Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Le prophète, oui, les policiers, non ? (Ou : l'affaire Placid)

Au lendemain de la relaxe de Charlie Hebdo dans l'affaire des caricatures, je voudrais aborder une autre affaire qui circule sur internet, et que plusieurs lecteurs m'ont signalée : l'affaire Placid, ou de la caricature porcine de la police.

Le 18 janvier dernier, la 11e chambre de la cour d'appel de Paris (celle-là même qui examinera un éventuel appel dans l'affaire Charlie Hebdo) a condamné l'auteur, l'éditeur et l'illustrateur d'un livre, à des peines d'amendes pour diffamation envers une administration publique, en l'espèce notre police nationale bien-aimée, au comportement toujours irréprochable.

C'est du dessinateur, Placid, que l'on parle surtout, puisqu'il a été également condamné pour la couverture de cet ouvrage, qui pourtant semble d'un premier abord verser dans l'art de la caricature pour qui la justice a d'habitude les yeux de Chimène, et dont la condamnation entraîne une chaîne de solidarité chez de nombreux dessinateurs.

Quelques explications s'imposent sur cette affaire, dont vous vous ferez ainsi votre opinion de manière éclairée.

Clément S., magistrat (quel joli prénom pour un magistrat...), membre du syndicat de la magistrature, plutôt marqué à gauche, a écrit un livre se voulant un guide du citoyen face à un contrôle d'identité. Cédant sans doute à certaines sirènes de la mercatique, le livre adopte un ton provocateur, puisqu'il est intitulé "VOS PAPIERS !", sous titré : "Que faire face à la police ?". Le dessin de couverture est dans cet esprit, puisqu'il représente un policier guère sympathique. Enfin, à l'intérieur, l'auteur impute expressément à la police dans son ensemble et de manière systématique la pratique de contrôles "au faciès", pratique au demeurant totalement illégale.

Le ministère public, saisi d'une plainte déposé par le ministre de l'intérieur, engage des poursuites contre l'éditeur, ès qualité de directeur de la publication, et l'auteur, en tant que complice de diffamation pour l'imputation des contrôles au faciès.

Je précise d'emblée que les faits remontant à 2001, c'est Daniel Vaillant, ministre socialiste, qui a déposé plainte, pas le futur ex ministre futur président (ou pas)[1].

Le ministère public poursuit également l'éditeur, toujours ès qualité de directeur de la publication, et le dessinateur en tant que complice, pour injure envers une administration publique pour le dessin de couverture.

Voici le corps du délit (notez la bave aux lèvres, elle jouera son rôle) :

En 2005, la 17e chambre du tribunal de Paris relaxe tout le monde en retenant la bonne foi pour la diffamation, et, pour l'injure, avait estimé que ce dessin, certes peu sympathique envers la police,

donnant à un représentant de la loi un visage à la frontière de l'homme et de l'animal, dénué de toute prétention au réalisme anatomique, mais suggérant une certaine faiblesse intellectuelle derrière l'affirmation agressive d'une autorité sure d'elle-même, relève du genre de la caricature. Il illustre la couverture d'un ouvrage militant qui entend dénoncer les conditions dans lesquelles les forces de l'ordre procéderaient, contre l'esprit de la loi, à des contrôles d'identité abusifs. Il participe donc, non pas de la stigmatisation de l'administration elle-même, mais des pratiques imputées à ses membres, ou à certains d'entre eux, par la caricature d'un fonctionnaire de police représenté non pas en tant que tel, mais en tant qu'il fait usage sans discernement ni humanité, des prérogatives que lui donne la loi en matière de contrôles d'identité. stigmatisait . Le parquet fait appel. Le 18 janvier, l'arrêt est rendu et, infirmant le jugement, condamne tout le monde.

Le dessin ne portaient donc, selon le tribunal, pas atteinte à la dignité des policiers et ne révélaient aucune intention de nuire.

Le parquet a fait appel, et le 18 janvier dernier, la cour d'appel de Paris a infirmé ce jugement et au contraire condamné les prévenus.

Et voici le résumé de la décision en question. Les gras sont de moi.

Sur la diffamation :

Les prévenus, respectivement directeur de publication et magistrat, sont poursuivis pour diffamation publique et complicité de diffamation publique envers une administration publique à la suite de la publication d'un livre, écrit par le magistrat, sous l'égide d'un syndicat de magistrats, relatif aux pratiques des contrôles d'identité effectués par la police. Les propos poursuivis imputent à l'ensemble des services de police des pratiques arbitraires et discriminatoires par la mise en oeuvre de contrôles d'identité "au faciès", c'est-à-dire fondés sur l'origine ethnique supposée des personnes contrôlées. Imputer à la police, non pas des dysfonctionnements ponctuels, mais la commission délibérée et à grande échelle d'infractions pénales de discrimination porte atteinte à l'honneur et à la considération de la police nationale. Les propos sont donc diffamatoires.

Voilà ce qui est reproché à l'auteur : avoir imputé ces pratiques, clairement illégales puisque discriminatoires, à l'ensemble de la police. La cour ne nie pas que de tels contrôles existent. Ce serait absurde. Mais dire que certains policiers font de tels contrôles n'a rien de répréhensible. D'ailleurs, démonstration : je l'affirme ici. Voyez si je vais être poursuivi. Mais les propos de l'auteur ne visait pas une catégorie restreinte de policiers, mais la police dans son ensemble. Dès lors, c'est la police qui était diffamée.

Mes lecteurs qui ont lu mon commentaire du jugement dans l'affaire Monputeaux savent que celui qui tient des propos diffamatoires, comme l'étaient ceux du blogueur prévenu dans ladite affaire, peut échapper à toute condamnation s'il démontre qu'il a agi de bonne foi. C'est précisément ce qu'ont tenté de faire l'auteur et l'éditeur, en vain.

Les prévenus ne peuvent bénéficier de la bonne foi. Le but de l'ouvrage apparaît légitime puisqu'il consiste à informer les lecteurs de l'état de la législation sur les contrôles d'identité et de leurs droits. Il n'existe pas d'animosité personnelle du rédacteur du livre envers la police nationale. En revanche, le fondement sérieux de l'allégation n'est pas établi. S'il existe un débat sur la pratique des contrôles d'identité, il n'est pas démontré qu'il existerait des pratiques illégales de grande ampleur de la police en la matière. L'ouvrage qui se présente comme un guide juridique, exigeait un effort particulier de rigueur. Le propos réducteur est d'autant moins légitime que l'auteur du livre est un magistrat judiciaire qui connaît la réalité des compétences des services de police. De plus, le livre a été publié au nom d'un syndicat de magistrats, et cette référence accréditait l'exactitude des propos y figurant. Enfin, l'auteur n'a pas fait preuve de prudence dans l'expression en affirmant sans réserve et de manière péremptoire l'existence d'une pratique reprochée à l'ensemble de la police nationale. L'usage d'un ton polémique est en totale contradiction avec le but affiché de l'ouvrage.

Les prévenus sont donc condamnés. Notez au passage que la qualité de magistrat (du parquet, à l'époque de la publication...) de l'auteur de l'ouvrage est retenu à charge contre le prévenu, pour écarter la bonne foi. Voilà pour les rumeurs de corporatisme judiciaire (bon, il y en aura toujours pour dire que les magistrats de la cour étaient à l'Union Syndicale des Magistrats...).

Maintenant, sur le dessin. Les prévenus sont cette fois l'éditeur et le dessinateur.

Un dessin, qui figurait en première et dernière page de couverture du livre, représente un policier affligé d'un groin et coiffé d'une casquette de gardien de la paix, prononçant les mots "vos papiers". Le dessin comporte la légende "Que faire face à la police ?". Ce dessin constitue une caricature et le genre de la caricature n'autorise pas les représentations dégradantes.

Le policier est représenté comme un être à la limite entre l'homme et l'animal par sa figure porcine, ayant la bave aux lèvres, montrant les dents et ayant les yeux exorbités. Le personnage exprime ainsi l'agressivité voire la haine et la représentation du policier est dégradante. La volonté délibérée de donner une image humiliante et terrifiante de la police est donc établie et le dessin vise l'institution de la police nationale dans son ensemble. Il était totalement dépourvu de légitimité dès lors qu'il se trouve en contradiction avec le style du livre, qui est dépourvu de vocation humoristique ou pamphlétaire. En outre, ce livre a été publié sous l'égide d'un syndicat de magistrats, qui n'ignorait pas le caractère extrêmement provocateur du dessin. Ce syndicat aurait dû faire preuve d'une plus grande retenue dans l'illustration du sujet traité et dans la représentation de la police. Le dessinateur avait reçu du syndicat la commande du dessin et il savait que celui-ci servirait à illustrer l'ouvrage en question. Les faits ont donc été commis en connaissance de cause. Les délits (injure et complicité d'injure) sont ainsi caractérisés.

L'éditeur est condamné pour les deux délits à une amende de 800 euros ; l'auteur à une amende de 1000 euros (outre le fait qu'il peut faire l'objet d'une procédure disciplinaire) et le dessinateur à une amende de 500 euros.

