Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

Aller au contenu | Aller au menu | Aller à la recherche

Recherche

Votre recherche de libération conditionnelle a donné 47 résultats.

mardi 20 mars 2007

C'est un fou, il repeint sa peine plancher...

Une de mes taupes m'a transmis un argumentaire de l'UMP destiné à ses élus sur différents points du projet du candidat de ce parti. L'un d'entre eux a immanquablement attiré mon attention, puisqu'il porte sur une nouveauté ne figurant pas dans le programme que j'ai commenté, celui de l'instauration de peines plancher pour les multirécidivistes.

L'argumentaire fait une page, et a de quoi laisser le juriste perplexe, et le pénaliste proche de l'apoplexie.

Comme d'habitude sur ce blog, un peu d'explications et de vocabulaire pour comprendre de quoi il s'agit, ce paragraphe ayant d'ailleurs tout lieu d'intéresser les rédacteurs de ce... truc.

Le Code pénal fixe pour chaque infraction une ou plusieurs peines. On les appelle peines principales. Il s'agit de peines d'amende et d'emprisonnement.

Chaque infraction se voit ainsi affecter une peine, mais il s'agit d'une peine maximum.

Ainsi, l'article 311-3 du Code pénal dispose-t-il que :

Le vol est puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros d'amende.

Cela ne signifie pas que tout voleur sera puni de trois ans d'emprisonnement et de 45000 euros. Cela signifie que tout voleur peut être puni d'une peine de prison pouvant aller jusqu'à trois ans ainsi que d'une peine d'amende pouvant aller jusqu'à 45000 euros, les deux cumulativement ou l'une de ces deux peines seulement.

C'est le rôle du juge de fixer la peine la plus adéquate. C'est un principe fondamental, qu'on appelle individualisation des peines. Le principe est posé à l'article 132-24 du Code pénal, mais le Conseil constitutionnel en a fait un principe à valeur constitutionnelle. C'est là l'un des aspects essentiels de l'audience pénale, et dans mes plaidoiries, je ne néglige jamais la question de la peine, qui est trop souvent traitée sous forme d'une invocation de l'indulgence du tribunal.

La récidive, enfin, s'entend d'une personne condamnée définitivement, c'est à dire qui n'a pas fait appel ou a épuisé les voies de recours, qui commet à nouveau des faits similaires. J'insiste sur le similaire. Le voleur qui à la sortie de prison bat sa femme n'est pas récidiviste. La loi assimile certaines infractions au regard de la récidive (l'escroquerie et l'abus de confiance, par exemple). Elle assimile également entre elles les infractions les plus graves, c'est à dire les crimes, et les délits punis de 10 années d'emprisonnement. Un meurtrier qui commet un viol à sa sortie de prison (ou en prison...) est un récidiviste. L'effet de la récidive est de doubler la peine encourue (le vol en récidive est ainsi passible de six années d'emprisonnement et de 90.000 euros d'amende).

Voilà le décor posé.

Maintenant, voici le magnifique argumentaire proposé par l'UMP (les gras sont tous de moi).


L’INSTAURATION DE PEINES PLANCHER POUR LES MULTIRECIDIVISTES POURQUOI, COMMENT ?

1. Pourquoi ? Même si le taux de récidive globale n’est que de 14,5% (personnes condamnées successivement pour deux délits de même nature), parmi les 357 440 personnes condamnées en 2004 pour un délit, 111 156 avaient déjà été condamnées au moins une fois depuis 2000, soit un taux de recondamnation de 31%.

Les analystes oublient de dire que le taux de récidive chute encore plus bas (environ 5%) quand le condamné a bénéficié de mesures d'aménagements de peine ou d'une libération conditionnelle. La bataille contre la récidive se mène très discrètement dans les cabinets des juges d'application des peines. Ce n'est clairement pas le but de ce projet, la phrase suivante le démontrant de manière fort comique.

Ces taux sont beaucoup plus élevés lorsqu’ils sont analysés précisément :

En clair : sans rien changer à la réalité des faits, nous allons élever ces taux par une analyse précise. Magie des chiffres...

o 71% des personnes condamnées à de la prison ferme avaient déjà été « averties » par une décision judiciaire au moins une fois ;

Superbe exemple de manipulation des chiffres. Pour qu'un juge prononce de la prison ferme, il faut soit que les faits soient extraordinairement graves au point de faire de la prison la seule peine adéquate (c'est rare : ce sont les crimes ou des délits très graves), soit que la personne ait déjà été condamnée. Les premières condamnations sont souvent d'avertissement, c'est à dire assorties du sursis. Une condamnation avec sursis interdit d'ailleurs de bénéficier d'un nouveau sursis simple, et les sursis avec mise à l'épreuve ne peuvent se cumuler qu'à concurrence de deux. Donc en évacuant les affaires d'une extrême gravité, il ne reste comme candidats à l'hospitalité de la république que les personnes ayant du sursis au casier. D'où un taux forcément très élevé de personnes déjà "averties". Cela ne révèle aucune information criminologique, c'est la conséquence naturelle de la politique pénale qui vise à privilégier l'avertissement à la neutralisation à la première sanction, politique dont on sait qu'elle entraîne fort peu de récidive.

