Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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L'autre Outreau

Mes deux billets sur Outreau ont eu le don d'attirer des Monsieur Prud'homme qui commentant pour la première, et j'espère la dernière fois sur ce blogue, déversent leur bile sur ma modeste personne en voyant dans mon affirmation que toute cette affaire relève d'un fonctionnement normal de l'institution judiciaire une sorte de défense corporatiste revenant à dire que tout s'était fort bien passé dans la meilleure machine judiciaire du monde.

Loin de là. Quand j'entends Fabrice Burgaud répéter sans cesse qu'il n'a fait qu'appliquer les règles du Code de procédure pénale, je partage la crainte que mon confrère Jean-Yves Le Borgne a exprimé cet après midi sur La Chaine Parlementaire : j'ai bien peur que ce ne soit vrai. Et c'est là mon seul propos : le fonctionnement normal de la machine judiciaire n'est pas satisfaisant, voilà ce qu'a montré une fois de plus cette affaire.

Oui, une fois de plus, car contrairement à ce qui est souvent dit ces temps ci, Outreau n'est pas une révélation, ni même un cas unique.

Dominique Barella, secrétaire général de l'Union Syndicale des Magistrats (syndicat majoritaire et modéré) rappelait qu'en 2004, c'est 832 personnes qui ont bénéficié d'un non lieu ou ont été relaxé ou acquitté après avoir effectué de la détention provisoire. Aucune de ces détentions n'a à ma connaissance été demandée par Fabrice Burgaud. 832, cela fait plus de deux par jour… Le député Georges Fenech, ancien juge d'instruction, pose un autre chiffre effrayant : sur 2002, ce serait en tout, en cumulant les durées des détentions provisoires ayant précédé les décisions de non lieu, relaxe ou acquittement, 534 années de détention provisoire pour rien qui ont été effectuées. J'ignore comment il a effectué ce calcul, je vous le donne tel quel.

Et puisqu'il faut raviver notre mémoire si courte, rappelons que nous avons déjà connu une affaire digne de celle d'Outreau.

Le 1er septembre 1998 s'est ouvert un procès gigantesque, celui dit du réseau Chalabi. Quatre années d'intruction menée par le juge Jean-Louis Bruguières, 100 tomes, soit des milliers de pages de procès verbaux, 138 prévenus, dont 27 détenus, à tel point que le gymnasse de l'Ecole Nationale de l'Administration pénitentiaire sera aménagée en salle d'audience pour 1,5 millions d'euros pour les deux mois que durera le procès.

Et le 22 janvier 1998, 51 prévenus sur 138 ont été reconnus totalement étrangers à ce réseau. Sur ces 51, 20 ont été toutefois reconnus coupables d'infractions mineures sans lien avec un réseau terroriste, et 31 ont été reconnus innocents de toute infraction. Certains avaient passé quatre ans en détention provisoire.

Il n'y a pas eu de commission d'enquête parlementaire. Pas de demande de la tête du juge Bruguières, qui exerce encore aujourd'hui à la section antiterroriste où il est en charge des dossiers les plus délicats. Pas de demande de suppression de la fonction du juge d'instruction.

Il est vrai que les prévenus n'avaient pas vraiment l'accent ch'ti.

Alors si vous voulez mon avis (sinon, qu'est ce que vous faites sur mon blogue ?), lâchons un peu les basques du juge Burgaud, ce salaud idéal et providentiel, et demandons nous pourquoi nous avons accepté que ce scandale fait en notre nom à tous perdure aussi longtemps.

La discussion continue ailleurs

1. Le mercredi 8 février 2006, 23:18 par Le blog Machin

Pauvre juge (suite)

La fin de l'audition approche, et je lis Maître Eolas qui une fois de plus, exprime très bien les choses

2. Le mercredi 8 février 2006, 23:46 par Blog de Bertrand Lemaire

Outreau : ou trop ou trop peu

Que serait la Blogosphère sans Maître Eolas ? Son dernier billet sur l'Affaire d'Outreau est remarquable. Outre trop vous inciter à lire ce billet, je risque par mon petit commentaire très passionnel de...

3. Le jeudi 9 février 2006, 01:45 par Falaises de marbre

Good night, and good luck

Je n'ai pas regardé l'audition du juge Burgaud, pas par envie de le faire, mais parce que je n'étais pas devant un poste de télé cet après-midi. J'en ai vu de courts extraits dans le journal de Mlle Drucker sur France 3 ce soir. Je n'ai d'ailleurs...

4. Le jeudi 9 février 2006, 11:57 par Met@llaH blOg

Outreau le fiasco

Hier comme certaines d'autres personnes j'ai écouté attentivement ce jeune juge qui a tenté de se défendre d'avoir fait son travail... Avant de vous livrer l'habituel billet du jeudi consacré à l'écologie je vous livre mes impressions à propos...

5. Le jeudi 9 février 2006, 13:05 par [Cup Of Tea] Blog

[ La curée ]

Il serait bon, pour le respect des valeurs d’humanisme que tout un peuple réclame hystériquement au vu de l’affaire d’Outreau, de bien vouloir cesser de dépecer en place publique le juge Burgaud, que son destin d...

6. Le jeudi 9 février 2006, 14:54 par Le blog du monde qui avance

Euuuuh... dit le juge

Quand le président se tait et offre la parole au petit juge, je m'attends à une formule de politesse, un simple "Merci, monsieur le président", par exemple. Curieusement, il n'y a rien de ce genre. Le juge ne se précipite pas pour parler, on le devine...