L'auteur a formé un pourvoi en cassation, l'éditeur, je ne sais pas, le dessinateur, je sais que non.

Evidemment, le mot "censure" est abondamment invoqué dans cette affaire. A tort. Le retrait du livre n'a pas été ordonné (mais en cas de réédition en l'état, les délits seraient à nouveau commis). Les deux décisions, même celle condamnant, reconnaissent implicitement la réalité du comportement dénoncé et estiment légitime la démarche de l'auteur. C'est l'analyse du texte et du dessin qui diverge.

On peut regretter cette décision de la cour d'appel ; j'avoue en être, aimant la liberté d'expression jusque dans ses excès. Mais je ne dis pas le droit, j'en propose juste une interprétation plus ou moins imaginative selon la détresse de mon client.

S'en indigner est en revanche injustifié. La même dénonciation et la même information auraient pu être données avec un ton plus modéré, sans perdre de leur pertinence, au contraire même. Gardons nous en tout cas d'invoquer des mots trop forts, il n'y en a eu que trop dans cette affaire. Dans les pays où la censure existe vraiment, dénoncer publiquement les méfaits de la police fait encourir bien pire que mille euros d'amende.

POUR EN SAVOIR PLUS :
- Le Syndicat de la magistrature propose les copies intégrales de ces décisions sur cette page (ce sont les PDF à la fin du communiqué).

-Le dessinateur a écrit cette lettre ouverte où il exprime son désarroi.

Notes

[1] Quelque chose me dit que ma formule est un peu confuse...

Commentaires

1. Le vendredi 23 mars 2007 à 18:18 par Sartorius

J'ai du mal avec ca:

"On peut regretter cette décision de la cour d'appel ; j'avoue en être, aimant la liberté d'expression jusque dans ses excès."

Quels excès doivent être punis et quels excès doivent être tolérés? (Je pose cette question sans animosité, mais cette phrase me semble étrange de votre part. Vous ne vouliez pas plutôt dire "aimant la caricature jusque dans ses excès" ?)


Quelle réponse donnez vous à votre question: "Le prophète, oui, les policiers, non ?"

Non, c'est bien la liberté d'expression que j'aime jusque dans ses excès. Mais j'exprime une opinion, rien d'autre. Quant à la question de mon titre, la réponse est : non, les deux sont traités pareil, quand bien même le résultat est différent.

Eolas

2. Le vendredi 23 mars 2007 à 18:23 par Verel

Il me semble que ce jugement aborde finalement une question de fond: celle du lien entre la police et la démocratie
Critiquer des abus commis par la police ou par les policiers est une condition de bon exercice de la démocratie et la vigilance à cet endroit doit être le fait de la hièrarchie policière, des juges, des élus, de la presse et des citoyens.
Par contre, s'exprimer de manière à laisser entendre que par définition la police est contre les citoyens est une attaque de la démocratie: l'alternative à une police institutionnelle, c'est l'auto défense et la vengeance personnelle.
Le devoir de tout démocrate est donc de défendre la police en général et de s'opposer à toute dérive qu'elle soit individuelle ou collective et organisée par la hiérarchie. A cet égard, les consignes données par le préfet Papon lors de la manifestation du FLN qui a connu les incidents que l'on sait étaient particulièrement indignes.
Je trouve donc les attendus de ce jugement très interessant, sans être capable de dire s'ils étaient adaptés ou non à ce cas.

3. Le vendredi 23 mars 2007 à 18:32 par Largentula

je comprends pas, je croyais que dans le cochon tout était bon, alors que dans la police, visiblement tout ne l'est pas !
Sinon, ça fait tout de même un bon coup de pub au bouquin et un moins bon aux plaignants... comme quoi...

4. Le vendredi 23 mars 2007 à 18:41 par f

"Le policier est représenté comme un être à la limite entre l'homme et l'animal par sa figure porcine, ayant la bave aux lèvres, montrant les dents et ayant les yeux exorbités. Le personnage exprime ainsi l'agressivité voire la haine et la représentation du policier est dégradante."

Personnellement je trouve plutot ce dessin rigolo et bon enfant rien a voir avec le fameux dessin CRS/SS de 68 qui parait plus haineux (un peu ...)

(www.indymedia.ie/cache/im...

"Bon enfant", à cause de la bave ?

Eolas

5. Le vendredi 23 mars 2007 à 18:51 par flo

ah. J'avais cru comprendre (billet d'avant, me souviens plus lequel précisément) qu'on ne pouvait déposer plainte pour injure et pour diffamation à la fois, que c'est l'un ou l'autre. Ai-je mal compris ? Ou les deux types de plaintes ont-ils été faits par deux instances distinctes ? Ou encore les deux motifs visent des éléments distincts de l'oeuvre ?

Autre remarque, en passant : je pense à ce qui se passe à Belleville en ce moment, où le contrôle systématique au faciès n'a absolument pas lieu, ce dont même les contrôlés ont certainement conscience, quel que soit leur âge :(

6. Le vendredi 23 mars 2007 à 19:21 par flo

Relisant, je vois que le Ministère de l'Intérieur a déposé plainte pour diffamation, et que le Ministère Public poursuit également pour injure. Ce qui pourrait signifier qu'il n'y aurait pas plainte pour les deux motifs à la fois, que le Ministère Public fait la deuxième poursuite spontanément ? Mais comment ça se détaille ?

7. Le vendredi 23 mars 2007 à 19:41 par Salomon Ibn Gabirol

@Eolas: derniere ligne de la premiere citation. "Le parquet fait appel. Le 18 janvier, l'arrêt est rendu et, infirmant le jugement, condamne tout le monde." Je doute que cette ligne fasse partie du jugement de premiere instance, sauf pour le tribunal a avoir le don de clairvoyance....

8. Le vendredi 23 mars 2007 à 20:08 par Jean Marc

"syndicat de la magistrature, plutôt marqué à gauche"

Que de pudeur il y a quelques années leur site faisait plutot peur quand on voyait leur idéologie.

Je n'aimerais pas être jugé par un de leur syndiqués .

Ce syndicat respecte t il la séparation des pouvoirs de la république?

9. Le vendredi 23 mars 2007 à 20:13 par Luc

"S'il existe un débat sur la pratique des contrôles d'identité, il n'est pas démontré qu'il existerait des pratiques illégales de grande ampleur de la police en la matière..."

Faudrait qu'ils sortent un peu de temps en temps, les juges...

10. Le vendredi 23 mars 2007 à 20:14 par potagepekinois

Rien ne prouve que cette caricature représente un policier, on dirait plutôt un gardien de parc.

11. Le vendredi 23 mars 2007 à 20:39 par Sartorius

@10:

"Vos papiers!"
"Que faire face à la police"

En effet, qu'est-ce qui a bien pu faire penser à un policier...

12. Le vendredi 23 mars 2007 à 20:45 par rose

Je trouve que ce dessin est presque sympathique comparativement à l'attitude de certains policiers car même s'ils sont "commandés" par Sarko n'en sont pas moins des hommes (ne devraient pas moins être des hommes) : www.educationsansfrontier...
merci pour votre blog.

13. Le vendredi 23 mars 2007 à 20:52 par Sartorius

@12:

"Certains policiers" dis-tu. Mais cette caricature et ce livre ne font selon le tribunal pas le distingo entre "les policiers" et "certains policiers". D'où la condamnation.

14. Le vendredi 23 mars 2007 à 21:07 par Schmorgluck

Je n'avais pas remarqué la bave, mais pour le reste je trouve que ce dessin est dans la lignée du style habituel du dessinateur : lambiek.net/artists/p/pla...
J'ignore si la cour en a tenu compte.

15. Le vendredi 23 mars 2007 à 21:18 par Schmorgluck

Maintenant que j'y pense, cet élément de continuité du style, c'était à l'avocat de Placid de le porter à l'attention de la cour (à condition que ce soit pertinent, ce dont je ne suis pas sûr).

16. Le vendredi 23 mars 2007 à 21:19 par Thomas

Je trouve ça génial quand les jugements, arrêts décortiquent de l'humour!

17. Le vendredi 23 mars 2007 à 21:26 par Raph

Le seul truc qui pourrait éventuellement être "choquant", c'est la moustache qui pourrait faire penser à Hitler... Mais bon, c'est pas dérangent en soi.

Après, il est clair que certains policiers abusent du Controle d'identité (art 78-2 CPP), mais j'en connais pas... Quand je bossais, je n'ai pas vu cette pratique : les seuls contrôles d'identité que j'ai vu (étant APJA 21 al 1ter, je ne pouvais pas les ordonnés, mais mes collègues oui) étaient vraiment justifier (Flagrant délit, infraction au Code de la Route, enquête préliminaire et réquisition du proc.. Et une fois, en CR si je me souviens bien)...
Cette pratique n'est donc pas généralisée...
Mais il est vrai que certaines personnes pensaient qu'ils étaient injustifiés alors qu'on était requis par le parquet...