o plus d’un condamné à de la prison ferme sur deux réitère dans les cinq ans suivant sa libération. Ce taux atteint 70% pour les personnes condamnées pour violences volontaires avec outrage, et même 72% dans le cas des personnes condamnées pour vol avec violence ;

Le réitérant n'est pas le récidiviste. Le réitérant est celui qui commet une nouvelle infraction après avoir été définitivement condamné, mais de nature différente de la première. Ce chiffre porte donc sur des personnes déjà enfoncées dans une délinquance habituelle et antisociale. Elles ne bénéficient d'ores et déjà d'aucune clémence de la part des tribunaux. Mais en tout état de cause, ce ne sont des multirécidivistes concernés par les peines plancher. Bref, un hors sujet pour le plaisir de citer des chiffres qui vont bien : un sur deux, 70%, 72%... Ca passe bien au vingt heure.

o près du tiers des agresseurs sexuels sur un mineur réitère dans les cinq ans qui suivent leur sortie de prison ;

Ca me parait beaucoup, mais je n'ai aucune source pour contester ces chiffres. Toujours est-il que les pulsions sexuelles sur mineur relèvent d'une pathologie mentale. Pas assez profonde pour en faire des déments au sens pénal (donc irresponsables) mais des soins sont indispensables en plus de la sanction. En prison, non seulement ces soins ne sont pas ou mal assurés mais les délinquants sexuels sont sans cesses agressés verbalement et physiquement par les autres prisonniers (ils sont appelés les "pointeurs"). On a donc des déséquilibrés, traités comme des chiens en prison, qui ont perdu leur emploi, et généralement leur famille et leurs amis à la sortie. Ca alors, leurs pulsions réapparaissent vite. La solution proposée est : les laisser plus longtemps en prison...

Enfin, pour relativiser : les agressions sexuelles sur mineurs recouvrent en grande partie les exhibitionnistes, ceux qui téléchargent des photographies pédophiles, les agressions plus graves étant souvent commises dans un cercle familial, qui suppose donc pour le passage à l'acte une facilité d'accès à la victime et une emprise exercée sur elle. On est loin du fantasme du prédateur sexuel à la Dutroux, qui écume les rues à la recherche d'enfants sans surveillance.

o près de six condamnés à un sursis avec mise à l’épreuve assorti d’un travail d’intérêt général sur dix réitèrent dans les cinq ans, et quatre sur dix sont condamnés à une peine de prison ferme.

...Donc, prononçons directement une peine de prison, et tant pis pour les 40% qui ne réitéraient pas. Une réflexion sur les TIG pour les réformer ? Pourquoi faire. La prison, y'a que ça qui plaît à l'électorat.

La moitié des crimes et délits connus en France sont commis en réalité par une infime minorité de délinquants (5%).

J'ai déjà dit ce que je pensais de ces chiffres, issus d'un rapport dont l'auteur lui même a contesté les conclusions qui en étaient tirées par le candidat de l'UMP. Si le reste des chiffres cités dans cet argumentaire sont aussi fiables, on est déjà dans le domaine du fantasme.

Ces niveaux de réitération traduisent l’impuissance de la justice à offrir des sanctions dissuasives.

L'impuissance de la justice et le fantasme de la dissuasion absolue, du délinquant terrorisé qui devient honnête mû par la peur. A se demander pourquoi il y a encore de la délinquance en Iran ou en Chine, où la justice est loin d'être impuissante.

2. Comment ?

Les délinquants ne doivent pas tous être traités de la même façon par la justice. Quelqu’un qui commet pour la première fois une infraction ne peut être traité comme un délinquant d’habitude.

Peut être parce que ce n'est PAS un délinquant d'habitude ?

La société doit protéger ses citoyens et se montrer intraitable vis-à-vis de ceux qui ne respectent rien, ni personne en réitérant des infractions en dépit d’avertissements judiciaires. Elle doit, pour cela, instituer des peines plancher pour les multirécidivistes.

Multirécidiviste... Voyons : récidiviste, qui commet un deuxième délit. Multirécidiviste, cela s'appliquerait donc à trois infractions, minimum, non ? Et bien non, comme on va le voir. C'est juste pour ajouter un multi- en préfixe, pour accentuer la menace. Comme ultra- devant libéral, néo- devant conservateur, crypto- devant communiste. On n'est jamais trop anxiogène.

Le niveau des peines plancher serait de plus en plus important en fonction du niveau de la récidive. Les peines seraient ainsi comprises entre une peine minimale et une peine maximale, le juge ne pouvant se soustraire à cette fourchette qu’en ne sanctionnant pas la personne prévenue. Les peines infligées resteront donc évidemment proportionnelles au type d’infractions commises et à la personnalité de leur auteur.

Les peines plancher ne s'appliqueront donc pas aux personnes innocentes, voilà qui est une bonne nouvelle.