7. Le jeudi 9 février 2006, 15:39 par KoZtoujours... tu m'intéresses

Janus Burgaud

Représentation de Janus J’ai suivi la dernière heure et demie d’audition du juge Burgaud, hier soir. Dernière heure et demie de sept heures d’interrogatoire. Et je ne fais probablement que traduire le sentiment de tous, et notammen...

Commentaires

1. Le mercredi 8 février 2006 à 16:16 par jules

Je suis également cette émission et la trouve de bonne qualité (je n'ose consulter TF1 ou France 2) ; pour une fois.

Ne faut-il pas ajouter ; quel prix la société est-elle prête à payer pur garantir la présomption d'innocence ?

A l'évidence, les mesures suggérées par Pascal Clément et rapportées par D. Barella en matière de détention provisoire méritent attention (pas de détention provisoire sauf pour les récidivistes et/ou les personnes accusées de crime).

Mais cela supposerait de laisser en liberté des personnes prévenues de coups et blessures contre leur compagne/épouse (pour faire dans le rapport d'actualité)...

Sans vouloir risquer ma chemise, je suis prêt à parier que l'on entendra(it) ceux-mêmes qui parlent du "scandale d'Outreau", évoquer le scandale des "prévenus qui battent leur femme en liberté" (ou que sais-je).

Autre dilemme que je sens affleurer. "Il faut laisser faire bénéficier les innocents de la présomption d'innocence et envoyer les coupables en détention provisoire."

Absurde ? Mais tout autant que de s'indigner de ce que des "innocents" aient fait de la détention provisoire, non?

2. Le mercredi 8 février 2006 à 16:16 par Authueil

Je suis entièrement d'accord avec votre analyse qui parle du fonctionnement "normal" de la justice et c'est effectivement effrayant que des vies puissent être broyées ainsi. Mais d'un autre coté, il faut en France des électrochocs de ce type pour que les choses avancent, c'est dommage, mais c'est comme cela. Il faut voir maintenant ce que les politiques vont faire (et là, j'ai quelques craintes). Il faudrait commencer par donner quelques moyens à une institution judiciaire maintenue en permanence au bord de l'asphyxie budgétaire. C'est ce que tous hurlent à tous les niveaux. Ensuite, il faut réformer avec l'institution, et pas contre elle. Quelles sont les forces en présence au sein de l'institution? le rapport de force est-il favorable à des évolutions? Ne connaissant pas ce milieu, je n'en sais rien, mais c'est là une clé pour une réforme réussie. Il faut aussi éviter les récupérations en vue de la présidentielle, pas évident vu la manie de Sarkozy de faire feu de de tout bois. Enfin, il faut que les politiques puissent gérer l'émotion populaire soulevée par ce naufrage judiciaire, sans pour autant se laisser dominer par cette émotion et tomber dans les réformes démagogiques. Il ya donc du travail et bien des écueils.

3. Le mercredi 8 février 2006 à 16:16 par jep

salutations,

je suis tout a fais d accord avec votre interprétation.
Je suis actuellement en train de regarder les émissions spéciales "burgaud contre le reste du monde" . Les chaînes de télé y vont à coup d envoyé spéciaux. Le compte à rebours a commencé: plus que 30 minutes, effet d annonce garanti.
Je subodore que cette audition ne va pas changer la face du monde, ni celle (malheureusement) de la procédure pénale francaise.
toutefois, il faut espérer que cette commission éclaire nos concitoyens sur le fonctionnement de la justice, sur le fait que rendre la justice est un acte éminemment complexe. En d'autres termes, que la passion actuelle retombe pour aboutir à des pistes de réflexions pluridisciplinaires et empli de raison.
Bien à vous.

4. Le mercredi 8 février 2006 à 16:19 par Dam

HS > sur le bandeau de gauche
"Tous les billets de ce blog sont la propriété exclusive du maître de ces lieux. Toute reproduction (hormis une brève citation en précisant la source et l'auteur) sans l'autorisation expresse de leur auteur"
Il semble qu'il manque la fin de la phrase non (ou c'est encore un texte juridique que je ne comprend pas :)

5. Le mercredi 8 février 2006 à 16:21 par nouvouzil

Bravo! Enfin le vrai débat va pouvoir avoir lieu.

J'ajoute que le but de la Commission est de faire un audit pour pouvoir ensuite légiférer, et que ce but est antinomique avec la notion de sanction contre les audités.

6. Le mercredi 8 février 2006 à 16:41 par Neville

Du choix des mots:

Cher Confrère,

J'ai peur que vous soyez victime d'un malentendu : non, dans l'affaire d'Outreau, on ne peut pas parler de déroulement "normal", mais hélas de déroulement "habituel".

Car ce n'est pas normal qu'une quinzaine d'accusés, reconnus ensuite innocents, aient subi un placement en détention provisoire, et aient été jeté en pâture à la vindicte générale ( on ne parle que de la détention provisoire dans cette affaire, pas de l'atteinte à la réputation).

Mais c'est habituel, et effectivement, de ce qu'on sait de ce dossier par la Presse, il ne semble pas que le Juge BURGAUD ait violé de règles de procédure pénale.


@ Jules : Restreindre la détention provisoire aux cas de crimes ne serait pas une garantie absolue puisque précisément dans l'affaire d'Outreau, le viol étant un crime, les mis en examen auraient néanmoins pu être détenus pour rien.

