Journal d'un avocat

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Le tribunal de Nice inaugure la loi sur la récidive... sur un cas d'école

La loi sur la récidive est passée sur les fonts baptismaux du journal officiel et est désormais connue sous le doux sobriquet de loi n° 2007-1198 du 10 août 2007 renforçant la lutte contre la récidive des majeurs et des mineurs, et si vous êtes vraiment très intime, JUSX0755260L.

Elle est parue au journal officiel du 11 août, soit samedi dernier, et est donc entrée en vigueur dimanche à zéro heure (depuis une ordonnance de février 2004, il n'y a plus de délai d'un jour franc entre la publication de la loi et son entrée en vigueur).

Et lundi, le tribunal de Nice s'est vu décerner par la presse les lauriers du premier tribunal à faire application de cette loi. Sans vouloir retirer un quelconque mérite aux très honorables juges niçois, je ne suis pas sûr que des 181 tribunaux correctionnels de France, celui de Nice soit bien le premier à avoir prononcé une telle peine, le critère retenu pour attribuer ce titre n'étant pas précisé (Ordre de l'affaire au rôle ? Heure du prononcé ?). Je pense que sa localisation sur la côte d'azur a dû aider à attirer l'attention des journalistes sur cette affaire en cette période estivale.

Deux voleurs récidivistes ont été arrêtés, sans nul doute pour des faits commis dimanche après zéro heure, qualifiés de vol aggravé par deux circonstances : la réunion (ils étaient deux) et l'effraction (bris de la vitre d'une voiture). Butin conséquent : 7000 euros (l'essence est hors de prix à Nice, visiblement) outre un téléphone, un lecteur MP3 et des sacs. Le tribunal,saisi en comparution immédiate, a retenu la récidive, soit qu'elle soit dans la citation, soit que le parquet n'ait demandé à l'audience, soit que le tribunal l'ait soulevé d'office, du fait des 18 condamnations ornant le casier judiciaire des prévenus.

Le tribunal a donc prononcé une peine de trois années d'emprisonnement ferme, avec maintien en détention. Ce qui est exactement la peine plancher du nouveau dispositif : le vol aggravé par deux circonstances fait encourir sept années d'emprisonnement, donc le plancher est à trois ans. C'est ce qu'a requis le parquet, et qu'a prononcé le tribunal. La loi les y invitait et surtout les dispensait de toute motivation autre que "Vu l'article 132-19-1 du Code pénal..." Et je vous laisse imaginer le désarroi de mon confrère qui devait établir qu'en considération des circonstances de l'infraction, de la personnalité de ses auteurs ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par ceux-ci, une peine plus légère s'imposait.

Y a-t-il à redire sur cette application de la loi ?

Pas grand chose, car comme mes lecteurs le savent désormais fort bien, ce n'est pas sept années qu'encouraient les prévenus, mais quatorze, puisque la récidive double le maximum encouru.

Nous avons donc deux prévenus qui comparaissent devant un tribunal correctionnel pour la dix neuvième fois, une au moins de leurs dix huit mentions précédentes étant due à un vol pour fonder la récidive, qui encourent donc jusqu'à quatorze ans de prison et qui en prennent trois, soit 21% du maximum encouru.

Nice n'est pas réputé être un tribunal indulgent, inspiré en cela par sa cour d'appel dont la simple évocation fait trembler les pénalistes parisiens (moi-même, je suis pris d'un frisson en écrivant ces lignes, et ça ne peut pas être le temps qu'il fait, nous sommes en plein mois d'août).

Je doute donc, mais en appelle ici à mes confrères Niçois (au fait : où trouvez vous le courage de faire appel ?), que le tribunal, sans la loi sur la récidive, eut fait preuve d'une plus grande bienveillance dans le quantum de sa peine. Il n'est même pas impossible que la loi proposant ici une solution toute faite ait dissuadé le tribunal d'aller voir plus haut dans l'échelle des peines si l'inspiration ne les y attendait pas. Il aurait été intéressant de savoir quelles avaient été les peines préalablement prononcées et pour quels faits. Le tribunal en fait toujours mention, en tout cas des dernières, lors des débats. Mais pour cela, i laurait fallu qu'un journaliste soit présent dans la salle...

En fait, cette affaire est si caricaturale (18 condamnations, c'est quand même rare) qu'elle ne saurait démontrer le bien fondé ou au contraire le risque d'effet pervers de cette loi. Attendons de voir si le risque qu'évoque un parquetier se réalise :

Que feront les juges quand, par exemple, une personne comparaîtra pour 3 ou 4 vols à l'étalage - vol simple en récidive ? Il serait étonnant qu'ils condamnent, pour un délit mineur, le voleur à une peine plancher d'un an ferme. Ce que désormais les textes prévoient...

Assurément, ce magistrat voulait dire pour son troisième ou quatrième vol à l'étalage : le fait d'être cité pour plusieurs délits différents ne crée pas ipso facto la récidive, car vous le savez désormais presque aussi bien que lui, il faut que le premier terme soit une condamnation antérieure et définitive. Mais le simple fait qu'un parquetier rechigne à l'idée d'invoquer le nouvel article 132-19-1 du code pénal pour une telle hypothèse me conforte dans ma conviction que la récidive sera aisément oubliée dans la citation, ou serait-elle présente que le tribunal trouverait aisément des circonstances dans l'infraction, des éléments de la personnalité de son auteur ou des garanties d'insertion ou de réinsertion présentées par celui-ci pour justifier d'écarter cette application trop mécanique.

Illustration de ce qui est un de mes dadas : ne touchons jamais au pouvoir du juge de corriger l'application de la loi. Cela nous met à l'abri de lois se voulant automatiques, et qui automatiquement finissent tyranniques.

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Commentaires

1. Le vendredi 17 août 2007 à 19:11 par Marcel

Le soucis est que pour un vol à l'étalage, il est courant que les "coupables" soient des gens qui n'aient aucune garantie d'insertion ou de quoi que ce soit, puisqu'il s'agit régulièrement de SDF, qui ont fort peu à apporter au juge comme garantie.
Je note que je me suis fait la même réflexion que vous : la peine plancher pourrait bien avoir tendance à dispenser les juges de réfléchir à donner une peine un peu plus élevée que ce que prévoit la loi. On ne réfléchira plus à donner trois ans et demi ou quatre ans, et pourquoi plutôt trois que quatre, et pourquoi plutôt quatre que trois : on appliquera le plancher et basta. En fait de peine plancher, ne pourrait-on pas en arriver à ce que ces planchers se transforment en "peines par défaut" ?