J'avoue que pour ma part, le caractère "évidemment" proportionné à la personnalité de l'auteur d'une peine en dessous de laquelle le juge ne peut aller ne m'apparaît pas évident, ce caractère automatique étant bien au contraire antinomique avec la personnalisation. Si un juge estimait devoir descendre assez bas dans l'échelle de la peine, c'est en vertu de la personnalisation. Le lui interdire contrevient à cette personnalisation. Dire le contraire, c'est mentir. Le barème cité en exemple le démontre d'ailleurs :

Un article du code pénal pourrait établir l’échelle des peines plancher de la manière suivante :

- à la première réitération, la peine plancher serait fixée à moins de la moitié de la peine encourue ;
- à la deuxième réitération, la peine plancher serait fixée à 75% de la peine encourue ;
- à la troisième réitération, la peine plancher serait fixée au maximum de la peine encourue.

Où est la personnalisation quand le plancher est égal au plafond ? Notons le terme de réitération, définie à l'article 132-16-7 du Code pénal : le réitérant n'est pas le récidiviste. On est donc dans l'hypothèse où le juge n'a plus le choix, ce n'est pas entre le maximum encouru pour le délit simple et le double de ce chiffre du fait de la récidive, c'est bien le max automatiquement, sans discussion possible sauf sur un point de détail : la culpabilité.

Quand le plancher touche le plafond, la maison devient inhabitable, ses habitants meurent étouffés...

Reste à justifier de la légalité de cette aberration. C'est indiscutablement le meilleur morceau.

Ce système de peines plancher est parfaitement conforme à nos principes juridiques :

Ha. Ha. Je ris déjà. Avec Guy Canivet au Conseil constitutionnel, je doute que la chose paraisse aussi évidente rue Montpensier.

- il est conforme au principe de l’individualisation des peines. Les peines plancher ne portent en aucune manière atteinte à la marge d’appréciation reconnue au juge quant à la culpabilité du prévenu. Le juge pourra toujours faire varier la peine au sein d’un intervalle. Une peine plancher n’est en aucun cas une peine automatique ;

Trois lignes après avoir écrit "à la troisième réitération, la peine plancher serait fixée au maximum de la peine encourue"... Il faut se relire, parfois.

- des peines minimales obligatoires existent déjà en matière criminelle (même si elles sont très basses). L’article 132-18 du code pénal dispose ainsi que, lorsqu’une infraction est punie de la réclusion criminelle, la cour d’assises peut prononcer une peine de réclusion criminelle pour la durée encourue (ou inférieure), mais aussi une peine d’emprisonnement qui ne peut alors être inférieure à deux ans ou un an (suivant la peine encourue). Il s’agit donc bien de peines minimales, qui peuvent certes être assorties du sursis ;

Savez vous dans quel type d'affaire les cours d'assises se heurtent à ce plancher qu'elles ne peuvent pas perforer ? Les affaires d'euthanasie, comme celle jugée il y a peu par la cour d'assises de Périgueux. C'est d'ailleurs la peine qui a été prononcée à l'encontre du médecin, l'infirmière ayant été acquittée. Ce sont les seules. On voit bien que ce système de peine plancher ne fait qu'entraver une juridiction qui aurait sans doute voulu aller plus bas pour montrer sa compréhension du geste en même temps que le nécessaire respect de la loi.

Car si le Dr Tramois recommençait à aider un patient à mourir, cette fois, ce serait une peine plancher de quinze ans qui s'appliquerait à elle. Elle vous paraît toujours aussi belle, cette idée de peine plancher ?

- le système des peines plancher existait sous le régime de l’ancien code pénal en vigueur jusqu’en 1994. L’ancien code pénal exprimait les peines sous forme d’intervalles, avec un minimum et un maximum. Ce n’est que depuis le nouveau code pénal, entré en application en 1994, qu’il n’est prévu, pour chaque infraction, qu’une peine maximale ;

J'adore la référence à un texte abrogé. Si on l'a abrogé, c'est qu'il y avait peut être une raison, non ? Surtout, c'est faire montre d'une ignorance crasse.

L'ancien code pénal prévoyait en effet un intervalle de peines. Le vol était ainsi puni selon l'ancien article 381 de trois mois à trois ans de prison. MAIS ce que les rédacteurs ignorent (je ne veux pas croire qu'ils l'aient tu sciemment...) c'est qu'un article 463 dans ce même code permettait au juge de reconnaître des "circonstances atténuantes" permettant alors de prononcer une peine moindre à ce plancher. Ainsi, le vote par la cour d'assises des circonstances atténuantes à un assassin lui faisait échapper à la guillotine. De fait, les planchers de l'ancien Code pénal n'étaient plus que symboliques, les juges ayant depuis longtemps pris l'habitude de fixer la peine qui leur semblait convenir, et de préciser le cas échéant qu'ils accordaient les circonstances atténuantes. C'est cette pratique que le législateur a consacré en juillet 1992 en votant le nouveau code pénal et son système de peines maximum sans minimum, abrogeant au passage le système des circonstances atténuantes.

J'ajoute pour conclure que le Code pénal est entré en vigueur le 1er mars 1994. Nicolas Sarkozy était donc ministre (du Budget) dans le dernier gouvernement à avoir appliqué l'ancien Code pénal et le premier à avoir appliqué le nouveau. Pour son ignorance, je ne lui trouve pas de circonstances atténuantes.