7. Le mercredi 8 février 2006 à 16:59 par pangloss

Il faut reconaître que le juge Burgaud est un bouc emmissaire providentiel pour ceux qui ne veulent rien faire.
C'est triste de devoir esperer, de supplier qu'on n'entende pas seulement ceux qui hurlent le plus fort mais aussi ceux qui sont au contact de la machine judiciaire tous les jours...

8. Le mercredi 8 février 2006 à 17:05 par Pierre

Je suis d'avis de ne pas accabler le juge burgaud qui agissait dans le cadre de ses fonctions dans l'intérêt général et non pas dans son intérêt, mais deux remarques :
- La loi sur le renforcement de la présomption d'innocence et les droits des victimes a été promulguée le 15 juin 2000 et s'inscrit dans ce souci d'éviter ou de limiter le recours à la détention provisoire (et dont les travaux préparatoires remontent à la décennie 90)

"Il n'y a pas eu de commission d'enquête parlementaire. Pas de demande de la tête du juge Bruguières, qui exerce encore aujourd'hui à la section antiterroriste où il est en charge des dossiers les plus délicats. Pas de demande de suppression de la fonction du juge d'instruction.

Il est vrai que les prévenus n'avaient pas vraiment l'accent ch'ti"

L'intérêt du législateur pour les personnes innocentes injustement détenues n'est pas né de l'affaire Outreau

- "L'électrochoc" est peut être dû au fait que 100% des détenus ont finalement été acquittés ?

Les acquittés d'Outreau devant la commission d'enquête ont souligné le caractère bref des entrevues avec ce juge avant de passer quelque temps en prison... la procédure pénale est peut être un peu légère ?

9. Le mercredi 8 février 2006 à 17:46 par Neville

@ Pierre :"100% des détenus ont finalement été acquittés"
Non, il y a quand même eu quatre mis en examen condamnés, les parents et un couple de voisins des principales victimes.

Mais sur les 14 autres, hors mis celui qui s'est suicidé, mettant ainsi fin aux poursuites à son égard, il est vrai que 7 ont été acquittés à St-Omer, et les 6 autres, qui avaient fait appel, l'ont finalement été à Paris.

10. Le mercredi 8 février 2006 à 17:52 par xave

Mais enfin ! Il ne s'agit pas de l'accent chti mais de celui du Pas-de-Calais, faut pas confondre !

11. Le mercredi 8 février 2006 à 17:59 par Chic, un romain !

Oui, enfin, bon, on obtient plus facilement d'importantes réformes en commençant par pendre le barde de passage et en dévorant quelques sangliers.

Pourquoi pas lui ?

12. Le mercredi 8 février 2006 à 18:21 par Pierre

@ Neville : Merci pour la rectification, c'était un raccourci pour dire que c'est peut être cette proportion d'acquittés qui choque l'opinion, le rappel de cette affaire étant assez pertinent :

"Et puisqu'il faut raviver notre mémoire si courte, rappelons que nous avons déjà connu une affaire digne de celle d'Outreau.

Le 1er septembre 1998 s'est ouvert un procès gigantesque, celui dit du réseau Chalabi. (...)

Et le 22 janvier 1998, 51 prévenus sur 138 ont été reconnus totalement étrangers à ce réseau. Sur ces 51, 20 ont été toutefois reconnus coupables d'infractions mineures sans lien avec un réseau terroriste, et 31 ont été reconnus innocents de toute infraction. Certains avaient passé quatre ans en détention provisoire.

Il n'y a pas eu de commission d'enquête parlementaire. Pas de demande de la tête du juge Bruguières, qui exerce encore aujourd'hui à la section antiterroriste où il est en charge des dossiers les plus délicats. Pas de demande de suppression de la fonction du juge d'instruction.

Il est vrai que les prévenus n'avaient pas vraiment l'accent ch'ti."

13. Le mercredi 8 février 2006 à 18:32 par jules

@ Neville,

Oui, je sais que le viol est un crime ;-)

Mon observation portait sur la proposition faite par Clément pour restreindre la détention provisoire.

En tout état de cause, je ne vois guère comment on pourrait éviter que des personnes soient mises en détention provisoires puis relaxées ou acquittées, sauf à supprimer la détention provisoire ou écarter le procès.

14. Le mercredi 8 février 2006 à 18:54 par Neville

@ Jules : Vous savez que le viol est un crime, et non un délit, mais apparemment, notre garde des Sceaux, qui veut limiter la détention provisoire aux cas de crimes pour éviter un nouvel Outreau, ne s'est visiblement pas aperçu qu'une telle mesure n'aurait pas évité aux accusés dOutreau de se retrouver en détention puisqu'il s'agissait de crimes.

Pardon si j'ai pu laisser croire que c'est vous que je visais dans ma remarque sur l'inefficacié d'une telle réforme au cas d'espèce.