2. Le vendredi 17 août 2007 à 19:23 par marseillai

Cher maître.
Intrigué par vos propos sur la cours d'appel d'aix j'ai veinement cherché a comprendre ce qui la rendait si effrayante et n'ai rien trouvé a ce propos.
Sauriez vous éclairé mes questions de vos lumiéres?

3. Le vendredi 17 août 2007 à 19:37 par Delio

En ce qui concerne les deux prévenus, il ne s'agit pas de vol à l'étalage, sinon il n'y aurait pas effraction, mais de vol à la roulotte, l'effraction étant constituée par le bris d'une fenêtre de portière.

Quant à la Cour d'Appel d'Aix, ce qui peut le rendre effrayante, c'est l'immensité du territoire de son ressort ainsi que le nombre impressionnant d'affaires qui y sont évoquées créant des délais encore plus longs que dans les autres juridictions d'appel. A ce propos, depuis de nombreuses années, les barreaux de Grasse et de Nice demandent la restauration d'une Cour d'Appel à Nice comme il en existait une avant l'annexion de 1860, quand Nice était encore savoyarde.

4. Le vendredi 17 août 2007 à 19:38 par Escualdifargo

Je me demande ce qu'ils ont pu voler dans une voiture pour 7000 euros. C'est même pas le prix de la mienne. Et encore on ne nous parle pas du montant des dégradations....

Cela étant dit, je ne suis pas sûr que sans cette loi la peine prononcée aurait été aussi "sévère" (pas de violences aux personnes). Pour peu que les deux aient eu un côté sympathique et franc à l'audience, ils auraient pu s'en sortir pour moins que cela.

5. Le vendredi 17 août 2007 à 19:49 par Delio

@Escualdifargo

Ce qu'ils ont pris pour 7000 € dans la voiture, c'est tout benoîtement du numéraire. Belle imprudence de la part des touristes qui furent, selon le compte-rendu d'audience paru dans "Nice-Matin", admonestés par le président du tribunal.

6. Le vendredi 17 août 2007 à 19:54 par Armand

Cher Maître,
Une majorité d'électeurs a choisi un président sur un programme.
C'est le principe de la démocratie.
Malheureusement, comme d'habitude, ne pas pouvoir interpréter, fera que les voleurs de pommes récidivistes risquent d'être davantage punis que des détrousseurs de vieilles dames, mais mineurs...
Et pendant sa peine de prison, l'amateur de pommes ne volera pas, mais il coûtera des tonnes de pommes en frais d'hébergement. :(
Salutations respectueuses.

7. Le vendredi 17 août 2007 à 20:06 par xerbias

"Que feront les juges quand, par exemple, une personne comparaîtra pour 3 ou 4 vols à l'étalage - vol simple en récidive ? Il serait étonnant qu'ils condamnent, pour un délit mineur, le voleur à une peine plancher d'un an ferme. "

Pourquoi ? A l'avenir, j'imagine que la personne en question aura été tenue au courant lors de la condamnation précédente ce qu'elle risquait en cas de récidive.
Autre question : pourquoi les juges devraient-ils trouver des prétextes ou oublier la récidive pour ne pas appliquer la loi ?

8. Le vendredi 17 août 2007 à 20:15 par Fred

que se passe t'il si le délit avait commencé disons à 23 heures et s'était terminé à 1 heure dans la nuit du dimanche?

merci

9. Le vendredi 17 août 2007 à 20:45 par Dilettante

Si je comprends bien, on peut anticiper qu'à l'avenir, l'application de cette loi épargne la plupart des récidivistes "insérés", incluant chefs d'entreprises, élus et hauts fonctionnaires, mais fasse rouler des têtes dans les quartiers à 30% de chômage...

Le fait que l'on rechigne à mentionner la récidive dans la citation, ou que le tribunal s'arrange comme il peut pour trouver des circonstances atténuante lorsque le "bon sens" est heurté, ne peuvent-ils pas constituer des entorses à la lettre ou à l'esprit de la loi ?

10. Le vendredi 17 août 2007 à 22:28 par Joker-eph

"(moi-même, je suis pris d'un frisson en écrivant ces lignes, et ça ne peut pas être le temps qu'il fait, nous sommes en plein mois d'août)"

Ah tiens par chez nous c'est plutôt novembre....

11. Le vendredi 17 août 2007 à 22:37 par Thésard

Excellent billet, comme à votre habitude, cher Maître !

Si jamais l'envie vous prenait de créer une rubrique "maljournalisme" (ce que je ne peux faire moi-même, tenu au devoir de réserve que je suis, ès-qualité d'allocataire de recherche), je soumets cet article (www.liberation.fr/actuali... ) à votre sagacité. Selon moi, l'auteur dudit article détourne la parole d'autrui afin de faire valoir une opinion qu'il n'a pas le courage de signer de sa plume, procédé fort lâche qui confine à la malhonnêteté intellectuelle...

Encore une fois, bravo pour votre blog, dont je suis un lecteur assidu !

12. Le vendredi 17 août 2007 à 22:51 par Murcia

Les êtres singuliers riaient des Normes, car c'est ainsi qu'ils nommaient les hommes de ce temps-là.

13. Le vendredi 17 août 2007 à 23:41 par Sans pseudo

Thésard, "ès-qualité" ça n’existe pas. C’est "en qualité" ou "ès qualités".
Cela dit, avez-vous lu la date de l’article que vous "soumettez" ? Lundi 5 décembre 2005.
Or tout (ou presque) est déjà dit par rapport au sujet qui inspire ce billet (la récidive) et le fait divers (sordide) qui a sorti cet article des archives payantes de Libération.
À savoir que - idée martelée régulièrement par Maître Eolas - ce n’est pas la menace d’une extrême sévérité qui dissuade le délinquant, mais la certitude qu’il a d’être pris, et rapidement jugé/condamné.
De même le législateur qui veut obliger le délinquant sexuel à se soigner (ça fait plus sérieux que de se déclarer contre les inondations) mais qui empêche de fait (par un budget Justice insuffisant) ces soins au moment où le délinquant est sous contrôle.

