Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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La cour de cassation promulgue la loi DADVSI

La cour de cassation vient de jeter un pavé dans la marre en cassant l'arrêt rendu le 22 avril 2005 par la cour d'appel de Paris dans l'affaire dite "Mullholland Drive". Et cet arrêt contient, caché dans un recoin, un bout de phrase qui fera sûrement gloser des juristes des pages et des pages, et qui a donc tout naturellement échappé à la presse grand public.

Re-situons le débat.

L'acquéreur d'un DVD du film de David Lynch Mullholland Drive fut pris au dépourvu quand, voulant effectuer une copie de sauvegarde dudit DVD en fut empêché par un dispositif anti-copie rendant la partie numérique de l'oeuvre aussi inaccessible que l'était déjà sa partie visuelle. Fort marri, il alla crier son ire chez UFC-Que Choisir ? qui lui fit bon accueil et les compères décidèrent de concert d'aller chanter pouille en justice contre le producteur, l'editeur et le diffuseur de l'oeuvre pour atteinte au droit à la copie privée.

Le tribunal de grande instance de Paris les débouta de leurs prétentions le 30 avril 2004, les condamnant en outre à 8000 euros de frais de justice.

Ni une ni deux, les plaideurs portèrent leur querelle devant la cour d'appel, espérant trouver Quai des Orfèvres les cinéphiles qui leur firent défaut Boulevard du Palais.

Grand bien leur fit, car la 4e chambre de la cour, le 22 avril 2005[1] réduisit à néant ledit jugement, accueilli à bras ouvert la demande de notre cinéphile informaticien évincé et lui accorda 150 euros de dommages intérêts, 30000 à UFC et 1500 euros de frais de procédure. Surtout, la cour, emporté par son amour du 7e art, et préférant peut être Apollon à Thémis, fit interdiction au producteur et à l'éditeur du film d'apposer quelque dispositif anti-copie que ce soit sur leurs DVD. Les déboutés invoquèrent alors Mars et partirent en guerre contre cet arrêt du côté du Quai de l'Horloge.

Très grand bien leur fit car les Conseillers de la première chambre civile [2] firent choir la foudre de Zeus sur l'arrêt rendu de l'autre côté de l'Île de la Cité.

Et cet arrêt, en la forme, a de quoi retenir immédiatement l'attention des juristes : il est court, ne cite pas le pourvoi, commence par un visa suivi d'un chapeau et casse l'arrêt qu'il examine : ce sont tous les indices des arrêts de principe destinés à marquer pour longtemps la jurisprudence de la cour.

Descendons de l'Olympe du droit et soyons le Prométhée de la procédure :

La cour rappelle à titre de prolégomène les faits :

Attendu que, se plaignant de ne pouvoir réaliser une copie du DVD “Mulholland Drive”, produit par les Films Alain Sarde, édité par la société Studio canal et diffusé par la société Universal Pictures vidéo France, rendue matériellement impossible en raison de mesures techniques de protection insérées dans le support, et prétendant que de telles mesures porteraient atteinte au droit de copie privée reconnu à l’usager par les articles L. 122-5 et L. 211-3 du Code de la propriété intellectuelle, M. X... et l’Union fédérale des consommateurs UFC Que choisir ont agi à l'encontre de ceux-ci pour leur voir interdire l’utilisation de telles mesures et la commercialisation des DVD ainsi protégés, leur demandant paiement, le premier, de la somme de 150 euros en réparation de son préjudice, la seconde, de celle de 30 000 euros du fait de l’atteinte portée à l’intérêt collectif des consommateurs ; que le Syndicat de l’édition vidéo est intervenu à l’instance aux côtés des défendeurs ;

Puis vient le visa.

Le visa est la liste des textes de loi que la cour va interpréter. Rappelons que la cour de cassation a comme mission première d'unifier l'interprétation de la loi ; ce visa indique donc expressément que c'est sous cette aune que devra désormais être mesuré l'article concerné.

Ce visa, le voici :

Vu les articles L. 122-5 et L. 211-3 du Code de la propriété intellectuelle, interprétés à la lumière des dispositions de la directive n° 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information, ensemble l’article 9.2 de la convention de Berne ;

Tiens, tiens ? Ca ne vous dit rien ? La directive citée est précisément celle dont la transposition est en cours avec le projet de loi DADVSI. La cour de cassation va interpréter le code de la propriété intellectuelle en tenant compte de cette directive alors même que la loi de transposition n'est pas adoptée. Je n'oserais affirmer que c'est une première, mais je le crois ; en tout cas c'est une évolution notable (Monsieur le Professeur Rolin, pouvez vous éclairer ma lanterne, car jouer les Prométhée sans feu m'est insupportable). [Mise à jour : Paxatagore, Nemesis de mes erreurs, apporte des précisions fort utiles sur son blog et en commentaires. La cour de cassation a déjà interprété des textes internes à la lumière d'une directive européenne en voie de transcription. Il n'y a pas nouveauté ici, à ceci près que la copie privée fait partie de la marge de manoeuvre laissée aux Etats et que le projet de loi en discussion la protège. La cour de cassation ne se contente pas d'appliquer la partie de la directive qui est claire et ne laisse aucun choix aux Etats membres. Mais à sa décharge, elle casse un arrêt qui fait interdiction au producteur, à l'éditeur et au distributeur de mettre des dispositifs anticopie sur les DVD, ce que la directive autorise expressément. La cour pouvait difficilement laisser passer ça.]

Une directive européenne n'a en effet aucun effet juridique direct en droit interne, elle ne fait qu'imposer aux Etats membres de la transposer dans leur législation interne avant une certaine date, date qui en l'espèce est dépassée depuis longtemps[3]. La cour de cassation prend acte de la carence du législateur, trop occupé à boire du champagne punch au Palais de Tokyo, et décide de tenir compte de ce texte dans son interprétation pour anticiper sur la marche du législateur. En cela, elle se rapproche de ce que fait le Conseil d'Etat depuis longtemps et prend sur elle d'intégrer dans la législation française une directive non transposée par le biais de l'interprétation de la loi. Rien que ça rend cet arrêt très important, au-delà du seul problème de droit d'auteur.

Vient ensuite le chapeau.

Le chapeau est un paragraphe qui pose l'interprétation des textes visés par la cour de cassation. En somme, la cour joint le geste à la parole, et annonçant qu'elle va interpréter le code de la propriété intellectuelle "à la lumière de la directive", elle nous révèle aussitôt quelle est cette interprétation.

Attendu, selon l’article 9.2. de la convention de Berne, que la reproduction des œuvres littéraires et artistiques protégées par le droit d’auteur peut être autorisée, dans certains cas spéciaux, pourvu qu’une telle reproduction ne porte pas atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre ni ne cause un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l’auteur ; que l’exception de copie privée prévue aux articles L. 122-5 et L. 211-3 du Code de la propriété intellectuelle, tels qu’ils doivent être interprétés à la lumière de la directive européenne susvisée, ne peut faire obstacle à l’insertion dans les supports sur lesquels est reproduite une oeuvre protégée, de mesures techniques de protection destinées à en empêcher la copie, lorsque celle-ci aurait pour effet de porter atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, laquelle doit s’apprécier en tenant compte de l’incidence économique qu’une telle copie peut avoir dans le contexte de l'environnement numérique ;...

Traduction : la directive DADVSI que le législateur n'a pas été fichu de transcrire en temps et en heure permet expressément de s'opposer à la copie même privée d'une oeuvre, et la convention de Berne, qui elle est en vigueur, prévoit qu'il est permis de s'opposer à une telle copie quand ellle porte atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre ou cause un préjudice injustifié aux intérêts légitimes de l'auteur. Ce n'est qu'une question de temps pour que ce qu'ont fait le producteur et l'éditeur ne devienne légal, et même ça devrait déjà l'être depuis longtemps. Et bien voilà, je fais comme si ça l'était d'ores et déjà.

Voici la règle posée. Maintenant, la cour va l'appliquer aux faits de l'espèce.

D'abord, faites entrer l'accusé, la cour expose comment la cour d'appel a statué. Pour faciliter la lecture, je mets en italique les propos qui sont ceux de la cour d'appel et de cette cour seulement :

Attendu que pour interdire aux sociétés Alain Sarde (le producteur), Studio canal (l'éditeur) et Universal Pictures vidéo France (le distributeur) l’utilisation d’une mesure de protection technique empêchant la copie du DVD “Mullholland Drive”, l’arrêt, après avoir relevé que la copie privée ne constituait qu’une exception légale aux droits d’auteur et non un droit reconnu de manière absolue à l’usager, retient que cette exception ne saurait être limitée alors que la législation française ne comporte aucune disposition en ce sens ; qu’en l’absence de dévoiement répréhensible, dont la preuve en l’espèce n’est pas rapportée, une copie à usage privé n’est pas de nature à porter atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre sous forme de DVD, laquelle génère des revenus nécessaires à l’amortissement des coûts de production ;

Vient ensuite la sentence de mort de l'arrêt de la cour d'appel de Paris :

Qu’en statuant ainsi, alors que l’atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, propre à faire écarter l’exception de copie privée s'apprécie au regard des risques inhérents au nouvel environnement numérique quant à la sauvegarde des droits d'auteur et de l’importance économique que l’exploitation de l’oeuvre, sous forme de DVD, représente pour l’amortissement des coûts de production cinématographique, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

C'est carrément une violation de la loi que retient la cour de cassation, c'est fort et cinglant.

La cour de cassation et la cour d'appel sont toutefois d'accord sur un point, qui n'est pas nouveau mais qu'il est bon de rappeler : la copie privée n'est pas un droit, mais une exception au principe de l'interdiction de toute copie de l'oeuvre. Cette exception cesse dès lors que d'autres intérêts protégés par la loi sont remis en cause, et c'est exactement le cas selon elle en matière de copie de DVD. Interdire tout dispositif anti copie, tout DRM pour parler clairement, c'est pour la cour de cassation sacrifier les intérêts légitimes de l'auteur en compromettant l'exploitation normale de l'oeuvre qui se retrouverait immédiatement disponible au téléchargement à grande échelle (car juridiquement, la distinction entre une copie privée réalisée en local à partir d'un DVD ou en réseau P2P est sujette à controverse : la cour d'appel de Montpellier, à laquelle s'est ralliée le tribunal de grande instance de Paris, ne la fait pas, tandis que Pontoise et Meaux la font). Et en plus de cette atteinte, la loi va bientôt expressément autoriser les DRM et même aurait dû le faire il y a de ça trois ans.

En somme, la cour de cassation a commencé à appliquer la loi DADVSI, avant même qu'elle ne soit votée.

Notes

[1] Arrêt disponible sur Juriscom.net

[2] Civ.1e, 28 février 2006, pourvois n°05-15.824, et 05-16.002

[3] La directive devait être transposée avant le 22 décembre 2002

La discussion continue ailleurs

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Commentaires

1. Le vendredi 3 mars 2006 à 19:28 par gnomnain

est-ce normal d'appliquer une loi qui n'est pas encore votée ou une directive européenne qui n'a aucune valeur en droit français?

C'est aussi normal que de ne pas encore avoir voté la loi qui devait la transposer trois ans après la date limite pour ce faire. Ce faisant, la cour de cassation rapproche le droit positif français de ce qu'il devrait être, ça n'a rie nde scandaleux, maix je le reconnais c'est audacieux.

Eolas

2. Le vendredi 3 mars 2006 à 19:49 par Simon

Je ne dirais pas que c'est audacieux, c'est plutôt un début de coup d'Etat !!! Si une institution judiciaire commence à dire ce que pourrait être la loi, la cour de Cassation va bientôt se dire que l'avortement est une exception pas forcément justifiable à la condamnation pour homicide volontaire ... La séparation des pouvoirs doit exister dans un sens mais aussi dans l'autre. Que le législateur soit défaillant, certes, mais c'est plus à la commission européenne de sanctionner le manquement et aux électeurs de juger, mais aucunement à des magistrats qui ne sont responsables devant personne. De parfois longs débats se font jours à l'Assemblée pour les interprétations qui sont faites des directives européennes, qui souvent permettent une certaines marges de manoeuvre. Si le judiciaire agi sur cette marge, quel rôle pour le Parlement ???

Votre argument sur l'avortement est très élégant en plus d'être pas du tout pertinent. La cour de cassation statue ici dans le silence de la loi. Une question lui est posée : est il licite d'empêcher la copie d'une oeuvre que l'on vend au public ? Le code de la propriété intellectuelle dit : l'auteur ne peut s'opposer à une copie privée ; la convention de Berne, de valeur supérieure, dit : la copie privée peut être autorisée mais ne doit pas porter atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre.

Bref, la question n'est pas clairement tranchée, mais la cour doit la trancher, elle. Et enfin, une directive qui devrait être transposée depuis longtemps et le sera bientôt dit expressément qu'il est licite de mettre des dispositifs anti-copie. Et la cour de cassation ne devrait surtout pas en tenir compte afin d'éviter que Simon ne crie au coup d'Etat ? Aurait-elle donc du statuer en sens contraire sachant que dans six mois la loi démolira sa jurisprudence ?

Le parlement n'est en rien dépouiller de sa compétence. Qu'il vote une loi disant expressément que les DRM ne doivent pas faire obstacle à la réalisation d'une copie privée, et les juges l'appliqueront à commencer par la cour de cassation.

Eolas

3. Le vendredi 3 mars 2006 à 19:57 par Thesa

Si je comprend bien, le fait que la transposition n'ait pas été faite est le problème de l'appareil législatif. Et donc la cour de cassation applique bel et bien une loi qui n'existe pas, et quelque part le fait qu'elle devrait exister ne la regarde pas... Dans ce cas, y a-t-il un recours possible pour l'acquéreur du DVD et UFC Que choisir ?

Je trouve un peu cavalier de dire que le fait qu'une loi devrait exister mais n'existe pas ne regarde pas la cour de cassation. Elle fait du droit, et précisément la non transposition d'une directive est un problème de droit. L'affaire va de toutes façons retourner devant la cour d'appel de Paris pour être à nouveau jugée : il est trop tôt pour parler de recours.

Eolas

4. Le vendredi 3 mars 2006 à 19:57 par krysalia

assez d'accord avec simon ...
depuis quand " ça n'avait pas été fait à temps par les personnes qui devaient, alors je me mèle de le faire même si ça n'est pas mon rayon" est une raison valable à une action ou une décision ? ... que ce soit une cour de cassation ne devrait pas changer grand chose à ce principe. si ?

Et après tout pourquoi pas ? Si un pouvoir peut suppléer à la carence d'un autre, autant qu'il le fasse, non ?

Eolas

5. Le vendredi 3 mars 2006 à 19:59 par coco

Simon,

"Je ne dirais pas que c'est audacieux, c'est plutôt un début de coup d'Etat !!! "

Biensûr que non. La théorie de l'écran législatif a été balayée en 1975 par la cour de cassation, vous débarquez complètement.

C'est l'application logique d'une règle qui existe depuis des lustrse, savoir, le principe de primauté du droit communautaire, qui permet d'ailleurs au juge d'écarter l'application d'une loi contraire au droit communautaire (règlements comme directives).

Concernant les directives, lorsqu'une directive est pas ou mal transposée, le juge DOIT écarter l'application de la loi qui lui contrevient.

En d'autres termes, le juge ne se fait pas législateur, au contraire, il remplit pleinement son office et fait une simple application de l'article 55 de la Constitution française (primauté des engagements internationaux de la France sur la loi interne) et du traité de 1957 qui a créé un ordre juridique propre (l'ordre juridique communautaire). C'est d'ailleurs exactement ce qu'a dit la CJCE en qualifiant le juge national de "juge naturel" du droit communautaire.

A défaut, les engagements internationaux et notamment communautaires de la France n'auraient aucune portée (puisqu'ils pourraient être effacés d'un coup de plume par le législateur).

6. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:00 par Flying™

@Simon: C'est une incidence de la construction européenne: le juge français se dédouble et aurait désormais un double fondement à sa compétence, un fondement national (la constitution) et un fondement communautaire.
Au titre de sa compétence communautaire, il doit donner application aux directives non transposées en temps et en heure ...

C'est une des conséquences de l'audace et du pragmatisme de la Cour de Justice, qui me semble bienfaisante, vue l'incapacité du législateur français à mettre en oeuvre la législation communautaire.

Brillant billet, bourré d'humour, Me Eolas, j'ai bien rigolé :-)

7. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:05 par coco

J'ajoute que les engagements internationaux de la France pourraient également être privés d'effet par le simple jeu de l'inertie parlementaire (ce qui est le cas quand une directive n'est pas transposée dans le délai, et ce qui aurait donc été le cas, en l'espèce, si la cour n'avait pas fait son boulot).

je rappelle également que les actes de droit communautaire dérivé (règlements, directives), sont adoptés par les états membres via le conseil (unanimité ou majorité, selon). Il n'y a pas de complot des juges donc, mais une règle de droit adoptée par les états, et des magistrats benoîtement chargés d'en assurer le respect.

8. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:06 par Flying™

A la réflexion, il y a une nouveauté assez stupéfiante dans cet arrêt: L'attitude du CE sur les directives non transposées était de les appliquer dans les conflits entre Etat et particulier (dits verticaux grosso modo).

Or ici, la Cour applique bel et bien une directive non transposée en temps et en heure à un conflit opposant deux particuliers, un conflit horizontal!

Le juge avait décidé dans de tel cas, de ne pas appliquer la directive, afin de ne pas défavoriser le particulier ayant agi contre la directive non transposée, mais réservant à la victime de la violation la possibilité de se retourner contre l'Etat en responsabilité pour violation du droit communautaire ...

Dites-moi si je me trompe ...

C'est effectivement mon analyse mais je ne suis pas certain que la cour ne soit pas déjà allé si loin. Auquel cas c'est un arrêt destiné à entrer au panthéon aux côté de l'arrêt Jacques Vabre de 1975. Mias je vous avoue avoir perdu de vue l'évolution de la jurisprudence en la matière dpeuis la fac. Je susi donc prudent.

Eolas

9. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:11 par Guillermito, sous la neige

J'aime beaucoup ces jugements en zig-zag, contredits par une cour d'appel, cassés par une cour de cassation, dépendant de la situation géographique du tribunal, et du fait que le juge s'est coupé en se rasant le matin, ce qui l'a mis de mauvaise humeur, et du temps qu'il fait. Je pense proposer lors de ma candidature aux prochaines présidentielles le programme suivant : remplaçons les cours et les juges par un jeter de pièce de monnaie à pile ou face. C'est plus rapide, c'est moins cher, et le résultat est statistiquement à peu près le même.

(Comment, moi, amer ? Pas du tout. Bon, si, allez, un peu).

10. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:11 par coco

Flying,

Tiens c'est vrai ça... Chouette alors : de bonnes lectures juridiques en perspective, ça va nous cahnger des énièmes articles sur la réforme des procédures collectives.

11. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:21 par coco

Flying,

En même temps la cour de cassation ne donne pas d'effet direct, elle recourt simplement au principe d'interprétation conforme. Donc je ne suis pas certaine que cela soit si extraordinaire au fond.

Elle dit quand même clairement qu'elle interprète la loi "à la lumière de la directive". Ce n'est pas de l'effet direct, mais le seul fondement de la cassation (pour violation de la loi) est que la directive recnnait expressément les DRM, dès lors les déclarer illicites était impossible. On se rapproche de la jurisprudence du Conseil d'Etat (arrêt Alitalia), qui ne décide pas de l'effet direct, ce qui serait une violation du droit communautaire, mais interdit de laisser subsister des dispositions réglementaires contraires à une directive dont la date de transposition est dépassée.

Eolas

12. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:28 par Dangereuse trilingue

Il y a une chose qui m'embrouille -- il y a bien dans l'UE des décisions (pour ne pas employer le mot «directive») communautaires qui s'appliquent automatiquement et d'autres qui nécessitent une transposition.