- le système des peines plancher existe dans presque tous les pays étrangers, la France étant un des seuls Etats à reconnaître une totale liberté dans la détermination de la peine.

Il n'y a pas de liberté totale, contrairement à l'ancien régime. Le juge ne peut prononcer que des peines prévues par la loi, dans la limite de leur maximum légal. Il jouit d'une liberté dans l'indulgence. Parce que lui, contrairement au législateur, est dans le prétoire, il voit et entend le prévenu, il entend les témoins, il entend la victime, et il a des éléments soutenus par un avocat justifiant une éventuelle clémence.

Quant aux "pays étrangers", l'Angleterre reconnaît une aussi grande liberté au juge, de même que l'Espagne, l'Allemagne, le Portugal, l'Italie, pour parler des pays dont je connais un peu le système répressif... En fait, le seul exemple de pays démocratique avec un système de peine plancher que je connaisse, ce sont les Etats-Unis. Avec les résultats que mes lecteurs connaissent.

Par ailleurs, afin de limiter davantage la récidive, il faut trouver des solutions pour les personnes arrivées en fin de peine, mais toujours dangereuses pour la société car refusant de se soigner (notamment les délinquants sexuels) : soit ces personnes acceptent de se faire soigner et la société doit pouvoir contrôler que tel est le cas, soit il faut prévoir leur maintien en milieu fermé avec un contrôle judiciaire, comme cela existe dans de nombreux Etats démocratiques.

Le meilleur pour la fin. Le rétablissement de l'embastillement. La privation de liberté au delà de la peine, par décision administrative, juste au cas où, pour ne pas prendre de risque. J'aimerais bien connaître la liste de ces "nombreux Etats démocratiques". J'aurais tendance à penser qu'un pays qui a ce genre de politique cesse de pouvoir porter ce titre.

Je n'ose soulever le fait que si un condamné refuse tout soin avec obstination, ça peut être aussi parce qu'il est innocent, et que par l'effet de cette loi, il ne recouvrerait jamais la liberté. En France, on ne poursuit pas d'innocents pour des accusations de crimes sexuels. Ca se saurait, non ?

jeudi 1 mars 2007

Commentaire en direct de "Nos Juges" : La Liberté Sous Conditions

Bonsoir. Deuxième épisode de la trilogie sur nos juges. Ce soir : un juge d'application des peines, ou "JAP" (prononcer "Jappe").

  • Le JAP peut être saisi sans formes par un détenu. C'est ce qu'a fait le premier prévenu, épileptique. Avant de statuer, le juge peut rencontrer le condamné. C'est cet entretien que nous voyons, il ne s'agit pas d'une audience à proprement parler. Le JAP a un bureau dans le centre de détention pour éviter de lourds transfèrements au palais de justice. En région parisienne, vu la taille des prisons, ce n'est pas le juge, mais un agent de probation du SPIP (Service Pénitentiaire d'Insertion et de Probation) qui assure ces permanences et fait le travail de préparation des dossiers. Je ne sais pas si cette JAP est particulièrement consciencieuse ou n'a pas d'agent du SPIP à sa disposition.


  • Oui, toutes les prisons sont aussi déprimantes qu'elles en ont l'air.


  • Les éléments pris en compte par le JAP pour envisager une libération conditionnelle sont, outre la personnalité et le comportement du condamné en détention, les efforts faits pour indemniser les victimes, et le projet mis en place pour la sortie : promesse d'embauche, logement à la sortie. Un JAP ne mettra personne dehors s'il n'a pas de domicile ni de travail.


  • Je parie que le détenu qui avait promis un coup de fil de ministre a été condamné pour escroquerie. Sous prétexte qu'ils ont dupé quelques personnes, ils pensent pouvoir berner aussi les avocats et les juges. Et pour certains, les condamnations répétées n'ébranlent pas leur conviction en leur faculté de persuasion...


  • Ces audiences sont récentes. C'est la réforme de la loi Perben II qui a prévu les débats contradictoires en présence facultative d'un avocat pour les demandes de libération conditionnelle. Ces audiences sont facultatives si le juge pense accorder la mesure. Ce sont donc des dossiers "limites" qui sont examinées en audience. Le directeur d'établissement donne un simple avis.


  • La "semi-liberté" est en fait la semi détention : le condamné passe la nuit en prison (pas dans les mêmes cellules que les condamnés) et sort la journée pour aller travailler ou suivre une formation. Les week-ends peuvent faire l'objet de permissions.


  • Encore un escroc. Admirez la qualité de l'expression orale, le dossier fourni, l'argumentation bien développée. Mais le dossier se révèle bancal. Le procureur s'oppose bien prévisiblement.


  • Tiens ? Qu'est ce que c'est que cette délibération avec le procureur, une fois le condamné sorti ??


  • Il est inexact de dire que la juge ne décide pas, n'accepte ni ne refuse : elle a décidé. L'ajournement est une décision, prévue par la loi. Notons la différence de comportement du condamné lors de la notification. Il n'est plus l'humble pénitent, il est la victime d'une "honte" pour la justice française...


  • Audience de la femme homicide. Pas facile, ce dossier...