14. Le samedi 18 août 2007 à 00:02 par Thésard

@ Sans pseudo, # 13 : je souscris également aux idées de Beccaria. Simplement, je pense que le cas particulier de la pédophilie mérite un débat plus approfondi en matière de récidive que les autres infractions, comme le vol. Par ailleurs, j'estime que le procédé de la journaliste est assez malhonnête, puisqu'il conduit à considérer le pédophile comme "victime" du manque de moyens dont souffre la Justice. Je pense que la première question à se poser est : comment protéger la société de tels individus ? Il me semble impossible de les emprisonner toute leur vie, et difficile d'imposer une castration chimique... donc, que faire ?

15. Le samedi 18 août 2007 à 09:17 par Christophe

Ce qu'il y a d'intéressant dans ce texte sur les peines plancher c'est qu'il a réintroduit les circonstances atténuantes disparues avec le nouveau code pénal.
On peut imaginer que le parquetier qui ne souhaite pas requérir une peine plancher soulève de lui-même une de ces circonstances lorsqu'elle existe. (récidive simple ou nouvelle du vol simple)

16. Le samedi 18 août 2007 à 13:21 par Joel

Tiens, moi aussi je m'etais fait la reflexion, comme Eolas et certains lecteurs, que sans la loi sur les peines planchers, la peine prononcee aurait peut-etre ete plus haute que les 3 ans fermes prononces. Il faudrait en savoir plus pour en etre sur.

Mais en y pensant un peu, je me dis que c'est peu probable : en effet, nos multirecidivistes ont d'apres le monde 38 et 42 ans, et
l'on nous dit qu'ils sont cites 18 fois au casier judiciaire. On ne sait pas pour quels delits, mais on peut imaginer qu'au moins dans certains cas, il s'agissait d'affaires de gravite comparable a celle jugee lundi (vol avec effraction en reunion); et on peut etre quasiment sur que lors de la plupart de leurs comparutions, ils etaient en etat de recidive (a cause de la confusion des delits pour la recidive, il n'y en a pas tant que ca. Y en a -t-il 18 ?).
Un simple calcul montre que la peine moyenne (ferme ou sursis, puisque vraisemblablement des eventuels sursis auraient ete revoques plus tard) prononcee dans tous les cas juges n'etait pas tres elevee (certainement pas trois ans), et on peut imaginer qu'avant la nouvelle loi le tribunal n'etait pas souvent aussi severe pour des faits similaires.

17. Le samedi 18 août 2007 à 14:17 par Kristian

Perpignan serait-il le deuxième TC a utiliser la nouvelle loi ?

L'Indépendant de Perpignan, 18/08/2007 :
"Loi sur la récidive : quatre ans de prison ferme pour quelques grammes de résine de cannabis" (www.lindependant.com/arti...
"Il a ainsi "inauguré" la loi du 11 août 2007, sur la récidive, proposée par le nouveau ministre de la Justice Rachida Dati et entérinée dernièrement par le Parlement."

He bé, pour une fois qu'on est pas en retard sur le reste du pays...

18. Le samedi 18 août 2007 à 14:36 par xerbias

Je continue à avoir du mal à comprendre où est le problème avec la loi sur la récidive. S'il s'agit de multi-récidives, la personne en question sera prévenue des conséquences de ces actes si elle devait recommencer. En outre, si la loi indique des bornes supérieures aux condamnations sans que cela nuisse au pouvoir de juger du juge, pourquoi des bornes inférieures le ferait ?

19. Le samedi 18 août 2007 à 15:08 par jean philippe

Dans certaines juridictions de province je suis prêt à parier que sans cette loi, les deux voleurs auraient eu une peine d'un an d'emprisonnement dont une partie assortie d'un sursis avec mise à l'épreuve. Je ne peux donc qu'adhérer à cette loi !

J'espère maintenant que tout le monde va jouer le jeu et que la récidive ne sera pas écarté à tout va ! Je ne rêve pas trop je suis convaincu quand dans certaines juridictions le taux de personnes jugées en état de récidive va chuter par magie...

20. Le samedi 18 août 2007 à 16:17 par xerbias

"Qui a besoin d'être protégé de l'indulgence ? "

La borne supérieure protège le citoyen jugé d'une sévérité excessive. La borne inférieure protège donc la société contre une indulgence excessive envers le citoyen jugé.

21. Le samedi 18 août 2007 à 17:57 par Gascogne

Mon cher Jean-Philippe, le terme de "province" (qui n'existe plus depuis un peu plus de deux cents ans) combiné à une adhésion sans reflexion à la loi du 10 août 2007, sont en général des arguments à même de me faire sortir de mes gonds...Fort heureusement, mon caractère évolue vers une zénitude béate grâce à des évènements récents...
Mon tribunal de "province" vient de condamner un voleur récidiviste à 4 ans dont 1 SME (maxi : 6 ans). 23 condamnations au casier ont fait que nous n'avons pas attendu les lois nouvelles pour savoir se montrer répressif quand cela est nécessaire. Je persiste à dire que cette loi est purement démago.

22. Le samedi 18 août 2007 à 19:32 par quiche

encore une application de la loi : ici quatre d'emprisonnement pour avoir voulu vendre 2 grammes de cocaïne pendant les fêtes de Dax : dur, dur !
www.sudouest.com/180807/v...

23. Le samedi 18 août 2007 à 19:56 par xerbias

"J'ai à peine eu le temps de poser le piège que vous sautez dedans à pied joints. "

Vous pouvez me trouver touchant, me tendre des pièges, m'attribuez tous les raisonnements que vous voulez, il reste qu'en écrivant des commentaires ici, ce n'est pas pour chercher un affrontement. Je ne pense donc pas qu'il soit nécessaire que vous ayez comme objectif celui de me ridiculiser.