15. Le mercredi 8 février 2006 à 19:09 par snep

Je suis entièrement d'accord avec ce billet d'Eolas. La question qui se pose désormais est celle de savoir quelles vont être les conséquences du rapport qui sera rendu par la commission d'enquête parlementaire. Monsieur le rapporteur Houillon a indiqué que le législateur ne saurait se contenter de réformettes compte tenu de l'ampleur qu'a pris l'évenement. Admettons. Dans quelques mois, notre procédure pénale est réformée dans un sens favorable aux droits de la défense. Le législateur opte pour une procédure accusatoire soumettant la joûte Parquet/Défense à une juge du siège jouant le rôle d'arbitre.
Il restera à mon sens quelque chose de fondamental à réformer et qui n'est pas inscrit dans les textes.
Et ce quelquechose, c'est les mentalités!
J'entends par là l'attitude de certains (et je souligne le "certains") juges qui méprisent totalement la défense et qui lèvent les yeux au ciel lorsqu'on leur parle de présomption d'innocence. Je parle de ces juges qui, en comparution immédiate, ne prennent pas le temps de lire l'enquête de personnalité du prévenu mais qui en revanche passe une heure à décortiquer le témoignage de la partie civile venue relater le choc qu'elle a eu lorsqu'elle a trouvé la vitre de la portière de son véhicule brisée.
Je ne dis pas, loin s'en faut, qu'il convient de minimiser la souffrance des parties civiles (je n'apprécierai pas non plus de voir mon véhicule fracassé), mais simplement qu''il conviendra de rééquilibrer le "jeu" tous les jours à l'audience et pas seulement dans les textes.
Parce que les textes (vous savez ceux qui sont d'intérprétation stricte), ils disent beaucoup de choses (du genre "la liberté est le principe et la détention l'exception") mais leur application en pratique est loin d'être aussi angélique!
Voilà! ça fait du bien

16. Le mercredi 8 février 2006 à 19:27 par jules

Bon, la réforme proposée par Clément aurait été inefficace dans l'affaire d'Outreau. Mais il me semble qu'il se prononçait, de façon générale, sur les façons de réduire la détention provisoire.

En tout état de cause, je ne vois guère quelle réforme serait efficace, sauf, peut-être, à imposer au juge de déférer aux demandes de la défense et du ministère public.

Et on pourrait ajouter à cela, que parmi la somme des responsables, on fait peu de cas de l'opinion publique, qui semble espérer que la détention provisoire (si possible avec torture et privation de télévision) s'appliquera bel et bien aux coupables sans effleurer jamais les innocents qui attendront leur procès dans la chaleur de leur foyer.

Au reste, on peut rappeler que c'est le jld qui prononce la mise en détention provisoire (et non pas le juge d'instruction); qu'il est tenu de s'assurer que les arguments exposés par le juge d'instruction sont vérifiés. A ma grande surprise, les personnes les mieux informées, qui assurent avoir suivi les audition des accusés devant la commission, ne semblent n'avoir pas retenu cet élément.

17. Le mercredi 8 février 2006 à 20:06 par BrunoNation

De toute façon le système reposera toujours sur la qualité du juge pour une part non négligeable quelque soient les perfectionnements que le législateur pourrait apporter. Et là, on a le sentiment qu'il y a eu une instruction uniquement à charge, que les doutes dont se prévaut le juge - et sur lesquels on peut avoir des doutes aussi ! - n'ont jamais bénéficié aux mis en examen. Franchement, l'audition me paraît dramatique et je comprends que 70% des français ont peur d'avoir à faire à la justice ...

18. Le mercredi 8 février 2006 à 20:47 par BrunoNation

incroyable ! il ne comprend même pas l'interrogation subtile de Houillon ...

19. Le mercredi 8 février 2006 à 20:51 par fb

Maître, "on" parlait de vous (et d'autres sujets relatifs à la justice) ce soir sur France Culture (Travaux Publics).

20. Le mercredi 8 février 2006 à 21:05 par leeloo

j'ai été très étonnée de l'attitude du juge F. Burgand cet après-midi... d'une part, il paraissait très peu sur de lui, d'autre part, il est clair que ce n'est pas un orateur... loin de là...

Son discours est loin d'être construit, il ne finit pas ses phrases... bref... curieuses impressions par rapport à ce que j'en avais lu dans le presse... cinglant, autoritaire, sur de lui... tous ces qualificatifs m'ont semblé totalement hos propos cet après-midi...

21. Le mercredi 8 février 2006 à 21:17 par skoobeedoo

Si vous pensez que Fabrice peut continuer à envoyer des innocents en prison, envoyez COUIC au 118218
Si vous pensez qu'il faut se servir de l'occasion pour lui faire porter le sombrero et oublier que le système judiciaire est mangé au vers, envoyez FFUITT au 22 à Asnières
Si vous pensez qu'avec des juges aussi peu télégéniques la justice devrait être remplacée par une redif en boucle de la croisière s'amuse, envoyez TF1M6 au 18/06/1815

22. Le mercredi 8 février 2006 à 22:13 par Pierre

Bon, c’est peut être à la mode de taper sur les magistrats et il y a un problème dans cette affaire. Mais, en spectateur attentif des séances de la commission, il faut reconnaître aussi qu’il semble y avoir eu un gros dysfonctionnement au niveau du barreau de Boulogne avec de grosses carences en matière de défense des indigents, des pauvres, etc.

Je comprends parfaitement qu’un cabinet doit faire son chiffre chaque mois pour pouvoir continuer à vivre, etc. Mais il y a eu une attitude de détachement, d’indifférence de certains avocats « commis d’office ». Et il est certains au vu des bourdes, du manque de combativité de certains pour leurs clients n’ont pas leur place dans cette profession.

Je pense et très rapidement qu’il faut aussi que le CNB tire les conséquences des carences des auxiliaires de justice intervenant en matière de défense pénale.


23. Le mercredi 8 février 2006 à 22:14 par NKIG

Alors là vous m'otez les mots de la bouche Cher Maître,

Et moi, je vais lui dire quoi au jury quand je vais la passer à l'oral la procédure pénale ?