  • Le juge ramène le procureur en voiture en lui servant de chauffeur... Je n'ai rien contre le co-voiturage, mais entre ça, et la discussion informelle à la porte "je ne sais du tout ce que je vais faire dans ce dossier", je souris en pensant aux magistrats qui se défendent de toute collusion entre le siège et le parquet. La distance nécessaire entre le juge et les parties, et le procureur est une partie, est ici clairement abolie. La moindre des choses serait qu'ils s'interdisent de parler de ces dossiers une fois l'audience achevée. Je n'aime pas trop cela.


  • Les décisions de placement en quartier disciplinaire, le "mitard", sont prises non par le JAP mais par ce qu'on appelle "le prétoire", une commission disciplinaire présidée par le directeur d'établissement accompagné d'un représentant des gardiens. Depuis 2000, le détenu peut être assisté d'un avocat. C'est un accident législatif qui l'a permis. le législateur a voté un texte qui s'appliquait au prétoire sans qu'il s'en rende compte. Le JAP n'a pas le pouvoir de lever une décision de mitard, qui est une sanction administrative et peut, depuis peu là aussi, faire l'objet d'un recours devant le tribunal administratif. Il y a dix ans encore, un prisonnier était condamné au mitard sans être défendu et sans recours possible. France, pays des droits de l'homme.


  • Demande de permission de sortie. Elles sont de la compétence du JAP. Elles ne sont pas prises en audience, car elles ne modifient pas la peine. C'est une commission, présidée par le JAP, où participe l'administration pénitentiaire.


  • Audience du TAP : Tribunal d'application des peines. Il traite notamment les demandes de libération conditionnelle pour les prisonniers condamnés à plus de dix ans et à qui il reste plus de trois ans à exécuter (art. 730 du code de procédure pénale). C'est ce qu'on voit ici.


  • Délibération du tribunal immédiate. Les juges profitent du fait d'être réunis pour délibérer tout de suite. Ces secondes qui durent des heures... Bien sûr que le condamné qui va être libéré dit merci. Curieux que les juges ne comprennent pas cela. Ce prisonnier condamné pour viol est un "pointeur", il est menacé tous les jours et est considéré comme un moins que rien par les autres détenus. Il est depuis des années dans un endroit où le temps semble ne pas bouger. Le tribunal lui accorde le retour à la vie. Merci est le mot qui vient spontanément à l'esprit. Les juges préféreraient être sûrs qu'il ne récidivera pas, bien sûr. Eux vivent dans le futur, lui sort d'un présent immobile. Le malentendu est inévitable.


Déjà fini ? Le temps passe vite quand on s'amuse.

Le prochain Burgaud sera un JAP ? Non : un JAP ne peut mettre un innocent en prison. Enfin, si, il peut, techniquement, mais il ne sera pas celui qui a commis l'erreur. Mais c'est certain que c'est un poste exposé avec l'état d'esprit sécuritaire actuel. Ce documentaire a hélas mis en lumière un élément tout à fait exact : la triste absence des avocats des prétoires des JAP. Non pas que nous boudions la matière, mais rares sont les prisonniers qui veulent ou peuvent exposer les frais d'un défenseur. C'est dommage. On ne fait pas que monter les dossiers, on explique les enjeux au condamné qui comprennent mieux ce qui les attend dehors.

Un manque à ce documentaire : le travail du JAP hors les murs de la prison. Le JAP a un bureau au palais de justice, et traite les dossiers des condamnés à de la prison ferme pour moins d'un an (et c'est la majorité des peines), des sursis avec mise à l'épreuve, des placements sous bracelet électronique, et c'est une part importante de leur activité.

La semaine prochaine, troisième épisode : le juge d'instance. La justice civile, à nouveau, qui juge les litiges entre particuliers.

mardi 20 février 2007

«Nos juges», une série de trois documentaires sur la justice

France 2 va diffuser à partir de ce jeudi 22 février une série de trois documentaires suivant le quotidien de trois juges, aux fonctions diverses, à trois stades de carrière différents.

Le premier épisode, « Le tribunal du désamour », diffusé ce jeudi à 22h50, est consacré à Isabelle Schmelck, vingt ans d’exercice, qui est juge aux affaires familiales au tribunal de grande instance de Créteil. Ses fonctions portent principalement sur deux points : les procédures de divorce, et les affaires liées à l'exercice de l'autorité parentale, le plus souvent la fixation d'un droit de visite et d'hébergement et d'une pension alimentaire. Les procédures de divorce supposent nécessairement l'intervention d'un avocat, pas celles sur l'autorité parentale. Les audiences se tiennent en cabinet, à huis clos, la juge assise à son bureau ne portant pas la robe.