Ce que j'ai toujours du mal à comprendre, en étant accusé de raisonnement totalitaire ou non, c'est la raison pour laquelle le juge, s'il y a récidive, pourrait consciemment "oublier" ce fait. Cela me donne l'impression désagréable qu'un juge dans une telle situation tricherait avec les lois.
Et je ne vois pas quel problème il y a dans le fait d'indiquer par une loi des bornes minimales et maximales à la condamnation qu'un juge aurait à décider pour la nouvelle récidive commise par quelqu'un qui aurait déjà commis à plusieurs reprises des faits similaires.

24. Le samedi 18 août 2007 à 21:32 par jean philippe

Gascogne vous savez aussi bien que moi qu'on ne peut pas faire d'un cas une généralité. J'ai vu a contrario l'exemple d'un cambrioleur jugé en état de récidive légale pour la dixième fois se prendre 6 mois SME (depuis il est en prison). Et hélas dans ma région de province, (j'aime se terme pour me démarquer des parisiens) notre tribunal a la réputation d'être particulièrement laxiste. Face à ce laxisme il était utile de voter une loi ! Je sais bien que tous les magistrats ne sont laxistes et tant mieux mais on en a quelques uns qui le sont tout comme on recontre des magistrats trop sévères (plus rare).

25. Le dimanche 19 août 2007 à 10:56 par Gascogne

@Xerbias : le problème qu'il y a à indiquer des bornes minimales et maximales est qu'autant il peut arriver quelques fois que le maximal paraisse bien peu, autant la borne minimale, surtout dans les proportions actuelles (cf les planchers qui existaient dans l'ancien code pénal, bien inférieurs, et que le législateur de 1992 a pourtant supprimés) est beaucoup plus souvent source d'injustice. La loi est d'ordre générale, et ne saurait s'adapter à toutes les situations. C'est l'office même du juge que d'interpréter la loi. Quand on bride cette possibilité, on en arrive à des systèmes aussi aberrants que le "tree strikes and your out". Volez trois fois une part de pizza, et vous prenez perpet...
@ Jean-Philippe : C'est amusant de dire qu'un exemple ne vaut rien, et de répondre par un autre exemple...Plus sérieusement, pour que nous puissions nous comprendre, il faudrait m'expliquer ce qu'est une peine "laxiste", ou une peine "trop sévère". Personnellement, je ne le sais pas. Lorsque je fixe une peine, je fais en sorte qu'elle soit juste, adaptée, et comprise. C'est à dire qu'elle serve à quelque chose. Une peine ne sert pas à satisfaire l'opinion publique ("cette putain"), les associations de défense des victimes ou je ne sais quel journaliste d'extrême droite ou d'extrême gauche. Une peine sert certes à sanctionner, mais également à réinsérer. Or, une peine automatique, incomprise car parfaitement identique quelles que soient les situations, ne fera que renforcer le sentiment d'injustice de celui qui la subit. Ce n'est certainement pas le meilleur moyen de le faire revenir dans les standards de la vie sociale.
La méfiance (voire la haine : lisez les commentaires sous les articles de presse sur internet, c'est édifiant) envers juge, instillée depuis quelques années par de très nombreux politiques, avec l'aide de média complaisants, a conduit à cette loi. Mais puisque le juge est incapable de remplir son office, poussons le raisonnement jusqu'au bout, et intéressons nous au logiciel chinois, qui, une fois nourri des données relatives au dossier, sort automatiquement une peine. Quand cette justice, sans juge, existera, je serais bien plus inquiet que je ne le suis actuellement concernant notre système répressif...

26. Le dimanche 19 août 2007 à 13:30 par xerbias

@Gascogne : Le plancher est pourtant par définition bien inférieur au plafond. Si je comprends qu'une première récidive puisse nécessiter une condamnation inférieure aux planchers en fonction de circonstances atténuantes, à partir d'une deuxième, je trouve qu'il est temps de ne plus hésiter à prononcer des sanctions fortes. Si on en arrive à une telle loi, et au vu des réactions qu'elle provoque, c'est bien parce que de telles peines étaient rarement prononcées. Il s'agit pourtant de multi-récidivistes, et je crois qu'il est prévu de prévenir les condamnés des conséquences d'une éventuelle récidive au regard de cette loi.

Dès lors, quelle injustice il y a-t-il ? La personne ayant été prévenue de ce qu'il se passerait, récidive quand même. Elle ne sera confrontée qu'à ce qu'elle pouvait s'attendre. Elle ne peut alors s'en prendre qu'à elle même.

@Eolas : la loi votée ne prévoit-elle pas des circonstances atténuantes possibles dans le cas d'une première récidive ? Par contre, pour les multi-récidivistes, prévenus de surcroit, je ne vois pas quelle injustice il peut y avoir. Alors vous allez peut-être me dire que ce n'est pas parce que je ne la vois pas qu'elle n'existe pas, mais l'argument a du mal à me convaincre.

"Et un médecin qui aide ses patients à mourir mérite-t-il quinze année de réclusion criminelle dès le deuxième ? "

Un médecin qui, après avoir été reconnu coupable de meurtre pour avoir aidé un patient à mourir, recommencerait dans les cinq années qui suivent m'inquièterait assez.

27. Le dimanche 19 août 2007 à 15:11 par quiche

"encore une application de la loi : ici quatre d'emprisonnement pour avoir voulu vendre 2 grammes de cocaïne pendant les fêtes de Dax : dur, dur !
www.sudouest.com/180807/v...

Réponse d'Eolas :

Pas 2 grammes, il avait 10 paquets sur lui. En quatrième récidive. Il encourait donc vingt ans. Je doute que s'il avait été jugé la semaine dernière, il aurait eu moins. "

j'ai assisté à l'audience : ce jeune homme détenait 10 grammes mais a voulu en vendre 2...
franchement, connaissant la jurisprudence de ce tribunal, il aurait pris grand maximum 24 mois la semaine dernière...

28. Le dimanche 19 août 2007 à 17:23 par Schmorgluck

Première ligne : "fonts baptismaux", non ?

29. Le dimanche 19 août 2007 à 19:19 par serdan

merci pour tous de vos dialogues sur la récidive.

Certains posts (de chez EOLAS par exemple) pourraient être cités pour un cours d'éducation civique.