Autrement, merci. Sur le fond, cela ne me réjouit pas. Et je ne parle pas en téléchargeuse effrénée, ce que je ne suis point. Brider la maîtrise de la technologie que les individus sont maintenant capables d'acquérir me paraît pernicieux. Imaginez seulement qu'on interdit par la loi aux automobilistes de réparer eux-mêmes leur voiture au prétexte que s'il savent faire ça, il pourraient exercer le week-end une activité de mécano non déclarée au fisc et potentiellement dangereuse pour leurs «clients».

Les règlements communautaires s'appliquent directement en droit interne. Les directives ne s'appliquent pas directement mais doivent être préalablement transcrites.

Eolas

13. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:33 par Obsidian

Merci une fois encore pour ce très attendu complément d'info et dont la verve est à la mesure des plus jolies fables (sur la forme, et dans le bon sens du terme, naturellement : -) de notre langue !

Ça change du SMS ...

14. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:34 par Flying™

Coco et Me Eolas:

En effet, je viens de parcourir rapidement le Système Juridique Communautaire de Denys Simon, et il semble que cet arrêt ait moins de rapport avec l'effet direct des directives non transposés entre particuliers qu'avec l'invocabilité d'interprétation conforme, c'et-à-dire le devoir pour les juridictions nationales (dixit la CJCE), d'interpréter le droit de manière à assurer l'effet utile du droit communautaire ...

A l'appui de ce point de vue, la terminologie employée par la Cour :
"Vu les articles L. 122-5 et L. 211-3 du Code de la propriété intellectuelle, INTERPRETES à la lumière des dispositions de la directive n° 2001/29/CE du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information"

A suivre ...

15. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:40 par Nicolas

Cela ramène d'ailleurs aux débats sur feu la tentative de constitution européenne. Car une directive européenne est un fiat de l'exécutif, ou plutôt du collège des exécutifs nationaux. Ce qui pose donc un problème légitime de contrôle démocratique si le filtre de la transposition parlementaire ne se fait pas. Le déficit démocratique des institutions européennes est d'autant plus préoccupant que les tribunaux se mettent à appliquer directement les directives européennes prises avec bien peu de garde-fous démocratiques.

16. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:41 par Charivari

Si je me souviens bien de mes cours de Droit Communautaire, le Législateur ne peut prendre de décision contraire à l'esprit d'un Directive en cours de transposition.

La Cour de Cass' ne fait ici qu'étendre ce principe à la Jurisprudence.

Cela peut se contester parce qu'elle doit, il me semble, statuer au regard de l'état actuel du Droit au moment de la naissance du différent.

Mais, et quelque soit la félonie de la loi DADVSI, cela reste compréhensible eut égard au retard du législateur dans la transposition du texte.

Inutile ici, de saisir la CJCE en ultime recours...

17. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:45 par Pierre

Il me semble que l'interprétation d'une directive non transposée dans les délais n'est pas une première ?

18. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:46 par Flying™

Charivari: ca tombe bien, on ne peut saisir la CJCE en ultime recours :p

Sinon je ne crois pas que cette décision soit assimilable à une extension des obligations du législatif (Interenvironnement Wallonie, 2001, il me semble), mais qu'elle touche plutôt soit à l'interprétation conforme, soit à l'effet direct des directives non transposés, selon le poids qu'on accorde à la directive dans la décision de la Cour de cassation.

19. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:49 par le vilain petit canard

Je vote pour Guillermito!

Non sérieusement, il y a plusieurs détails qui m'échappent, là. Pourquoi faire perdre autant de temps aux parlements nationaux pour transposer des directives européennes, si elles sont directement applicables et même supérieures à tout ce que pourrait dire un parlement national?

J"aimerais bien comprendre sur quoi se base cette supériorité, d'ailleurs. Le sieur coco nous informe que c'est du fait de l'article 55 de la constitution, qui est ainsi formulé :

Art. 55. - Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie.

Et là, je voudrais pas paraître inutilement pinailleur, mais "sous réserve de son application par l'autre partie". Or en l'espèce, il me semble me rappeler que la directive EUCD dont il est ici question, n'est pas encore transposée dans certains autres pays européens (Espagne, République tchèque à en croire Wikipedia [1].

J'ai l'impression, corrigez moi si je me trompe, que la légitimité du droit européen est bien plus "de fait" que "de droit", c'est à dire que son application ou pas, comme le faisait remarquer Guillermito, est quelque peu laissée à la discrétion des juges, suivant la tendance du moment.

Parce que, toujours pour pinailler, remarquez que la cour de cassation ne dit pas "la cour d'appel a violé la loi", mais "la cour d’appel a violé les textes susvisés". Ce qui ne fait pas d'eux des lois.

[1] fr.wikipedia.org/wiki/EUC...

20. Le vendredi 3 mars 2006 à 20:55 par Flying™

Le vilain bestiau H5N1 :)

La réciprocité comme condition d'aplication des directives est bannie de la logique communautaire ...

D'ailleurs, ce n'est pas tant dans la Constitution qu'on trouve ici des réponses, mais dans les traités et la jurisprudence de la Cour de Justice. C'est en cela que les juges nationaux ne sont plus que des juges nationaux, mais également communautaires.
C'est en cela que les juges nationaux ont de quoi devenir schyzophrènes: ils sont à la fois investis par la Constitution et par les Traités communautaires.

21. Le vendredi 3 mars 2006 à 21:09 par Paxatagore

Je suis un peu étonné par les commentaires juridiques sur l'applicabilité de la directive européenne. Il me semble qu'il est de jurisprudence ancienne, maintenant, de la CJCE, que les directives, à certaines conditions, peuvent avoir un effet direct. La cour de cassation interprète depuis longtemps la loi française à la lumière des dispositions non encore transposées d'une directive communautaire (par exemple, la directive sur la responsabilité du fait des produits défectueux). Sur le plan des rapports entre le droit français et le droit communautaire, cet arrêt de la cour de cassation n'est en rien une nouveauté.

Pour schématiser la position de la CJCE (cour de justice des communautés européennes) : le juge national (ici, la cour de cassation) est un juge communautaire, chargé de veiller au respect du droit communautaire et à sa primauté sur le droit national. Lorsqu'un Etat ne transpose pas dans sa législation interne une directive européenne, le juge peut l'appliquer malgré tout, dès lors qu'elle est suffisament claire et précise.

@ Nicolas : une directive n'est pas un acte de l'exécutif, mais souvent un acte émanant du conseil européen et du parlement. Le titre exact de la directive dont il s'agit est :
"Directive 2001/29/CE <b>du Parlement européen</b> et du Conseil du 22 mai 2001 sur l'harmonisation de certains aspects du droit d'auteur et des droits voisins dans la société de l'information". (c'est moi qui grasse).

@ Le Vilain petit canard : les directives laissent souvent une certaine marge de manoeuvre aux Etats, qui transposent la décision commune dans leur droit national avec des variantes. Mais il se peut aussi que, parfois, la marge de manoeuvre soit si limitée que le texte, en fait, se suffit à lui-même, sur certains points particuliers. Par ailleurs, la cour de cassation a l'obligation d'essayer d'appliquer quand même les directives européennes, même si le Parlement ne fait pas son travail.

Il est par ailleurs, maintenant, de jurisprudence constante, que la clause de réciprocité ne vaut pas pour les engagements européens. En effet, le véritable fondement constitutionnel, en droit français, du droit européen, c'est l'article 88-1 de la Constitution, et pas l'article que vous citez.

22. Le vendredi 3 mars 2006 à 21:18 par Flying™

Paxatagore: certes les directives doivent être claires, précises, inconditionnelles pour être d'effet direct.
Mais l'effet direct n'était pas reconnu dans les affaires entre particuliers (CJCE, Faccini Dori 1994), afin de ne pas léser la partie qui se fiait naïvement au droit national, mais offrant toutefois (en théorie, c'est la CJCE qui ouvre cette possibilité) la possibilité à l'autre partie victime de l'absence de transposition, la possibilité de se retourner contre l'Etat négligent ...

23. Le vendredi 3 mars 2006 à 21:47 par flo

C'est quand même un embrouillamini impressionnant, qui en laisse présager d'autres pour les utilisateurs. J'essaie de reprendre les éléments pour suivre : Le code de la propriété intellectuelle dit que l'auteur ne peut s'opposer à une copie privée ; la convention de Berne, de valeur supérieure, dit que la copie privée peut être autorisée mais ne doit pas porter atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre.

Le point qui a fait basculer la décision, si j'ai bien compris la fin de votre billet, c'est que la Cour a estimé que dans ce cas la copie privée pouvait donner lieu à diffusion en réseau type P2P (et que ce risque fait sortir d'un usage privé, il y a risque d'atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre du fait de l'existence du duplicat obtenu, lui-même duplicable). Or, tant qu'il n'y a pas eu mise à dispo sur un réseau public, il n'y a pas eu autre chose que de la copie privée, me trompé-je ? Donc la Cour de Cassation a présumé d'une possibilité d'atteinte à l'exploitation normale de l'oeuvre.

C'est ennuyeux. Sur cette base, dès que l'on pourra arguer de "possibilité de", on pourra de facto interdire la copie privée de la main gauche, après l'avoir autorisée de la main droite. Cet arrêt confirme donc (si j'ai bien lu) les craintes de mise à mort de la copie privée.

(En fait, si on avait créé des clés anti copie "transmissibles" pour limiter le nombre des duplications au lieu de confier la clé au seul logiciel, on n'en serait peut-être pas là.)

24. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:06 par RMISTE

Le juridisme est au droit ce que la bigoterie est à la religion...

Et à vous gloser d'Europe vous en oubliez l'essentiel mes chers amis juristes :

"L'exception de copie privée est l'un des éléments du droit d'auteur contribuant à faire de ce dernier un pacte entre citoyens plutôt qu'un simple instrument de régulation des activités commerciales d'échanges d'oeuvres."

Le sens de l'histoire est clairement l'adaptation du droit aux réalités de la société et faire la part belle aux seuls intérêts économiques de quelques lobbys est scandaleux.

Il n'y a pas si longtemps on libérait la cryptologie sous la contrainte du commerce électronique...

Pour vous rafraîchir la mémoire sur l'affaire qui nous préoccupe voir cette chronique pas si ancienne

Copie privée : le droit laisse la place à l'exception
01/06/2004 (www.foruminternet.org/act...

l'exception reste un droit ... bien chagrin !

"On rappellera enfin qu'à l'occasion du débat organisé le 10 septembre 2003 par le Forum des droits sur l'internet sur le thème "Internet, menace ou opportunité pour l’industrie musicale?", le ministre de la culture et de la communication de l'époque, Jean-Jacques Aillagon s'était prononcé en faveur de la possibilité pour le consommateur de réaliser des copies..."

J'ai pêché la suite pour la forme dans l'opposition (tic.parti-socialiste.fr/a... :

En s'y attaquant, alors que transposition de la directive européenne sur le droit d'auteur ne le requiert pas, le gouvernement réaffirme sa vision des citoyens en simples con-so(t)-mateurs et poursuit l'offensive contre la création entamée avec la réforme du régime des intermittents du spectacle.

Cette mesure pénalisera en effet des millions de citoyens qui ne sont en rien des contrefacteurs et se contentent de transférer des oeuvres d'un périphérique à un autre, comme la loi les y autorise.

Pour moi le dispositif de l'arrêt de la Cour de Cassation est bien triste et son apparente force rèvèle bien des compromissions...

Qu'allons nous dire à nos enfants dans 20 ans ?

CON SOT MATEUR obligé de subir des produits imparfaits qui me balancent d'injurieux messages anti-pirates en guise d'introduction aux dessins animés de mes mômes j'en appelle à la raison ...

Aux armes honnêtes citoyens brulez vos DVD
Qu'un sang impur abreuve nos sillons ;-)

Signé: Une racaille de sous-homme bien décidé à n'acheter aucun DVD plombé

25. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:10 par GroM

"porter atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, laquelle doit s’apprécier en tenant compte de l’incidence économique qu’une telle copie peut avoir dans le contexte de l'environnement numérique"

Je dois dire que je suis particulièrement inquiet par la priorité donnée par la convention de Berne et la directive en question à l'exploitation de l'oeuvre au détriment du droit à la copie privée. Dans "l'environnement numérique", cette priorité déséquilibre dangereusement en faveur des auteurs la situation puisqu'elle revient à interdire aux possesseurs d'une oeuvre numérique toute copie - et donc, à les forcer à acheter plusieurs copie d'une même oeuvre pour pouvoir en profiter sur des supports différents.

Nous allons donc passer d'un marché captif - celui du CD - à un autre marché captif - celui des produits dématérialisés DRMisés et donc incompatibles. La loi DADVSI, qui modifie l'article L122-5 du CPI pour supprimer l'exception de copie privée lorsque "l'exploitation normale" est menacée, risque donc de priver cet article de toute substance opérationnelle dans "l'environnement numérique".

Je partage par ailleurs l'avis de Paxatagore sur la portée de cet arrêt vis-à-vis du droit communautaire. Si la jurisprudence du CE interdit aux états de se prévaloir d'une directive non transposée (CE 23 juin 1995, SA Lilly France) elle autorise bien les particuliers à le faire. Dans le cas de l'arrêt Tète (CE, 6 Février 1998) on a une situation similaire à celle de cet arrêt, puisqu'un particulier invoquait à son profit une directive non transposée sur les modalités de passation de marchés publics dans le silence de la loi nationale. Je n'ai donc pas l'impression que cet arrêt soit très nouveau sous le soleil, d'autant que la cour de cassation me semble plus favorable à la supranationalité du droit que le CE.

Pour terminer, je trouve assez comique l'acharnement du producteur à interdire la copie sur VHS de ce film - un support obsolète, analogique, pour lequel il n'existe sans doute même pas d'édition officielle.

26. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:19 par alex on lune

Voilà un arrêt qui nous plonge dans les subtilités du droit communautaire et du droit d'auteur, mais aussi de la théorie générale du droit!

D'abord concernant la directive du 22 mai 2001, il faut distinguer comme vous l'avez suggéré l'application de la "simple" interprétation. Dans cet arrêt il s'agit d'interprétation et non d'application directe. Il me semble moins contestable d'interpréter un texte par rapport à une directive communautaire non encore transposée (alors que le délai de transposition est dépassé) que de l'appliquer directement, même si cela lèse les particuliers. Cependant, cette méthode juridique est criticable dans la mesure où le texte interprété et le texte interprétatif ne se situent pas du tout sur le même plan, je veux dire la copie privée issue de la loi de 1957 ne correspond ni au même système, ni aux mêmes techniques que ladite direction. Mais soit, quoi que l'on dise, le droit communautaire (textes + jurisprudences) prime sur les droits nationaux, et cette primauté ne cesse de s'amplifier. Ce qui confirme bien que droit européen et droit national ne se situent pas sur deux plans différents, mais que le premier l'emporte sur le second (comme je le soutenais à charge contre un billet ancien Eolas à propos du projet de Traité européen, rejet ;-). La méthode est pourrie dans la moëlle : hiérarchie des normes et séparations des pouvoirs obscures. Je désapprouve donc en conclusion cette méthode qui nuit à l'intelligibilité et la clarté du droit. Même Eolas (avocat) est perdu en la matière.

Concernant la référence à la Convention de Berne, la règle du triple test, celle est nécessairement destinée au législateur : elle prescrit que les règles que les législateurs édictent doivent être conformes aux trois critères. L'exception de copie privée a été instituée en ce sens et depuis lors estimée conforme.

Dès lors, le juge a deux alternatives : soit appliquer L. 122-5 CPI, soit ne pas l'appliquer, en l'estimant non-conventionnel, contraire à la Convention de Berne. Ce qu'il n'a pas fait en l'occurrence.

La Cour de cassation a décidé cette "chose" curieuse : elle a décidé d'appliquer L. 122-5 en y ajoutant les règles du triple test de la convention de Berne, ce qui a pour effet d'ajouter des conditions contraignantes au premier texte. C'est pas bien rigoureux, puisque je le répète la Convention de Berne n'a pas pour destinataires les justiciables, mais le législateur, l'Etat.

En procédant ainsi, l'exception de copie privée n'a plus qu'une portée très contingente, très relative, elle n'aura plus qu'une application dépendant des circonstances de fait économiques et technologiques, comme le révèle d'ailleurs les allusions de l'arrêt (référence aux notions d'ammortissement, ce qui est pour le moins nouveau pour un arrêt en matière en droit d'auteur). Ce faisant, la copie privée est conçue comme le fair use du copyright. Or, droit d'auteur et copyright ce n'est pas tout à fait le même système!

Enfin, imaginons, cauchemardons que le test en trois étapes "s'insère" dans la règle de copie privée, il n'est pas certain que l'espèce devait mener à la solution qu'adopte la Cour de cassation. En quoi l'absence de mesure technique de protection favorise la copie illicite si la copie n'est effectuée que pour le seul usage du copiste, ce qui était revendiqué ici ? La Cour de cassation sacrifie ici la copie privée qui est l'un des éléments structurels essentiels de notre d'auteur vers une protection excessive, per se, des mesures techniques de protection. Ce sacrifice ne se justifie pas, puisque le communiquant au public est contrefacteur, l'incrimination de contrefaçon est suffisante.

J'en terminerai pour dire que la copie privée n'est certes pas un droit, mais qui pourrait affirmer avec certitude qu'il s'agisse d'une exception ? Ne s'agirait t-il pas plutôt d'une limite ? Certains ne verraient pas de différence entre exception et limite. Il y a pourtant une différence de dégré. Le public, l'amateur a une véritable place dans le système et la technique du droit d'auteur que cet arrêt me semble mettre à mal.

En rendant la copie privée ineffective, cet arrêt aura le même effet que la LOI DADVSI : dégoûter le public de la propriété intellectuelle! Je ne suis pas sûr que David Lynch s'oppose à ce qu'aux acheteurs du dvd ne puisse effectuer une copie de sauvegarde pour la conserver, l'utiliser en d'autres lieux et sur d'autres supports.

Voilà mon avis qui ne demande qu'à être amendé, et éventuellement contesté.

27. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:19 par Flying™

Grom:
Je ne connais pas bien l'arrêt Tète en question, mais à vous comprendre, il s'agit d'un conflit entre un particulier et l'Etat: rien d'étonnant alors que l'effet direct soit reconnu à la directive non transposée.

En revanche, je répète une énième fois ce que je pense être juste, la CJCE (toujours et encore, CJCE, Faccini Dori, 1994), et à ma connaissance les juridictions françaises n'ont pas reconnu d'effet direct aux directives non transposées DANS LES CONFLITS ENTRE PARTICULIERS. Pour ne pas faire peser ces particuliers la responsabilité de la négligence de l'Etat.
L'essentiel est dans le contexte: les particuliers peuvent invoquer une telle directive contre l'Etat, non contre un autre particulier!

Or c'est le scénario particulier à particulier (ou P2P :D) qui est exposé ici. La question est de savoir s'il s'agit d'un effet direct, ou simplement d'une invocabilité d'interprétation (qui existe seul précisément en l'absence d'effet direct de la directive).

28. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:23 par Ruxor

Ce que je trouve étonnant, c'est à quel point il semble avoir échappé à tout le monde, aussi bien aux plaignants, aux défenseurs, à la cour et à tous ceux qui ont commenté les différents arrêts, et surtout au législateur qui manifestement n'a pas appris à parler français, que « droit à une copie privée » peut signifier deux choses très différentes : d'une part, (a) le fait qu'il soit légal pour le propriétaire d'effectuer une copie privée si on en est matériellement capable (l'auteur ne saurait *légalement* l'interdire) ou, d'autre part, (b) le fait, beaucoup plus fort, que le propriétaire puisse exiger qu'on ne l'empêche pas matériellement d'effectuer cette copie. Autrement dit, le sens (a) signifie que l'auteur ne pourrait pas porter plainte contre celui qui effectue une copie, alors que le sens (b) signifie que celui qui voudrait pouvoir effectuer une copie pourrait porter plainte contre l'auteur si on l'empêche d'effectuer cette copie. Manifestement, les plaignants ont compris, ou feignent d'avoir compris, la chose dans ce second sens, mais personne ne semble avoir relever l'amphibologie, et tout le monde, systématiquement, confond les deux notions. Le CPI utilise l'expression « l'auteur ne peut interdire » : qu'est-ce que c'est censé vouloir dire, ça ? Qu'il lui est interdit d'empêcher ((b)), ou bien que c'est autorisé même s'il prétend l'interdire ((a)) ?

Ce serait bien si les juristes avaient obligatoirement dans leur formation un cours de logique modale, pour pouvoir apprendre que « il est interdit qu'il soit interdit » ne signifie pas la même chose que « il est autorisé »...

29. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:30 par GroM

@Flying: je vois votre point. Je vous ai lu trop vite manifestement :-)

30. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:32 par Pierre

Le sens de l'histoire va vers un droit très restrictif et un prix des supports toujours aussi cher, ce qui ne va pas amener à la fin des logiciels p2p à moins de prendre des mesures pénales extrêmement restrictives (et effectives) ce qui m'étonnerait beaucoup, quand même.

31. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:40 par flo

GroM pointe un truc très juste. l'appréciation de contexte n'a peut-être pas été faite au mieux par la Cour : j'essaie d'imaginer comment à partir d'une cassette VHS (analogique) on pourrait mettre en réseau et diffuser massivement, je n'y arrive pas.

32. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:41 par Thalamos

Cher maître,

Je viens de découvrir votre blog et j'ai passé un week end très juridique (je ne suis pas du sérail). Chapeau bas sur l'ensemble de l'oeuvre.

Concernant ce cas précis, j'ai franchement appris que les directives européennes sont directement applicables par les juges nationaux. Sur le fond (de ce cas précis toujours), je ne vous cache pas que cela ne m'arrange pas - je ne dois pas être le seul.
Mais sur le principe, je suis assez heureux de constater à quel point l'Union Européenne, ça fonctionne au niveau judiciaire.

Quelque chose m'intrigue (j'imagine que c'est une question très bête) : il y a-t-il un recours possible à cette décision au niveau européen ?

33. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:45 par Flying™

Flo:
Rien d'impossible techniquement: un camescope numérique ou un péripéhrique de capture analogique suffisent pour cela. C'est cependant plus fastidieux que depuis un DVD ...

Ceci dit, je ne comprends pas le sens de votre question. La question posée ne serait-elle pas plutôt: la copie sur VHS menace-t-elle l'économie de la diffusion en DVD par société en charge de l'opération?

34. Le vendredi 3 mars 2006 à 22:51 par Flying™

Thalamos:
Un recours? Dans l'Union, il y a la CJCE, et elle ne peut être saisie par un particulier, seulement par un juge pour lui poser une question, donc cette voie est fermée car l'affaire est close.

Devant la CEDH? Sur quel fondement? attaquer une directive devant la CEDH? Non plus possible.

Cette décision me semble sans recours. Cependant, la jurisprudence évolue ...

35. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:02 par flo

Flying : vous avez raison, sur les deux points.

Mais je doute, comme vous sans doute, qu'un particulier prenne la peine de copier sur VHS pour ensuite se donner le plaisir de passer par un périphérique permettant de...

la question (implicite) est donc mieux formulée ainsi !

36. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:02 par tokvil

Triste nouvelle pour l'image de la france, mon prof americain de copyright avait presente l'arret de la cour d'appel comme une mini revolution. Il va etre triste quand je vais lui annoncer sa condamnation a mort.

J'ai, malheureusement un probleme, j'aimerais bien imprimer cet arret et lui donner, mais il n'est pas encore sous legifrance, et pour je ne sait quelle raison, je n'arrive pas a me connecter sur le site de la cour de cassation. Pouvez vous, m'indiquer un autre site ou je peux le trouver(sachant bien evidemment que je n'ai aps acces aux revues juridiques) merci d'avance

Tkl

37. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:14 par jules

L'interprétation "à la lumière d'une directive" existe depuis un certain temps devant la Cour de cassation. La "source communautaire en est un arrêt Marleasing rendu par la CJCE. Elle y expliquait qu'à défaut d'effet horizontal (création d'obligations au profit des particuliers), une directive doit s'imposer à l'interprétation du juge. La Cour de cassationen fait un usage assez courant aujourd'hui.

Une loi de transposition non conforme à une directive n'offrirait pas de recours interne. Seule l'hypothèse du contrôle du réglement a été admise à ce jour (me semble-t-il).

A lire avec précision le texte de la décision, il ne me semble pas que la cour d'appel ait écarté purement et simplement l'hypothèse du "droit" à la copie privée. Mais elle juge que ce "droit" n'a pas un caractère "absolu" référence directe - mais inopportune - à la formulation de l'article 544 en matière de droit de propriété.

Plus de précisions à venir lorsque j'aurai publié mon propre commentaire ;-)

38. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:18 par bigfinger

"Une directive européenne n'a en effet aucun effet juridique direct en droit interne, elle ne fait qu'imposer aux Etats membres de la transposer dans leur législation interne avant une certaine date"

Il me semble, qu'une directive devient directement invocable et applicable en droit interne passé la date prévue pour sa transposition.

39. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:26 par Flying™

bigfinger:

Tous en choeur!
Pas lorsqu'elle s'inscrit dans un conflit opposant deux particuliers! ;)

Mais il s'agit probablement plus d'interprétation conforme comme le dit Jules, palliatif à l'absence d'effet direct en ce cas. Je suis vraiment une belle quiche lorsqu'il s'agit de décrypter les sombres et obscrures pensées des juges de la Cour de cassation ...

40. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:28 par tokvil

//Pas lorsqu'elle s'inscrit dans un conflit opposant deux particuliers//

Je crois que la limitation au conflit Verticaux connais deja quelque limites. Donc faut voir

41. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:40 par Flying™

@Jules:

Hmmm? Plutôt que de limitations, la CJCE pointe plutôt vers l'extension: invocable par tous, à l'encontre de l'Etat (ED vertical), de toutes les collectivités publiques, personnes morales soumis au contrôle de l'Etat (ED vertical démembré), y compris dans des relations de nature privée, type Etat-employeur (ED vertical oblique) ... seule l'ED horizontal échappe donc à ces directives.

42. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:40 par Flying™

oups, le précédent msg était adressé à tokvil, dont le blog est très plaisant à lire :)

43. Le vendredi 3 mars 2006 à 23:44 par Flying™

Pour me faire pardonne de ce troisième message, faute d'avoir tourné ma langue 7 fois, ce sera mon dernier de la soirée

Tokvil: Il y a bien une limitation de l'effet direct vertical, c'est l'effet vertical dit descendant. Evidemment l'Etat ne peut opposer à un particulier une directive qu'il a négligé de transposer. Ce serait absurde.

44. Le samedi 4 mars 2006 à 00:29 par Laurent GUERBY

Il y a des interprétations divergentes sur cette sortie de la cour de cassation, pour les amateurs de contradiction la plus poussée est ici : www.debatpublic.net/Membe... (le titre du billet est "une dangereuse erreur" et ça parle de séparation des pouvoirs).

Et en plus pathétique avec quelques des en suspens sur les différences internationales sur les cours "suprêmes" guerby.org/blog/index.php...

45. Le samedi 4 mars 2006 à 01:17 par krysalia

suite a mon commentaire n°4, maïtre Eolas écrivait :
" ► Et après tout pourquoi pas ? Si un pouvoir peut suppléer à la carence d'un autre, autant qu'il le fasse, non ?

Eolas"

J'aurais tendance à répondre non :

J'ai tendance a voir la cour de cassation comme une cour qui juge l'application du droit, de la procédure et de la loi dans des affaires précises, et ça me fait drôle ( voire ça me titille les tripes ), de l'imaginer influant directement sur le poids des directives sur lesquelles elle se base dans le cas précis qu'elle juge.

Ah ! Je tape cette réponse et je lis plus haut : " Ce n'est pas de l'effet direct, mais le seul fondement de la cassation (pour violation de la loi) est que la directive reconnait expressément les DRM, dès lors les déclarer illicites était impossible. ( Maître Eolas ) "

Forcément c'est plus logique comme ça :
Ainsi, la cour de cassation n'a pas influé sur le poids de cette directive, mais ce surcroit de validation qu'elle lui donne n'est qu'une conséquense de la prise en compte, par la cour de cassation, de certains des éléments de cette directive.

Ca m'éclaire. Merci Maître ;)


46. Le samedi 4 mars 2006 à 07:34 par buLLes

Première réaction :

Ce blog que je visite pour la première fois (hummmmmmm les premières fois...) me fait penser à une petite expèrience vécue par une amie, il y a quelques années, sur une plage alors qu'elle lisait un livre du genre 400/500 pages, couverture blanche, ambiance nrf. Derrière elle se trouvait une famille... J'aime pas me moquer je ne dirai donc pas qu'ils étaient plus proches des Groseille que des Duquesnoy... Et la mère de dire à ces enfants "Regardez là, elle. Elle fait semblant de lire des livres sans images"...

Deuxième réaction :

Krysalia, vous ici !!!

47. Le samedi 4 mars 2006 à 08:32 par mad

Rhôôôôô,

Une application de l'effet direct des directives non transposé dans les temps a un conflit horizontal :)
Elle l'avais déjà fait dans des affaires sociales je crois, sur l'égalité homme femme....

48. Le samedi 4 mars 2006 à 08:36 par mad

Ca m'aprendra à poster sans lire les commentaires avant :)

49. Le samedi 4 mars 2006 à 08:57 par Aurélien

Que pensez vous du point de vue de Philippe Aigrain?
www.debatpublic.net/Membe...

Il considère que dans cet arrêt la cour de cassation a abussé de son pouvoir en interprétant le triple de test de la Convention de Berne. S'agissant d'un traité international il ne s'adresse pas aux juges mais au seul pouvoir législatif des Etats. La cour de cassation n'a donc pas qualité pour interpréter ce traité.



50. Le samedi 4 mars 2006 à 10:41 par YR

Bonjour,

La Cour de Cassation estime donc que le fait de vouloir effectuer une copie d'un DVD, protégé par une mesure technique, POUR UN USAGE PRIVE constitue une "atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, propre à faire écarter l’exception de copie privée". Cette Cour précise que cette atteinte "s'apprécie au regard des risques inhérents au nouvel environnement numérique" ?

La Cour n'a t'elle pas a motiver sa décision par des éléments plus probants que ce "risque inhérent" ?

Cette formulation semble indiquer que ce qui légitime l'interdiction de la copie privée en l'espèce est la POSSIBILITE d'atteinte à l'exploitation normale que constituerAIT (j'insiste sur le conditionnel) par exemple la mise à disposition du fichier numérique obtenu par copie sur un réseau d'échange de fichiers.

Quelle est cette justice qui juge PREVENTIVEMENT des infractions ? Ne faut-il pas que "l'atteinte à l'exploitation normale" (i.e. la mise à disposition effective) soit PROUVEE pour constituer un manquement à la directive ? La simple présomption de mauvais usage suffirait donc à interdire la copie privée ?

L'argumentation des anti-DADVSI considérant que la directive tient de fait les copieurs pour des délinquants en puissance me semble donc renforcée par cette décision.

YR

51. Le samedi 4 mars 2006 à 10:50 par forgeron

Ok, on n'a plus le droit de faire de copie de sauvegarde de DVDs proteges. Peut-on en contre-partie esperer rapporter un DVD qui aurait subi les outrages du temps au magasin pour un echange standard?
Je vais commencer a recenser mes DVD CC... pour voir.

52. Le samedi 4 mars 2006 à 11:06 par jules

@ Mad,

A ma connaissance, c'est un Conseil des prudhommes qui avait cru bon d'appliquer une directive à un litige entre particuliers. Ce qui n'avait pas manqué de faire gloser sur les vertus de cette juridiction.

53. Le samedi 4 mars 2006 à 11:38 par Vonric

Merci encore Me Eolas.
A la lumiere de ces explications, et au vu des récentes affaires Outreaux et maintenant DADVSI, le droit me parait de plus en plus passionant ! Il y a 15 ans, eusse-je pu lire le Journal d'un Avocat, peutre etre aurais-je choisit une fac de droit...

54. Le samedi 4 mars 2006 à 12:03 par un passant


Quelques remarques à propos du billet et des commentaires postés ci-dessus :


- les partisans de la copie privés semblaient avoir perdu de vue qu'il s'agit d'une exception, une dérogation à un droit, cet arrêt le rappelle.

- certains piliers de bars virtuels semblent s'agiter et hurlent au coup d'état des juges et à l'intrusion oppressive du droit européen antidémocratique, avec des arguments qui montrent non seulement leur totale méconnaissance des règles de droit applicable, mais, plus inquiétant, un nationalisme juridique sous-jacent et une sourde préférence pour l'arbitraire réel du pouvoir législatif et exécutif à la mise en oeuvre logique des mécanismes de l'Etat de droit censés les protéger.


- Rappelons tout d'abord que les traités signés et ratifiés par les Etats membres contiennent notamment une clause de loyauté, par laquelle les Etats s'engagent à mettre en oeuvre le droit communautaire originaire (traités) et dérivé (règlement, directives, décisions etc...)

Ceci n'est d'ailleurs qu'une simple reprise d'un principe général de droit international.

Mutatis mutandis, il existe aussi en droit interne des contrat, et figure à l'article 1134 du code civil.


- Rappelons ensuite que les juridictions sont des organes institués par les Etats pour exercer l'une des fonctions du souverain, rendre la justice. En France, le souverain étant le peuple, les décisions sont rendues au nom du peule français.

Dès lors, les obligations internationales s'adressant aux Etats doivent être appliquées par l'ensemble des organes des Etats, juridictions comprises.


- Rappelons enfin que, contrairement à une légende colportée y compris par des juristes, l'ensemble du droit communautaire est d'application immédiate, directives incluses. Une directive, dès sa publication au JOCE, fait partie du droit interne des Etats membres.

Elle impose diverse obligations aux Etats, essentiellement sa transposition ( en France, par le pouvoir législatif ou réglementaire, selon le domaine), mais pas seulement.

Et le juge interne est aussi le destinataire d'obligations existant en droit interne dès la publiation de la directive.


Ceci posé, quelles sont ces oligations ?

- un Etat ne doit pas, dans le délai de transposition de la directive, adopté des mesures de natures à rendre plus difficile par la suite la transposition de la directive
=> invocabilité "préventive"


- Lorsque le délai de transposition est écoulé, et la directive très mal ou non transposée, si cette très mauvaise ou non transposition, fautive, cause un préjudice à des particuliers en les empêchant de se prévaloir de droits clairement identifiables dans la directive et dont ils devaient bénéficier, alors l'Etat engage sa responsabilité à leur égrad et leur doit réparation.
=> invocabilité "verticale de réparation"

- Lorsque le délai de transposition est écoulé, et la directive non transposée, si des droits et obligations sont suffisament clairs et précis, et incoditionnels, alors les particuliers peuvent s'en prévaloir dans un litige les opposant à un organisme public quelconque (etat, collectivité, établissement public...) ou même un organisme privé chargé d'une mission de service public et disposant pour ce fiare de prérogatives exorbitantes du droit commun.
=> invocabilité "verticale" et "oblique" ou "verticale démembrée"

- Lorsque le délai de transposition est écoulé, le juge a l'obligation d'appliquer les dispositions de la directives aux litiges portées devant lui.

Toutefois, la directives ne pouvant créer des obligations directement à la charge des particuliers, dans un litige "horizontal" entre particuliers, le juge ne pourra pas appliquer directement les dispositions de la directive.

Il doit alors appliquer le droit national pertinent, mais en s'efforçant de rapprocher son sens de celui des dispositions correspondantes de la directive, en pratique dans la limite de ce que permet le texte national sans donner le sentiment de complètement en dénaturer le sens précédemment donné ou le sen commun.

Ceci a été posé par la CJCE en 1984 dans la décision Von colson, et c'est ce qu'a fait la Cour de cassation ici, mais ce n'est pas une nouveauté.

La cour de cassation l'a fait des dizaines de fois, et la première civile a rappelé les conditions de cette "interprétation conforme" dans un arrêt de juillet 1996 :

"Mais attendu que si le juge national, saisi d'un litige dans une matière rentrant dans le domaine d'application d'une directive, est tenu d'interpréter son droit interne à la lumière du texte et de la finalité de cette directive, c'est à la condition que celle-ci soit contraignante pour l'Etat membre et ne lui laisse pas une faculté d'option pour l'adaptation de son droit national au droit communautaire;"


Cette obligation d'interprétation conforme connait diverses limites, notamment lorsque la procédure est de nature pénale. Elle n'est alors pas applicable en raison du principe de légalité des délits et des peines et de son corrolaire, l'interprétation stricte.
(CJCE, 1996, porocédure pénale c. X)

Enfin, cette interprétation conforme revient quelquefois à tordre le texte interne à un point tel que c'en devient une application horizontale déguisée de la directive. L'arrêt Marleasing cité dans un commentaire posté ci-dessus illustre cette dérive possible de l'interprétation conforme.





Sur la convention de Berne :

L'article 55 C. pose en droit interne le principe que :

"Les traités ou accords régulièrement ratifiés ou approuvés ont, dès leur publication, une autorité supérieure à celle des lois, sous réserve, pour chaque accord ou traité, de son application par l'autre partie."


Rappelons encore une fois qu'un traité sadresse aux organes de l'Etat, dont font partie les juridctions et que si celles ci ne l'appliquent pas, elles engagent la responsabilité internationale de l'Etat.


- en application de l'article 55 de la Constitution, tel qu'interprété par les juridictions administratives et judiciaires à la suite de la décision IVG du CC en 1975, les Traités internationaux, lorsque leurs dispositions présentent les qualités nécessaires pour être jugées d'effet direct, et si la condition de réciprocité existe, doivent être appliqués par le juge interne au besoin en écartant la loi.

Le juge français fai cela couramment en écartant une loi interne au visa d'une disoposition de la CEDH.


- certains considèrent anormal que le juge interprète lui-même le texte invoqué devant lui lorsqu'il s'agit d'un traité.

En effet, autrefois, le Conseil d'Etat jugeait que ce n'était pas à lui d'interpréter un traité.

Ainsi, lors d'un contentieux en matière de droit fiscal, au hasard, le CE demandait au ministère des affaires étrangères l'interprattion à faire des disopositions d'une convention fiscale internationale.

Le Quai d'Orsay transmettait la demande précise au service qualifié du ministère du budget, lequel donnait alors son interprétation de la convention, transise ensuite par le ministère des affaires étrangères au juge, lequel s'estimait liée par le sens donné.

Curieusement, ce système aboutissait rarement à des interprétations défavorables aux thèses soutenues par l'administration.


Autant revenir au ministre-juge dans ces conditions, ce serait mois hypocrite.


Il faut vraiment ne rien connaitre au fonctionnement de la justice pour ne pas voir que la solution d'un litige dépend bien souvent de l'interpr"tation qui va être donnée aux textes applicables au litige.

Aussi, la Cour EDH a sanctionné à plusieurs reprises cette automutilation de sa fonction juridictionnelle pratiquée par le juge français.


Si certains regrettent que le juge s'estiment compétent pour interpreter un texte invoqué devant lui, qu'ils renoncent à saisir une juridiction.

Dans la suite logique des arguments développés au sujet du pouvoir législatif et des traités, je suppose que M. Aigrain est un chaud partisan des lois de validation...


Jusqu'au jour peut-être où il aura à en subir directement les conséquences...