18. Le vendredi 23 mars 2007 à 21:38 par éconoclaste-sm

Question bête : j'ai le livre, mais je l'ai jamais lu (chuis pas basané, c'est pas utile ;-) ). Il date de 2001. Est-ce que beaucoup de choses ont changé depuis dans le code de procédure pénale (c'est bien là dedans qu'on trouve les règles relatives aux contrôles et tout ça ?) ? Bref, il est encore pertinent sur le fond cet ouvrage ?

Pour la liberté d'expression, chuis d'accord avec toi. Sans excès, il n'y a que des limites.

19. Le vendredi 23 mars 2007 à 22:18 par Lucas Clermont

J'imagine que les policiers sont des travailleurs comme les autres qui ne doivent guère goûter qu'on les assimile à des brutes aux tendances fascisantes. Un peu comme les associations avocat, voleur ; fonctionnaire, fainéant ; étudiant, jeune con, politicien, corrompu ; la routine des préjugés.

On doit s'habituer, sans doute, mais cela me fatiguerait.

20. Le vendredi 23 mars 2007 à 22:27 par Nicolas

Le dessinateur aurait pu être condamné pour injure au bon goût, tant pour ma part je trouve son dessin hideux, mais j'ignore si une telle qualification figure quelque part.

Par ailleurs, je trouve absolument immorale cette guéguerre magistrats/policiers, alors même qu'ils devraient (et c'est ce qui se passe, je crois, dans l'univers enchanté des bisounours) *essayer* de travailler ensemble.
Pour un syndicat de magistrat, cracher ainsi sur la police, n'est guère le signe d'une relation que j'aimerais... apaisée tout au moins.

Et sinon, les relations que j'ai pu avoir avec des policiers (en tant que justiciable) ont toujours été empreintes de courtoisie, quand bien même j'ai pu moi-même être pénible.

21. Le vendredi 23 mars 2007 à 22:56 par mad

@ Nicolas, #19
Heureusement personne ne s'est encore piqué de définir légalement le beau ou le bon gout.

Et quant à la réaction des syndicats de magistrats // policier, je crois que beaucoup de magistrats en on plus que marre de rejetter des procédures baclées pour faire du chiffre, et de s'entendre ensuite accusé des malheurs de la FRance toute entière par ce qu'ils sanctionnent les erreurs faites en amont, conformément à la procédure.

mais ce n'est que mon avis, pas plus constructif que le votre.

mad.

22. Le vendredi 23 mars 2007 à 23:09 par Geo

j'ai l'impression que la Justice juge de l'art..
Pour le dessin..,
cela me fait peur (j'ai rarement peur lorsque je lis une info): j'ai l'impression que la cour d'appel juge moralement (cela dépend donc des juges eu-même: dans leur sensiblité, de leurs personnalités, et/ou d'un contexte)
Pourquoi la cour d'appel n'a pas dit: ce dessin relève de l'expression écrite et de son droit, notre boule magique qui trace la ligne blanche entre une représentation imagée non-dégradante et une représentation imagée dégradante, est en panne: par défaut: le délit n'est pas constitué.

"Le policier est représenté comme un être à la limite entre l'homme et l'animal par sa figure porcine, ayant la bave aux lèvres, montrant les dents et ayant les yeux exorbités. Le personnage exprime ainsi l'agressivité voire la haine et la représentation du policier est dégradante."
Si une telle caricature est interdite, alors, de mon avis perso, toutes les caricatures agressives sont interdites pour ces juges.

Quand je relis l'argumentation visant le contenu du livre, même si je ne connais pas ce contenu, j'ai vu passé un courant d'air bien froid près de chez moi.
"le fondement sérieux de l'allégation n'est pas établi. S'il existe un débat sur la pratique des contrôles d'identité, il n'est pas démontré qu'il existerait des pratiques illégales de grande ampleur de la police en la matière. L'ouvrage qui se présente comme un guide juridique, exigeait un effort particulier de rigueur."
C'est la cour d'appel qui vient de définir ce que devait être le contenu du livre,
définition d'un contenu/d'idées.
Mais c'est vrai que le livre n'a pas été interdit à la vente,
mais qu'il faudrait aussi que les protoganistes ne soient condamné qu'une seule fois quand même.

Placid a gagné un lecteur.(surtout qu'il présente des zolie planches humoristiques sur son blog, mais .., à mon gout..).

23. Le vendredi 23 mars 2007 à 23:21 par max-00-

Merci pour cet article.
Mais en béotien que je suis, je me demande si cette décision de justice peut faire jurisprudence (j'espère ne pas faire s'esclaffer les spécialistes) ; pour parler en mon jargon : se pourrait-il que les dessinateurs soient désormais interdits de porcs policiers ?
Vous semblez prendre tout ceci avec une certaine légèreté ; sans doute la distance du législateur ; mais le subjectif de ce genre de jugement me fait plutôt froid dans le dos.
il y a une petite odeur de Kafka dans tout ça (cela dit sans vouloir te faire de peine Franz, mais toi, au moins tu avais le sens de l'humour).

24. Le vendredi 23 mars 2007 à 23:28 par nul intégral

je pense qu'il est temps de dépénaliser ces questions, et de ne pas laisser l'état s'occuper de nos libertés d'opinion et d'expression.

25. Le samedi 24 mars 2007 à 00:27 par Perplexe

Euh… vous n'auriez pas dit que la caricature ressemblait à un cochon.
Bah… je ne m'en serais pas rendu compte tout seul !
Je trouve même qu'il faut vraiment avoir l'esprit mal placé pour imaginer que ça ressemble à un cochon.

C'est de l'art abstrait.
Dit donc, il serait malheureux Picasso aujourd'hui…
Vous imaginer les modèles de Picasso en train de porter plainte, pour diffamation, vous ?

Ouais… on vit une drôle d'époque.

26. Le samedi 24 mars 2007 à 00:46 par Nicolas

Pigs = policiers
C'est plutôt états-uniens comme amalgame.
En France, c'est "poulets"

27. Le samedi 24 mars 2007 à 00:49 par Nicolas

Mais je persévère : ce dessin est très laid, et la laideur s'étale si tant sur les murs de notre bien-aimé métro (je vis à Paris) qu'il n'est nul besoin d'en rajouter.

J'en rajoute pourtant : o comme ce dessin est moche !

28. Le samedi 24 mars 2007 à 02:23 par Flying™

J'imagine que l'on ne manquera pas de critiquer la Cour pour sa décision, et je le comprends, étant également en faveur d'une liberté d'expression plutôt excessive.

Mais je comprends également qu'être avocat ou simple citoyen commentant la décision et en être le juge sont deux choses bien différentes. Il ne s'agit également de prendre en compte des considérations telles que : comment éviter que notre pays ne sombre dans la guerre civile? Comment faire respecter les institutions de la république afin de maintenir notre pays dans la civilisation? Comment légitimer le monopole de la violence imparti à l'Etat tout en laissant des images dégradantes et infondées (au sens de non argumentées et documentées)? Telles sont les raisons qui peuvent justifier à mon sens ce genre de restriction à la liberté d'expression.

Soit, je comprends toutes ces difficultés et je mesure les enjeux qui entrent en conflit ici, au-delà du droit.

Mais lorsque je lis ceci:

"Ce dessin constitue une caricature et le genre de la caricature n'autorise pas les représentations dégradantes."

Je me dis que la Cour n'est pas vraiment à la hauteur du défis intellectuel, expédiant ce genre d'affirmations sans les justifier. Qu'est-ce qu'une caricature sinon une image dégradante d'une personne ?!

Exposer un raisonnement ne suffit pas à en justifier la solution, encore faut-il justifier la construction du raisonnement, et notamment le choix des syllogismes ...







29. Le samedi 24 mars 2007 à 02:34 par petit jardin

''Pourvu que je ne parle ni de l’autorité, ni du culte, ni de la politique, ni de la morale, ni des gens en place, ni des corps en crédit, ni de l’Opéra, ni des autres spectacles, ni de personne qui tienne à quelque chose, je puis tout imprimer librement, sous l’inspection de deux ou trois censeurs.''

Beaumarchais. Le Mariage de Figaro.

30. Le samedi 24 mars 2007 à 05:04 par Yoshette

@23 : il ne faut pas tout mélanger. Cela n'est pas l'état qui a émis un jugement, mais des magistrats. Ne confondons pas tout et ne faisons pas d'amalgames.

31. Le samedi 24 mars 2007 à 05:08 par Xavier

...je dois dire que cette décision me laisse perplexe.

Pour moi, sans aucune formation de droit, cette caricature et celle de Charlie Hebdo étaient des caricatures, c'est la liberté d'expression et, la police comme les représentants musulmans, feraient mieux de s'attaquer à la racine de leurs problèmes plutôt qu'à ceux qui les dénoncent, ces problèmes!

En ce qui concerne le délis de faciès, je ne comprend pas. Pour moi c'est l'art de la police, précisément, que de pouvoir détecter si un individu "a plus de chance ou non" de commettre un déli ou d'en commettre un.

Loin de moi l'idée de penser qu'on a une tête d'assassin ou non, mais, par exemple, un jeune punk avec sa crête sur le crâne est plus susceptible de posséder de la drogue que l'épicier qui met les tomates dans le comptoir. Partant de ce constat, et oui c'est un préjugé mais il se vérifie, un policier ne devrait pas préféré le contrôle du punk à celui de l'épicier?