Certains dialogues (toujours chez le même, par exemple) pourraient être cités comme de vrais exemples de dialogues avec Socrate.

serdan

30. Le lundi 20 août 2007 à 07:47 par Tous

> Les bornes nuisent au pouvoir de juger du juge : c'est même leur fonction.
> La borne supérieure protège le citoyen jugé d'une sévérité excessive qui
> est contraire aux droits de l'homme (les peines doivent être strictement
> et évidemment nécessaires). Qui a besoin d'être protégé de l'indulgence ?

C'est encore le biais individualiste. D'un côté il y a un citoyen (partie bien identifiée, on comprend aisément les conséquences d'une condamnation sur son futur) et de l'autre un ensemble de citoyens, j'ai nommé l'Etat (partie pas très bien identifiée, on voit difficilement les conséquences du jugement sur son "intégrité").

Quand le juge donne d'un côté, il retire de l'autre. L'indulgence pour l'un c'est la sévérité pour l'autre. Or tu reconnais à l'individu des droits qu'il convient de protéger mais rien à l'ensemble des individus. Je veux bien qu'il ne soit pas aisé d'évaluer dans quelle mesure l'Etat est lésé. Mais de là à nier intégralement comme tu le fais...

Je ne suis pas favorable aux peines plancher mais la réponse à ta question est toute trouvée : qui a besoin d'être protégé de l'indulgence ? Tous.

31. Le lundi 20 août 2007 à 10:45 par Web Info Hebdo

« sa cour d'appel dont la simple évocation fait trembler les pénalistes parisiens».

Elle fait beaucoup moins trembler depuis le départ à la retraite du célèbre Président de la 13ème chambre, espièglement surnommé "Papy Pan Pan" par les avocats stagiaires .

Celui là même qui demandait aux prévenus :

Pourquoi avez vous fait appel ? Vous n’avez jamais entendu parler de moi ?

Et qui demandait aux prévenus libres s'ils avais pris leur brosse à dent...

32. Le lundi 20 août 2007 à 11:01 par teebo

Bonjour,

Donc cette loi sur la récidive s'applique aussi dans toute sa splendeur|sévérité même si les faits précédents ont été commis avant le décret d'application? Il me semblait qu'il y avait un mécanisme dans le droit français qui empêchait que des actes commis avant le décret d'application puisse rentrer dans cette application, apparemment ce n'est pas le cas ici...

33. Le lundi 20 août 2007 à 12:29 par 20100

"La loi du 10 août n'a pas besoin de décret d'application."

Pourquoi cette loi n'a-t-elle pas besoin de décret d'application ?

Merci d'éclairer la lanterne d'un l'illettré du droit.

34. Le lundi 20 août 2007 à 16:37 par nap

Bonjour,

Vu samedi soir en deuxième partie de soirée (sur france 3 il me semble) un reportage sur les comparutions immédiates en guyane : le "nouveau" juge n'a pas eu besoin d'une quelconque loi pour être très sévère (je ne juge sa sévérité qu'au fait que ses condamnation étaient systématiquement supérieures aux réquisitions du parquet qui faisaient déjà frémir les avocats présents...)
Par ailleurs ce juge est multi-casquette : JLD un jour et... président du Tribunal correctionnel un peu plus tard... où il est amené à juger les personnes qu'il a "maintenu" en détention auparavant.
Je ne suis pas réellement certain qu'il soit de bonne justice que le JLD puisse être également Président du Tribunal correctionnel sur une même affaire... mais bon... ce doit être dû au manque de moyens de la justice et au manque de personnel...
Ensuite, on voit le Juge et le Procureur prendre le même véhicule pour se rendre à une audience dans une ville se trouvant à plusieurs dizaines de kilomètres.
Le journaliste semble intéressé par cette proximité et interroge le Procureur. Celui-ci semble un peu gêné pour répondre mais indique que vu les circonstances et le budget de la justice, ils ne peuvent se permettre de prendre deux véhicules et voyagent donc ensemble.
Son air gêné était quant même amusant ;o)
@+

35. Le lundi 20 août 2007 à 19:26 par Tous

> A vous suivre, l'intérêt collectif étant supposément supérieur à l'intérêt individuel,

Pas supérieur, opposé par moments.

> il vaudrait mieux condamner un innocent (ce qui fait du mal à un seul) que prendre le risque de libérer un coupable

Non, car condamner un innocent fait aussi du tort à la collectivité.

> Cela justifie même qu'il n'y ait qu'une peine unique, et même la plus sévère,
> qui a l'avantage d'être relativement économique : on supprime le danger,
> et on économise l'argent de tous, on gagne sur tous les tableaux.

Si la collectivité se réduit à personne, on a perdu sur tous les tableaux.

Je veux bien avoir un "biais collectiviste" mais je puis difficilement incarner la collectivité tout seul. J'ai quand même envie de vivre avec les autres, en bon termes de préférence, y compris avec le maître de ces lieux, eût-il des avis contraires aux miens.

> [Sur la réinsertion de l'individu dans la société] Ce risque doit être couru par tous, oui,
> y compris par moi, j'en prends ma part tous les jours, car l'intérêt de l'individu passe
> ici avant tout.

Mais non. La réinsertion de l'individu est à la fois dans son intérêt ET dans celui des autres. Tu laisses entendre qu'elle serait dans son intérêt CONTRE celui des autres, et que du coup je serais un méchant liberticide en prônant la supériorité du second sur le premier.

> C'est ce respect des droits individuels qui caractérise les vraies démocraties,
> qui sont des Etats qui tirent leur légitimité de la protection de ces droits.

Mais vivre peinard sans que ça dégénère ni dans un sens (tu peux plus garer ta voiture dehors) ni dans l'autre (il y a des caméras partout et une police de voisinage privée) est un droit individuel. Seulement tu ne peux pas exercer ce droit tout seul mais seulement au sein d'une collectivité qui est plus ou moins bien représentée par l'Etat.

> Les démocraties qui sacrifient l'un à tous, ce sont des démocraties populaires,
> des enfers pavés de bonnes intentions.

Et hop un "Staline-point". Je ne veux pas d'un Etat qui sacrifie ses hommes à la grandeur de la collectivité. Je veux juste que l'on reconnaisse qu'il existe une entité collective, certes difficile à cerner, mais dont il faut aussi prendre compte lors des décisions. Tu arrêtes systématiquement l'analyse des conséquences d'un jugement à la sphère de l'individu, alors que nous y prenons tous part.