On reproche à tort aux juges de vouloir s'"émanciper". Les magistrats ne sont souvent que d'honnêtes gardiens de la morale bourgeoise.

Et ils sont malheureusement trop souvent sensibles aux pressions extérieures, que ce soit l'opinion publique sensée être exprimée par les media, ou le pouvoir politique.

Il est vrai que lorsqu'un premier ministre vient expliquer au 20H qu'il a personnellement veillé à ce qu'un président dont la collégialité a décidé de mettre fin à la détention provisoire d'un individu (dont l'innocence pour les faits ayant motivés cette détention provisoire à laquel il a avait été mis fin a été par la suite reconnue me semble-t-il) vit sa carrière bloquée, ça n'encourage pas à l'indépendance.

On le voit dans des contentieux politiquement sensibles des étrangers (RAF/rétention) ou à l'occasion d'affaires récentes dont je ne citerai pas le nom, qui démontrent non pas l'autisme des magistrats mais leur grande sensibilité à l'air du temps.

55. Le samedi 4 mars 2006 à 12:09 par un passant

Zut on ne peut pas éditer pour corriger les fautes d'orthographe :o

56. Le samedi 4 mars 2006 à 12:30 par nap

Bonjour,

premier post.... après de longues heures de lecture de ce blog ces derniers mois, et donc (désolé de ne pas être original)... bravo et merci pour ce blog ! (le seul point négatif étant... son succès ;o) qui oblige à lire des pages et des pages de commentaires plus brillant juridiquement les uns que les autres... j'en profite donc pour remercier également ces lumineux "posteurs")

Un petit commentaire relatif à l'arrêt de la Cour de Cass. : il me semble que la jurisprudence en cette matière risque d'être "en retard d'un métro", tous comme l'étaient (et le sont encore un peu) les majors.

En effet, nous sommes encore à règlementer à outrance le support matériel... alors qu'au vu de l'évolution, le contenu n'aura plus besoin de contenant matériel, l'ensemble des échanges pouvant se faire sous la forme du téléchargement.

C'est déjà le cas en pratique, même si les majors freinent des quatre fers.

En conclusion, la réponse aux différents verrouillages des différents supports matériels pourrait être de délaisser purement et simplement ces supports matériels au profit du téléchargement.
(Dernière remarque, les échanges de fichiers ne sont pas tant défavorables aux auteurs qui pourraient être correctement rémunérés dans le cadre d'une licence globale qu'aux majors qui ont peur de voir disparaître leurs marges astronomiques).

@+
VBD
Nap

57. Le samedi 4 mars 2006 à 13:17 par phi

L'arrêt de la cour de cassation me semble, hélas, juste. Il serait grand temps que les Français arrêtent de se dire "c'est une loi idiote, mais de toute facon, personne ne las respectera" ou bien "c'est le délire de l'Europe, mais nous on aura nos lois".
La seule réplique possible est de vite transcrire la directive en imposant l'apposition sur le DVD d'un énorme autocollant "COPIE PRIVEE INTERDITE ET IMPOSSIBLE". L'empêchement de la copie n'est pas une nouveauté: depuis longtemps, certains textes sont imprimés en noir sur papier rouge, rendant la photocopie impossible. Le scandale est que l'acherteur ne soit pas prévenu.
Il faudrait aussi que les consommateurs prennent leurs responsabilités: c'est débile d'acheter un CD ou DVD si on ne dispose pas librement du contenu. L'éditeur obtient le beurre et l'argent du beurre! S'il veut des DADVSI, il devrait diviser le prix par 10, donc proposer l'oeuvre en téléchargement afin de réduire le parasitisme commercial.
Les gens prennent mal la mesure des ennuis qu'ils risquent avec les DRM. Quand on voit le nombre de plantages d'un ordinateur lambda, cela signifie que leur précieux DVD DRMisé sera inutilisable dans quelques années. Les CD non protégés pouvaient être dupliqués à volonté, avant que le support ne se dégrade; avec les BD-DRM, la moindre défaillance matérielle ou logicielle de l'un quelconque des maillons de la chaîne peut rendre toute la vidéthèque inutilisable. Si quelque virus modifie quelque donnée du lecteur BD, vous n'avez plus qu'à en racheter un autre, en espérant que les DRM vous autorisent à faire lire votre BD par un autre lecteur, ce qui à terme n'a rien d'évident. Là où il suffisait, au pire, de reformater le disque dur et de réinstaller le système, vous devrez passer par diverses formalités à la merci du bon vouloir de l'éditeur. C'est pourquoi, en ce qui me concerne, je boycotte et boycotterai systématiquement les disques "protégés".
Enfin, ce genre de loi n'a de sens et n'est viable que dans un domaine concurrentiel, ce qui est de moins en moins le cas. Il serait grand temps que les "élus" (je veux parler des apparatchiks patentés qui obtiennent plus de voix que leur apparatchik patenté concurrent) s'occupent de défendre le consommateur français contre le producteur multinational. Sans quoi il faudrait encore moins s'étonner de la montée de mouvements populistes et/ou nationalistes aux effets collatéraux imprévisibles.
L'un des grans efforts du XXème siècle a été la normalisation, qui a permis de rendre réparable tout appareil par toute personne compétente. Cela a contribué à tirer les prix par le bas, pour le bien de tous, en décourageant les tarifs trop exorbitants. C'est de moins en moins le cas dans l'automobile. Avec les DRM, ce ne le sera même plus en informatique, pourtant encore le domaine grand public de loin le plus concurrentiel.

58. Le samedi 4 mars 2006 à 14:20 par YR

La question est bien de savoir sur quels éléments de la Directive se fonde la Cour de Cassation pour estimer que l'interdiction de la copie privée du DVD concerné est légale.

Je maintiens que l'invocation de "risques inhérents au nouvel environnement numérique" sans preuve d'une réelle mise à disposition de la part du plaignant me paraît un argument pour le moins faible pour créer une jurisprudence aussi restrictive.

La conséquence de cet arrêt est que la simple possibilité de mise à disposition d'une copie du DVD sur un réseau d'échange P2P (c'est cela qui semble visé ici) constitue maintenant une raison légale suffisante pour interdire toute copie, non seulement de DVD, mais de tout support de contenu numérique ! Ce qui entraîne de fait la suppression de l'exception de copie privée tant que les réseaux P2P existeront...

Est-ce trop demander que de permettre de conserver le droit à la copie privée tel que défini avant cette Directive, c'est à dire sans limitation du nombre de copies et sans critère flou d' "atteinte à l'exploitation normale", ouvrant la porte à toutes les interprétations ? Sans refuser d'éventuelles améliorations, en direction des handicapés par exemple, comme c'est le cas dans la directive concernée.

YR

PS :
@un passant (#54) :
Merci pour ces précisions très utiles aux béotiens. J'ai compris que nous sommes en l'espèce dans un litige "horizontal".

59. Le samedi 4 mars 2006 à 14:23 par Simon

@ Eolas
Certes, maître, mon argument n'est pas forcément pertinent. Ceci étant, votre contre argument est dangereux : "Si un pouvoir peut suppléer à la carence d'un autre, autant qu'il le fasse, non ?"

Non Parce qu'à ce prix là, l'exécutif peut appliquer une mesure d'intérêt public jugé par lui mais refusé par le législatif. L'exécutif aller contre une décision de justice qui ne lui plait pas ...

Que la France soit en faute, certes, mais n'est ce pas à la Commission européenne de le dire ?? De plus, je me méfie de la supériorité du droit international, qui lui n'est pas révisable aisément ni dénonçable, et de fait est une oeuvre législative négociée entre exécutifs. Si jamais au détour d'un long accord international, un exécutif faisait passer (mais est ce imaginable en France ?? :-) ) une mesure restreignant un droit considéré comme acquis dans ce pays, les parlementaires ne pouirraient pas revenir sur ce point (à moins de dénoncer l'accord, ce qui est, nous l'avons vu récemment très compliqué).

De plus, une loi ne peut être rétroactive (sauf si je ne me trompe pas dans le domaine pénal si la peine encourue est moindre, vous m'excuserez, je ne suis pas juriste). Mais appliquer une loi qui n'existe pas encore au niveau national (parce que pas retranscrite) me semble très limite.

@ Coco
Merci de me rappeler la supériorité du droit communautaire, mais l'objection que j'émets reste valable, puisque le droit communautaire doit être retranscrit, faute de quoi la commission européenne entame une procédure de carence. C'est à la commission de revenir sur ce point, qui est de l'ordre, me semble t'il de la justice internationale.
Je pense qu'un législateur élu avec dans son programme une mesure contrevenant clairement à un engagement international du pays doit pouvoir assumer son choix, quitte à en payer les conséquences ...

60. Le samedi 4 mars 2006 à 14:32 par Simon

Précision : ... tant qu'il reste dans le domaine démocratique.
près ce sont aux électeurs de faire leur choix, et s'ils sont mauvais ... tant pis pour eux.

61. Le samedi 4 mars 2006 à 14:34 par Olivier

Et pendant ce temps, mr le ministre de la culture raconte hier chez Guillaume Durand (émission Campus qui est, je crois, en direct) que son projet de loi garantit le droit à la copie privée...

62. Le samedi 4 mars 2006 à 15:07 par Pierre

Au vu de l'amendement voté au Parlement au mois de décembre et des discussions en longueur sur la loi dont le débat a été repoussé, la Cour de cassation veut peut être signifier par cet arrêt qu'il est temps que le législateur se prononce, une provocation à légiférer dans un sens ou dans l'autre (cette jurisprudence pourrait devenir caduque rapidement...).

63. Le samedi 4 mars 2006 à 15:09 par Pierre-Selim

Olivier> c'est pas vraiment possible sachant que le "droit à la copie privée" n'existe pas.

64. Le samedi 4 mars 2006 à 15:27 par Minimal

Une autre vision qui me semble restreindre la portée de cet Arrêt :

La Cour se prononce sur la seule violation des textes de droit interne par la Cour d'Appel qui avait écarté sans motivation suffisante les moyens de protection employés:

"Vu les articles L. 122-5 et L. 211-3 du Code de la propriété intellectuelle,

Attendu que pour interdire aux sociétés X Y et Z l’utilisation d’une mesure de protection technique l’arrêt, après avoir relevé que la copie privée ne constituait qu’une exception légale aux droits d’auteur et non un droit reconnu de manière absolue à l’usager, retient que cette exception ne saurait être limitée alors que la législation française ne comporte aucune disposition en ce sens;

qu’en l’absence de dévoiement répréhensible, dont la preuve en l’espèce n’est pas rapportée ...

la cour d’appel a violé les textes susvisés ;"


LA COUR DE CASSATION n'a donc rien promulgué du tout !

Elle sanctionne simplement une Cour d'Appel qui n'a pas caractérisé un quelconque dévoiement propre à rendre frauduleux le moyen de protection technique utilisé !

L'affaire est renvoyée devant la même Cour et d'ici là le legislateur aura certainement transposé la directive dont il est fait mention !

P.S. pour paigrain concernant www.debatpublic.net/Membe...
on ne dit pas un arrêt cassant un "jugement" de la cour d'appel de Paris ( www.juritravail.com/lexiq... )


65. Le samedi 4 mars 2006 à 15:35 par Nicolas

Il y a, me semble-t-il, deux problèmes, distincts mais liés, dans cette discussion:
- les mécanismes d'application du droit communautaire
- le contrôle démocratique de ce droit communautaire

Sans vouloir faire de la peine à nos députés européens, leur poids dans les décisions, pour diverses raisons, est très faible voire nul. Cela reste un problème, même si on n'en parle plus depuis juin dernier. Je suis donc d'accord avec Simon (#59). Le fait que les juges puissent sans transposition appliquer le droit européen (ce qui, si j'ai bien compris, est techniquement le cas) pose problème non pas à cause des juges, mais à cause des mécanismes pour le moins opaques et éloignés du contrôle démocratique qui instituent ce droit européen.

66. Le samedi 4 mars 2006 à 15:57 par Flying™

@ Nicolas:

Certes, on ne se situe pas dans un idéal de production démocratique des normes, mais au final, qui gagne à voir les juges français pragmatiquement reconnaitre l'invocabilité des directives non transposées dans les délais, dans le cadre d'un conflit opposant l'Etat à un particulier?

Ce sont les particuliers, face à l'Etat! Car seuls les particuliers peuvent contre l'Etat, invoquer une telle directive. A eux de choisir s'ils voudront faire appel à cette norme pour appuyer leur argumentation. L'Etat ne pourra invoquer cette directive.

Pas très démocratique, mais non plus automatique, et enfin à la discrétion du particulier, telle est le mode d'intégration dans le droit français de ces directives laissées sur le côté de la route par le législateur .... il me semble que la solution est raisonnable, puisqu'elle jour au seul bénéfice du particulier.


Mais il est important de comprendre que ce mécanisme ne joue probablement pas dans notre affaire. Ici, il s'agirait plutot du mécanisme dit de l'interprétation conforme: lorsque plusieurs interprétations possibles s'offrent au juge national, il doit privilégier celle la plus compatible avec le droit communautaire (CJCE, Von Colson, 1984), notamment avec une directive non transposée dans les délais.

Cette technique est fondée sur deux éléments:
- la présomption que l'Etat (français en l'occurence) a eu l'intention de mettre en oeuvre cette directive.
- le fait que cette mise en oeuvre incombe à toutes les autorités, juridictions y compris.

67. Le samedi 4 mars 2006 à 16:23 par YR

@ Pierre-Selim (#63)

Vous affirmez que "le "droit à la copie privée" n'existe pas".

Pouvez-vous développer ce point de vue ?

L'article L-122-5 du Code de la Propriété Intellectuel indique pourtant que :
"Lorsque l'oeuvre a été divulguée, l'auteur ne peut interdire :
[...]
2º Les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective [...] "

Ce n'est pas une définition du droit à la copie privée ?

YR

"L'auteur ne peut interdire" ne veut pas dire "l'auteur ne peut empêcher matériellement". L'interdiction vse les conditions du contrat que souscrit l'acquéreur d'une oeuvre audiovisuelle (dont on vous impose un résumé dans plusieurs langue chaque fois que vous appuyez sur "lecture").

Eolas

68. Le samedi 4 mars 2006 à 16:27 par jf royer

Le commentaire 28 (RUXOR) me semble pertinent. Si c'est bien le cas, toute cette contoverse n'a guère d'intérêt. Donc ce ne doit pas être le cas. Mais alors pourquoi aucun juriste ne lui répond-il ?

69. Le samedi 4 mars 2006 à 16:29 par Samspit

@YR

Ainsi que cela a été rappelé dans plusieurs commentaires, il ne s'agit pas d'un droit mais d'une exception, voire limite, au monopole de l'auteur sur l'exploitation de son oeuvre.

Je pense que Pierre-Selim ne faisait que rappeller cette subtile difference.

70. Le samedi 4 mars 2006 à 16:35 par Sarah

Ne pensez-vous pas que peut-être ce n'est pas un hasard si l'examen de la loi DAVDSI a été repoussé de sorte à ce que cette décision soit rendue dans l'intérval?

JE doute fort que RDDV et son équipe n'aient pas été au courant de la date prévue pour cette décision dans une affaire bien connue et qui touche au coeur du problème de la DAVDSI.

► Votre théorie du complot mérite un prix de la paranoia. En admettant que le ministère de la culture ait pu connaître le sens de la décision avant même que les conseillers de la première chambre civile ne l'ait prise, je ne parviens pas à voir en quoi cette décision fait les affaires du ministre. Au contraire, elel risque de braquer encore plus les adversaires du projet. Et sinon, vous croyez que RDDV a quelque chose à voir avec l'assassinat de Kennedy ?

Eolas

71. Le samedi 4 mars 2006 à 17:40 par asteroid257

De toute façon, je ne saisis pas comment on peut encore croire à la copie privée quand on sait que notre cher ministre a expliqué qu'il était favorable à la mise en place de sanctions pénales contre ceux qui utilisent des logiciels permettant de faire sauter les systèmes anticopie.

Si on reprend notre possesseur du dvd du film de Lynch, ca signifie que non seulement il n'arrive pas à l'utiliser à cause du système anticopie mais qu'en plus il ne peut rien faire pour y remédier puisque en faisant sauter la protection au moyen d'un logiciel (dvd decrypter par exemple), il se rend coupable d'une contravention.

Quant à la gestion des DRM, laissez moi rire. Les gens peu au fait de ses technologies vont vite être dépassés dans leur utilisation.

Le résultat c'est que lorsque les gens seront lassés de tout ça et n'acheteront plus ni musique ni film via les canaux de distribution légaux, les "majors" auront l'air bien malins.

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asteroid257.free.fr
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72. Le samedi 4 mars 2006 à 17:57 par Juriste en herbes

"Rappelons que la cour de cassation a comme mission première d'unifier l'interprétation de la loi" Quelle est son(ses) autre(s) mission(s) ? Je croyais que c'était là sa stricte tâche.

Elle s'assure aussi que les juges appliquent bien la loi, tout simplement. Elle ne fait pas que trancher des problèmesd'interprétation de la loi. Quand elle casse un arrêt d'assises parce que le président n'a pas précisé que la décision de culpabilité a été acquise par huit voix au moins, elle n'interprète pas le CPP : elle l'applique. Elle est également compétente pour les pourvois en révision, notamment.

Eolas

73. Le samedi 4 mars 2006 à 18:11 par authueil

Cher maitre

Je vous demande un avis juridique sur un sous-amendement à un amendement gouvernemental sur l'article 7 de la loi DAVDSI, qui pourrait être déposé avant mardi midi, qui permettrait de régler la question, ainsi rédigé:

« Les mesures techniques de protection mises en œuvre par les titulaires de droits ne peuvent faire obstacle à ce que l’utilisateur puisse faire un libre usage, et notamment une copie privée, de l’œuvre ou de l’objet auquel il a accédé de manière licite. »

Merci de me faire connaitre la solidité de cette proposition, notamment vis à vis de l'arrêt de la cour de Cassation.

Quoi que dise la loi, la cour de cassation s'y pliera. Mais encore une fois, cet arrêt a été cassé parce qu'il faisait interdiction au producteur de placer toute mesure de protection sur le DVD. Si la mesure de protection permettait de réaliser une copie, il n'y aurait nulle incompatibilité entre cette jurisprudence et la loi à venir.

Eolas

74. Le samedi 4 mars 2006 à 18:45 par mad

@ Jules, #54 : légifrance cite une série de décision de la Cour sur le sujet, mais je n'ai pas été capable de trouver la date du décret de transcription de la directive "égalité homme femme" pour comparer.

mon Légifrance-Fu est trop faible :)

75. Le samedi 4 mars 2006 à 20:43 par Sarah

"Votre théorie du complot mérite un prix de la paranoia. En admettant que le ministère de la culture ait pu connaître le sens de la décision avant même que les conseillers de la première chambre civile ne l'ait prise, je ne parviens pas à voir en quoi cette décision fait les affaires du ministre. Au contraire, elel risque de braquer encore plus les adversaires du projet. Et sinon, vous croyez que RDDV a quelque chose à voir avec l'assassinat de Kennedy ?

Eolas"



Cher Eolas,
vous me faites bien rire avec votre réaction! il n'y avait aucune théorie du complot dans mon hypothèse! loin de moi toute paranoia, j'ai plutôt l'impression que vous soyez le paranoiaque...
Il ne me semble pas m'être aventurée à dire que RDDV connaissait le sens de la décision avant qu'elle ne soit rendue ni que celle-ci aurait fait les affaires du ministre.
Mais peut-être êtes-vous voyante... Sans parler de votre boutade infantile sur l'assassinat de Kennedy... Dommage, j'aimais bien votre style jusque-là. Mais peut-être votre sieste est allée de travers cet après-midi.

