemple, un cyberdélinquant sexuel ayant téléchargé des photographies ou des films sur des sites pirates ou des réseaux p2p, et la maltraitance des malheureux sujets de ces photographies ou films, n'est pas évident.

Il en est de même pour ceux ayant téléchargé des images de synthèse, dessins, et autres documents ne nécessitant pas la présence d'acteurs mineurs. (Je ne sais pas si ces faits sont punissables en France, mais ils le sont aux États-Unis, du moins dans certaines circonstances.)

On justifie habituellement la répression dans ces deux derniers cas par des motifs de morale publique, par l'idée qu'une personne habituée à visionner de tels documents pourrait être dangereuse. Soit ; encore qu'on n'ait apparemment aucune étude sociologique ou psychologique démontrant un tel lien de cause à effet, ou encore démontrant que la prison a un rôle dissuasif ou curatif sur ce type de personnes.

Je déplore par ailleurs l'hystérie qui entoure les affaires de mœurs concernant les mineurs. L'affaire d'Outreau aurait dû enseigner au public et aux magistrats une certaine modération.

Là encore, plutôt que de s'en remettre au dégoût que peut inspirer l'acte commis (ou, plutôt, prétendument commis, l'affaire n'ayant pas été jugée), il faudrait plutôt s'en remettre à la loi, qui énumère une liste restrictive de raisons justifiant la détention préventive.

84. Le samedi 30 juin 2007 à 12:05 par Un citoyen curieux

@Eolas:

Certes, le supérieur hiérarchique présent dans le véhicule (enfin, si on suit les règles...) n'est pas pénalement responsable. (Encore que... pouvez-vous m'éclairer sur la non-assistance à personne en danger?)

Il n'en reste pas moins que, comme vous l'avez d'ailleurs souligné, un fonctionnaire qui, étant présent auprès d'un subordonné qui se conduit de façon imprudente, ne lui ordonne pas de cesser ses pratiques, a très certainement commis une faute disciplinaire.

C'est d'autant plus le cas que ce fonctionnaire est dépositaire de l'autorité publique. Je m'étonne qu'on n'évoque pas ce problème dans la presse.

Plus généralement, il convient également de s'interroger sur les pratiques courantes du service auquel ce fonctionnaire stagiaire appartenait. Mon expérience professionnelle est que les jeunes intègrent les pratiques habituelles de leur lieu de travail : s'il est habituel d'ignorer certaines règles, ils font de même; mais ils innovent rarement dans ce genre de choses (ou s'ils le font ils se font rappeler à l'ordre, dans les services bien tenus). Si la hiérarchie laissait régulièrement faire ce genre de choses (conduite avec girophares et sirène sans réelle urgence etc.), c'est qu'elle gérait mal le service. Je serais donc curieux de savoir ce qu'il en était.

Enfin bref, je ne voudrais pas qu'un jeune lampiste paye pour un problème plus général.

85. Le lundi 2 juillet 2007 à 11:35 par francis

en tant que néophyte du droit, j'ai toujours compris à travers la presse que le maintien en détention d'un mis en examen était bien souvent lié à la souffrance de la victime ou de son entourage qui comprendrait mal de "croiser dans la rue " celui qu'elle considère comme son violeur,
l'assassin de son fils, etc...
même si la justice n'a pas encore tranché.
Dans des cas graves, avec une présomption de culpabilité forte, où le coupable est connu, seules les modalités/motivations sont à déterminer, pour des durées raisonnables, de quelques semaines , à quelques mois, cette détention me paraît acceptable même si elle s'apparente, il est vrai, à une forme de peine avant le procès...

86. Le lundi 2 juillet 2007 à 21:51 par stellar

Vous partez cependant du principe que "le coupable est connu." Cela fait aussi parti de l'objet du procès : qui a causé quoi et est-ce que cela est pénalement répréhensible. Comment être sûr ce que va décider le tribunal avant le procès?

87. Le mardi 3 juillet 2007 à 13:42 par juged'instruction

Juste une petite remarque à propos de l'entrée en vigueur de la suppression du critère de trouble à l'ordre public en matière correctionnel. Cette disposition de la loi du 5 mars avait une entrée en vigueur repoussée au 1er juillet 2007. Donc, juridiquement parlant on aurait pu motiver une DP sur le seul critère du trouble à l'ordre public, la Cour n'aurait rien pu y redire. En opportunité, la plupart d'entre nous avont décidé d'anticiper l'entrée en vigueur et d'appliquer le texte dès le 5 mars, pour ne pas créer une inégalité selon que vous serez présenté au Juge des Libertés le 30 juin ou le 1er juillet.
Merci Eolas d'essayer de faire toucher du doigt la complexité de nos métiers...