Le deuxième, « La liberté sous conditions », sera diffusé mercredi 28 février, également en deuxième partie de soirée, suit Françoise-Léa Cramier, 28 ans, qui entre dans ses fonctions de juge d’application des peines à la sortie de l’Ecole de la Magistrature. Là aussi, ce sont des audiences en cabinet, juge sans robe. Beaucoup de décisions peuvent être prises sans même une audience (lorsqu'un prisonnier sollicite une libération conditionnelle et que le juge pense y faire droit, il peut se passer de l'audience). Son rôle se limite (si j'ose dire, c'est déjà considérable) aux mesures d'aménagement des peines : avant l'emprisonnement, envisager des alternatives, comme le placement sous bracelet électronique ou la semi détention (le condamné sort dans la journée pour aller travailler et dort en prison), si la peine ne dépasse pas un an. Pour les incarcérés, il décide des réductions de peines supplémentaires, des permissions, des libérations conditionnelles. <del>Il n'a aucune compétence pour modifier la peine elle même</del>(en fait, si) Il n'est pas un juge d'appel sur la peine : si un problème apparaît, c'est de la compétence de la juridiction ayant prononcé ladite peine. Il ne traite que des dossiers de condamnés, la culpabilité n'est jamais en débat. C'est un poste méconnu, ça peut être intéressant.

Le troisième et dernier, « Le tribunal de la vie ordinaire », diffusé le jeudi 1er mars, toujours sur France 2, toujours en deuxième partie de soirée, sera consacré à Pierre-François Martinot, 32 ans, juge d’instance à Châteaubriant, en Bretagne. Le tribunal d'instance juge les affaires civiles moyennes, portant sur une somme comprise entre 4000 et 10000 euros. En dessous, c'est le juge de proximité, au dessus, c'est le tribunal de grande instance. Le ministère d'avocat n'est pas obligatoire devant ce tribunal, on peut se représenter soi-même. Le tribunal d'instance juge également certaines affaires, quel qu'en soit le montant, car la loi lui en attribue la compétence : les affaires de baux d'habitation (sauf pour le remboursement du dépôt de garantie, c'est le juge de proximité), les affaires de crédit à la consommation, par exemple. Le juge d'instance est aussi juge des tutelles dans son ressort : il ouvre les procédures de mise sous tutelle ou curatelle et suit leur déroulement.

Je n'ai pas vu ces documentaires, j'en ignore la qualité. Mais je me devais de les signaler. Je tâcherai de les regarder et ouvrirai un billet consacré à chacun de ces épisodes pour que nous en discutions en commentaires.

Inside the délibéré

Comme annoncé, voici un billet d'une guest star,

Lire la suite...

vendredi 22 décembre 2006

Y'a des fois, quand même...

Comme mes lecteurs habitués le savent, je suis un ami des Etats-Unis. J’aime et admire ce grand pays qui nous a tant appris sur la démocratie au point que nous préférons l’oublier et faire comme si elle était née chez nous, avec son frère jumeau, l’Etat de droit, et j’aime beaucoup, à l’occasion, tordre le coup à quelques idées reçues qui courent par chez nous pour tenter de démontrer que ce pays ne mérite qu’aux mieux, mépris, et au pire, crainte.

C’est donc vierge de tout parti pris que je puis m’indigner de quelque chose qui s’y passe.

En l’occurrence, une décision discrète, qui passerait inaperçue si l’internet ne la reliait pas. Parce que quelques fois, la raison défaille, face à une décision indigne d’un pays civilisé.

Je veux donc vous parler de Genarlow Wilson. Il a 19 ans, bon athlète, bon étudiant, avec une moyenne générale de 16/20[1], pas de casier judiciaire.

Il a été interpellé en août 2004 et placé en détention provisoire.

Les faits qui lui sont reprochés laissent pantois : lors du réveillon du Nouvel An le 31 décembre 2003, lui et cinq de ses copains et une copine de lycée ont loué une chambre d’hôtel et ont fêté l’année nouvelle d’une façon plutôt paillarde. A cette occasion, cette jeune fille de 15 ans lui a fait une fellation, lui en avait 17. Elle était consentante. Le tout a été filmé.

En France, un juge ne dirait qu’une chose : « veinard ! ». En Georgie, dans le Comté de Douglas, il a été considéré comme un child molester, un délinquant sexuel sur mineurs. J’insiste sur un point : le rapport était consenti et la supposée victime n’a pas porté plainte.

Bon, un emballement judiciaire dans un Etat sudiste réputé pour ses jeunes femmes prudes et fidèles, et on a envie de ricaner devant ces juges coincés et outrés qu’un jeune homme de 17 ans ait des pulsions sexuelles, et qu’une jeune fille de 15 ans puisse y répondre.

Désolé de gâcher l’ambiance.

En Georgie, l’âge de la majorité sexuelle est de 16 ans (il est de 15 ans en France). La loi de Georgie prévoit que l’agression sexuelle sur mineur est un crime passible de 10 ans de prison minimum, sans possibilité de libération conditionnelle (parole), et d’être inscrit à vie sur les fichiers des délinquants sexuels. Il a été condamné à 11 ans, dont dix sans parole, et un an de probation, outre son inscription à vie sur les fichiers de délinquants sexuels. Ses compagnons de chambrée, ayant plaidé coupable, purgent des peines de cinq années. Genarlow avait plaidé non coupable.

Le 15 décembre, la Cour Suprême de Georgie a confirmé ce jugement.

Ca vous glace ?

Il y a pire encore.