Le sens de ma remarque était simplement d'hypothiser que RDDV ait pu vouloir attendre le résultat de cette affaire pour connaître la position de la Cour de Cass et s'en servir pour fignoler son projet, dans un sens ou dans l'autre. C'est tout.

Voilà, je retourne maintenant à l'étude de l'origine de la grippe aviaire, virus mis au point par la PETA pour qu'on arrête de tuer des poulets...

_____________________________

"Si tu travailles avec un marteau-piqueur pendant un tremblement de terre, désynchronise-toi, sinon tu travailles pour rien." JC Vandamme.

76. Le samedi 4 mars 2006 à 21:31 par wesson

Bonsoir cher Eolas,

cet arrêt arrive à point nommé. Les esprits tordus pourront y voir une confirmation que le téléphone fonctionne toujours très bien entre le gouvernement et la justice... c'est pratique et beaucoup plus discret qu'un hélico envoyé dans l'himalaya...


Sur l'efficacité d'empêcher une copie privée d'un DVD acheté légalement, ça fait sourire. Par exemple voilà 4 jours que le film "Les bronzes 3" sont disponibles en qualité DVD à peu près partout, alors que le dvd commercial, ben on peut pas vraiment le copier puisque aux dernières nouvelles il ne doit sortir que dans 6 mois.

Pour autant que ma mémoire soit bonne, je n'ai pas connaissance d'un seul film qui n'ai pas été disponible sous 48H à compter de sa sortie en salle. Il y en as même eu qui ont été disponible AVANT leur sortie en salle (hulk, shrek, ...)

C'est dire si la multiplication des contraintes et la criminalisation totale de la copie va faire diminuer le piratage. D'un coté une industrie ou l'on vous suspecte dès lors que vous achetez, et de l'autre on peut tout avoir sans conditions. La MPAA a tué Napster ce qui a fait exploser Edonkey/Emule, 2 ans après elle saisit Razorback2 (le + gros serveur emule) qui utilisait une vielle technologie, ce qui automatiquement va stimuler les réseau décentralisés de type Kadmelia, ou il n'y a pas de serveur donc aucun endroit où frapper. Demain, Emule sera probablement interdit et filtré de partout, ce qui va permettre le développement de Mute (un peer to peer anonyme, surcrypté et pratiquement indétectable)

Le gouvernement peut bien légiférer, et la cours de cass peut bien jurisprudencer, ce n'est pas en restreignant les droits des acheteurs légaux que les chiffres des ventes vont grossir, par contre le piratage pur et simple, faute de vouloir l'encadrer pourra continuer à se développer sans réelle contraintes. C'est comme la drogue ou les prostituées, ne pas légaliser c'est développer un marché parallèle incontrôlable, et se priver des garanties que l'on pourrais apporter aux consommateurs occasionnels.

Bah, La DADVSI sera probablement votée dans l'état inacceptable dans laquelle elle est (DRM protégés, sanctions à tous les étages, milice de l'internet), et dans 2 ans les dégats seront tel que le gouvernement d'alors fera machine arrière (comme est en train de le faire l'Australie qui fut en son temps en pointe sur les DRM).

77. Le samedi 4 mars 2006 à 21:53 par YR

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► "L'auteur ne peut interdire" ne veut pas dire "l'auteur ne peut empêcher matériellement".
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Je ne comprends pas bien cette subtilité, digne d'un avocat ;o)

Si je ne peux interdire l'accès à une pièce, je ne vois pas comment on pourrait m'autoriser à la fermer à clef ? La loi serait bizarrement écrite si tel était le cas... Allez-y ! Personne ne vous interdit d'entrer... si vous le pouvez matériellement !

J'ajoute qu'avec la loi DADVSI, le fait d'utiliser une fausse clef ou d'entrer par la fenêtre, bien que l'accès à la pièce ne puisse m'être interdit, serait condamnable. N'est-ce pas marcher sur la tête ? Autant interdire l'accès à la pièce, cela serait plus clair.

Dans le cas qui nous occupe avec ce DVD, le plaignant se plaint de la présence du verrou, et on lui rétorque que de toutes façons, verrou ou pas, il n'a pas le droit d'entrer dans la pièce car cela nuirait au propriétaire des murs.

Mes comparaisons valent-elles quelquechose ?

YR

78. Le samedi 4 mars 2006 à 23:03 par lausannensis

Bonsoir Maître,

Si la jurisprudence de la CJCE n'a pas évolué, les directives n'ont pas d'effet direct entre particulier : El Corte Inglés SA contre Cristina Blázquez Rivero, Affaire C-192/94. (tinyurl.com/g6w3n).
De plus les personnes "victimes" d'un défaut de transposition d'une directive peuvent engager la responsabilité de l'Etat : Erich Dillenkofer, (...) contre Bundesrepublik Deutschland, Affaires jointes C-178/94, C-179/94, C-188/94, C-189/94 et C-190/94 (tinyurl.com/g6ojf). Je m'étonne d'ailleurs que les sociétés d'auteurs n'aient pas agit dans ce sens. En tout cas je n'ai rien entendu de la sorte.

Cela n'enlève rien au pouvoir d'interprétation de la Cour de Cassation qui interprète le droit français à la lumière des traités et du droit communautaire.

Par ailleurs, toutes mes félicitations pour ce billet très drôle :-D

79. Le dimanche 5 mars 2006 à 01:48 par vinc17

YR, même s'il y a une mesure de protection sur un DVD, tu peux toujours filmer ce qu'il y a à l'écran. La copie sera peut-être mauvaise, mais la loi n'impose pas que la copie n'ait aucune perte. Alternativement, tu peux toujours contourner la protection (cf DeCSS) pour copier.

Si la future loi interdit de contourner une protection éventuelle, ces deux moyens de copier seront malheureusement illégaux.

80. Le dimanche 5 mars 2006 à 14:50 par Naël

@ Simon :

Votre théorie du traité comme moyen pour le législatif d'empiéter sur l'exécutif est fausse...

Tout simplement parce qu'il y a deux étapes pour qu'un traité soit intégré dans le droit français : la signature (en très simplifié, l'éxécutif indique ici qu'il est d'accord pour que le traité produide des effets en droit positif) et la ratification.

Cette ratification peut intervenir soit par voie parlementaire, soit par voie référendaire. C'est donc au final soit le parlement, soit le peuple, qui a le dernier mot, puisque le pouvoir législatif peut tout à fait refuser de ratifier un traité signé par le pouvoir exécutif.

Pour information, le traité établissant une consitution pour l'europe a été signé par le pouvoir exécutif, mais le référendum a refusé la ratification.

Dès lors, dire que le mécanisme des traités internationaux porte atteinte à la séparation des pouvoirs est faux.

81. Le dimanche 5 mars 2006 à 14:54 par Naël

Simon écrit :

"Si jamais au détour d'un long accord international, un exécutif faisait passer (mais est ce imaginable en France ?? :-) ) une mesure restreignant un droit considéré comme acquis dans ce pays, les parlementaires ne pouirraient pas revenir sur ce point (à moins de dénoncer l'accord, ce qui est, nous l'avons vu récemment très compliqué)."

C'est là encore inexact.

En effet, d'une part, outre le fait que le législateur peut refuser la ratification, il existe un mécanisme de blocage quand bien même cette ratification serait opérée, à savoir la convention européenne des droits de l'homme, qui prévaut sur les autres traités.

82. Le dimanche 5 mars 2006 à 18:03 par flo

Eolas, votre réponse en #73 laisse penser que si le DRM avait permis un nombre donné de copies (pour usage privé) à partir du DVD, le résultat en cassation aurait pu être différent. En fait, il y a deux problèmes connexes : ce que dit le droit sur le droit d'auteur et la copie privée d'une part, et ce que sont techniquement les DRM. De là vient le hiatus auquel on se heurte quand on réfléchit à la décision décrite dans ce billet.

Ou alors il aurait fallu que la décision de la cour d'appel ne fasse pas interdiction de placer un outil DRM, mais mette l'accent sur le fait que ce DRM n'était pas "interopérable" avec la lattitude de copie privée laissée à l'usager.

Il est tout à fait possible que dans ce deuxième cas, la décisio nde la cour de cassation eût été autre, en effet.

Eolas

83. Le dimanche 5 mars 2006 à 19:12 par Saluki

• Les apiculteurs de Sologne se sont réunis pour considérer le tort économique que leur portait le remplacement sournois des rouleaux de cire par des hideuses galettes noires. Ils envisagent des mesures spectaculaires de rétorsion à l'encontre des fraudeurs, essaim au poing.

• Le Syndicat Unifié des Moucheurs de Chandelles a réuni tous ses délégués en AG de crise, hier à 20h50, Antenne2 était présente.
La manif est prévue demain à 14 heures: j'ai vu les banderolles, le mot d'ordre est:
"Salaud d'Edison"

Autrement dit, je souhaite bien du plaisir à ceux qui prétendent freiner ou contrecarrer un progrès (?) technique. C'est la course de la cuirasse face au calibre.

84. Le dimanche 5 mars 2006 à 19:45 par Simon

@ Naël
Certes, mais un texte peut être compatible avec la convention européenne des droits de l'homme sans qu'il puisse être souhaitable de le voir appliquer. Que je sache, les lois Perben le sont ...
Pour info, depui la CED, la France a t'elle refusé de ratifier un traité (hormis le TCE, mais, en tant que noniste, j'attends encore de voir ...) ???

85. Le dimanche 5 mars 2006 à 20:34 par Soupçon de cafard

J'aurais voulu être un juriste
Pouvoir copier en stéréo
Savoir un jour ce qui existe
En Jazz ou bien en Flamenco

J'aurais voulu être un auteur
Pouvoir chanter un peu tôt
Toutes les pensées, tous les bonheurs
Inspirées au consommateur.

Danser, bouger, brasser de l'air
Echanger mon sens de l'humour
Contre un certain sens des affaires.
Réussir et en être fier.

Me prendre pour un anarchiste
Au compte en banque d'un millionaire.

86. Le dimanche 5 mars 2006 à 22:38 par all

Le DRM est légal, mais contourner un DRM n'est pas pour l'instant illégal. Je vois ça comme ça, en attendant DADVSI bien sur.
Le "nouvel environnement numérique", à mon sens, ne signifie rien, l'exception de copie privée incluant les moyens modernes de reproduction.

87. Le dimanche 5 mars 2006 à 23:28 par nicO

Je ne peux lire tout les commentaires mais celui-ci m'a fait bondir :

"- certains piliers de bars virtuels semblent s'agiter et hurlent au coup d'état des juges et à l'intrusion oppressive du droit européen antidémocratique, avec des arguments qui montrent non seulement leur totale méconnaissance des règles de droit applicable, mais, plus inquiétant, un nationalisme juridique sous-jacent et une sourde préférence pour l'arbitraire réel du pouvoir législatif et exécutif à la mise en oeuvre logique des mécanismes de l'Etat de droit censés les protéger."

Cela m'évoque 2 choses : qu'il ne faut jamais laisser écrire les lois par les juristes mais par les politiques (cela me rappelle les joies de la commission juridiques européenne pour le brevet logiciel contre l'avis de la commission culture et de la commission économique).

Ensuite, une majorité de la France a dis non à la constitution européenne car elle ne voulait pas donner de carte blanche à des institutions lointaines qui _semblent_ complètement inféodé au lobby en place et très loin des préocupations locals. Donc quelques part, la constitution n'allait pas assez loin dans la représentation démocratiure des institutions européennes.

Or, là, on nous sort un droit supra nationnal qui sous-entend que de toute façon cela ne sert à rien de transposer car cela s'applique de toute façon. Si le pouvoir en place a des problèmes, il suffit de laisser pourrir et cela s'applique tout seul.

Je crois que certains compatriotes vont tomber de haut et vont encore plus haïr l'Europe...

► Tiens ? Revoilà un noniste qui nous refait la danse du scalp. Quitte à me répéter, le projet de TCE était indiscutablement plus démocratique que le fonctionnement opaque actuel (cohabitatiosn de plusieurs traités et plusieurs communautés). Présenter le refus du TCE comme le refus de cette complexité revient à dire que les nonistes ont préféré le très peu au peu, sous prétexte que le peu n'était pas assez. Je suis entièrement d'accord avec ça, mais c'est courageux de votre part d'assumer enfin cette incohérence.

Ensuite, rejeter le TCE ne voulait pas dire que le fonctionnement actuel allait changer (le fameux plan B, j'en ris encore), au contraire ça voulait dire qu'il va perdurer au moins dix ans. Ergo, on ne vous "sort" pas un droit supra national, vous gardez celui que vous n'avez pas voulu changer.

Enfin, si la France a dit non ainsi que la Hollande, je vous rappelle que l'Espagne, la Belgique, l'Italie, l'Allemagne, la Grèce, la Slovaquie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, Chypre, et la Slovénie ont d'ores et déjà dit oui (ce qui au niveau démographique fait plus du double de la population noniste en me comptant dedans), donc ne considérez pas trop vite que vous avez raison parce que vous êtes politiquement majoritaire. Les nonistes ne sont que les rois du bac à sable.

Eolas, toujours européen

88. Le dimanche 5 mars 2006 à 23:37 par nicO


"Ainsi que cela a été rappelé dans plusieurs commentaires, il ne s'agit pas d'un droit mais d'une exception, voire limite, au monopole de l'auteur sur l'exploitation de son oeuvre."

Je site un commentaire d'ici :
linuxfr.org/comments/6871...

<i>"C'est un jeu de mot que de dire qu'un exception à une règle ne constitue pas un droit.

Lorsqu'un policier OPJ fait une saisie lors d'une perquisition (selon les prescriptions légales), concrètement il réalise un vol aux yeux de la loi pénale, le dol criminel (volonté de soustraire un bien à autrui) et sa matérialité sont avéré. Oui mais voilà, la loi l'autorisant à le faire, il dispose d'un fait justificatif. C'est une exception à la règle. Mais c'est au final un droit pour l'OPJ d'effectuer une saisie, si tant est qu'il respecte les prescriptions légales.

Autre exemple ? Lorsqu'un individu viole une femme, si cette dernière se saisit d'une arme et le tue, concrètement elle réalise un homicide volontaire aux yeux de la loi pénale, là encore le dol criminel et la matérialité de l'infraction ne faisant nul doute. Oui mais voilà, la loi prévoit l'exception de la légitime défense, qui stipule que quiconque peut user de la force pour défendre un individu ou un bien, tant que l'intérêt sacrifié est inférieur à l'intérieur protégé (ie : on ne peut tuer pour protéger un bien matériel), tant que la défense est concomitante et proportionnée à l'agression. C'est une exception à la règle. Mais c'est au final un droit pour quiconque de se défendre, si tant est que cette défense respecte les prescriptions légales.

Donc, de fait, une exception à une règle donne un droit. Un droit encadré, certes, mais un droit néanmoins (tous les droits sont de toute façon encadrés)."</i>

► Bon sang mais c'est du n'importe quoi ! Comparaison n'est pas raison, mais là c'est pure déraison.

Le vol est l'appropriation frauduleuse de la chose d'autrui. Appropriation veut dire : "se comporter comme le propriétaire de la chose". Frauduleuse veut dire "en sachant qu'on en est pas le propriétaire". Un OPJ qui effectue une saisie sait qu'il n'est pas le propriétaire et ne se comporte pas en propriétaire. Il dresse procès verbal de la saisie, pose des scellés pour en garantir la conservation, et la chose saisie reste la propriété de son propriétaire, jusqu'à ce qu'un juge statue sur son sort (confisacation, destruction ou restitution). On est donc pas dans l'exception, mais dans le pur respect du droit de propriété.

Deuxième mauvais exemple : la légitime défense n'est pas un droit mais une exception. Un citoyen ne peut exiger de l'Etat quelque action ou abstention pour luipermettre d'exercer ce droit (exiger le droit de porter une arme par exemple). De plus, la preuve de la légitime défense pèse sur l'accusé : c'est à lui d'apporter la preuve qu'il a agi en LD, ce n'est pas au procureur de prouver en plus qu'il n'a pas agi en LD. Ce qui démontre que c'est une exception, puisque si c'était un droit, ce serait à la partie poursuivante de prouver qu'il n'a pas agi couvert par ce droit. Ce n'est pas "un droit de se défendre", la présentation exacte est : on n'a pas le droit de blesser ou tuer autrui (principe) SAUF (exception) quand c'est pour se défendre, cette défense étant limitativement définie par la loi (concomitance de l'acte et de la défense, riposte proportionnée).

Et puis il faudra m'expliquer la pertinence d'invoquer des mécanismes du droit pénal en matière de propriété littéraire et artistique. Pourquoi pas le droit de l'urbanisme pendant qu'on y est...

Eolas

89. Le lundi 6 mars 2006 à 09:40 par Yves

> atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, propre à faire écarter l’exception de copie privée

La cour s'arroge le don de divination économique? Lors de l'avènement des magnétscopes, le même raisonnement aurait pu prévaloir. Pourtant la vente de VHS préenregistrées a largemeent compensé le potentiel manque à gagner de la copie privée de films diffusé à la télé.

La justification économique du triple test est très discutable.

En plus, la cour interprète la directive d'une manière parfaitement discutable: les députés (qui ont déjà voté les amendements "licence globale") ont choisi une autre interprétation, et c'est à eux de faire la loi.

IANAL mais je partage l'avis que le cour a outrepassé ses compétences.

Quis custodiet ipsos custodes ?

Un amendement n'est pas la loi. Il ne devient la loi qu'une fois publié au journal officiel. Et l'amendement voté (qui ne sera pas conservé dans la version finale, ne rêvez pas) n'a pas pour effet de prohiber les DRM. Et la loi a toujours pour effet de les protéger. Dès lors, interdire tout DRM comme l'a fait la cour va à l'encotnre de la directive et de la loi telel qu'elle devra être votée.

Eolas

90. Le lundi 6 mars 2006 à 11:29 par Muscardin

Je partage l'avis d'YR et de Yves.

Nous avons là un bel exemple de ce que pourrait donner la transposition du test 3 étapes dans notre droit : un (non) joyeux bordel.

Je ne comprends pas que cette "atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, propre à faire écarter l’exception de copie privée" basée sur une hypothétique intention frauduleuse de l'acheteur ne fasse pas tiquer les juristes du coin...

91. Le lundi 6 mars 2006 à 14:08 par melodius

Je suis juriste, pratique cette matière, et trouve cet arrêt mauvais et, n'ayons pas peur des mots, heurtant.

En réalité, la Cour de cassation française considère que tout investissement mérite d'être protégé, et bazarde ainsi joyeusement l'édifice "droit d'auteur" et les équilibres qui le soutiennent. Le droit d'auteur ne protège pas des "investissements", mais une oeuvre, censée être originale. C'est un droit de monopole - et donc une exception au droit commun, qui est la liberté de copie - limité dans le temps et dans son étendue, puisqu'il ne saurait faire obstacle à des usages utiles à la société, et notamment l'exception de copie privée.

Relevons par ailleurs que le droit d'auteur, censé encourager la création, est aujourd'hui utilisé pour faire la guerre à l'innovation technique au bénéfice d'une industrie dont le modèle commercial est aussi dépassé que le buggy hippique. Les zélotes du droit d'auteur sont en train de pousser le bouchon tellement loin qu'on peut espérer qu'il détruiront l'objet de leur affection.

► Malgré votre argument d'autorité en ouverture, je ne partage pas votre analyse de l'arrêt de la cour. La mentio nde l'intérêt économique n'est que la reprise des stipulations de la convention de Berne, que la cour a obligation d'appliquer. (PS : j'ai rectifié votre commentaire selon vos indications)

Eolas

92. Le lundi 6 mars 2006 à 17:31 par alex on lune

Comme je le disais dans mon commentaire, le l'intégration du triple test de la convention Berne dans le raisonnement juridicaire est très contestable. Cette règle ne devrait s'imposer qu'à l'égard du législateur. On va vers une grande insécurité juridique.
De plus, le triple test,c'est pas seulement la balance d'intérêts économiques !
Je partage l'avis de mélodius.