Tout comme un gendarme laissera sans doute passer, à la sortie d'une boîte de nuit, un père avec dans sa voiture sa fille et ses copines mais arrêtera le ptit jeune dans la 205... c'est aussi un délis de faciès, non?

Un contrôle d'identité dans un quartier "non-blanc" pour trouver des immigrés illégaux c'est plus évident que d'aller dans un quartier hupé, non? Ça aussi c'est un délis de faciès.

Pour moi les cas que je cite, s'ils sont emmerdants pour l'individu innocent qui n'a rien à se reprocher et qui ne se fait arrêter que pour sa gueule ou son look ou son âge, ils sont quand même d'une certaine manière nécessaires pour avoir un service policier un tantinet efficace, non?

32. Le samedi 24 mars 2007 à 09:44 par Clems

Il doit y avoir dans Hara Kiri dix mille fois pire sur la police.

Et peut être dans Charlie Hebdo aussi.

Ceci dit Cabu expliquait qu'il avait déjà eu x plaintes pour injures contre l'armée probablement la police mais jamais de la part d'une religion.

Comme quoi ce n'est pas toujours la cavalerie qui arrive en retard dans ces combats là.

33. Le samedi 24 mars 2007 à 10:11 par Achipe

Extrait du jugement de diffamation :
"Imputer à la police, non pas des dysfonctionnements ponctuels, mais la commission délibérée et à grande échelle d'infractions pénales de discrimination porte atteinte à l'honneur et à la considération de la police nationale. Les propos sont donc diffamatoires."

Personnellement, je ne suis pas juriste, mais j'impute à la police la commission délibérée et à grande échelle d'infractions pénales de discrimination. Tout le monde sait que les jeunes habitant certaines banlieues sont plus contrôlés que les autres pour la raison qu'ils sont jeunes et habitent ces banlieues. Que ce fait porte atteinte à l'honneur et à la considération de la police nationale, je le crois.

34. Le samedi 24 mars 2007 à 10:13 par Achipe

"Dans les pays où la censure existe vraiment, dénoncer publiquement les méfaits de la police fait encourir bien pire que mille euros d'amende."

Horrible argument

35. Le samedi 24 mars 2007 à 10:48 par Teddy

C'est toujours sompliqué lorsque les propos tenus relèvent de l'idéologie.

En ce jour de relax pour Charlie Hebdo, le blog train train quotidien s'est vu lui censuré par Typepad à la demande de la SNCF pour des images détournées (par moi) qui reprennaient explicitement le logo de la SNCF, la transformant en SNTR (Société Nationale des Trains en Retard).

Toute la question est de savoir si ce type de détournement, ne s'inscrivant pas dans une logique de contrefaçon mais dans une logique de contestation sous un angle à la fois satyrique et factuel (sur l'axe rouen/paris, les retards (importants) deviennent quais quotidiens).

Quid ?

Une autre image, celle d'une loco de train corail qui habituellement arbore un joli "en voyage..." s'est transformée en "en retard..." et le "Donner au train des idées d'avance" en "Donner au train des heures de retard".

Je ne nie pas que cette satyre vise explicitement la SNCF, c'en est d'ailleurs le but. Mais, est-il illégal d'utiliser le marketing de la SNCF, avec un regard satyrique, pour affirmer par l'image une réalité quotidienne, qui devient insupportable pour les usagers ?

Typepad a tranché : pour lui c'est un contenu manifestement illicite. Typepad n'est pas sur d'avoir bien tranché quelques jours après puisqu'il invite la SNCF à entamer une procédure judiciaire.

Un arret de la cour d'appel de Paris du 23 Avril 2003 (je ne suis pas tout à fait sur de la date) rend un jugement en faveur de "Réseau Voltaire" qui avait mis en ligne un site "jeboycottedanone.com" détournant la stratégie marketing de Gervais-Danone en créant un logo repris de l'original.

Les images incriminées ont été retirées du blog train train quotidien, mais ont eut le temps de se retrouver diffusées bien ailleurs, par exemple :
www.monputeaux.com/2007/0...
blog.communes76.com/index...

Du coup, porte-t-on atteinte à la SNCF, ou bien, nus contentons-nous de crier la vérité qui deviendrai insupportable ?

36. Le samedi 24 mars 2007 à 11:26 par nul intégral

"cela n'est pas l'état qui a émis un jugement, mais des magistrats"

dans leur serment, les magistrats jurent de servir l'état.

Absolument pas. Le texte exact est " "Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes même après la cessation de mes fonctions et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat". Vous en avez d'autres comme ça, à nous infliger ?

Eolas

37. Le samedi 24 mars 2007 à 12:01 par Achipe

@Xavier
"Pour moi les cas que je cite, s'ils sont emmerdants pour l'individu innocent qui n'a rien à se reprocher et qui ne se fait arrêter que pour sa gueule ou son look ou son âge, ils sont quand même d'une certaine manière nécessaires pour avoir un service policier un tantinet efficace, non?"

Non.

Tu parles avec un "bon sens" écoeurant. Pour parler comme ça, je devine que tu ne dois pas te faire contrôler très souvent. C'est exactement le genre d'arguments qui justifient tous les abus de la police (que je ne remets pas en cause, nécessaire au bon fonctionnement du pays, etc. etc.).

38. Le samedi 24 mars 2007 à 12:36 par MKe

Quand dira-t-on que ce ne sont pas les caricaturistes qui "dégradent l'image" et rendent antipathiques les extrémistes religieux ou les policiers (pas systématiquement, mais si souvent !) obtus et violents, mais bien les principaux intéressés, qui en refusant de faire le ménage dans leurs rangs (outrage ! rébellion ! blasphéme !) contribuent à noircir chaque jour un peu plus l'image de leurs pairs "modérés"...

Mais on le dit déjà, à commencer par vous. Le fait que des policiers aient des comportements inacceptables, nul ne dit le contraire, il n'est que de lire le rapport annuel de la commission de déontologie de la police nationale. Mais cela n'autorise pas à injurier les policiers en général ; or la cour d'appel a estimé que tel était le cas ici.

Eolas

39. Le samedi 24 mars 2007 à 12:43 par rahat

@36 dans leur serment, les magistrats jurent de servir l'état.

non !

"Je jure de bien et fidèlement remplir mes fonctions, de garder le secret des délibérations et des votes même après la cessation de mes fonctions et de me conduire en tout comme un digne et loyal magistrat".

40. Le samedi 24 mars 2007 à 13:04 par Raph

"Tout le monde sait que les jeunes habitant certaines banlieues sont plus contrôlés que les autres pour la raison qu'ils sont jeunes et habitent ces banlieues."
Mais pourquoi les policiers s'amuseraient à contrôler forcément les jeunes dans des quartiers ? On ne les contrôle que si on pense qu'ils ont commis un crime ou un délit. Alors, si un jeune change de direction (ou se met à courir) quand il voit les policiers et quand il se fait rattrapé, il dégage une forte odeur de cannibis, le contrôle est peut-être fondé.. Mais si un épicier sans le cannabis, il va aussi se faire contrôler.

Ensuite, si on nous dit que la personne qui a explosé une vitrine d'une agence de travail temporaire est de type nordafr, qu'il a un jogging bleu, qu'il fait 1m75 et qu'il est rasé, si on croise une personne répondant à cette description 100 mètres plus loin, c'est normal qu'on aille le contrôler.

"On ne les controle que si on pense qu'ils ont commis un crime ou un délit". Oui, mais hélas, des policiers semblent penser que le simple fait d'être noir ou arabe et de porter une capuche rend suspect d'avoir commis un crime ou un délit.

Eolas

41. Le samedi 24 mars 2007 à 13:16 par LLG

Suis-je le seul à trouver les condamnations pour injure d'une autre âge ? Un peu comme l'adultère l'est devenu. La victime d'une injure est aussi celui qui la profère, à mon avis.

42. Le samedi 24 mars 2007 à 14:16 par Achipe

Ton témoignage est intéressant Raph. Et bien sûr, je n'ai rien à redire sur tous les cas que tu présentes.
En ce qui me concerne, je n'ai jamais vécu en banlieue mais j'ai été un moment sans logement, contraint à vivre dans ma voiture. Et curieusement, alors que je n'avais jamais été contrôlé de ma vie (il faut dire que je suis blanc), on a commencé à me contrôler tous les 2 jours en moyenne. Pourquoi? parce que soudain avec ma voiture pleine d'affaires je devenais un "présumé suspect" (de vol je suppose). Comme si c'est pas assez dur d'être exclu, il faut subir ce genre d'"agressions" quotidiennement. Double peine, comme en banlieue.

43. Le samedi 24 mars 2007 à 15:22 par schloren

Raph > Mais pourquoi les policiers s'amuseraient à contrôler forcément les jeunes dans des quartiers ? On ne les contrôle que si on pense qu'ils ont commis un crime ou un délit.
Un immense éclat de rire vient d'éclater.