En 2006, le parlement de Georgie a modifié le Code pénal de cet Etat pour transformer le délit d’agression sexuelle sans violence ni contrainte ni surprise sur une victime âgée de 13 à 16 ans par un auteur de 18 ans ou moins en délit mineur (misdemeanor) passible d’un an de prison maximum. La peine prononcée contre Genarlow Wilson relève d’un crime aboli.

Sauf que le législateur a expressément exclu que la loi nouvelle s’applique à des faits antérieurs. Ce que la Cour Suprême de Georgie n’a pu que constater, dans cet attendu de son président qui fait frémir :

Ainsi, bien que je sois très sensible à l’argument de Wilson sur l’injustice de condamner ce jeune homme prometteur, avec de bons résultats scolaires et aucun antécédent judiciaire à dix années de prison sans parole et une inscription à vie comme délinquant sexuel parce qu’il a eu un rapport sexuel oral consenti avec une jeune fille de 15 ans, soit âgée de deux ans de moins que lui, cette Cour est tenue par la décision du parlement que des jeunes personnes dans la situation de Wilson n’ont pas droit au traitement de délit mineur désormais prévu par l’article 16-6-4 (d) du Code pénal de Georgie (OCGA).

Notons que cela ne pourrait arriver en France : la rétroactivité de la loi pénale plus douce, principe à valeur constitutionnelle, interdirait au parlement de prévoir que l’abolition de ce crime ne puisse profiter à des personnes en cours de jugement ou déjà condamnées.

Mais, quand, sous les meilleurs prétextes du monde, celui de vous protéger des méchants, vous et vos enfants, on vous parle de durcir la répression des mineurs, de prévoir des peines plancher, quand chaque nouvelle loi répressive prive le juge de son pouvoir d’adaptation de la peine, souvenez vous de Genarlow Wilson. 19 ans. Pas de casier. Très bons résultats. Un avenir prometteur.

Tout cela, broyé, détruit, anéanti. Au nom de la protection des mineurs.

Ha, il était mineur, lui aussi ?

On ne fait pas d’omelettes sans casser des oeufs.


Un billet juridique sur la question sur le blog The Volokh’s conspiracy. L’auteur est très pessimiste sur les chances de succès d’un recours devant la cour suprême des Etats-Unis.

Merci de vous abstenir de propos anti-américains en commentaire, je les effacerai. Ce sont des américains qui m’ont informé de cette affaire et tous expriment leur indignation face à cette affaire. Même la Cour Suprême de Georgie trouve cette décision injuste. Et Bush n’a rien à voir là dedans (il n’a pas le pouvoir de gracier). Récupérer cette affaire pour de la propagande serait abject.

Notes

[1] Pour une meilleure compréhension, j’ai traduit sa situation scolaire aux normes françaises. Pour les puristes, son Grade Point Average (GPA) est de 3.2 sur 4.

mardi 28 février 2006

Les petits Outreau

Au coeur des émeutes de l'automne dernier, j'avais raconté l'ambiance électrique qui pouvait régner dans certains tribunaux de banlieue à cette époque dans ce billet : La banlieue dans le prétoire.

Un confrère, Atoon, racontait son expérience dans un commentaire :

Un petit mot pour confirmer tes impressions d'audiences : j'ai assuré la défense d'un jeune à une audience dans des circonstances similaires : tentative d'incendie d'un centre social reconnu par un prévenu qui dénonce trois des ses amis. Les trois dénoncés nient. Aucune enquête de police, audience de comparution immédiate dans une ambiance très similaire au cas que tu évoques et conclusion : tout le monde a pris 12 mois dont 7 fermes avec mandat de dépot.

Je ne sais pas si mon client était coupable, il a 23 ans, un casier vierge, n'a qu'une envie c'est de partir de sa banlieue et le voilà en prison pour 7 mois (moins les remises automatiques) et un avenir professionnel un peu plus compromis.

J'ai fait appel et j'ai espoir (vain sans doute).

Je me demande cependant comment notre société compte faire grandir le respect du à la justice dans ces cités à partir du moment où les citoyens y sont traités par la justice de façon aussi légère.

J'imagine si en bas de chez moi une voiture avait brulé, la police aurait fait une enquête, ordonné confrontation des prévenus (ce qui n'a pas été fait dans le cas que j'évoque), interrogé des témoins, fait des constatations matérielles et n'aurait renvoyé à une audience normale que les personnes contre lesquelles ils existaient d'autres preuves qu'une simple dénonciation.

En période de crise, les garanties des justiciables semblent s'effacer d'autant plus vite qu'ils viennent de certains milieux...

Pour finir l'anecdote, à la même audience j'ai assisté un jeune plus blanc et habitant un quartier plus fréquentable qui avait reconnu avoir brulé plusieurs voitures. Pompier volontaire, j'ai plaidé la pyromanie et la prise en charge médicale. Il n'a écopé que d'une peine avec sursis...

Ce même confrère vient de reprendre contact avec moi pour me raconter la suite.

L'appel a eu lieu aujourd'hui, mon client a été relaxé au vu de l'indigence du dossier. Son honneur est sauf, mais il a passé un peu plus de trois mois en prison. A noter qu'à l'audience, l'avocat général m'a carrément fait la leçon en ces termes : votre client aurait mieux fait de purger sa seine et de s'en contenter plutot que d'interjeter cet appel dénué de toute chance d'aboutir.