93. Le lundi 6 mars 2006 à 18:04 par melodius

Quel argument d'autorité, cher Confrère ? ;-)

Sinon, pour le triple test, pas du tout, mais alors là pas du tout du tout convaincu. Au-delà de l'argument très juste d'Alex, que la Cour s'immisce ainsi à nouveau dans le travail législatif (la première, elle "promulguait" la DADVSI) il s'agit donc bien des intérêts "légitimes" auquel il ne peut être porté un préjudice "injustifié" (voir le texte de l'art. 9.2 de la convention de Berne). S'agissant d'une exception aussi vieille que le droit d'auteur lui-même, et d'une convention elle aussi d'un âge plus que respectable, je trouve un peu fort de café de considérer que ces conditions seraient soudainement réunies.

De plus, et j'insiste sur ce point, la ratio legis des droits intellectuels est d'encourager le progrès, or on voit que c'est précisément le contraire qui se produit. Tout le blabla au sujet des "droits de l'artiste" vient opportunément cacher le fait fondamental, qui est que ce n'est pas l'artiste, mais les intermédiaires qui sont en train de devenir rapidement inutiles grâce au progrès technique. D'où leur lobbying, qui malheureusement porte ses fruits. Et histoire de bien préciser le "lieu" d'où je parle, c'est un affreux ultra-libéral qui écrit ces quelques lignes, pas un altermondialeux en sandales et chaussettes en laine de bouc.

« c'est un affreux ultra-libéral qui écrit ces quelques lignes, pas un altermondialeux en sandales et chaussettes en laine de bouc. » Alors bienvenue, cher confrère, vous êtes ici chez vous !

Eolas

94. Le lundi 6 mars 2006 à 23:27 par loz

Toujours à propos de DADVSI, il me semble avoir lu plusieurs fois içi que ce projet de loi ne mettait pas en péril le logiciel libre.
Voici un article argumenté qui affirme me contraire : blogs.sun.com/roller/page...

Appréciez l'ironie, une des victimes ne serait autre que... Vivendi Universal !

► cet article ne démontre pas que le projet de loi met en péril le logiciel libre, mais que des amendements déposés (trois sur plus de 220) pourraient créer des difficultés à certains logiciels libres s'ils étaient adoptés. Mais le sens de la nuance n'est pas open source chez les adversaires du projet.

Eolas

95. Le mardi 7 mars 2006 à 02:03 par Sic Transit

Article très intéressant de Me Eolas, et excellent débat de tous les participants de ce post, mais très bonne réflexion de Nicolas (commentaire 15) sur le fait que "

Le déficit démocratique des institutions européennes est d'autant plus préoccupant que les tribunaux se mettent à appliquer directement les directives européennes prises avec bien peu de garde-fous démocratiques."

Et (commentaire 65) sur le risque de confondre dans nos discussions les aspect juridique et politique du débat:

"Il y a, me semble-t-il, deux problèmes, distincts mais liés, dans cette discussion:
- les mécanismes d'application du droit communautaire
- le contrôle démocratique de ce droit communautaire
(...)
Le fait que les juges puissent sans transposition appliquer le droit européen (ce qui, si j'ai bien compris, est techniquement le cas) pose problème non pas à cause des juges, mais à cause des mécanismes pour le moins opaques et éloignés du contrôle démocratique qui instituent ce droit européen."

Le droit c'est une chose, et on peut disserter avec une science experte de la conformité au droit des décisions prises.

Mais Nicolas botte en touche le sujet et soulève la question politique. Autre façon de faire rebondir le commentaire de Simon (commentaire 2), car il y a bien un problème, une incertitude et des dangers, dans la manière d'exercer aujourd'hui les pouvoirs.

A juste titre, car la conformité au droit, sans considération de la manière (toujours politique) dont il est fondé, c'est comme pratiquer des syllogismes logiquement corrects mais sur la base de prémisses absurdes.

Beaucoup découvrent ici certaines conséquences très concrètes de la construction politique actuelle de l'Europe. C'est plutôt une bonne chose : nul n'est censé ignorer la loi devrait se dire aussi de la connaissance de nos institutions.

Mais le problème politique n'en reste pas moins entier.

Ce n'est pas seulement le pouvoir législatif que l'on contourne par cet espace de pont que le pouvoir exécutif établit avec le pouvoir judiciaire. C'est aussi la question de la souveraineté populaire, car le législatif est précisément le seul pouvoir qui a directement des comptes à rendre aux citoyens.

Certaines analyses du traité pour la constitution européenne avait montré comment les institutions actuelles, et plus encore certaines dispositions du nouveau traité, non seulement n'accroissait pas de manière significative le pouvoir législatif du parlement européen (et même le diminuait en importance relative) mais créer une certaine connivence de la cours de justice européenne avec le pouvoir exécutif européen, du fait des procédures de nominations des juges.

Quand bien même tout serait parfaitement conforme à certains textes établis, le problème est réel, et il n'est pas petit.

Je ne néglige pas pour autant la discussion sur la conformité juridique, qui semble également pouvoir se discuter.

Comme le dit Pataxagore (commentaire 21),

"Pour schématiser la position de la CJCE (cour de justice des communautés européennes) : le juge national (ici, la cour de cassation) est un juge communautaire, chargé de veiller au respect du droit communautaire et à sa primauté sur le droit national. Lorsqu'un Etat ne transpose pas dans sa législation interne une directive européenne, le juge peut l'appliquer malgré tout, dès lors qu'elle est suffisament claire et précise."

Or à considérer le chapeau de la décision de la cour de cassation, cité plus haut par Me Eolas, on peut se poser la question de ce que signifie ici "claire et précise" quand on lit que :

"l’exception de copie privée prévue aux articles L. 122-5 et L. 211-3 du Code de la propriété intellectuelle, tels qu’ils doivent être interprétés à la lumière de la directive européenne susvisée, ne peut faire obstacle à l’insertion dans les supports sur lesquels est reproduite une oeuvre protégée, de mesures techniques de protection destinées à en empêcher la copie, lorsque celle-ci aurait pour effet de porter atteinte à l’exploitation normale de l’oeuvre, laquelle doit s’apprécier en tenant compte de l’incidence économique qu’une telle copie peut avoir dans le contexte de l'environnement numérique"

Car qu'est-ce qu'une exploitation "normale" sinon un terme qui ne veut rien dire sinon de renvoyer à l'idée d'une norme mais qui n'est pas ici définie.

Quand on lit ensuite que selon la cour cette "exploitation normale (...) doit s’apprécier en tenant compte de l’incidence économique qu’une telle copie peut avoir dans le contexte de l'environnement numérique", cela semble vraiment la porte ouverte à toute les interprétations. Et la voix directe vers la suppression pure et simple de toute copie privée.

Et comme l'a fait remarquer Alex on Lune (commentaire 26), la "référence aux notions d'ammortissement, (...) est pour le moins nouveau pour un arrêt en matière en droit d'auteur"

Yr ajoute à juste titre (commentaires 50 et 58):

"Cette formulation semble indiquer que ce qui légitime l'interdiction de la copie privée en l'espèce est la POSSIBILITE d'atteinte à l'exploitation normale que constituerAIT (j'insiste sur le conditionnel) par exemple la mise à disposition du fichier numérique obtenu par copie sur un réseau d'échange de fichiers."

"Quelle est cette justice qui juge PREVENTIVEMENT des infractions ? Ne faut-il pas que "l'atteinte à l'exploitation normale" (i.e. la mise à disposition effective) soit PROUVEE pour constituer un manquement à la directive ? La simple présomption de mauvais usage suffirait donc à interdire la copie privée ?"

(...)

"La conséquence de cet arrêt est que la simple possibilité de mise à disposition d'une copie du DVD sur un réseau d'échange P2P (c'est cela qui semble visé ici) constitue maintenant une raison légale suffisante pour interdire toute copie, non seulement de DVD, mais de tout support de contenu numérique ! Ce qui entraîne de fait la suppression de l'exception de copie privée tant que les réseaux P2P existeront..."

Et Yves (commentaire 89) fait enfin remarquer:

"La cour s'arroge le don de divination économique? Lors de l'avènement des magnétscopes, le même raisonnement aurait pu prévaloir. Pourtant la vente de VHS préenregistrées a largemeent compensé le potentiel manque à gagner de la copie privée de films diffusé à la télé."

Enfin Mélodius (commentaire 91 et 93) rappelle très justement ce que la décision peut avoir de heurtant eu égard à l'esprit des lois sur le droit d'auteur qui était d'équilibrer ceux de l'auteur et ceux du public :

"De plus, et j'insiste sur ce point, la ratio legis des droits intellectuels est d'encourager le progrès, or on voit que c'est précisément le contraire qui se produit. Tout le blabla au sujet des "droits de l'artiste" vient opportunément cacher le fait fondamental, qui est que ce n'est pas l'artiste, mais les intermédiaires qui sont en train de devenir rapidement inutiles grâce au progrès technique."

On connaît le fameux mot de Hugo sur lequel des deux droits devrait être sacrifié, entre celui de l'auteur et celui du public, s'il fallait choisir, sauf qu'aujourd'hui c'est celui du public que l'on choisit de sacrifier! Et même pas au nom des auteurs finalement.

96. Le mardi 7 mars 2006 à 08:30 par Croa

Il y a longtemps que nous savons que nous ne somme plus en démocratie et que, dorénavant, ce sont les lobbys de Bruxelles qui disent le droit.

► Absolument. Et pour avoir tenu ces propos, vous allez être envoyé en stage de rééducation idéologique au Groenland par la Police Politique des lobbies de Bruxelles. Merci de n'emporter que deux kilos de bagages et aucun livre. Les agents devraient défoncer votre porte d'ici trente secondes.

Eolas

97. Le mardi 7 mars 2006 à 08:49 par MadCoder

@Eolas/#94:

Le monde du libre et de l'open-source réagit souvent avec ses trippes (et non pas avec son portefeuille). C'est sa force, et c'est sa faiblesse. C'est sa force, parce que c'est une source de motivation sans fond, c'est sa faiblesse parce que ça ne rend pas souvent service au mouvement dans sa communication.

Néanmoins, DAVDSI poserait des problèmes assez rapidement pour : tout ce qui affiche des pages html (browser, client mail, etc…), les lecteurs vidéo, et les lecteurs audio. On vient de citer 4 des applications dans le top 5 des applications le plus utilisées par le grand public (et applications sur lesquelles le grand public sera le plus demandeur de DRM qui marchent !!!).

Bien sur ça ne serait pas la __mort__ pure et simple du libre, mais ça serait tout de même un énorme coup dur. Et si il ne faut parler que de sous, il y a des gens dont les résultats ne dépendent que de ce que le libre sait faire: Mandriva, SuSe, …

Donc je ne suis pas certain qu'il y ait un manque de nuance. En terme de pourcentage du nombre de lignes de code, la partie qui décode le DRM c'est sans doute beaucoup moins que le reste du lecteur vidéo. Mais pour l'utilisateur, ça l'empêche de faire 90% de ce qu'il __voudrait__ faire. Dire que ça n'est pas gênant pour le logiciel libre, personnellement, j'appelle ça de l'hypocrisie.

98. Le mardi 7 mars 2006 à 11:48 par olivier

Bon, je ne sais pas si, en temps que béotien juridique, j'ai une quelconque légitimité à m'exprimer ici. Mais compte tenu du ton général, je vais présager que oui !

J'aimerai (et c'est un comble sur le blog d'un avocat) extraire le sujet du débat juridique pour le ramener sur le terrain populaire et sociologique, quitte à plonger irrémédiablement dans le hors sujet. On peut légitimement estimer qu'en démocratie, la loi qu'applique les juges est (très indirectement) issue, sinon de la volonté du peuple, au moins de ses choix politiques (même si ce précepte est contredit tous les jours !). Donc, rendons à César ce qui appartenait à Jules ... même si l'adage n'est pas forcément vérifiable.

La révolution numérique. Beaucoup de monde dans ce débat sur le "problème" des droits d'auteurs (et SURTOUT voisins) dans la société de l'information semble occulter le fait que la planète vive, depuis quelques années, son plus énorme (et encore, le mot est faible) phénomène de société. Les évolutions de l'énergie et du transport sont réduites à de simples anecdotes si on les compare au bouleversement (dont nous ne sommes qu'aux prémices) apportés par l'Internet et les réseaux informatiques. Le partage de l'information au niveau mondial et la dématérialisation des supports est aujourd'hui un état de fait irréversible. Penser qu'une loi européenne va pouvoir aller à l'encontre d'une telle modification planétaire des comportements est une aberration sociologique. Un peu comme si le Lichtenstein décidait de fermer son espace aérien aux vols commerciaux internationaux en pensant qu'il va les faire supprimer et éviter ainsi tout risque d'accidents (oui, je sais, le parallèle est tendancieux).

Les majors. Les bureaucrates européens, les politiques français et les juges peuvent continuer à s'essouffler pour tenter de sauver un modèle économique plus opportuniste qu'inoxydable, ils ne pourront aller à l'encontre de l'évolution technologique et de l'attente qu'elle crée dans la société. Ils pourront, peut-être, permettre aux majors de sauver leur peau quelques mois, mais rien de plus. Ces dernières, pour ne pas avoir su (ou voulu) anticiper cette situation, sont vouées à subir la loi qu'elles ont défendue à corps et à cris : celle du marché. Leur modèle est obsolète. Et ce n'est pas en tentant quelques barouds d'honneur sur les DRM, les plates-formes de téléchargement ou le régime des intermittents (en France) qu'elles vont pouvoir échapper à une restructuration dure du marché. D'autres y sont passés auparavant, et des biens plus gros en terme d'emplois et de volume. Ca fera sûrement mal socialement, mais c'est inéluctable.

Les DRM. Comme l'ont expliqués certains techniciens sur d'autres billets à propos de DADVSI, pour que les DRM soit totalement efficaces, il est nécessaire que l'intégralité de la chaîne soit susceptible de permettre l'application de ces protections. Hors, ces même techniciens ont démontrée l'incompatibilité des licences GNU (ouvertes) avec les outils DRM (par définition fermés). Lorsque l'on sait qu'une immense majorité des flux transitent par des outils en licence GNU (apache, PHP, MySQL, Linux, Sun, mozzila ... pour ne citer que les plus connus), on se demande comment ils vont faire pour contourner toutes ces "failles" potentielles pour leur système. D'autant qu'ils utilisent déjà abondamment ces outils par ailleurs ! Les rendre incompatibles serait se priver d'une part de marché beaucoup trop importante et surtout, aller à l'encontre d'une évolution incontournable qui tend à rendre la technologie de plus en plus accessible. Quant à tenter de criminaliser l'utilisation de ces outils parce qu'ils permettent un contournement des DRM, c'est carrément ridicule ... et surtout ubuesque.

La théorie du grand complot. J'ai lu, de ci de là, que de grandes manœuvres étaient engagées entre les majors et les tenants de l'informatique grand public (Microsoft et Intel, principalement) pour créer, à terme, des systèmes totalement hermétiques dans lesquels il deviendrait impossible de faire des opérations non conformes aux choix de ces derniers. Certes, Palladium va dans ce sens. Mais ces systèmes deviendraient par ailleurs, à la fois contraires aux règles les plus élémentaires concernant les libertés individuelles mais génèreraient aussi (et surtout) une situation jamais vue encore en terme de position dominante et de concurrence déloyale. On touche ici aux contradictions insolubles d'une réglementation européenne qui défend Microsoft et son lecteur sur le champ des DRM tout en le combattant très âprement sur celui de l'abus de position dominante, pourtant nécessaire au bon fonctionnement de ces mêmes DRM.

Je ne vois pas comment cette évolution technologique sur les réseaux et leur utilisation pourra être contenue par quelques entreprises et quelques états compatissants. Elle est bien trop avancée et démocratisée pour qu'ils arrivent à leurs fins. Les enjeux sociologiques sont bien trop importants pour qu'ils soient sacrifiés sur l'autel du bénéfice de quelques majors (même si elles sont appuyées dans leur combat par d'autres lobbys, pour des raisons éminemment opportunistes).

En appliquant le principe du Rasoir D'Occam (certes contestable d'un point de vu scientifique strict), entre un bouleversement mondial et la modification profonde d'un système très bien implanté et une simple modification des systèmes de rémunération des créateurs de contenus de ce même système ... vous pensez sérieusement que la première hypothèse sera finalement mise en oeuvre ?

Je le concède, tout ça n'est que mon avis. Avis forgé à la lumière de 25 ans passés à faire passer mes entreprises au travers de tous les pièges tendus par les différentes évolutions. 25 durant lesquels j'ai appris qu'il était vain de vouloir aller à l'encontre des attentes de ses clients.... même (surtout ?) les moins intéressants en terme de rentabilité.

Merci de m'avoir laissé un espace d'expression, qui, en tant que non bloggueur, est le bienvenu.

99. Le mardi 7 mars 2006 à 13:55 par dee2

Ça ne m'étonne pas finalement ce billet, le © vaincra toujours à la fin ! Mais finalement ça ne me dérange pas si on en profite pour supprimer toutes les taxes attachées aux supports vierges en raison du soi-disant « droit à la copie privée - si vous y arrivez ».

À quand une action d'envergure pour récupérer cette taxe injustement perçue vue les jurisprudences et lois qui se dessinent précisèment ? Et serait-elle possible légalement ?

100. Le mardi 7 mars 2006 à 15:54 par Xuelynom

J'ai du lire plusieurs fois le paragraphe commençant par "attendu que pour..."

Je ne l'ai toujours pas bien compris.

Je suppose que pour un avocat, la structure doit sembler logique et que le cerveau avocatical remet en ordre les différentes subordonnées et appartés, mais pour un cerveau d'homo sapiens sapientis, c'est ardu...
Pourquoi ne pas faire une réforme de la justice qui transforme le texte en plusieurs phrases simples?

101. Le mardi 7 mars 2006 à 15:54 par Popo

Olivier, à force de raconter n'importe quoi, on finit par desservir la cause que l'on défend.

Un fichier DRM-isé, c'est d'abord du contenu (audio, vidéo, les recettes de ma grand-mère, n'importe quoi) qui a été crypté de manière sophistiquée. Il n'est pas possible d'accéder au contenu d'un fichier DRM sans avoir une clé de décodage, qui se trouve généralement ailleurs (dans un fichier de licenses).

Les logiciels que tu cites n'ont aucun mal à transférer des fichiers DRM-isés, car ils n'essaient pas d'en extraire le contenu. Donc, pas la peine de modifier Apache, PHP, Mozilla, etc... De plus, cela ne compromet en rien la sécurité du système.

Là où les choses se gâtent, c'est lorsqu'il faut bien sortir le contenu pour le faire apparaitre dans le monde réel, c'est à dire vers nos chastes oreilles ou nos jolies mirettes.

Par exemple, les données d'un DVD sont cryptées à l'aide d'un algorithme assez faible appelé le CSS. Le but de cet algorithme n'est *pas* d'empêcher la copie, car rien ne t'empêche de copier les données cryptées, voire même de les graver sur un DVD double-couche. C'est d'ailleurs ce que font les pirates à grande échelle, c'est à dire ceux qui possèdent des usines en Chine et arrosent la plupart des pays dits
"émergents".

CSS, qui est une forme basique de DRM, permet de contrôler qui a le droit de "lire" les données. Le cartel qui régente le format DVD ne veut pas que n'importe qui puisse accéder aux données vidéos brutes, donc il impose aux fabriquants de lecteurs de DVD des restrictions drastiques, et refuse même certaines implémentations.