44. Le samedi 24 mars 2007 à 15:48 par Laurent GUERBY

Sur le site du SM:

"A ce titre, le Syndicat de la Magistrature tient à rappeler son soutien sans faille à Clément Schouler et ne doute pas que la Cour de cassation, d’ores et déjà saisie d’un pourvoi contre cet arrêt de la cour d’appel de Paris, saura protéger la liberté d’expression."

Suite probable des évenements : la cour de cassation rejete le pourvoi ou valide la condamnation (vive la France) puis la CEDH reexplique pour la 354238eme fois a la justice française la signification de liberté d'expression.

45. Le samedi 24 mars 2007 à 18:07 par Raph

Les motifs de contrôles d'identité (art 78-2 du CPP) :
Les policiers peuvent inviter à justifier, par tout moyen, de son identité toute personne à l'égard de laquelle existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner :
- qu'elle a commis ou tenté de commettre une infraction ;
- ou qu'elle se prépare à commettre un crime ou un délit ;
- ou qu'elle est susceptible de fournir des renseignements utiles à l'enquête en cas de crime ou de délit ;
- ou qu'elle fait l'objet de recherches ordonnées par une autorité judiciaire.
Sur réquisitions écrites du procureur de la République aux fins de recherche et de poursuite d'infractions qu'il précise, l'identité de toute personne peut être également contrôlée, selon les mêmes modalités, dans les lieux et pour une période de temps déterminés par ce magistrat. (...)

L'identité de toute personne, quel que soit son comportement, peut également être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa, pour prévenir une atteinte à l'ordre public, notamment à la sécurité des personnes ou des biens.

Dans une zone comprise entre la frontière terrestre de la France avec les Etats parties à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 et une ligne tracée à 20 kilomètres en deçà, l'identité de toute personne peut également être contrôlée, selon les modalités prévues au premier alinéa, en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévues par la loi.

====
Après, contrôler les jeunes, pourquoi faire ? C'est quoi le but réel ? Montrer qu'on est policier.. Ils le savent, on a un uniforme bleu et une voiture avec une girlande dessus et partout, il y a écrit POLICE...

Achipe : le fait d'avoir un voiture remplir d'ojets parait suspect, surtout s'il y a eu récemment des cambriolage dans le coin. Le policier ne sait pas que cette personne vit dans sa voiture. Ce n'est pas inscrit (et heurement) sur son front.

Je me souviens d'un contrôle : au volant, il y avait une femme, 1m75, ce qu'il faut là où il faut. On l'arrête pour vérifier ses papiers (comme par hazard ^^) et on vérifie son permis de conduire... DUPOND Robert, sexe M... Premier réflexe, on pense à un faux permis (logique, c'est la mode).. On se dirige vers elle et on lui dit "madame, il y a un problème.. Le permis est au nom de Monsieur Robert DUPOND". Elle nous répond "c'est bien moi"...
On a eu l'air intelligent (surtout qu'on se voyait sur un défaut de permis, faux et usage de faux, vérification d'identité, etc.)

46. Le samedi 24 mars 2007 à 20:54 par Achipe

OK je vais conclure pour ma part, en disant que les contrôles policiers sont une grosse machine à discrimination (géographique, ethnique,...). Pour quel résultat? quelques grammes de shit? Si la police voulait faire son travail de manière honnête, elle privilégierait davantage l'investigation et les filatures.

47. Le samedi 24 mars 2007 à 21:42 par Damien

Cher Eolas, dommage que vous ne citiez pas la phrase incriminée, qui est je crois, d'après le Syndicat de la Magistrature:

« Les contrôles d’identité au faciès, bien que prohibés par la loi, sont non seulement monnaie courante, mais se multiplient »

On peut disserter sur la signification de "monnaie courante" ("être courant, commun"), mais la phrase me semble plutôt indiquer un nombre massif qu'une pratique généralisée. Autrement dit, il ne s'agit pas de "l'existence d'une pratique reprochée à l'ensemble de la police nationale", comme le dit le jugement. D'ailleurs, comment une pratique absolument générale pourrait-elle se "multiplier" ?

Les travaux des sociologues, les comptes tenus par les associations et de multiples témoignages confirment la grande fréquence des "contrôles au faciès". Il est évidemment très délicat de fournir le moindre chiffre. Doit-on pour autant se taire, ou présenter systématiquement, et avec maintes pincettes, un phénomène massif comme une série d'exceptions malheureuses?

Défendre l'honneur de la police, c'est important. Pour cette raison précisément, dénoncer ses dérives, c'est fondamentale, et toucher à la liberté d'expression sur ce sujet, c'est révoltant.

Concernant le dessin, le jugement est plus affligeant encore. Ils auraient pu aller plus loin, d'ailleurs, et signaler que les policiers disant systématiquement "vos papiers, s'il vous plaît", omettre le "s'il vous plaît" était injurieux. Dommage que la plainte n'ait pas porté sur ce point.

Enfin,concernant la comparaison avec le procès "Charlie Hebdo", dans les deux cas, le droit est respecté, certes. Et pourtant, comment ne pas voir le décalage? Je ne sais pas exactement d'où il vient, mais il est là, et il est scandaleux.

48. Le samedi 24 mars 2007 à 23:18 par Willy

Marrant, dans le dernier passage cité de l'arret, j'aurais plutôt graissé : "Il était totalement dépourvu de légitimité dès lors qu'il se trouve en contradiction avec le style du livre, qui est dépourvu de vocation humoristique ou pamphlétaire."

Cela me parait le plus important non ? Le dessin perd le statut de caricature parfaitement légale parce qu'il accompagne un texte qui n'est absolument pas caricatural mais se veut des plus sérieux.

Si (j'espère) ce que j'ai dit jusque là est pertinent, le dernier commentaire le sera probablement beaucoup moins (tant pis je tente) : ça ne veut pas dire que quelque-part on condamne le dessinateur pour ce qu'a écrit l'auteur ? Que si le texte avait été pamphlétaitre on n'aurait rien dit au dessinateur ?

49. Le dimanche 25 mars 2007 à 03:06 par Raph

Achipe : mais où avez-vous vu que sur un contrôle d'identité on trouve du shit ?

Ha, la naïveté des étudiants en droit... J'ai été comme vous, autrefois...

Eolas

50. Le dimanche 25 mars 2007 à 04:26 par Polydamas

Ce qui me dérange n'est pas la caricature en tant que telle qui a évidemment sa place en démocratie. De la part de n'importe quelle association, on aurait pu la comprendre.

Ce qui me dérange profondément est la division des pouvoirs que cette caricature entretient dans le pouvoir judiciaire.

Un policier, jusqu'à preuve du contraire, est au service de la justice. Même chose pour le magistrat. Jeter l'opprobe sur la police, qui travaille avec les magistrats, chacun à son niveau, pour la justice, est, à mon sens, une attaque contre des "collègues de travail" et finalement, l'obligation de réserve et le devoir de fidélité de tout employé envers son entreprise.

C'est d'autant plus grave qu'il s'agit ici d'une institution attaquée non pas avec des faits avérés, ce qui aurait été justifié, mais par une caricature éditée par un syndicat de magistrats (donc a priori de gens dont on ne peut remettre en cause la probité), qu'on peut parfois soupconner de manquer d'indépendance. Cette caricature affaiblit et décridibilise à la fois la police et les magistrats...

C'est à ce titre que, pour ma part, il était normal que ce magistrat soit sanctionné.



"j'avoue en être, aimant la liberté d'expression jusque dans ses excès."

Ah oui!
Je provoque mais vous avez la même opinion pour Dieudonné, Gollnisch, Faurrisson, etc ? J'avoue que j'aimerais connaître votre point de vue.

J'ai déjà parlé de Dieudonné. Quant à Gollnisch et Faurisson, les propos que tiennent ces personnes ne provoquent chez moi qu'un soupir teinté de profond mépris. Je ne ressens nullement le besoin qu'un jugement me conforte dans mon opinion, elle est assez solide. Et je ressentirais un certain malaise que la loi leur interdise de proférer leurs sottises. J'en conclurais qu'elle croit que je suis assez bête pour les croire.

Eolas

51. Le dimanche 25 mars 2007 à 11:16 par Sartorius

Achipe dit: "OK je vais conclure pour ma part, en disant que les contrôles policiers sont une grosse machine à discrimination (géographique, ethnique,...). Pour quel résultat? quelques grammes de shit? Si la police voulait faire son travail de manière honnête, elle privilégierait davantage l'investigation et les filatures."


Supprimons donc les controles policiers.

Et quand on s'apercevra (inévitablement) que les policiers font plus d'"investigations" dans les banlieues et de "filatures" de jeunes, on supprimera aussi les investigations et les filatures.


Une solution à proposer (enfin?) pour remédier à ce que vous dénoncez?

52. Le dimanche 25 mars 2007 à 13:42 par pfelelep

personnelement, en tant qu'illustrateur, cette décision de justice me fait flipper.


anecdote: un jour, un de mes amis, lors d'une soirée étudiante, vit une jeune fille japonaise se prendre une dizaine de "blagues" de mauvais goût sur son pays (genre "sakaKOUILLE! Ca veut dire slip en japonais?" et autre finesses d'esprit adolescentes).