Votre bien dévoué;-)

24. Le mercredi 8 février 2006 à 22:49 par Bib2

Oui, quelle que soit l'améllioration des lois (et je crois qu'elles en auraient bien besoin), au final, ce sont les hommes qui les appliqueront. Avec un pouvoir d'appréciation subjective ! Et aucun examen validant ne garantira jamais la maturité, la sagesse, la pondération, la perspicacité des magistrats.
Les avocats sont là pour équilibrer la balance. Cela ne fonctionne pas toujours, ou tardivement comme dans cette affaire. Mais cela fonctionne le plus souvent, heureusement.
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Maître Eolas, lorsque vous énoncez les résultats du procès du réseau Chalabi, vous écrivez :
"[...] le 22 janvier 1998, 51 prévenus sur 138 ont été reconnus totalement étrangers à ce réseau. [...] 31 ont été reconnus innocents de toute infraction. Certains avaient passé quatre ans en détention provisoire.",
vous savez bien que parmi les 31 innocents se trouvent peut-être des coupables que l'on n'a pu identifier formellement, ou dont les avocats étaient particulièrement habiles.

J'ose alors poser une question iconoclaste : qui sait si les 14 acquittés d'Outreau - pardon, 13 - sont bien innocents ? Mais tout le monde est d'accord : mieux vaut libérer un coupable que punir un innocent.

25. Le mercredi 8 février 2006 à 22:53 par Zozo

Une question qui me turlupine : Et si ce juge avait débuté sa carrière par un CPE... Aurait-il été licencié par son employeur à la fin de son travail, sans explication ?

26. Le mercredi 8 février 2006 à 23:06 par Luc

Que Burgaud soit, peu ou prou, la victime expiatoire de la mauvaise conscience de tout un shystème c'est l'évicence. Mais de là l'absoudre azu prétexte qu'il a respecté le code à la lettre !

Après son audition de ce soir, il devrait probablement être poursuivi pour faux témoignage sous serment. Un seul exempe : quand il affirme que dans ses P-V d'audition tout était scrupuleusement noté, y compris le fait que quelqu'un frappe à la porte de son cabinet, non seulement cela est contredit par tous les acquittés, par leurs avocats, mais aussi par les P-V eux-mêmes.

On a évoqué au cours de l'audition de Burgaud un P-V d'un interrogatoire de Badaoui au cours duquel il pose UNE seule question.
Et l'inculpée (aujourd'hui condamnée) répond par une tirade de 33 lignes dactylographiées dans laquelle elle dit "il s'agissait BIEN de Daniel Legrand".
Ce "BIEN" au milieu de la phrase trahit de façon évidente qu'il y a eu une question incidente du juge et que c'est plus que probablement lui qui a prononcé le nom de Legrand, que l'autre ne fait que confirmer (comme elle n'a cessé de tout confirmer jusqu'à l'absurde). Or cette question, dont l'existence ne semble pas douteuse, n'est pas transcrite.

Je suis convaincu que Burgaud a menti, et pas uniquement sur ce point.
Quant à ses "regrets", prononcés du bout des lèvres....

Le comble est atteint quand il dit qu'il ne referait pas les choses de la même manière ! Vous voyez un type qui a provoqué une catastrophe venir dire "si c'était à refaire je le referais" ? A part Chirac, je ne vous pas qui pourrait le dire !

Mais il y en a un autre qui fait encore mieux : le procureur Lesigne qui, si j'en crois Le Monde, promet de déposer avec sincérité. Mais il va prêter serment lui aussi ! Alors c'est quoi cette promesse faite à des journalistes ? De qui il se moque, Lesigne ?

Pour conclure, il me semble à ce stade qu'il y a deux grandes catégories professionnelles qui ont aussi une lourde responsabilité dans cette affaire et qui ne semble pas prêtes à le reconnaître et à en tirer les conséquences.

Les média, d'abord. La surenchère télévisée de mercredi soir est de particulièrement mauvaise augure. TF1 et le soi-disant service public se sont une fois de plus livrés une concurrence du plus mauvais aloi, sur le mode racoleur le plus écoeurant. Pujadas sur antenne une heure avant le début de l'émission ... ! Pour ressasser encore et encore les mêmes histoires, raconter les mêmes âneries. Et hélas Robert Badinter qui se prêté à cette comédie et affirme que Burgaud a l'air d'un bon gars qui lui rappelle tant et tant de ses étudiants sérieux et appliqués. Même pour ce grand homme la vieillesse est un naufrage.

Les parlementaires ensuite. Ils ont eu le culot de demander à Burgaud pourquoi il n'avait pas acheté une caméra pour remplacer celle de la police, hors d'usage ! Ils sont à ce point ignorants de tout qu'ils ignorent qu'il y a d'une part un ministère de l'Intérieur (occupé par vous savez qui, et j'emploie le mot "occupé" dans un sens précis) et d'autre part un ministère de la Justice dont on préfère oublier les noms de la plupart des anciens titulaires comme de l'actuel. Burgaud a beaucoup de torts, mais de là à lui demander de vérifer le bon état de marche des équipements du commissariat ! Faut pas qu'il aille laver les voitures de patrouille aussi ?

Donc, ces messieurs qui votent des budgets de misère pour la Justice depuis des lustres sont enclins à demander des comptes à tout le monde... sauf évidemment à eux-mêmes, toujours très satisfaits et donneurs de leçons. Ignobles et ridicules, voilà les mots qui me viennent à l'esprit.

27. Le mercredi 8 février 2006 à 23:30 par Sans pseudo

Bib2, je vous félicite votre question n'est pas iconoclaste.
Du moins ni i, ni oclaste.
Vous non plus.