36. Le lundi 20 août 2007 à 21:53 par jean philippe

@ Gascogne : J'ai pris un exemple justement pour démontrer qu'à partir d'un exemple on peut tirer n'importe quelle conclusion. Pour moi une peine laxiste est une peine largement inférieure à la peine maximum prévue par le code pénal infligée à un multi récidiviste !

Vous dites que la peine n'a pas vocation à satisfaire l'opinion publique. Vous avez en partie raison mais n'oubliez la mention "au nom du peuple français" qu'on trouve sur les décisions... Peut-être faudrait il accepter le regard des citoyens.

37. Le lundi 20 août 2007 à 22:05 par Juge du siège

Cet après-midi, le tribunal correctionnel de Metz a condamné à 2 ans d'emprisonnement (dont toutefois 1 an assorti d'un SME) une personne jugée coupable de tentative de vol, tentative précédée de dégradations.
En l'espèce: un type d'une quarantaine d'année, marginal et limité intellectuellement, accumulant les petits larcins de ce type mais sans jamais être violent, avait tenté de voler un CD à la FNAC locale, après avoir enlevé l'emballage du CD pour y chercher l'antivol.

38. Le mardi 21 août 2007 à 09:17 par SEGOLENE

Cette loi sur la récidive n'est elle pas suffsamment sévère ? J'ai lu qu'à partir de Mars 2008 les condamnations ne seraient plus effacées du bulletin n°1 par la réhabilitation . Est-ce bien exact ? Que cherche donc le législateur exactement ? A créer la desespérance chez ceux qui ont vécu des accidents de la vie ? Tous ne sont pas des délinquants d'habitude ! Les juges ne seront-ils pas influencés si dix ans plus tard, l'un d'entre eux commet à nouveau une infraction ? Je ne comprends décidément pas cette société vengeresse. Elle va obtenir l'inverse de ce qu'elle veut .

39. Le mardi 21 août 2007 à 10:00 par nap

@34 réponse Eolas : merci pour la précision (en l'occurence : je ne peux pas dire si le magistrat a pris part à la décision lors du délibéré (absence de caméra) mais il était présent lors des débats (qui ont été dirigés par un autre juge) puis c'est lui qui a annoncé le jugement. Je suppose que le juge a dû respecter la lettre du CPP... il n'en reste pas moins que je trouve un peu choquant que le prévenu retrouve devant lui le JLD qu'il avait vu avant.

Sinon : le documentaire s'intitule CAYENNE EXPRESS (première partie passée sur France 3 samedi soir et seconde partie passée cette nuit à 2h40... c'est dommage...). cf. www.telephant.com/Cayenne...

@+

40. Le mardi 21 août 2007 à 12:03 par nap

@39 réponse Eolas : vous avez excité ma curiosité sur ce point précis et j'ai trouvé ceci :
www.ca-amiens.justice.fr/...
(apparemment la Cour d'appel d'Amiens ne semble pas avoir la même lecture que vous du CPP et restreint l'interdiction de 137-1 CPP à la procédure d'instruction), je serais intéressé de savoir ce que vous (ou autre "spécialiste") en pensez...
Par ailleurs je trouve relativement "désagréable" le fait que la Cour d'appel "rappelle l’absence d’effet pratique de la nullité soulevée" car la Cour aurait alors annulé le jugement et évoqué l'affaire : je le comprends comme : "le juge de première instance peut bien violer la procédure pénale sur ce point, cela n'a pas d'importance !"
m'enfin,
@+

41. Le mardi 21 août 2007 à 12:48 par jean philippe

@ Ségolène : Vous n'avez pas l'impression d'exagérer en parlant d'accident de la vie ? Je veux bien admettre que certains délinquants sont touchés par le chômage et la maladie mais toutes les personnes frappées par ces accidents ne dévient pas nécessairement sinon croyez bien que j'en aurais cramé des voitures !!! Un peu de sérieux, n'inversons pas les rôles ce ne sont pas les délinquants qui sont victimes quand même !!!

Et pour répondre à votre interrogation, souvent lorsqu'un dossier présente une condamnation antérieure ancienne, le juge sans aller jusqu'à l'ignorer il la relativise.

@nap : Intéressante la position de la cour d'appel d'Amiens mais je ne donne pas cher de ce raisonnement si l'affaire devait se retrouver devant la Cour de Cassation (et encore moins devant la CEDH!!!). Si on admet que l'article 137-1 du CPP ne s'applique pas à la comparution immédiate, ce qui est déjà discutable, je ne pense pas qu'on puisse écarter l'article 6§1 de la CEDH or si on regarde la jurisprudence constante de la cour de Strasbourg un juge qui a connu une affaire à quelque titre que ce soit ne peut participer à la formation de jugement.

42. Le mardi 21 août 2007 à 14:12 par segolene

à jean-philippe: décidément, vous n'avez pas le pardon facile. Si vous appréciez le fait qu'une réhabilitation n'efface plus une condamnation, et que personne ne puisse remettre les compteurs à zéro, je vous plains de tout mon coeur, et je plains aussi les gens qui vous entourent !!!!! Vous souhaiteriez peut-être qu'on supprime le principe même de laréhabilitation ? N'ayez crainte, ça va venir...

43. Le mardi 21 août 2007 à 14:30 par jean philippe

J'ai pas dit que j'étais contre la réhabilitation, j'ai simplement dit que les juges savent très bien faire la différence entre une personne qui a une condamnation antérieure ancienne et une personne qui a une condamnation antérieure plus récente !

Puisque nous parlons de récidive, ceci n'est pas une consultation maître, mais que pensez-vous de l'avant projet de loi sur le traitement des pédophiles ? Nicolas Sarkozy a annoncé vouloir supprimer les remises de peines et les libérations conditionnelles pour les pédophiles. Je suis sceptique en ce sens que nous allons avoir au final plus de libérations sèches or je crois que s'il est un domaine où il convient d'assurer un suivi des délinquants et criminels c'est le domaine de la pédophilie.