88. Le mardi 3 juillet 2007 à 15:40 par PEB

Les différents commentaires font apparaître qu'en matière de police, dès lors qu'il y a "bavure", on est à la croisée des chemins entre:
- L'infraction pénale (nécessairement personnelle)
- La faute personnelle (l'agent doit payer les pots cassés)
- La faute de service (l'organisation du travail n'est pas tip-top, c'est donc le Trésor qui doit réparer la lésion)

D'un point de vue pécunier, les victimes ont intérêt à plaider au civil la faute de service: le Trésor est réputé solvable. (La France n'est pas le Zimbabwé).

Cependant, elles préfèrent souvent la voie pénale. Elles sauront peut-être le fin mot de l'histoire (et encore!) mais elles n'auront souvent que leurs yeux pour pleurer en guise d'indemnité. Un simple agent de police est rarement assujéti à l'ISF.

Il est vrai que la voie civile contre l'Etat est une procédure longue, écrite, ardue et aride où on n'apprend pas toujours grand chose sur les évènements.

Cependant, plaider la faute de service n'est pas si inutile que cela car cette voie, disai-je, ouvre les yeux de l'Administration sur ses propres manquements en termes d'organisation du service, d'effectifs et de formation du personnel. Dans ce cas, les chefs de services sont nécessairement interrogés par la hiérarchie sur ces différents points.

J'ajoute qu'avec la voie civile contre l'Etat, les victimes ont de grande chance d'obtenir quelques consolations pécuniaires. Or, si la voie pénale est préférée, si le fonctionnaire est relaxé, elles ne receveront rien: "Electa una via, non datur recursus ad alteram." L'Etat peut se retourner cependant contre son agent en engageant une action récursoire à laquelle les victimes sont certes étrangère.

Sans connaître le dossier, il faudrait rappeler aux familles que, si la douleur est une plaie ouverte, il y a un travail à faire de mise en perspective de la chaîne de responsabilité.

89. Le mercredi 4 juillet 2007 à 17:14 par Nyctalope

@83 : Oui, les dessins sont punissables en France. C'était le but du remplacement, dans le Code Pénal, du terme "image" (ou "photo" je ne sais plus) par "représentation graphique". En France, on peut être envoyé en prison parce que l'on possède un dessin.

Concernant les réseaux p2p, vous n'avez pas tort : on oublie pourtant de dire que cela représente l'immense majorité du circuit de ces images, et que le circuit économique est l'exception et non la règle. Et pourtant, celui qui passe par les réseaux p2p risquera beaucoup plus gros : celui qui achète sera mis en examen pour simple consultation : il risque au maximum 3 ans (avec tout ce que ça suppose de droits supplémentaires qui d'ailleurs le protègent, comme le droit de refuser une perquisition, si je ne m'abuse. Eolas pourra-t-il confirmer ?). Celui qui passe par les réseaux p2p diffuse aussi, presque mécaniquement. En tant que diffuseur, il encoure 5 ans, et surtout il est extrêmement aisé d'y rajouter la bande organisée (je serais intéressé par des précisions de Maître Eolas sur ce point d'ailleurs : quest-ce qui définit EXACTEMENT la bande organisée ?), ce qui fait encourir 10 ans à l'affreux pervers pornographe. C'est à dire autant que le coupable d'un homicide involontaire sur mineur avec plusieurs circonstances aggravantes, plus qu'un agresseur sexuel sur mineur, plus que la quasi-totalité des délits non-sexuels commis sur mineur (dont le délaissement de mineur de 15ans, la privation de nourriture et de soins au point de compromettre la santé de l'enfant, la provocation à l'usage illicite de stupéfiants...).

Cela dit, on part en hors-sujet total (on n'est certes pas les premiers, mais c'est pas une raison), même si nous restons dans le sujet du blog.

90. Le jeudi 5 juillet 2007 à 15:26 par Un citoyen curieux

@Nyctalope:

En fait, je crois que nous sommes en plein dans le sujet, à savoir l'utilisation par le législateur ou la justice du critère de l'émoi public (médiatiquement suscité) pour décider de la détention préventive ou des peines applicables.

Je ne peut donc qu'applaudir aux clauses « Ce trouble ne peut résulter du seul retentissement médiatique de l'affaire. Toutefois, le présent alinéa n'est pas applicable en matière correctionnelle. ». Je pense cependant qu'on trouvera le moyen de contourner la première dans le cas d'affaires particulièrement scabreuses.