28. Le mercredi 8 février 2006 à 23:31 par brigetoun

j'ai vu une petite partie de l'audition des acquittés et j'ai arrêté. Malaise. Voyeurs et non compatissants les télespectateurs s'indignent après avoir fait leur pâture des journaux au moment de l'"affaire" et applaudi aux lois Perben. Il ne s'agit pas de disculper le juge qui avait peut être une opinion faite d'avance et a été trop perméable au contexte, mais que le public (nous) et les journalistes s'indignent sans se remettre en question...
Très triste que Badinter se soit prété à cette mise en scène.

29. Le mercredi 8 février 2006 à 23:31 par Corinne

Luc #26 <i>Burgaud a beaucoup de torts, mais de là à lui demander de vérifer le bon état de marche des équipements du commissariat ! Faut pas qu'il aille laver les voitures de patrouille aussi ?</i>

Lol (enfin, un peu jaune, vu l'affaire). Effectivement la question était peu judicieuse.

Ce qu'on oublie aussi, c'est que parfois dans les grandes administrations, voire les grandes entreprises, il est plus facile d'obtenir quelque chose de gros (genre renouvellement de tous les ordinateurs) qu'un truc aussi insignifiant qu'une agrafeuse.

30. Le jeudi 9 février 2006 à 01:16 par StraightfromtheCask

Je partage nombre de questions et d'opinions ici développées et je remercie Maître Eolas de nous offrir une fois de plus le lieu et les termes d'un échange serein et sincère. Je partage l'avis de snep notamment qui soulève un mal bien pire que celui de l'inflation législative : les mentalités. Je ne peux que rejoindre le constat de Luc sur l'impossible absolution du juge Burgaud, de même que sur les conditions de travail des acteurs de la machine judiciaire française, qui sont lamentables.
Certes, Fabrice Burgaud ne doit pas porter seul le poids d'un échec collectif. Ce que Luc suggère, et qui n'est pas mis en évidence par l'exécution sommaire du petit juge de St Omer, est que ce dernier s'inscrit totalement dans l'approche, dans les conceptions et dans les réflexes propres à sa profession (je ne parle pas ici de qualités professionnelles mais de modus operandi). Il est même certainement loin d'être la lanterne rouge des magistrats instructeurs. Mais l'hystérie médiatique actuelle ne le laissera pas entrevoir. Les plaideurs sont là pour accompagner, défendre et parfois raisonner leurs clients. La hiérarchie est là pour ordonner, aiguiller, diriger les poursuites du Parquet. Le magistrat instructeur est seul. Qu'il partage un dossier avec un confrère n'y changera rien et le nombre de juges d'instruction ainsi que le budget de fonctionnement des institutions concernées rendent certaines hypothèses actuelles risibles "en l'Etat". L'hérésie tient avant tout dans le fait de laisser un jeune premier de la classe seul face à un Outreau. Elle se poursuit quand on lui propose l'aide qu'on devrait lui imposer. Elle persiste quand il la refuse. Elle règne en maître (et en TNT) depuis ce soir. Ne réformer "que" les textes n'inversera pas le processus de déliquescence bien engagé dans les esprits.

31. Le jeudi 9 février 2006 à 09:07 par Guignolito

@Eolas :
Vous avez commis une erreur manifeste sur les dates du procès Chalabi. Parce qu'un procès qui finit avant d'avoir commencé (ouverture le 1er septembre, condamnations le 22 janvier de la même année), ça n'existe que dans les régimes communistes.

32. Le jeudi 9 février 2006 à 09:13 par Marc

Cher Maître,

En cette heure matinale, je me permets de prendre la plume (!) avec la précaution et l'humilité qu'impose la gravité de cette affaire.

Tout d'abord votre avis m'intéresse, pour votre opinion en tant que professionnel du droit, et surtout pour la sensibilité, l'humanité qui semble émerger de vos billets et qui rejoignent les miennes.

Je suis tout à fait d'accord sur l'erreur et le danger qui consisterait à placer le Juge Burgaud dans le rôle du bouc-emissaire. Je suis tout à fait prêt à vous croire lorsque vous dites que le droit a été parfaitement respecté et qu'il n'y a pas eu d'erreur judiciaire.

Cette affaire nous apprend la chose suivante : vous, avocat, moi, enseignant, n'importe qui, peut demain voir sa vie totalement basculer. Une maladie, un accident, bien que dramatiques, ne sont à mettre que sur le compte de la fatalité.

Mais voir sa vie brisée suite au fonctionnement normal d'une justice d'un pays comme le notre, suite à l'application des textes, quelle conclusion en tirer?

Soyons concrets et plaçons nous du point de l'individu. Les institutions sont entre de bonnes mains. Demain, vous, moi, sommes accusés de pédophilie, et nous nous retrouvons devant un juge d'instruction. Demain, nous nous entendons signifier notre détention provisoire. Que ferez-vous? Que ferais-je?
Accepter le système en espérant une réparation? S'enfuir? Se suicider? Se défendre au mieux et devenir le chef de file d'une association de victimes de l'institution judiciaire?

Tout cela est bien pauvre, et comme je doute qu'il y ait une révolution dans nos textes, il faudra pour certains, dans l'avenir, faire le choix que je propose.