Mon ami, se portant au secours de la jeune fille, interpelle son "agresseur":

"mais arrête! Tu ne vois pas qu'elle rit jaune?"

...

"oups".

Lui et la jeune file japonaise sont FINALEMENT devenus amis, avec le temps (et beaucoup d'explications).

Comme quoi, l'humour, c'est une discipline délicate; comme disait Desproges:
"Peut-on rire de tout? Oui!
Peut-on rire de tout avec tout le monde? C'est plus difficile"

53. Le dimanche 25 mars 2007 à 13:51 par Vulgus pecum

Vos papiers !

...et vos analyses ADN !

...s'il vous plait Monsieur.

Tiens par hasard, je suis tombé là dessus :

listes.samizdat.net/sympa...

Finalement, bientôt, se faire demander ses papiers ce sera un peu dépassé ! :)

54. Le dimanche 25 mars 2007 à 14:13 par Siamoize

Je suis scandalisée.

écrit par Willy:Si (j'espère) ce que j'ai dit jusque là est pertinent, le dernier commentaire le sera probablement beaucoup moins (tant pis je tente) : ça ne veut pas dire que quelque-part on condamne le dessinateur pour ce qu'a écrit l'auteur ? Que si le texte avait été pamphlétaitre on n'aurait rien dit au dessinateur ?

c'est bien ce que je me suis demandée en voyant toute cette affaire.
d'ailleurs il y à une association de dessinateurs, tout acquis à la cause de Placid: touscochons.blogspot.com/

55. Le dimanche 25 mars 2007 à 15:54 par Raph

"Ha, la naïveté des étudiants en droit... J'ai été comme vous, autrefois..."

J'ai aussi Adjoint de Sécurité de la Police Nationale (APJA 21 1ter) pendant 6 mois... Et j'ai assisté à des contrôles d'identité. A mes yeux l'article 78-2 a toujours été respecté et je n'ai jamais assisté à des contrôles irréguliers..

Et un contrôle d'identité peut engager à une palpation de sécurité (et éventiellement trouver des stup), mais elle doit être justifiée (menace, attitude pouvant laisser qu'elle soit une menace...), mais le but du contrôle est le passage au fichier des personnes recherchées (FPR) et éventuellement au STIC (quand les services "d'investigation" étaient là.

A combien de contrôles 'identités avez vous assisté ? Estimez vous qu'il s'agit d'un échantillon représentatif ? Notez que dans ces décisions, les magistrats reconnaissent la réalité de ces pratiques.

Eolas

56. Le dimanche 25 mars 2007 à 17:02 par Irène Delse

Eolas : "On peut regretter cette décision de la cour d'appel ; j'avoue en être, aimant la liberté d'expression jusque dans ses excès. S'en indigner est en revanche injustifié. La même dénonciation et la même information auraient pu être données avec un ton plus modéré, sans perdre de leur pertinence, au contraire même."

Là, ça fait un peu bisounours, tout de même... C'est quoi, une caricature modérée ? Et comment dénoncer des faits choquants (tels que les contrôles au faciès) sans les énoncer d'abord clairement ? Et serait-ce la prudence naturelle d'un avocat obligé de travailler au quotidien avec policier et magistrats qui le fait parler ainsi ?

Du moins c'est la question qui me taraudait devant tant de diplomatie. Mais finalement, la lumière dans mon esprit s'est faite : comme Me Eolas nous le rappelle, il s'agit là de son opinion *personnelle*. On n'est pas obligé d'être d'accord avec lui. Il ne trouve pas normal qu'on puisse s'indigner ? Il récuse le terme de "censure", ma foi, grand bien lui fasse. C'est une question de lexique. On peut vouloir réserver le terme à la "grande censure" qui a lieu en Chine ou en Egypte. (Cela permet accessoirement d'affirmer qu'il n'y a pas de censure en France. Chouette, alors.) Mais justement, quand les décisions de justice, conjuguées à certaines pressions ministérielles (moi aussi, je peux me la jouer diplomate...) se traduisent par un climat favorable à l'autocensure, alors on ne peut que se poser des questions. Et s'inquiéter. Et, parce que si on ne réagit pas les choses continue, s'indigner. Comme dans le cas de la grenouille graduellement ébouillantée : de petites choses viennent entamer peu à peu la liberté, mais parce que ce sont de petites choses, on préfère ne pas réagir trop "excessivement", employer de grands mots, s'indigner... Et au final, on s'autocensure.

Conclusion : tout est affaire d'interprétation. Un tribunal reconnait le caractère choquant des caricatures de Charlie, mais relaxe le journal en invoquant la liberté d'expression. Un autre tribunal s'appuie sur le caractère choquant d'autres caricatures pour condamner un livre. Les bornes sont définies de façon... Aïe, aïe, je vais devoir lâcher un mot "excessif"... De façon arbitraire.

Tiens, à propos... Vous avez dit avocat ? ;)
www.bragelonne.fr/livre.p...

57. Le dimanche 25 mars 2007 à 19:43 par LDiCesare

Eolas, sur le site du dessinateur que vous liez, je lis "un comité de soutien a été mis en place afin que Placid puisse regler son amende". Je croyais que c'était illégal de demander des dons pour régler une amende. Ici il n'y a pas appel à don mais à achat, mais quand même, quant ils ajoutent "d'autres auteurs mettront leurs originaux en vente dans les jours à venir", les dessinateurs ne risquent-ils pas des poursuites en plus? Me trompe-je ou devrait-on leur proposer plutôt un comité de soutien pour qu'il s'achète un antivirus (au hasard)?

Les souscriptions sont interdites, pas les ventes.

Eolas

58. Le dimanche 25 mars 2007 à 20:08 par Gathar

Un témoignage sur le contrôle d'identité. L'autre jour, en gare de RER, j'avais un bon quart d'heure d'avance. Dans le souterrain menant aux quais, j'ai donc déambulé en attendant mon transport. Dans ce même souterrain, une dizaine de policiers, qui procédaient à des contrôles "systématiques".

Pourquoi les guillemets autour ce ce mot ? Les contrôles étaient systématiques dans le sens où tous les jeunes noir ou basanés y passaient, et personne d'autre. Pourtant en 1/4 d'heure, malgré le peu d'affluence de la gare, il en est passé du monde dans la gare, dont moi, qui ne suis pas basané et ne devait plus être assez jeune, mais suis resté assez longtemps à leur porté.

En plus, je ne sais pas combien dure en moyenne un contrôle, mais là, c'était minimum 5 bonnes minutes, avec plaquage contre le mur et fouille au corps à chaque fois.

J'aurais aimé agir, faire quelque-chose contre cette injustice. Je ne savais pas quoi faire. Ce jour là, j'ai eu honte de mon pays. J'ai encore un goût amer dans la bouche quand j'y repense.

59. Le dimanche 25 mars 2007 à 20:20 par theo

raph, témoignage ne vaut pas généralité.

de même qu'à l'inverse les pratiques déviantes de "certains" policiers ne justifient pas forcément un dessin qui vise implicitement l'ensemble de la police.

le recours à "l'humour" ou "l'art" pour dire que la justice doit se tenir éloignée et que les auteurs n'ont aucune responsabilité à assumer est un travers français qui m'a toujours fait tiquer, par son mélange d'hypocrisie et de vide intellectuel.
Même si je suis d'accord que ça fout les boules de voir une cour, quelle qu'elle soit, se demander si tel dessin de Charlie est admissible ou si la pub de marithé+françois girbaud doit être interdite.

le rapport des français au langage est très jaloux. Mais de fait la loi de 1881 sur la liberté de la presse (maintes fois amendée) a résolu la question de théorie du droit (ou de philosophie, selon le point de vue) d'une manière qui me parait pertinente et sage, conforme d'ailleurs à la linguistique moderne.
Contrairement à la législation américaine qui s'arrache périodiquement les cheveux sur la frontière entre acte et "speech" (ce dernier étant protégé par le 1er amendement, par extension), la loi française estime qu'une publication ou un propos tenu publiquement est une forme d'acte. En linguistique on appelle ça un "acte de langage", tout bonnement.

malheureusement, rares sont les auteurs, quelle que soit la discipline scientifique, qui se sont penchés sur l'humour. c'est dommage, parce que le gai savoir est une bien bonne chose, et parce qu'on comprendrait un peu mieux de quoi il retourne.

en conclusion,
il me semble avoir lu que les caricaturistes sont rarement condamnés, ce qui laisse penser que la plupart des juges sont assez soucieux de protéger la liberté d'expression. Je ne suis pas en train de dire qu'il fallait condamner placid, c'est un propos plus général.

60. Le dimanche 25 mars 2007 à 21:01 par Raph

@58 theo : je pense que voulez dire "palpatation de sécurité" au lieu de "fouille au corps"...

Je me pose une question : si quelqu'un avait fait un bouquin pour expliquer à la population comme "s'autodéfendre légalement" (chose à laquelle je m'oppose, je précise) et que la couverture soit une caricature d'un groupe de jeunes nord-afr (d'ailleur, je ne vois pas pourquoi on ne dit pas maghrébins...) qui volent une voiture, n'aurait-on pas vu la LICRA, SOS racisme crié au scandale (exemple volontairement "clichet") ?