C'est pour cela qu'il n'est pas légal de lire des DVDs sous Linux aux USA, car cela nécessite de faire sauter la "protection" du CSS, chose prohibée par le DMCA, qui est l'inspiration de la directive EUCD. Il n'existe en effet aucun logiciel légal sur cette plateforme approuvé par le cartel qui permette de le faire dans le respect de la loi dans ce pays.

En France, c'est encore permis, et c'est justement ce que fait le logiciel open-source VLC, développé en bonne partie à l'Ecole Centrale. Si le même genre de restriction légale apparaît dans notre législation (impossible de faire péter les DRMs), il faudra retirer la fonctionnalité
"lecture des DVDs" de ce logiciel, parce que certaines personnes pourraient être amenées à utiliser ce code pour faire des DIVX.

A vrai dire, il faudrait aussi retirer pas mal d'autres trucs, et tu seras
aussi certains que les futurs formats multimédia seront *tous* DRM-isés, et complètement impossibles à lire légalement sous Linux.
Ce ne peut être que pour le bonheur de Microsoft et Apple, qui se disputent le monopole du DRM; car tout le monde sait que le marché
explosera quand l'interopérabilité existera; malheureusement, ce ne peut arriver que par la disparition d'un des deux DRMs, ou alors un carcan législatif qui mettrait tout le monde d'accord.

Noter aussi que c'est aussi grâce à CSS que les fournisseurs de contenu peuvent imposer des restrictions, comme les "régions" bien connues qui empêchent de lire un DVD américain sur un lecteur Européen. Encore une fois, cela n'a rien à voir avec la copie elle-même.

102. Le mardi 7 mars 2006 à 16:43 par En direct de l'assemblée

AMENDEMENT N° 272

présenté par

le Gouvernement


ARTICLE ADDITIONNEL

APRÈS L'ARTICLE PREMIER, insérer l'article suivant :

"L'article L. 122-5 du code de la propriété intellectuelle est ainsi modifié :

I. - Le dernier alinéa du 3° est supprimé."

..."cet amendement transpose en droit français le « test en trois étapes », principe essentiel du droit de la propriété littéraire et artistique européen et international énoncé à l'article 5-5 de la directive, et conforme aux traités de l'OMPI relatifs au droit d'auteur et aux droits voisins et à l'accord sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). Ce principe, déjà appliqué par le juge, fixe les limites des exceptions au droit d'auteur et aux droits voisins : celles-ci doivent constituer des « cas spéciaux » et ne pas porter atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre ni causer un préjudice injustifié aux intérêts légitimes des titulaires de droits."

103. Le mardi 7 mars 2006 à 17:20 par Olivier

@Popo

<<
Un fichier DRM-isé, c'est d'abord du contenu (audio, vidéo, les recettes de ma grand-mère, n'importe quoi) qui a été crypté de manière sophistiquée. Il n'est pas possible d'accéder au contenu d'un fichier DRM sans avoir une clé de décodage, qui se trouve généralement ailleurs (dans un fichier de licenses).

Les logiciels que tu cites n'ont aucun mal à transférer des fichiers DRM-isés, car ils n'essaient pas d'en extraire le contenu. Donc, pas la peine de modifier Apache, PHP, Mozilla, etc... De plus, cela ne compromet en rien la sécurité du système.
>>

Mon propos n'était pas de parler de technique, mais puisque tu m'interpelles sur le sujet, allons-y.

Je te concède volontiers qu'apache (seul) ne constitue pas un danger. Mais apache peut utiliser PHP comme module. Hors PHP est un langage de programmation permettant, par exemple, d'ouvrir un fichier, de transformer son contenu et de le restituer sous un format différent. Rien de moins que ce qui est nécessaire pour contourner un DRM. Comme PHP ne permet pas de créer des "logiciels" autonomes (compilés) mais simplement des scripts interprétés par son moteur, une loi déclarant les outils contournant les DRM illicites, serait susceptible, en étant appliquée très strictement, de déclarer PHP (et donc son hôte apache) comme faisant partie de ces logiciels illicites. Contrairement aux outils de programmation (et aux serveurs) fermés sur lesquels il serait parfaitement envisageable d'intégrer des systèmes contrôlant l'ouverture des fichiers DMR-isés et d'en limiter leur utilisation.

D'autre part, ce paragraphe tenait plus à mettre en avant le fait que, dans la sphère GNU, cohabitaient des logiciels qu'ils utilisent pour faire transiter et vendre leurs fichiers (en faisant de grosses économies) avec d'autres susceptibles de mettre en danger l'intégrité de leurs protections (en cohabitation très étroite parfois). En d'autres termes, ils veulent le beurre et l'argent du beurre en faisant la guerre (par l'intermédiaire de lois telles que DADVSI) aux seconds tout en profitant des premiers. Cette position ne me semble pas être tenable à long terme compte tenu des liens resserrés unissant la communauté open source.

104. Le mardi 7 mars 2006 à 17:35 par v_atekor

La réflexion de Olivier est valide dans le cas d'un ammendement proposé par (dit "VU/Sacem" ) qui propose la vérification de contenu des échanges faits par réseau via les DRM. Ce qui suppose que les logiciels d'échanges (ftp, http) doivent être modifiés et pouvoir interpréter ces échanges en terme de droits (ce qui suppose un déchiffrement du DRM)

Celà ne concerne que certains ammendements.

105. Le mardi 7 mars 2006 à 19:21 par YR

7mars, 19h20 : il est question de cette décision à l'assemblée !

YR

106. Le mardi 7 mars 2006 à 21:16 par Paul TOTH

Bonsoir,

Je suis analyste programmeur et absolument pas juriste...mais il y a quelque chose qui me gène dans tout ce débat.

D'une part, les protections techniques, aussi sophistiquées soient-elles, n'empecheront pas le piratage des oeuvres. Pour dé-DRM-isé une oeuvre, il suffit d'avoir le logiciel officiel pour sortir le flux de son enveloppe, et mettre en place ce qu'il faut pour recapturer le flux dans un format non DRMisé (au pire, et pour faire simple, en collant une caméra devant l'écran du PC). ça serait totalement illégal, mais ça ne le serait pas plus que de télécharger une oeuvre sous copyright en p2p en prétextant en faire une copie privée, la belle blague ! Et vu qu'on va vers des peines plus "acceptables" pour le pirate, je ne vois pas pourquoi il s'en priverait !

D'autre part, mettre en place une protection technique interdisant la copie privée d'un DVD - dont on a fait l'acquisition - sous la seule raison que cela permettrait de le diffuser sur les réseaux p2p, me semble être un procès d'intention, ce qui ne tient pas juridiquement me semble-t-il, non ?

Finalement pour ce qui est des logiciels libres, la DRMisation des oeuvres me semble plus douteuse qu'il n'y parait. Imaginons que Maitre Eolas décide d'assurer ses droits d'auteurs sur son Blog en le DMRisant...seuls un navigateur capable de valider son contenu pourra le visualiser, et il sera donc propriétaire.

Moi si je m'apelle Bill, demain je diffuse gratuitement le navigateur SecureSurf qui vous garantie une navigation en toute tranquilité sur des sites au contenu identifié...identifié par un module gratuit de IIS que tout le monde pourra utilisé pour DRMisé son site Web...j'ajoute à cela l'argument d'une garantie de protection antivirale jusque là jamais égalée, des services en lignes pour acheter les oeuvres sous copyright...et 10 ans après le ratage de Microsoft Network ( fr.wikipedia.org/wiki/Mic... ), je fais la nique à Internet et vire les concurants libres.

A mes yeux, le débat sur le DRM est tout sauf une question de droits d'auteur.

107. Le mardi 7 mars 2006 à 21:16 par Popo

@Olivier:

Ah ce niveau, je me demande si c'est du délire ou autre chose:

<<<
Comme PHP ne permet pas de créer des "logiciels" autonomes (compilés) mais simplement des scripts interprétés par son moteur, une loi déclarant les outils contournant les DRM illicites, serait susceptible, en étant appliquée très strictement, de déclarer PHP (et donc son hôte apache) comme faisant partie de ces logiciels illicites.
>>>

Tu t'emportes beaucoup là. Une loi qui interdit simplement de contourner les DRMs ne peut avoir les conséquences que tu décris. Car si on suit ton raisonnement jusqu'au bout, *n'importe* quel langage de programmation, voire *n'importe* quel programme contrôlé par un utilisateur, étant capable d'envoyer/recevoir des fichiers via l'Internet devrait être modifié. Ca ne se limite certainement pas à Apache + PHP, et encore moins à l'Open Source.

En gros, quasiment *tous* les softs existants disposant d'une quelconque connectivité devraient être modifiés pour intégrer ces DRMs "magiques", à moins de devenir hors la loi. Que ce soit Apache ou bien Windows, Java, .NET, Python et j'en passe....

Et tu ne pourrait pas faire une modification sans être certain qu'elle ne peut absolument pas offrir la moindre potentialité de possibilité de contournement d'un quelconque DRM par un utilisateur averti.

Après tout, ROT13 est un algo de cryptage utilisé pour "protéger" des eBooks. Si tu interdis à tout langage de programmation d'implémenter un algorithme aussi simple (on décale chaque lettre de l'alphabet de 13 places !) parce qu'il a juste le potentiel d'être utilisé pour casser un malheureux DRM, tu te prives en gros de toute machine de Turing, donc des fondements de l'informatique telle que nous la connaissons de nos jours.

C'est un peu comme de décréter que tous les moteurs à explosion sont désormais interdits, sauf s'ils sont modifiés pour fonctionner au purin.

Ca ne risque pas d'arriver pour des raisons pratiques, économiques et même politiques, si nous sommes le seul pays à faire une telle chose.

Et si un tel amendement, avec l'interprétation que tu en donnes, existe, je suggère fortement à son auteur de se recycler dans l'écriture des aventures de "caca-boudin, l'étron copain des enfants"; ça correspondra bien mieux à la juste mesure de ses talents.



108. Le mardi 7 mars 2006 à 23:06 par Mat

Juste une petite précision que je ne pense pas avoir lu dans les autres commentaires, excellents par ailleurs tout comme les articles de notre cher eolas.

L'une des premières applications par la cour de cassation d'une directive communautaire, avant sa transposition, concerne celle relative aux produits défectueux.

La cour avait, là aussi, interprété le droit français à la lumière de la directive.

Cela date maintenant d'une dizaine d'années, mais peut-on voir un mouvement de fond de la cour d'appliquer sans hésitations des textes en défaveur des consommateurs, alors qu'elle aurait pu favoriser le débat parlementaire.

109. Le mercredi 8 mars 2006 à 09:25 par Olivier

@Popo

Est assimilé à un délit de contrefaçon :

>1° Le fait, en connaissance de cause, d'éditer ou de mettre à la disposition du public, sous
>quelque forme que ce soit, un logiciel manifestement destiné à la mise à disposition non
>autorisée au public d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit littéraire et artistique qui ne
>comprend pas les mesures pour, en l'état de la technique, préserver ces oeuvres ou objets
>protégés contre un usage non autorisé.
>
>2° Le fait d'éditer ou de mettre à la disposition du public, sous quelque forme que ce soit,
>un logiciel autre que celui visé au 1° ci-dessus, dès lors que, ayant connaissance de ce
>que ledit logiciel est manifestement utilisé pour la la mise à disposition non autorisée au
>public d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit littéraire et artistique, l'éditeur n'a pas
>pris les mesures pour, en l'état de la technique, préserver ces oeuvres ou objets protégés
>contre un usage non autorisé.
>
>3° Le fait, en connaissance de cause, de promouvoir directement la mise à disposition du
>public sous quelque forme que ce soit ou l'utilisation d'un logiciel visé au 1° et 2° ci-dessus.
>
>4° Les dispositions ci-dessus s'appliquent sans préjudice de l'application des dispositions de
>l'article L121-7 du Code Pénal et de celles proprres à la loi du 21 juin 2004.

Voilà l'amendement ...

Le paragraphe 2 exprime bien le fait qu'un logiciel utilisé pour contourner les DRM (même s'il n'est pas conçu pour ça) et pour lequel aucune mesure ne serait prise deviendrait illicite. Dans le cas d'un logiciel open source, détourné de son usage initial, aucune mesure ne pourra être prise (du fait de la licence et non de la technique) ce qui aurait pour effet de le rendre "hors la loi".

Je serais curieux de voir, dans le cas où php serait utilisé à de telles fins, comment ils comptent s'y prendre pour rendre illicite un logiciel qui fait tourner près de 50% des sites de la planète et qui n'est rien d'autre qu'un module d'un autre logiciel (apache) qui, lui, en fait tourner près de 90% !! quand on sait que tous les sites du gouvernement sont développés sous SPIP (à base de php) c'est ubuesque non ....

D'allieurs, mon propos initial était de dire que tout ça n'a aucune chance de régler le problème. Une loi qui tente de lutter contre une évolution technique majeure dejà très implanté et qui est, en outre, un phénomène de société, n'a aucune chance d'être applicable !

Je pense qu'on va quitter le débat technique qui n'étais pas du tout mon propos au départ.

110. Le mercredi 8 mars 2006 à 13:09 par coco

Simon (commentaire 59)

"@ Coco
Merci de me rappeler la supériorité du droit communautaire, mais l'objection que j'émets reste valable, puisque le droit communautaire doit être retranscrit, faute de quoi la commission européenne entame une procédure de carence. C'est à la commission de revenir sur ce point, qui est de l'ordre, me semble t'il de la justice internationale."

Il existe un ordre juridique propre, l'ordre juridique communautaire. On ne peut pas tabler sur le recours exclusif à la procédure de carence pour s'assurer que le droit dérivé est effectif (le droit dérivé étant particulièrment développé). Autrement, ce droit et notamment les directives seraient, en pratique, vidées de leur susbtance.

D'autant que la plupart des directives sont très claires et très précises (pensez à la directive Bolkestein :-)), souvcent, d'ailleurs, bien pus précises que certaines dispositions de la convention européenne des droits de l'homme, laquelle est appliquée directement devant nos juridictions.

La transposition dans ces cas c'est quoi? Un copié / collé des dispositions claires et précises de la directive. Point à la ligne. Arrêtons de prendre des airs de vierges offensées quand une application est faite de ces dispositions (sous convert d'interprétation conforme).

En d'autres termes je trouve ridicule de refuser l'interprétation conforme à une directive dont le délai de transposition est passé, quand ladite directive comporte des dispositions extrêmement claires, précises, qui n'auraient pu qu'être COPIEES/COLLEES dans la loi (car enfin c'est bien de cela qu'il s'agit en l'espèce!!!).

Si les dispositions ainsi copiées / collées déplaisent, il ne fallait pas pondre ce texte, et là les gouvernements sont responsables, pas les juges.

"Je pense qu'un législateur élu avec dans son programme une mesure contrevenant clairement à un engagement international du pays doit pouvoir assumer son choix, quitte à en payer les conséquences ..."

Et...?

Bon au-delà de ce que vous dites, et à la lecture des différents commentaire, de gros problèmes se posent du fait du caractère quelque peu ovniesque du droit communautaire. L'UE est une organisation internationale qui pond des textes applicables dans ses Etats membres. Donc il y a une trappe quelque part.

Mazeaud (député me semble-t-il) avait déposé en 1996, si mes souvenirs sont bons, un projet de loi visant à instaurer un contrôle de constitutionnalité des actes de transposition du droit dérivé de l'Union. Tollé général chez les spécialistes de droit européen : un tel projet aurait vidé de substance l'effectivité de l'ordre juridique communautaire. Si les objections faites à cette proposition étaient dans l'ensemble parfaitement pertinentes et fondées, il reste que Mazeaud a posé un problème bien réel qui n'a, à ma connaissance, pas encore trouvé de solution.

A ce jour, les institutions de l'Union peuvent donc pondre des textes non conformes aux différentes déclarations de droits que connaissent les Etats (sous réserve des PGD dégagés par la CJCE).

111. Le mercredi 8 mars 2006 à 16:33 par Stéphane

<spam on>
Avis de Berryer sur berryer.info
Le 30 mars, invité Michel Boujenah, heure et lieu habituel. Invitation demandé à l'entrée.
<spam off>
[ le 4ème secrétaire cherche des candidats, présentez-vous et venez nous parler du dadvsi ? ]
Merci
Stéphane

112. Le mercredi 8 mars 2006 à 16:34 par Stéphane

<spam on>
Avis de Berryer sur berryer.info
Le 30 mars, invité Michel Boujenah, heure et lieu habituel. Invitation demandé à l'entrée.
<spam off>
[ le 4ème secrétaire cherche des candidats, présentez-vous et venez nous parler du dadvsi ? ]
Merci
Stéphane

113. Le mercredi 8 mars 2006 à 23:31 par Popo

@Olivier

je ne comprends pas ton interprétation de l'amendement. Il parle bien d'un logiciel qui est "manifestement utilisé pour la mise à disposition non autorisée d'oeuvres protégées, blablabla"

PHP, tel qu'il est installé sur les serveurs web ne fait pas partie de cette catégorie; il faut en effet installer un script spécial pour par exemple faire péter les verrous du DRM, et c'est ce dernier qui est visé par un tel amendement, pas le langage de programmation utilisé pour le faire tourner. On est donc très très loin de la situation catastrophique que tu décris.

En revanche, c'est un amendement qui signe l'arrêt de mort de la lecture d'une partie du code de VLC, ce qui signifie que lire ses DVDs sous Linux deviendrait automatiquement illégal en France, comme il l'est aux Etats-Unis.

C'est sans doute ce que notre ministre veut dire par promouvoir l'interopérabilité :-)

Autre horreur de ce "manifestement" bien trop ambigü. Est-ce qu'un programme comme Emule ou Bittorrent serait considéré comme illégal ?.

Ces derniers peuvent, et sont, tous les deux utilisés pour distribuer légalement du contenu (ex: distributions Linux, musique libre, etc...), bien qu'un grand nombre d'utilisateurs les utilisent à des fins bien moins reluisantes.

En d'autre termes, est-ce l'utilisation qu'en font les utilisateurs, plutôt que la technique, qui déterminerait la légalité du logiciel ? Si c'est le cas, c'est la porte à tous les abus d'interprétation.

Donc, je reconnais comme toi que c'est un amendement mauvais, mais je ne veux pas que l'on se trompe de cible en le critiquant.

114. Le jeudi 9 mars 2006 à 08:16 par Olivier

Cet ammendement met directement tous les logiciels P2P hors jeu, c'est d'ailleurs le but recherché par ses auteurs. Un premier "contre coup" toucherait les lecteurs open sources. D'autres pourraient arriver, si on appliquait à la lettre cet amendement. Une mise à l'écart des soft P2P tendrait à l'utilisation d'autres systèmes pour le partage (Messagerie instantannée ...). Qu'en adviendrait il si nombre de pratiques illicites étaient prouvées sur ce type d'outils ?? Et les milliers de serveurs apache hebergeant des fichiers illégaux ? et les milliers de serveurs FTP permettant de les uploader ? Et les milliers de serveurs de mail les faisant tansiter en pièce jointe ? Bref, tout le système est potentiellement capable (et l'est déjà fortement) d'être utilisé de manière illégale vis à vis de cet amendement, ou d'autres, aussi fantaisistes.

Quant à PHP, ton raisonnement serait valable si il créait des soft autonomes. Hors, un script php n'est rien sans l'interpréteur. C'est ce dernier qui "opère" sur les instructions du script. C'est donc ce dernier qui pourrait effectuer des opérations potentiellement illicites sur des fichiers DRM-isés.

Mais bon, gageons que nos représentants ne seront pas assez fous pour permettre une telle bétise.

D'ailleurs, et je lance un petit appel aux personnes compétantes, qu'en est il des transpositions de l'EUCD dans les autres pays ?? Quel est leur position vis à vis de ce problème très épineux que représente l'autorisation des DRM sans encadrement ?