44. Le mardi 21 août 2007 à 16:18 par segolene

à jean-philippe : alors quel est l'intérêt de ne pas effacer une condamnation ancienne ? En quoi est-ce que cela protègera davantage la société ? De toute façon, si la personne commet un nouveau délit, elle sera condamnée ! Est-ce que la victime de ce nouveau délit se sentira davantage " vengée " ? Le juge condamne pour punir le délinquant, pas pour faire " plaisir " à la victime . Heureusement que le choix de la peine ne revient pas à la victime, au moins pour l'instant...
Je regrette, mais il y a bien un esprit vengeur dans notre société.

45. Le mardi 21 août 2007 à 16:34 par segolene

Je suis scandalisée par notre président largement élu : c'est quoi, ces rebondissements sur un nouveau fait divers qui vient de sortir ? C'est quoi, ces manières de faire venir à l'Elysée le père de ce petit garçon ? Et le grand-père ? C'est quoi , ces médias qui les gonflent d'importance ? C'est quoi ,ces manières qui consistent à faire croire au bon peuple qu'on est à l'écoute ? Ce ne serait pas de la démogagie par hasard ? On n'a pas besoin d'être un grand psychologue pour savoir que la famille d'une victime manque automatiquement d'objectivité, qu'elle n'a aucun recul . En justice, , la première chose à faire à mon humble avis, c'est d'éviter la vindicte populaire. Et là , tout est fait pour exacerber la haine . C'est quoi, ces manières de décider d'une loi dans la minute qui suit l'entretien avec le père de la victime ? Il existe encore dans cette république un parlement qui prend le temps de réfléchir , et heureusement un conseil constitutionnel qui tient la route . Pour combien de temps ?

46. Le mardi 21 août 2007 à 17:40 par jacques

Franchement, je ne vois pas l'intérêt d'une telle Loi alors que tout l'éventail judiciaire existait déjà en tenant compte des récidives.
Le problème n'est-il pas d'être capable de faire appliquer les jugements rendus ? Comment expliquer à une jeune victime de viol, requalifié en agression sexuelle, que son auteur ne soit pas incarcéré plus de 4 mois après un jugement qui l'a condamné au mois d'avril à 4 ans dont 18 mois ferme, en prenant en compte que ce dernier avait 7 enfants et son casier vierge ? Or, c'est la victime qui n'ose pas sortir de chez elle par peur de le croiser sur son lieu de travail ?
Comment expliquer à des parents (pères, mères ou gds parents) pourquoi les jugements rendus pour non représentation d'enfants ne sont pas appliqués, après trois condamnations avec sursis, une dernière en janvier à 6 mois dont 1 ferme, après plus de 26 plaintes pour un papa de l'Isère qui a certes obtenu un DVH pour ses enfants il y a presque 2 ans, sans pouvoir le faire appliquer ...
La Loi ne semble pas concerner ce dernier cas qui détruit des familles entières et principalement des enfants "pris en otages" des années lors d'un conflit familial.
On peut toujours faire des Lois, mais s'il faut attendre des années et de nombreuses récidives avant que le jugement rendu soit appliqué, ça ne sert à rien pour les victimes...

47. Le mardi 21 août 2007 à 19:05 par Juge niçoise

"Très honorable juge niçoise" (quel vil flatteur ce Me Eolas, aurait il une affaire à plaider ici prochainement ?), je réagis à ce billet, en précisant tout d'abord que je ne faisais pas partie du Tribunal correctionnel qui a siégé ce jour là, que je ne connais cette affaire que par ce qu'en ont dit les journaux et que je me garderai de la commenter davantage. Evidemment, je ne vois pas comment on peut affirmer avec certitude que Nice a été la première à appliquer ces peines plancher, mais ce n'est qu'un détail. Je suis plus étonnée par la réputation de sévérité qui nous est faite. Siégeant assez souvent en correctionnelle, je n'ai pas ce sentiment. Et venant d'une petite juridiction "tranquille" d'une région bien plus septentrionale, je n'ai jamais été choquée par les peines prononcées ici, ni dans un sens, ni dans l'autre. Seuls les "vols à la portière" sont plutôt sévèrement réprimés, ce qui a sans doute contribué, avec les actions de prévention, à les faire diminuer assez considérablement. Et quand je vois les arrêts de la Cour d'Appel, je ne constate pas d'aggravation de la répression systématique. Au contraire plutôt. Quant à vos 900 confrères niçois, croyez moi, ils n'hésitent pas utiliser les voies de recours. Ces frissons aoutiens me semblent quelque peu exagérés et j'espère que si vous plaidez devant nous un jour, vous serez tout à fait rassuré. Quelques considérations sur les peines planchers et leur application (parce que après cette "première", il y en a eu d'autres, auxquelles j'ai participé) : le parquet relèvera systématiquement la récidive car la circulaire qui vient d'être rédigée par la Chancellerie l'y incite, ce qui me paraît cohérent avec le texte. Oui, on ira globalement vers une aggravation des peines car ces sanctions plancher "tirent vers le haut". Nous les écarterons lorsque nous le pourrons, utilisant les marges de manoeuvre que nous laisse le texte. En comparution immédiate, ce sera difficile, faute d'éléments suffisants sur la personnalité et les avocats auront tout intérêt à demander un délai. En tout cas, cela va conduire les avocats à aussi plaider sur la peine, ce qu'ils ne font pas si souvent, sauf Me Eolas bien sûr. Rappelons aussi que nous pouvons assortir la peine d'un sursis simple (pas toujours possible s'il y a eu une condamnation antérieure à de la prison ferme) ou d'une mise à l'épreuve, et nous l'avons fait quand cela nous est apparu nécessaire. Y aura t'il un effet dissuasif à terme ? Je n'en suis pas persuadée, même si, pour reprendre l'exemple des vols à la portière, il est probable que la sévérité des sanctions prononcées a eu un effet. Mais n'oublions pas que le délinquant moyen, si tant est qu'il sache qu'il est en récidive, pense avant tout qu'il ne va PAS se faire prendre.
Enfin, je rassure Me Eolas, je n'ai pas mauvais caractère, même face à un casier judiciaire qui n'en finit pas, ni même quand la Cour d'appel m'infirme.

48. Le mercredi 22 août 2007 à 12:08 par Oscar

Un détenu, arrivant dans une minuscule cellule, déjà occupée par deux prisonniers, et devant dormir sur un matelas posé à même le sol s'est exclamé : j'ai été condamné à une peine plancher !