En étant (ancien) policier, cette couverture ne me choque pas. Elle m'indifèrent (tout comme les caricatures d'un prophète).

61. Le dimanche 25 mars 2007 à 21:17 par Diane

petite histoire de policiers.

Mon fils a été victime d'une infraction. J'en ai touché un mot au proc dans les couloirs qui m'encourage à déposer plainte en me disant qu'il instruirait. Je me présente à la maréchuassée et explique mon souci en ne déclinant que mon nom patronymiqueet rien de plus. Je me suis fait recevoir comme unchien dans un jeu de quille par un jeunot qui m'a sèchement expliqué qu'il n'y avait rien à faire et que je ferais mieux de rentrer chez moi au leiu de venir embêter la police avec mes salades ( qui n'en étainet pas croyez moi)

Je lui dit poliment que j'étais venue sur les conseils du parquet et j'ai eu droit à un rictus et à une remarque acerbe " on va voir ma p'tite dame si le parquet vous a dit de venir; je vais l'apeler moi le parquet et on va voir si c'est vrai ce que vous racontez car si non..." je me suis dit va mon coco, va...

Il est revenu 5 minute après livide, suivit par the big boss in personam et s'est bien sagement assis à son bureau et à pris ma plainte.

J'espère qu'il a compris que la politesse c'était pour tout le monde. Il est choquant de voir une victime se faire recevoir de la sorte. Si je n'aivais pas été avocat, on m'aurait simplement envoyé au diable et pas de la façon la plus courtoise.

Et que dire d'un ami magistrat , de teint très mat qui en traversant avec sa vieille voiture une ville de notre beau pays et qui s'est fait contrôler par deux policiers qui l'ont traité d'office de sale bougnoule! Il a laissé ces braves garçons faire leur cinéma, puis a apelé son collègue du parquet et ces deux messieurs ont eu à s'expliquer sur leurs gestes.

62. Le dimanche 25 mars 2007 à 21:23 par Diane

désolée, j'ai fait une fausse manip; je voulais prévisualiser et j'ai envoyé le post avec une montagne de fautes.

63. Le lundi 26 mars 2007 à 00:47 par DavidLeMarrec

Le problème est tout de même que la limite est trop subtile (cf. les interprétations des deux jugements, exactement opposées) pour que le citoyen puisse la deviner. Il est donc incité à critiquer autant que ça le chante tant qu’il n’indispose personne. Ce n’est pas de la censure au sens où l’Etat interdirait l’expression de certaines opinions ; mais c’en est dans la mesure où la critique, quelle qu’elle soit, est toujours potentiellement condamnable juridiquement - sans que le citoyen puisse avoir aucune certitude de ce qui est permis ou non.

C’est un vrai problème de société, à rapprocher du statut de victime qui remplace le statut de héros, de l'Etat-poule, etc.

64. Le lundi 26 mars 2007 à 03:22 par Le Chevalier Bayard

Une décision contestable qui s'inscrit de plus en plus dans une jurisprudence "sociologique".

Cette jurisprudence, fondée sur une échelle "objective" de valeurs s' expose donc à la critique "réaliste" de faire prévaloir purement et simplement les préférences du juge et d'imposer arbitrairement aux justiciables les valeurs du groupe particulier auquel le magistrat adhère.

Pour autant, il convient de rappeler, à la manière de Chaîm Perelman, fondateur de la "Nouvelle réthorique" et s'adressant au Modernes que : " La raison juridique ne mérite ni excès d'honneur ni excès d'indignité".

Perelman et Ronald Dworkin, comme d'ailleurs la plupart des théoriciens du droit du XXème siècle rappellent que le magistrat "herculéen" dans nos sociétés modernes, attire tous les regards et succède au législateur comme figure mythique, symbole du droit et de la justice.

En effet, la mission assignée aux magistrats se révéle parfois totalement hors de portée dans nos sociétés complexes et pluralistes, où coexistent plusieurs ordres de principes concurrents, voire antagonistes, reflètant des conceptions divergentes de la vie sociale et de ses fins.

De sorte que, du procès, on retient seulement le jugement qui le clôt, dont on attend qu'il retisse harmonieusement les fils d'un ordre juridique un moment décousus du litige.

Cette focalisation sur le jugement, au détriment des débats judiciaires qui le précèdent et le nourrissent, trahit la permanence et l'obsession scientiste moderne, toujours en quête d'une vérité univoque, quitte à refouler la réalité pratique du conflit et de la contradiction que le procès met en scène et dramatise.

A cet égard, rappelons que le juge se limite en principe à encadrer les débats, à présider l'audience, avant de mettre en délibéré et finalement statuer dans sa décision sur les mérites respectifs des argumentations développées devant lui.

Le juge ne motive donc pas sa décision dans l'abstrait, dans sa motivation il a un devoir absolu de répondre aux arguments soulevés par les parties.

Bref, l'argumentation judiciaire n'est pas l'apanage du juge, ni d'ailleurs de quiconque, mais le produit d'un dialogue à plusieurs voix organisé par les règles de la procédure.

Dans ce "combat" dialogique, je considère que c'est aux avocats des parties à qui il revient de ne pas être simplement bon, ni même très bon mais d'être les meilleurs...

65. Le lundi 26 mars 2007 à 13:11 par tschok

on peut partir de l'idée que la caricature procède par équivalence des moyens, c'est à dire qu'elle se propose d'opposer à l'objet qu'elle caricature les même tendances extrêmes, mais dans le sens inverse.

Par exemple quelque chose qui fait peur par sa violence va faire rire par sa bétise, parce que la bétise est associée à la violence et que le rire tue la peur.

Ici, l'équivalence des moyens c'est:
à partir du moment où une société décide que le fait qu'un seul policier se livre à un contrôle d'identité au faciès porte atteinte à l'image de la police dans son ensemble, alors, par équivalence de moyens, la caricature peut porter sur l'ensemble de la police, sans distinguer. Pourquoi? Parce qu'il appartient à la police de veiller à ce que ses fonctionnaires aient un comportement légal. Si elle ne le fait pas, et elle ne le fait pas comme le constate elle-même la cour, alors, la société est en droit de se moquer, sans avoir à distinguer ceux qui parmi les policiers font du contrôle au faciès, ou non.

En quelque sorte, par son inaction ou son action inefficace, la police endosse la faute individuelle de certains de ses membres et la caricature, même acerbe et sans nuance est alors un procédé loyal.

C'est une façon de dire: "puisque vous ne faites pas le ménage par vous mêmes, tant pis pour vous". Qui ne dit mot consent, comme dit l'adage. Donc la police doit assumer sa mauvaise image, qui n'est jamais que celle qu'elle se donne par elle-même.

Exemple dans notre culture ancienne: Guignol est une caricature qui se moque du gendarme, présenté comme un être stupide, ridicule et brutal. Le gendarme de guignol incarne les forces de l'ordre dans leur ensemble, sans distinguer, car il date d'un époque où les forces de l'ordre donnaient encore moins dans la nuance que de nos jours. Mais en contrepartie de leur soumission à une police brutale, le pouvoir de l'époque donnait au gens le droit de se moquer.

Sous notre nouvelle culture: en application de la jurisprudence de la cour d'appel de Paris, guignol est une injure ou une diffamation, ou tout ce qu'on veut.

Ici, la cour a voulu protéger l'image de la police en tant que communauté doté d'un "Moi" susceptible d'être blessé, outragé, tout en reconnaissant que des contrôles au faciès avaient bien lieu, mais que cela n'engageait pas la police dans son entier.

Ce raisonnement juridique moderne, typique de notre époque, fait il évoluer les exigences de qualité du service public à la hausse ou à la baisse?

Attention, cette question est différente de celle des libertés publiques: nous pouvons toujours nous moquer des contrôles au faciès, mais seulement en fustigeant les policiers qui s'y livrent, tout en distinguant soigneusement l'institution qu'est la police. En somme, nous n'avons plus le droit de nous moquer de la police, mais seulement des policiers pris individuellement. Cette limite apportée à notre liberté d'expression et à la fois modérée, donc licite, mais en pratique profondément ridicule car elle nous oblige à des précautions oratoires jésuistiques. Mais c'est ainsi.

La question centrale à mon sens, c'est donc: est ce qu'on a amélioré les choses, ou pas.

Mon opinion: en tranchant le problème de cette façon, la cour d'appel acrédite l'idée que les contrôles au faciès, qui révèlent de la part de celui qui s'y livre un esprit raciste et xénophobe, ne concernent pas l'institution dans son ensemble, mais sont strictement un problème de comportement individuel de la part de certains fonctionnaires.

De là à penser qu'on s'en lave les mains, il n'y a qu'un pas.

66. Le lundi 26 mars 2007 à 15:59 par Lucie

C'est l'habitude de ce dessinateur de représenter des personnages avec des têtes de cochon ! Certains dessinent des mick.. des souris, lui c'est des cochons. Y a-t-il un moyen de trouver la plaidoirie de son avocat ? Parce si cela n'a pas été évoqué, c'est qu'il y a un problème quelque part...