C'est pourquoi je reviens sur l'attitude parfaitement légale du Juge d'Instruction.
Tout d'abord, et ce n'est pas de son fait, cette affaire n'aurait jamais du être donné à quelqu'un d'inexpérimenté.
Ensuite, et cela interroge sur la formation donnée à l'Ecole de la Magistrature, je pense très sincèrement qu'il faut des capacités intellectuelles particulières pour aborder ce métier. De toute évidence, ce juge a commis des fautes de raisonnement particulièrement tragiques, (utilisation des confrontations collectives un peu légère, éléments pouvant innocenter certains des prévenus négligés, tri orienté entre le vrai et le faux dans la parole des accusateurs,...), une sensibilité et une immaturité flagrante (il semble qu'il n'ait pas la moindre idée de ce qu'attend un détenu pour pédophilie en prison), des préjugés bien ancrés.

Je ne ferais sans doute pas mieux que lui et c'est pour cela que je ne suis pas juge, je suis enseignant.
Il n'a pas transgressé le droit, mais la façon de faire son métier a contribué à provoquer cette catastrophe.
En tant qu'enseignant, je me rend compte des conséquences que pourrait avoir une telle attitude dans un collège.

On ne peut se retrancher derrière les textes, ils ne sont et ne seront jamais parfaits. Les qualités humaines, la vision de ce que peut être la justice, sont les garants d'un fonctionnement plus humain de cette "machine judiciaire".

Aussi je crois important qu'une réelle remise en cause en tant qu'individus des juges et magistrats face à leur décisions est une voie importante qu'il ne faut surtout pas refuser par respect de la fonction, puisque c'est justement dans le respect pour cette fonction qu'elle doit avoir lieu.
Et cela doit avoir lieu car il est hors de question pour moi, comme pour vous, de vivre dans un pays qui laisse planer une épée de damoclès sur chacun d'entre nous, même si cette épée est tenue par la justice.
Il est hors de question de voir notre vie dépendre de n'importe quelle personne sortant de l'Ecole de la Magistrature.

En tant que non professionnel du droit, je peux toutefois affirmer ceci sans peur d'être dans l'erreur : des lois, des textes, une justice qui permettent la destruction de vies avec une telle facilité, et bien cette justice est forcément inappropriée.

Bien à vous,
Marc


33. Le jeudi 9 février 2006 à 09:35 par La vieille

Perplexe !
D'abord, oui lachez les basques du juge Burgaud !
Il a assumé son instruction simplement.
Le décalage entre le Juge attendu (hautain, directif, autoritaire ...) et le juge présent a été un choc.
Et que penser du fonctionnement de la machine judiciaire et du respect de la présomption d'innocence ?
J'ai eu l'impression que la conviction du juge était faite dès l'ouverture de l'instruction, madame Guigou a tenté de définir l'orientation donnée à cette affaire par les enquêteurs dès l'origine, (existence d'un réseau ?).
Devant tant d'horreurs avérées ou suspectées, le juge a du perdre toute velléité d'instruire à décharge .... et la machine s'est emballée.
Perplexité donc.

34. Le jeudi 9 février 2006 à 09:42 par Ze

clap clap clap.

Rien à dire tout est écrit :)

35. Le jeudi 9 février 2006 à 09:45 par BrunoNation

D'accord avec une grande partie du post de Luc sauf sur la partie Assemblée Nationale qui est hors sujet car ici ce n'est pas un problème de moyens c'est un problème de recrutement (mais nous avons le même problème avec les enseignants chercheurs en fait) :

le magistrat avait un rythme saccadé parce qu'il attendait que ses avocats lui soufflent les réponses déjà préparées. Quand, une fois ils n'avaient pas prévu la question, il n'a rien répondu. Le rapporteur s'en est ému plusieurs fois. Il était d'une indifférence très évidente répondant aux questions les plus émouvantes sans aucune spontanéité (le cas de l'huissier qui a assisté menotté à l'enterrement de sa mère est incroyable, la façon dont il dit que la mère était cardiaque plutôt que gréviste de la faim une injure).

Surtout il a appliqué la méthode du déni systématique malgré les contradictions flagrantes mises en
évidence par le rapporteur qui était très bon : par exemple quand l'accusatrice principale lui écrit plusieurs lettres en lui disant qu'il n'a pas respecté sa parole en la libérant alors qu'elle a balancé à tout va comme il le lui avait demandé , il ne voit pas l'alternative simple : soit il lui a dit cela soit elle ment et par conséquent il doit remettre en cause son témoignage. Sa réponse est de dire qu'elle ment pour sortir et qu'il a commandé une expertise ce qui est justement le sujet en débat ! et tout était du même tonneau.

On a donc d'après mes impressions Wnidows Media-isées : un individu limité intellectuellement, arrogant et méprisant avec des personnes qui le dépassaient très largement, la plupart des députés sauf Guigou, Fenech et la dernière intervenante très complaisants et , et malgré la bienveillance et la sollicitude de ces personnes à son endroit, qui a instruit uniquement à charge et qui, quand tout montrait que le dossier était vide n'a au minimum rien fait pour réparer.

Donc s'il n'est pas responsable d'être ce qu'il est, il devrait au moins devoir rendre des comptes sur ses actions. Il n'a commis qu'une erreur à mon avis dans son témoignage : il a dit sous serment qu'il n'avait pas reçu le courrier le prévenant que l'experte psychologue était impliquée dans le conseil général (grâce à l'habileté du rapporteur qui l'a flatté en lui disant que s'il l'avait su, bien sûr il l'aurait révoquée) et je pense que c'est un élément objectif qui peut être apporté pour prouver le mensonge.

Mon avis est qu'il faut revoir drastiquement le recrutement (mauvais) des Grandes Ecoles (Ulm, X, ENA, ENM) qui est une des causes principales du déclin français.