91. Le jeudi 19 juillet 2007 à 16:26 par Ramo

Moi qui suis ni maître ni avocat, ni en France ni Français,
est ce une homicide involontaire ou un homide par imprudence !
Traverser un passage pour piéton de la maniére qu'il fut et qualifier cela d'homicide involontaire, c'est deja une escroquerie.
l'imprudence n'est t'elle pas une faute passible de correctionnelle ?
Et l'imprudence de la Police, de confier le volant d'un véhicule prioritaire a une jeune de 22 ans , n'est ce pas comdamnable ?

92. Le lundi 23 juillet 2007 à 20:16 par SNCF

Pas tout saisi effectivement...

93. Le dimanche 29 juillet 2007 à 00:38 par bigmama

Commentaire pour Essayons de comprendre
Maître, je lis de temps en temps votre blog et j'y apprends beaucoup. Votre humour 2ème degré pince-sans-rire me plaît bien aussi !
Je suis particulièrement intéressée par les interrogations que pose parfois le fonctionnement de notre Justice.
Voici un exemple qui me tient à coeur :
- une personne est jugée et déclarée innocente par un Tribunal de Grande Instance.
- la victime fait appel.
- deuxième procès, à la Cour d'Appel cette fois : l'accusé est condamné.
Il fait son temps de prison, paie la somme fixée pour la victime et les frais qui lui reviennent.
Il pourra essayer les différetns recours : la demande de grâce, la Cassation, la demande de révision et, enfin, la réhabilitation. Mais cela ne changera rien au fait que la Justice se sera contredite et n'aura finalement pas décidé quel tribunal avait raison.
Nous sommes là en présence de deux jugements totalement opposés sans que rien n'ait changé dans le dossier entre les deux procès.
Je trouve totalement injuste que le deuxième procès soit le seul pris en compte au final et déclaré juste.
Depuis quelques années, les choses ont changé pour les condamnations aux Assises, le condamné pouvant faire appel de la décision. Ce changement prouve que l'on peut améliorer le système.
En ce qui concerne le procesus que j'exposais, ne pourrait-on pas envisager qu' un troisième procès serve en quelque sorte d'arbitre, départageant les deux décisions et que son verdict, quel qu'il soit, soit le seul retenu ? Il ressemblerait au premier verdict (celui du TGI) ou au second (Cour d'Appel), peu importe mais ce qui compte c'est qu'on n'aurait pas accepté que la Justice ait "dit noir" d'abord puis "blanc" sans que cela la trouble !
J'aimerais avoir votre avis sur cette question. Merci beaucoup.
Autre chose : comme ça m'agace quand j'entends un journaliste dire qu'un tribunal "a reconnu" untel coupable. Pourquoi ne pas dire "a déclaré" ? Ca me semble plus juste.
Et puis merci pour vos précisions à propos de révision et réhabilitation. C'est loin d'être clair pour tout le monde !


Dans votre hypothèse, il n'y a pas que la victime qui a fait appel : pour que la cour d'appel puisse prononcer une peine de prison, il faut que le ministère public aussi soit appelant. La source de votre incompréhension vient du fait que vous envisagez les deux procès comme identiques et indépendants. Comme deux tirages au sort, en somme. Il n'en est rien. D'une part, la cour d'appel est composée de magistrats plus expérimentés, et qui siègent toujours "en collégiale", c'est à dire sont trois, quand le tribunal correctionnel peut être à juge unique (et c'est de plus en plus souvent le cas). Donc d'un strict point de vue de statistique, on peut estimer que la probabilité que la cour d'appel se trompe et que le tribunal ait eu raison est inférieure à l'hypothèse inverse. D'autre part, le procès en appel tient compte du premier procès, puisqu'il consiste essentiellement en la contestation du premier jugement (c'est la première question que pose le président de la chambre des appels correctionnels aux appelants : art.513 du CPP). Le tribunal a expliqué pourquoi il relaxe. Il ne se contente pas de dire "blanc". Il peut motiver sa décision en invoquant le bénéfice du doute car il estime que tel élément de l'infraction n'a pas été prouvé. Or le ministère public ou la victime, qui pensait avoir suffisamment prouvé ce point, pense pouvoir apporter en appel les éléments qui ont manqué au tribunal, ce qui entraînera la condamnation. Le premier jugement n'établit pas une vérité, il se contente de dire "en l'état du dossier, je n'ai pas la preuve de la culpabilité du prévenu". C'est la la justification principale de l'existence d'un appel : rien ne vaut une audience pour mettre à l'épreuve un dossier, il est équitable de pouvoir en solliciter une deuxième pour avoir l'opportunité de faire valoir tous ses arguments.

Eolas

94. Le lundi 30 juillet 2007 à 22:33 par Alex K

D'une clarté à toute épreuve, Cher Eolas, d'une clarté à toute épreuve...

Vous me paraissez vraiment bon... en tout cas par écrit.

Je suis curieux de vous entendre plaider un jour.

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