67. Le lundi 26 mars 2007 à 16:58 par Me Amoral

Il n'avait pas d'avocat, c'est peut être là le problème!

68. Le lundi 26 mars 2007 à 17:45 par Raph

" Estimez vous qu'il s'agit d'un échantillon représentatif ? Notez que dans ces décisions, les magistrats reconnaissent la réalité de ces pratiques."

Je pense qu'il s'agit d'un échantillon représentatif, mais dans mon commissariat, il y avait pas mal de "jeunes" qui tournaient, et donc qui étaient sorti de l'école. De plus, la hiérarchie nous donnait des instrutions et on avait des retours de parquet et des juges (on peut parler dans notre cas de très bonne collaboration entre justice et police, du moins, à mes yeux) : en plus, nous étions en sous-effectif (et mon départ n'a rien arrangé) donc, pas le temps d'emmerder les jeunes et surtout, aucun intérêt

69. Le lundi 26 mars 2007 à 19:41 par tschok

Raph,

Sauf vot' respect, M'sieur l'agent, j'imagine mal un fonctionnaire de police ou de gendarmerie dire qu'il pratique les contrôles d'identité au faciès, comme ça, en étant détendu et relax.

En général, c'est pas le genre de truc qu'on met dans les statistiques.

D'ailleurs sur les formulaires, y a pas les cases.

Mais ce serait marrant un formulaire d'évaluation avec la question: "à combien de contrôles d'identité au faciès avez vous procédé durant le mois écoulé?"

(le pire étant qu'on obtienne des réponses positives)

Parce que la cour d'appel de Paris, dans sa grande sagesse, a raison de pointer l'insuffisance de nos instruments de mesure: après tout, faute de mesures, rien ne prouve que le contrôle au faciès soit généralisé...

70. Le mardi 27 mars 2007 à 12:11 par Raph

tschok,
Je n'ai pas dis qu'ils n'existaient pas, j'ai juste précisé que ce n'était pas la généralité.

Voilà ! Et la cour condamne l'auteur pour avoir laissé entendre que tel était le cas.

Eolas

71. Le jeudi 29 mars 2007 à 16:28 par Salagir

J'ai suivis la lettre ouverte du dessinateur et ses premières lignes me semble déjà de mauvaise foi. Il parle de censure alors que nous savons ici que c'en est pas ;)

Ensuite il dit "...vient d'être condamné [...] pour avoir dessiné un représentant de l'ordre avec un "nez de cochon". Outre le fait que [je] dessine tous [mes] personnages avec des nez de cochon..."
D'une c'est loin d'être le seul problème (bave, dents, regard, etc), de deux, j'ai cliqué sur tous les liens de la page de son site (les liens sont cachés et apparaissent quand on passe dessus, sans label c'est pratique), et j'ai vu des extraits de ces BDs.
Pas un seul nez de cochon.

Je comprends qu'on peut l'avoir mauvaise à la suite d'un tel jugement mais de là à crier à la censure injuste alors qu'il s'agit quand même d'un dessin violent et directionnel...

La plume est plus forte que l'épée on dit, il est donc normal qu'une insulte dessinée puisse être sanctionnée comme une insulte physique (alias un poing dans la gueule) : editer à grande échelle un dessin n'est pas anodin.

Je ne dis pas que le jugement était super justifié (ni le contraire), mais j'aime juste pas les gens qui font semblants d'être étonnés et sont de mauvaise foi après leurs actes.

72. Le jeudi 29 mars 2007 à 20:33 par Me A... de B....

je conseille la lecture de "voix publique" LE PARISIEN - RUBRIQUE "VOS TRANSPORTS" Ed° SEINE SAINT DENIS de ce jour 28/03/07 page VIII du cahier central, sur le CRS qui fait sa justice lui-même (justice et non Justice)
en tant qu'avocat, en tant que citoyen, je ne compte plus les violations des droits de mes semblables par des policiers. certains d'entre eux entre deux couloirs des palais de Justice dénoncent le comportement de leurs collègues.
je me rappelle un policier me disant un jour qu'il donnait systématiquement l'adresse de l'IGS aux jeunes qui avaient été frappés sans raison par ses collègues.
j'ai constaté personnellement des faits répréhensibles de la part de policiers, des proches ont été victimes de comportements inadmissibles de la part de policiers, d'autres faits sont régulièrement dénoncés (CNDS), le Parquet ne fait pas suffisamment son travail de contrôle: combien de GAV prolongées de 24H sans aucun acte postérieur alors que le défèrement aurait pu avoir lieu dans les 24H, combien de qualifications erronées par manque d'examen critique des procédures dont les officiers de police veulent bien leur rendre compte, combien de GAV injustifiées dans des conditions ignobles alors qu'une convocation pour le lendemain suffirait, etc...
il y a des policiers admirables, la grande majorité, j'ose croire, leur travail est plus que risqué et nécessaire
il y a des magistrats admirables, on les brime pour avoir défendu la démocratie (ça devient un engagement politique de gauche voire de "gauchiste" de défendre la démocratie) il y a des magistrats racistes, le corps le sait mais il ne fait rien
il y a des avocats incompétents: engager la responsabilité d'un avocat incompétent est chose aisée (il est d'ailleurs assuré pour cela), faire sanctionner les manquements des policiers violents et des magistrats incompétents relève du parcours du combattant
le comportement de certains policiers nuit forcément au corps tout entier, par définition, si j'ose dire, car ce corps semble refuser d'affronter cet état de fait et nier les dérives qui sont réelles.
le désaveu et le discrédit est jeté, on a toujours tendance à généraliser
le corps doit regarder la vérité en face, certains de ses éléments n'ont rien à faire dans la police de la République
sarkozy ne l'y incite pas vraiment : il viole la présomption d'innocence, viole la séparation des pouvoirs, dit, par exemple, que l'autorité judiciaire serait à l'origine de la GAV de la directrice d'école alors que c'est un OPJ qui place en GAV, etc...
je me rappelle le décès des 2 jeunes dans le transformateur: on a dit qu'ils étaient connus des services de police, ces 2 jeunes meurent dans des conditions atroces, et on salit leur mémoire
alors que M. DELARUE a droit à un stage de citoyenneté, c'est très bien une justice clémente, personnalisée, j'attends de voir appliquer cette jurisprudence à un cas similaire natif du 93
il n'y a pas que dans le 93 qu'on asperge des femmes d'essence avant de mettre le feu, il suffisait de voir l'émission de M. HONDELATTE dimanche dernier pour voir que les crimes ne sont pas endémiques à tel ou tel endroit
les infractions sont plus fréquentes partout où l'éducation, le respect, le soutien reculent et où la précarité et les inégalités avancent
je ne le savais pas forcément avant de devenir avocat, je le constate depuis tous les jours
j'arrête sinon je fais faillite
y'a pas moyen d'avoir un correcteur d'orthographe quand on fait un commentaire, je suis nul en informatique ?

73. Le jeudi 29 mars 2007 à 21:32 par Me A... de B....

en fait c'est LE PARISIEN du 29/03/07 oups et gloups

74. Le lundi 16 avril 2007 à 19:23 par Apokrif

"Le dessin perd le statut de caricature parfaitement légale parce qu'il accompagne un texte qui n'est absolument pas caricatural mais se veut des plus sérieux."

Ce qui veut dire que l'infraction n'aurait été pas constituée si le livre avait eu un caractère "pamphlétaire"... c'est-à-dire si la charge contre la police avait été *plus* violente!

75. Le samedi 28 avril 2007 à 10:48 par henriparisien

J’arrive après la bataille,

Concernant le dessinateur, son dessin n’a un caractère diffamatoire que parce qu’il accompagne un texte qui se veut sérieux. Ce n’est donc pas le dessinateur qui a commis un délit, mais l’éditeur qui a retenu le dessin pour illustrer la revue.

Avec un bon avocat, il aurait été relaxé ? Ou je me trompe ?

76. Le mercredi 23 mai 2007 à 17:07 par Docteur C

Dans votre compte-rendu de la procédure, vous omettez, cher Maître, certains élements pittoresques: le fait qu'après plusieurs plaintes émanants de syndicats de policiers (toutes déclarées irrecevables) des policiers ont manifesté portants masques porcins... Pratique discutable lorsqu'elle émane de nos forces de l'ordre. C'est cette manifestation qui aura provoqué la plainte du ministère de l'intérieur.

Par ailleurs, rappelons aussi le fait que le livre n'était pas édité par le syndicat de la magistrature, mais par "l'esprit frappeur" soit Michel Sitbon, qui est lui aussi condamné dans l'affaire.

Rappelons enfin que le tirage de ce livre ne devait pas dépasser les 3000 exemplaires, peu diffusés, ce qui achève d'agiter cette tempête dans un verre d'eau.

Enfin, un livre intitulé "tous coupables" a été édité par un collectif d'éditeurs "les cochons enragés" et il est toujours disponible dans toutes les bonnes librairies de France. Il regroupe essentiellement des réactions écrites et dessinées à cette condamnation:
www.editions-rackham.com/...

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