Comme quoi, il ne faut pas toujours écouter les confrères qui m'ont tous dissuadé de faire appel également (je précise comme tu l'as deviné que je ne fais pas partie de la grande caste des pénalistes).

Comme je lui ai répondu, cette relaxe obtenue en appel contre l'avis du parquet général et surtout de cet aréopage de confrères bien intentionnés l'y fait renter au contraire par la gande porte.

Les propos de l'avocat général tels qu'ils sont rapportés peuvent surprendre et méritent d'être interprétés. Ce magistrat n'a certainement pas voulu dire que quand on est condamné à tort, il vaut mieux ne pas faire appel malgré tout plutôt que d'oser insinuer qu'un tribunal s'est trompé. Cette appréciation repose sur un calcul simple : condamné début novembre, à sept mois fermes, cela veut dire libération au bout de cinq mois (soit date de sortie début mars, peine purgée) et possibilité de libération conditionnelle mi janvier, c'est à dire qu'il pouvait espérer être libéré avant que l'appel ne soit jugé, tandis que son appel, ayant un effet suspensif, empêchait le jeu des réductions de peine et a fait que le prévenu a comparu détenu devant la cour. Dès lors, faire un appel aurait été un très mauvais calcul de la part de l'avocat si la condamnation avait été confirmée. Voilà le fondement du reproche formulé par l'avocat général.

Ce genre de calcul est fréquemment fait par les prévenus condamnés à de courtes peines de prison (du genre deux ou trois mois fermes) qui savent, s'ils ont de l'expérience, ou apprennent très vite à la maison d'arrêt qu'ils sortiront plus vite s'ils ne font pas appel. Et les juges des tribunaux correctionnels le savent très bien eux aussi. Le tuning de la peine existe pour décourager les appels sur des dossiers où l'intime conviction du juge l'emporte sur les faits matériels dans le dossier.

Et voilà un prévenu qui a effectué trois mois de détention pour rien. Et qui a eu le courage de préférer la prison à l'admission d'un délit qu'il n'avait pas commis contre l'espoir d'une plus prompte sortie. Un mini Outreau, qui passera inaperçu et donnera lieu à une indemnisation misérable.

Je ne vais pas me lamenter en versant des larmes de crocodiles sur cette justice qui se trompe parfois. La justice peut se tromper, parfois aussi en relaxant un coupable, et de telles détentions sont inévitables. Traitez moi de cynique désabusé, mais j'en fais mon parti. Tant que je ne serai pas infaillible, je n'aurai pas le front d'exiger que d'autres le fussent. Je voulais juste que cette affaire, noyée dans le maëlstrom quotidien du traitement en temps réel, qui emporte juges, procureurs, avocats et surtout prévenus et parties civiles, ne passe pas par perte et profit.

Car le jugement qui a envoyé un innocent trois mois en prison commençait par ces mots : Au Nom du Peuple Français.

jeudi 23 juin 2005

Liberté conditionnelle et récidive

Après un long silence, j'essaye de reprendre le rythme des billets réguliers.

Le premier ministre de l'intérieur, très en verve ces jours ci, a posé temporairement son kärcher pour saisir son martinet et se propose de "faire payer" un juge "pour sa faute" dans l'affaire Patrick Gateau. Il s'agit d'une personne ayant été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité pour des faits de meurtre qui, à l'occasion d'une liberté conditionnelle, a enlevé et assassiné une femme, la caractère sordide de l'affaire étant aggravé par le montant dérisoire du butin : 20 euros. Il y a de quoi enflammer l'opinion publique, et le ministre de l'intérieur est très sensible à l'opinion publique (sans doute dans la perspective de sa prochaine candidature au conseil général des Hauts de Seine ?).

Comme d'habitude en matière de démagogie, le raisonnement semble frappé du coin du bon sens : Gateau était condamné à perpétuité, un juge l'a remis dehors quand même, Gateau en a profité pour tuer quelqu'un, ergo : le juge est responsable de cette mort.

Dans la réalité, maintenant, pourquoi remet-on un condamné à perpétuité en liberté, ce qui semble paradoxal, et qui prend la décision ?

Lire la suite...

page 3 de 3 -

Mes logiciels, comme mes clients, sont libres. Ce blog est délibéré sous Firefox et promulgué par Dotclear.

Tous les billets de ce blog sont la propriété exclusive du maître de ces lieux. Toute reproduction (hormis une brève citation en précisant la source et l'auteur) sans l'autorisation expresse de leur auteur est interdite. Toutefois, dans le cas de reproduction à des fins pédagogiques (formation professionnelle ou enseignement), la reproduction de l'intégralité d'un billet est autorisée d'emblée, à condition bien sûr d'en préciser la source.

Vous avez trouvé ce blog grâce à

Blog hébergé par Clever-cloud.com, la force du Chouchen, la résistance du granit, la flexibilité du korrigan.

Domaine par Gandi.net, cherchez pas, y'a pas mieux.