115. Le jeudi 9 mars 2006 à 09:14 par Popo

<<<
Et les milliers de serveurs apache hebergeant des fichiers illégaux ? et les milliers de serveurs FTP permettant de les uploader ? Et les milliers de serveurs de mail les faisant tansiter en pièce jointe ? Bref, tout le système est potentiellement capable (et l'est déjà fortement) d'être utilisé de manière illégale vis à vis de cet amendement, ou d'autres, aussi fantaisistes.
>>>

Je ne vois pas comment tu peux en déduire que Apache ou un serveur FTP sont des programmes "manifestement destiné à la disposition non autorisée au public d'oeuvres protégées". Contrairement au P2P, il y a des millions de serveurs qui ne sont pas utilisés pour télécharger et uploader illégalement des "oeuvres".

<<<
Quant à PHP, ton raisonnement serait valable si il créait des soft autonomes. Hors, un script php n'est rien sans l'interpréteur. C'est ce dernier qui "opère" sur les instructions du script. C'est donc ce dernier qui pourrait effectuer des opérations potentiellement illicites sur des fichiers DRM-isés.
>>>

Ben non, parce que même un programme comme PHP n'est rien sans le processeur qui l'exécute. C'est ce dernier qui "opère" sur les instructions de PHP qui lui-même suit les inscriptions du script en les transformant à sa manière. Avec un raisonnement pareil on en revient à bannir toute l'informatique.

A part ça, on est d'accord, ce genre d'amendement signifie la criminalisation de certains logiciels P2P, et la mort d'une partie du code de VLC. En revanche, il faut arrêter le délire sur la mort de l'open-source en général.

Evidemment, les pirates n'en ont rien à foutre, ils continueront à utiliser des programmes dans l'illégalité pour continuer leurs activités. Tout cela n'est qu'une pantalonnade ridicule, un match perdu d'avance, qui n'est là que pour confirmer les marges monumentales des majors avant qu'elles ne se lancent sérieusement dans le business du téléchargement légal en le contrôlant le plus possible.

116. Le jeudi 9 mars 2006 à 10:38 par Foxapoildur

Eolas tu postes sur le blog de Laurel ! Je ne te connaissais pas ce côté midinette. Hi! Hi!

117. Le jeudi 9 mars 2006 à 11:54 par Paul TOTH

Techniquement parlant, il n'y a pas de différence entre FTP, HTTP et le P2P, dire que l'un est illégal revient à dire que l'ensemble est illégal.

BitTorrent (qui est du P2P) est par exemple de plus en plus utilisé pour télécharger des fichiers totalement légalement par des sites comme www.jeuxvideo.com qui soulage son serveur par le P2P pour le téléchargement de jeux en version démo.

On trouve des "ROM" (des copies de jeux pour console) sur des sites Web, cela ne rend pas les sites web illégaux. Tout comme je peux mettre en place un traffic de logiciels piratés par la poste, ça ne rend pas l'envoie de colis illégal pour autant.

Par contre, rendre obligatoire la validation par DRM du contenu téléchargé met les logiciels OpenSource hors course pour une question d'incompatibilité de license. Par le même occasion on vire Linux, plateforme qui tourne majoritairement avec des solutions OpenSource, et comme je le disais précédemment on déroule le tapis rouge devant Bill.

118. Le jeudi 9 mars 2006 à 13:02 par Popo

@Paut Toth

Je ne vois pas d'où vous sortez qu'il n'y a pas de différences techniques entre FTP, HTTP et P2P. On les utilisent tous pour transférer des fichiers, mais la façon dont tout cela se produit (la technique, pas l'usage) varie énormément d'un protocole à l'autre.

Le problème qui se pose est l'interprétation du terme "manifestement" qui est particulièrement malheureux dans un tel amendement, car terriblement ambigü. J'aimerai beaucoup qu'un juriste puisse nous donner des précisions sur les limites d'interprétation d'un tel mot.

Comment un juge va-t'il être à même d'interpréter ce "manifestement" lorsque Vivendi Universal demandera l'interdiction pure et simple de BitTorrent en France, par exemple ?

119. Le jeudi 9 mars 2006 à 13:58 par Olivier

Comme je l'ai dit plus haut, je ne suis pas juriste. Néanmoins, pour ma part, la lecture est assez simple :

>"...dès lors que, ayant connaissance de ce que ledit logiciel est manifestement utilisé pour la
>mise à disposition non autorisée au public d'oeuvres ou d'objets protégés par un droit littéraire
>et artistique..."

semble vouloir dire, à mes yeux :

>"...dès lors que, ayant connaissance de ce que ledit logiciel est *de manière non
>contestable* utilisé pour la mise à disposition non autorisée au public d'oeuvres ou d'objets
>protégés par un droit littéraire et artistique..."

Voilà pourquoi j'ai dit dans mon message initial que la mise en place d'une telle législation sur les DRM était ridicule, voire ubuesque, compte tenu du nombre important de logiciels régissants les transactions internet répondant à cette définition. Ces logiciels étant pour la plupart open-source il serait impossible de les modifier pour éliminer ce problème, ce qui les rendrait illicites. Ceci dit, cet amendemant n'est pas encore voté, bien que l'attitude du ministre de l'intérieur laisse à penser que dans le camp du gouvernement, on souhaite franchement son adoption ! (archquo.nouvelobs.com/cgi...

120. Le jeudi 9 mars 2006 à 14:07 par Paul TOTH

@Popo

c'est pourtant simple, les trois protocols sont des protocols de transfert de fichiers, c'est comme si l'on prétendait que de parler français c'est plus ou moins bien que de parler anglais.

Le peer to peer est une inovation technologique permettant de partager la charge du téléchargement d'une ressource entre plusieurs ordinateurs clients au lieu de la concentrer sur le seul serveur source. Si on rend cette technologie illégale, on peut aussi bien rendre ADSL2+ illégal en prétextant que seul le téléchargement massif d'oeuvres illégales justifie un tel débit.

prenons un autre exemple, les serveurs de news, faut-il rendre le protocol NNTP illégal ? Il existe en effet actuellement des serveurs de news dit "binaires" hébergés par des fournisseurs d'accès qui contiennent des fichiers sous copyright en toute illégalité. La pratique moins connue du grand public ne la rend pas plus légale, et le fait que l'hébergeur soit le fournisseur d'accès le rend complice (je suppose) au même titre que lorsqu'il héberge un site Web illégal - ce n'est pas l'hébergeur qui place les fichiers illégalement sur ses serveurs, mais c'est bien lui qui les mets à disposition sur des forums aux noms évocateurs : alt.binaries.dvd.image, alt.binaries.games.xbox, alt.binaries.warez etc...doit-on penser que les autorités connaissent si mal leur dossier qu'ils n'ont pas connaissance de cette pratique, ou que d'autres enjeux que les droits d'auteurs sont ici en question ?

Sans compter que supprimer le P2P ne ferait que faire émerger d'autres solutions de téléchargement qui se fondraient dans la masse en exploitant les protocols existants (avec SOAP par exemple).

Aujourd'hui un téléchargement en P2P n'est pas plus anonyme que le téléchargement par n'importe quel autre protocol puisqu'il passe par l'adresse IP de l'ordinateur client. Si demain j'ouvre un site web dans un pays à la législation moins regardante et qui m'assure l'anonymat, qu'est-ce qui m'empechera d'y placer des DivX a télécharger en HTTP ? La vulgarisation de cette pratique rendrait alors le protocol HTTP illégal ?

mais bon, "Avec internet, on peut faire n'importe quoi. On peut empêcher ces sites d'être utilisables en France. Ils le font bien en Chine "
www.pcinpact.com/actu/new...

121. Le jeudi 9 mars 2006 à 14:19 par Paul TOTH

Une petite remarque encore sur les droits d'auteurs...je suis passé tout à l'heure à Auchan, je vois Kill Bill à 2€ ! étonné j'attrape la boite pour me rendre compte que c'est une cassette VHS...le DVD est à 12,99€...l'oeuvre est pourtant la même...ça coûte donc si cher de fabriquer un DVD ?

122. Le jeudi 9 mars 2006 à 14:37 par Foxapoildur

Un dvd coute 1 euro à fabriquer (je parle de la fabrication physique du DVD, boitier et livret compris). En nouveauté il est vendu 20 euros. Vu la taille du gâteau qu'il y a entre les deux, on comprends mieux l'hystérie des intéressés.

123. Le jeudi 9 mars 2006 à 16:35 par Popo

@Paul Thot

votre analogie est incorrecte. Quand j'utilise du FTP ou du HTTP pour télécharger quelque chose, je ne le met pas à disposition d'autres personnes. En revanche, si j'utilise un protocole P2P c'est exactement ce qui se passe.

encore une fois, tout le problème vient du fait que l'amendement ne vise pas des protocoles particuliers mais des "programmes qui sont manifestement destinés à la disposition non autorisée au public d'oeuvres protégées" (sic).

Ce qui laisse énormément de choses à l'appréciation d'un juge. Cependant, je vois mal un juge décréter qu'un protocole est illégal en conséquence. Dans le cas des news, il y a des milliers de newsgroup qui n'ont rien à voir avec quoi que ce soit d'illégal.

Encore une fois, je préférerai l'avis d'un juriste sur la question, plutôt que vos extrapolations

Evidemment, nous sommes d'accord qu'il s'agit d'un texte affreux.

124. Le jeudi 9 mars 2006 à 18:08 par YR

VHS à 2€, DVD est à 12,99€ pour une même oeuvre ?

Ben oui, c'est l'offre et la demande. Le principe même de fixation des prix.

Personne n'en veut de ma VHS toute vieille et toute moche ? Je brade !
Tout le monde n'en veut de mon bô DVD 5 langues, 40 minutes de bonus avec commentaires de l'auteur et bêtisier en sus ? Je monte le prix !
L'édition Collector 2 DVD au lieu d'un avec autographe de l'acteur principal s'arrache ? Je double encore le prix.

Tant que les gens achètent, pourquoi se priver ?
C'est cela la "main invisible du marché"...

YR

Le prix est fixé par l'offre et la demande, dans un marché idéal. La valeur d'une chose est le prix que quelqu'un est prêt à payer pour se la procurer. Même un prix inférieur au cout de production peut être intéressant pour les deux parties. Exemple : je fais fabriquer 2000 DVD à 2 € pièce et les vend 10 euros. Une fois que j'en ai vendu 400, je suis rentré dans mes frais, tout euro supplémentaire est du bénéfice. Je peux vendre les 1600 qui reste à 1 euro pièce pour récupérer des fonds plus vite pour le prochain DVD par exemple. Bilan de l'opération : 1600 euros de bénéfice. C'est beau le capitalisme.

La main invisible de SMith n'a rien à voir avec les prix, c'est le mécanisme inexplicable à l'époique (il y a depuis des théories qui expliquent cela) qui fait que la demande est toujours satisfaite par une offre adéquate, ergo que le capitalisme n'entraîne pas la pénurie, contrairement aux autres mécanismes (économie planifiée, mercantilisme, collectivisme...)

Eolas

125. Le jeudi 9 mars 2006 à 20:00 par Popo

@YR

Je vais me faire l'avocat du diable, mais les VHS que l'on trouve à 2€, et quelque fois un tout petit plus, sont pour la plupart des recyclages de boutiques de location vidéo.

Ce sont des cassettes qui ont été beaucoup lu, dont la qualité d'image est devenue très médiocre; on est donc loin du même produit que le DVD.

Comment je le sais ? Amèrement, parce que j'en ai acheté pardi :-) Et il y a inscrit en gros sur la K7 "Autorisé à la location", et sur la jaquette, il y a même écrit: "ce vidéogramme comprend des droits locatifs acquis forfaitairement par votre vidéoclub"

Donc, bien regarder quand on achète ce genre de produit, c'est rarement une affaire !!

126. Le vendredi 10 mars 2006 à 16:03 par Foxapoildur

"la demande est toujours satisfaite par une offre adéquate"

Que c'est beau, on dirait du Eolas.

Je n'ai donc qu'à demander un logement décent et un emploi stable pour l'obtenir !

D'autre part, ta conception de l'économie de marché est un peu désuète. Dans la société du spectacle et du marketing on devrait plutôt inverser ta proposition et dire: "L'offre est toujours satisfaite par une demande adéquate."

Merci. En fait, c'est du Adam Smith. Et le terme demande est à prendre au sens économique, tout comme offre, qui n'a rien à voir avec le sens d'offrir u ncadeau. Une demande insolvable équivaut à une absence de demande. Quant à votre "demande" de logement et d'emploi, le marché de l'u net de l'autre en France n'étant pas libre mais strictement encadré par des lois impératives, ne vous étonnez pas trop de la pénurie, et n'ayez aucun espoir quand on vous annonce qu'une loi supplémentaire s'ajoutant à l'édifice arrangera le problème.

Eolas

127. Le vendredi 10 mars 2006 à 21:38 par xirox

<<<Interdire tout dispositif anti copie, tout DRM pour parler clairement, c'est pour la cour de cassation sacrifier les intérêts légitimes de l'auteur en compromettant l'exploitation normale de l'oeuvre qui se retrouverait immédiatement disponible au téléchargement à grande échelle (car juridiquement, la distinction entre une copie privée réalisée en local à partir d'un DVD ou en réseau P2P est sujette à controverse : la cour d'appel de Montpellier, à laquelle s'est ralliée le tribunal de grande instance de Paris, ne la fait pas, tandis que Pontoise et Meaux la font).>>>

La cour de cassation est donc techniquement inculte vu que : 1) les industriels de la contrefaçon se battent complêtement des DRM vu qu'il leur suffit de faire des copies physique des mediums, bit à bit. 2) le brouillage CSS utilisé en guise de DRM sur les DVD n'empêche plus depuis belle lurette que des particuliers innondes les systèmes d'échange de rips de DVD dispo au téléchargement à grande échelle dès leur sortie (et voir avant...)

Dès lors empécher un particulier de faire une copie privée en toute bonne fois est _vraiment_ déguelasse. Comme d'habitude les DRM font chier les gens qui achêtent et laissent les autres totalement indifférents !

128. Le mardi 14 mars 2006 à 16:55 par AkirA

Bien le bonjour au Maître des lieux et à tous ses lecteurs,

Pour apprécier l'urgence du gouvernement français à transposer la directive de 2001, voici un lien
www.europa.eu.int/rapid/p...
qui est un communiqué de presse de la Commission Européenne portant, entres autres, sur un avis supplémentaire à l'égard de la France pour que celle-ci la transpose dans les meilleurs délais. A défaut, la Commission saisit la CJCE (sans compter les sanctions pécuniaires).
On comprend mieux pourquoi l'urgence est de mise par le Gouvernement (et donc pourquoi cette loi et son vote sont baclés...).

Pour l'arrêt de Cassation, j'y vois, en plus, une décision d'opportunité, dans un contexte propice à rendre une telle décision.
Toutefois, au regard de la Directive, ce n'est pas choquant, puisque celle-ci offre la faculté aux Etats d'autoriser de telles mesures anti-copies. La Cour a donc fait son choix et le Gouvernement va suivre.

On oublierait presque l'adage "il n'y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas". Or, en matière de copie privée, les juridictions ont tendance à l'oublier....DVD, CD, Download, Upload...l'article L122-5 CPI ne distingue pas le support à partir duquel l'exception de copie privée joue, mais cela n'a pas empêché des juridictions de relaxer des "peer to peeristes", et à l'inverse de juger les mesures anticopies légales pour les DVD mais aussi pour les CD (Voir jugement TGI de Nanterre du 15 avril 2005). Les décisions changent et évoluent selon le support...

Bref, on a pas fini d'en reparler!

129. Le mercredi 15 mars 2006 à 14:49 par BrunoNation

@Bigfinger : non !

Sur la reconnaissance d'un effet direct horizontal d'une directive, arrêt Defrenne CJCE 1976.
Par ailleurs, passé le délai de transposition, les droits sont dans le patrimoine des citoyens des Etats Membres même s'il n'y a pas eu transposition, ou transposition partielle ou fautive.

L'Etat est d'ailleurs responsable du dommage causé par la non application du droit communautaire CJCE Francovich 1991 et également si le dommage est causé directement par un jugement y compris d'une cour suprême (ou Haute juridiction en France : CE ou Cour Cass) arrêt Köbler.

@Ruxor :

Quand la logique modale aura quelques résultats sérieux et aura réussi à formaliser des raisonnements non classiques (non monotonie, granularité etc.) elle pourra peut être être utile aux normes juridiques.

Encore, son utilisation constructive exigerait beaucoup de finesse pour la compréhension d'une norme, d'un fait et de sa qualification. Quand on voit les sottises faites par des personnes qui maîtrisent les probas quand elles essaient de les appliquer aux sciences de l'homme ou à la vie de tous les jours ...

Sinon ton raisonnement sur l'amphibologie fondamentale et aporétique du droit est tellement b... que j'ai pensé que tu étais malade ou qu'il s'agissait d'un troll ("raisonnement humain vs mathématique (le tien étant mathématique mais humain, trop humain :-) ?, compréhension de l'un par l'autre, nul n'a été condamné pour travailler (?), les deux sens possibles (ah deux vraiment ? et pourquoi pas équiprobables :-) enfin bon nimportnawak ...).

130. Le mercredi 15 mars 2006 à 21:37 par MCF

S'agissant du raisonnement suivi par la Cour de Cassation, il y a un précédent célèbre avec la directive du 25 juillet 1985 sur la responsablité du fait des produits défectueux.

MCF

131. Le jeudi 16 mars 2006 à 11:08 par YR

Extrait de l'intervention de M. Vanneste, rapporteur de la loi DADVSI, le 15 mars :
____________________________________________
M. le Rapporteur - Nous ne devons pas affaiblir ce secteur en permettant d'enregistrer des DVD sur internet. Tel est le sens de notre proposition, laquelle s'appuie d'ailleurs sur l'arrêt Mulholland Drive de la Cour de cassation, lequel dit que « l'atteinte à l'exploitation normale de l'œuvre propre à faire écarter l'exception pour copie privée s'apprécie au regard des risques inhérents au nouvel environnement numérique quant à la sauvegarde des droits d'auteur et de l'importance économique que l'exploitation de l'œuvre sous forme de DVD représente pour l'amortissement des coûts de production cinématographique ». C'est parce que nous sommes responsables que nous avons tiré les conséquences de cette jurisprudence en confiant le soin au collège des médiateurs de fixer les modalités d'exercice de la copie privée.

Plusieurs députés socialistes - Dans ces conditions, pourquoi acceptez-vous d'être encore député ? ____________________________________________

La question mérite d'être posée. Qui rédige les lois ? Les députés ou les juges ?

Ce n'est pas parce qu'un juge a décidé d'appliquer un texte pour en tirer une jurisprudence que celle-ci doit devenir de fait la loi !

YR

132. Le jeudi 16 mars 2006 à 13:23 par Apokrif

"Ce n'est pas parce qu'un juge a décidé d'appliquer un texte pour en tirer une jurisprudence que celle-ci doit devenir de fait la loi !"

Non, mais adopter une loi conforme (ou contraire) à la jurisprudence permet d'améliorer la sécurité juridique en établissant une règle de droit de façon sûre, au lieu de la laisser dépendre de l'interprétation des magistrats qui peuvent changer d'avis demain.

133. Le mercredi 12 avril 2006 à 00:23 par floflo

ola cher maitre il n'y a la rien a mon humble avis d'étudiant en première année rien de bien extraordinaire cet arrêt n'est que la suite logique de celui de la Cour de Cassation du 5 avril 2005 (1ère civ.) qui finnissait par "au regard de l'article 1147 du code civil interprété à la lumière de l'article 6 de la directive du conseil des communautés européennes non encore transposé en droit français"

à moins de me tromper je ne vois la rien de bien particulièrement neuf dans cette décision.

alors "beaucoup de bruit pour rien" ?

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