49. Le mercredi 22 août 2007 à 15:24 par didier Schneider

@ 26 : "Un médecin qui, après avoir été reconnu coupable de meurtre pour avoir aidé un patient à mourir, recommencerait dans les cinq années qui suivent m'inquièterait assez."

Un médecin d'un service de traitement du cancer, confronté très souvent à ce cas, et qui ne le ferait seulement que deux fois en 5 ans m'inquiéterait assez.

« sa cour d'appel dont la simple évocation fait trembler les pénalistes parisiens».
Versailles n'est pas triste non plus.

50. Le mercredi 22 août 2007 à 19:30 par avocate parisienne

Je peux me tromper mais est-il possible de juger en comparution immédiate des délits punis de 14 ans de prison? Dans mes vagues souvenirs de chargée de TD, il me semblait que la loi Perben 2 avait levé le plafond à 7 ans au lieu de 5? Me trompé-je?
Car, le cas échéant, cela ajoute une bien belle qualité à notre nouvelle loi: celle de pouvoir condamner à 14 ans en 1/4 d'heure. Dîtes-moi que je rêve...

51. Le jeudi 23 août 2007 à 13:43 par didier Schneider

"Ha, y'a pas que moi qui a remarqué un durcissement récent de la cour de Versailles ?"

--> j'ai toujours entendu dire que Paris, c'était le paradis à coté de Versailles ( enfin, pour le civil ) . Il y avait quelques individualités ( je ne peux citer les noms hélas) qui ont inspiré la crainte et la colère, la haine et/ou le mépris. il y en a encore...

Mais il est jouissif de leur couper "les moyens" [scouic ! ] par une cass bien sentie. Et de revenir trois après dans la même chambre en leur excipant les quatres pages d'une assemblée plénière ( vingt personnes + l'avocat général + la greffière) pour un dossier similaire.

Ne pas oublier la greffière , jamais. J'ai toujours été bien reçu par le personnel du greffe, qui ne m'a jamais tancé quand je déposais des concluses non signées.

52. Le jeudi 13 septembre 2007 à 15:42 par Confrère anonyme

une observation qui mérite réflexion :
la question qui doit se poser concernant ce texte est celle de l'application de la loi dans le temps : en effet une loi pénale plus sévère ne peut avoir d'affet rétrocatif. En conséquence, pour qu'il y ait récidive au sens de la loi du 10 août 2007, cela impose que la "première" infraction a été commise sous l'empire de la nouvelle loi ; si la "première" infraction a été commise avant son entrée en vigueur, c'est la loi antérieure sur la récidive qui doit s'appliquer ....

53. Le jeudi 20 septembre 2007 à 19:30 par Maitre A... de B.....

le Confrère anonyme a raison. la Cour de cassation l'a rappelé par des arrêts d'avril 2006 pour la suppression de la possibilité de dispense d'inscription au B2 en matière d'atteintes aux moeurs .

par analogie ou je ne sais quel raisonnement dont vous connaissez les termes, mais qui ne semble pas vous être venu à l'esprit, si la nouvelle loi est plus sévère, elle ne peut s'appliquer si le 1er terme de la récidive a été commis avant l'entrée en vigueur de la Loi.

j'ai déjà eu des jp favorables à BOBIGNY et NANTERRE sans appel du parquet pour des affaires figurant au B1 de mineurs depuis PERBEN et pour lesquels on visait la récidive dont j'ai obtenu la relaxe.
Eolas, je me suis beaucoup marrée en voyant que pas une seconde, cet argument ne vous était venu à l'esprit.
vos lecteurs seront décus. Vous critiquez beaucoup mais qu'apportez-vous ?

je ne sais ce que fera la cour de cass de ce raisonnement mais c'est la 1ère chose qui devrait venir à l'esprit d'un pénaliste.

manifestement, cela ne vous a même pas effleuré.

vous êtes cultivé, intelligent et talentueux mais surtout donneur de leçons.

un peu d'humilité, un défenseur ne peut accepter une telle Loi sans se souvenir des fondamentaux.

idem pour la Loi sur le bracelet électronique (la 2ème). le conseil constit l'a validée en disant que c'était préventif.
cela l'est peut-être mais c'est aussi coercitif donc cela ne devrait pas avoir d'effet sur une condamnation passée.

j'espère que la CEDH sera saisie de ces questions

bravo confrère anonyme, enfin un avocat

54. Le vendredi 21 septembre 2007 à 13:26 par Maitre A... de B.....

vous avez plus de temps que moi Eolas mais rapidement (vous avez un lien avec légifrance):

jp avril et mai crim cour de cass, peut-être le 24/04/06 si ma mémoire est exacte: les faits ayant été commis avant l'entrée en vigueur de la loi PERBEN (qui prohibe la dispense d'inscription B2 en matière de moeurs) il est possible de solliciter la dispense B2 pour ce type de faits, la loi pénale aggravante n'étant pas rétroactive (même si la juridiction statue après l'entrée en vigueur) = c'est la date des faits qui compte pour l'application d'une Loi pénale aggravante dans le temps

quant aux mineurs, avant PERBEN les condamnations B1 disparaissaient à la majorité, depuis PERBEN elles restent, vous savez jusqu'à quand.

ce qui permet au parquet de viser la récidive, le 1er terme étant commis durant la minorité, le 2nd à la majorité

j'ai demandé la relaxe de la récidive (ne vous en déplaise c'est comme cela que l'on fait) et l'ai obtenue aux motifs que le 1er terme avait été commis avant l'entrée en vigueur de PERBEN , parce que c'est une Loi pénale aggravante, etc....

et je l'ai obtenue à 3 reprises sans appel du parquet

même raisonnement avec peine plancher: la récidive suppose 2 termes, le 1er terme doit avoir été commis après l'entrée en vigueur de la Loi, elle ne peut s'appliquer à compter du 2nd terme

que vous n'adhériez pas à mon raisonnement (que vous n'avez pas sembler comprendre, je vais certes vite mais un confrère auquel j'ai fait lire mon mot a compris de suite), c'est votre pb

mais la moindre des choses pour un défenseur c'est d'y penser

et Confrère anonyme y a pensé

j'aime bcp quand vous êtes désagréable, ça me fait marrer

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