Sinon, les avocats étaient très discrets et semble-t-il très efficace ce qui tranche avec les pauvres hères avocats dans le film de depardon.

36. Le jeudi 9 février 2006 à 10:36 par MadCoder

> Mon avis est qu'il faut revoir drastiquement le recrutement (mauvais) des
> Grandes Ecoles (Ulm, X, ENA, ENM) qui est une des causes principales du
> déclin français.

Oulah, il me semble qu'il y a un gros amalgame. Il est absurde de mettre ces 4 écoles sur le même pied, elle se ressemble autant que le BTS Tourisme et le CAP charcutier.
 - Ulm est une école (et en tant qu'enseignant chercheur c'est chose connue) qui forme essentiellement des universitaires, et des chercheurs (brillants pour ceux que j'ai rencontrés ou dont j'ai lu les travaux en tout cas).
 - L'X est une école qui forme quelques universitaires égarés, et pour moitié des ingénieurs, et pour moitié des futurs dir.cab. et autres aides de ministres, etc…
 - L'ENA est avant tout une école qui forme des hauts fonctionnaires.
 - L'ENM forme des magistrat.

D'autre part, pour ce qui est du recrutement — même si on supposait acquis que le niveau des gens recrutés diminue — ne peut être seul ni premier responsable, mais plutôt l'enseignement, et l'orientation des élèves au niveau du Lycée. Je suggère notament la lecture de la lettre de démission de Laurent Lafforge (médaille Fields) du HCE (Haut Commissariat à l'Éducation) qui est édifiante [ www.ihes.fr/~lafforgue/de... ].

Bref, ces propos gratuits sont agaçants de par le fait qu'ils relaient des lieux communs non fondés, et malheureusement accentués par l'amertume de ceux qui en ont raté les concours (n'avez vous jamais remarqué que les gens qui crachent le plus sur l'ENA sont les gens de Science Po. qui l'ont raté ? que les gens qui crachent le plus sur l'X sont à Centrale Paris ? etc…)

En admettant que ce sont tout de même les X, ENS (ça ça me fait un peut rire), ENA et ENM-iens qui gèrent la France (ça me semble bien réducteur…), il faut aussi se rappeler que ce sont les dirigeants qui sont sortis d'école il y a 20 ou 30 ans qui ont orienté, refondu, choisi :
 - les scolarités de ces écoles,
 - les manière d'y enseigner,
 - et surtout toute la chaîne éducative qui permet d'y arriver.

Histoire de tomber dans un autre lieu commun qui rode dans certains couloirs de droite de l'Éducation Nationale (ça existe), est ce que ça ne serait pas plutôt la culture anti-élite¹ de la gauche — et là je suis désolé, mais étant de 81, c'est bien la gauche qui a modelé mon parcours scolaire ainsi que des gens de ma génération — et même de certaines à droite qui génère le “déclin de la France”² (ici je reprend les mots de BrunoNation) ?

Bref, sur les terres du maître de ces lieux, un peu de rigueur de pensée ne fait pas de mal.

En toute courtoisie, et pour l'amour de la discussion et du débat,
PH

¹: comprendre la culture qui vise à ne jamais mesurer deux étudiants entre eux avant... Bac+2 au moins (pauvres chéris, avant ils sont trop sensibles !)
²: c'est un lieu commun dont je doute qu'il soit plus fondé que celui auquel je réponds. Néanmoins, il a le mérite de reposer sur un constat indéfendable : viser le bien et non le mieux aboutit à la médiocrité et au "moyen" la plupart du temps.

37. Le jeudi 9 février 2006 à 10:39 par Saluki

Je n'ai pas vu la course à l'audience entre les chaînes publiques et privées.

Je n'ai vu qu'un condensé sur FR3 et donc je ne transcris que l'impression ressentie par ce (in)digest.
J'espère que le rapporteur /proc' Houillon aura autant d'incisiveté ce matin avec le suivant…

38. Le jeudi 9 février 2006 à 10:40 par Guignolito

C'est ça, le troll sur les Grandes Écoles revient ... C'est sûr qu'avec des glandos incapables d'apprendre le plus simple de leurs cours, on aura de meilleurs résultats, c'est prouvé !

Et on vous a jamais dit que, quelle que soit la méthode de sélection, la proportion de cons est toujours la même ?

39. Le jeudi 9 février 2006 à 10:47 par MadCoder

@moi-même: oups, je voulais dire "constat indiscutable" et pas indéfendable dans ² …

@Guignolito: il y a une citation dont l'attribution est variable selon les gens, mais qui aurait été prononcée (ça c'est la partie commune à toutes les attributions de cette citation à ma connaissance) devant une promo d'X :

« Ici il y a la même proportions de cons qu'ailleurs, mais ils sont bien plus dangereux, parce qu'ils ont été soigneusement sélectionnés. »

40. Le jeudi 9 février 2006 à 11:00 par BrunoNation

Dire que le niveau moyen des ENS est faible n'est certainement pas un lieu commun : une provocation, une bêtise, le fruit de la jalousie (comme vous l'évoquez) , d'un cerveau faible ou malade etc. d'accord. Mais un lieu commun certainement pas. Ou en tous cas pas chez les personnes dont l'avis compte (plutôt dans les lieux communs des bistrots ...)

Oui, je pense pour de très nombreuses raisons que le niveau moyen des élèves issus de toutes ses écoles - dont le point commun est de sélectionner une élite chacun dans son domaine évidemment - est faible, qu'il n'a pas baissé au contraire ces 20 dernières années, il a plutôt augmenté par rapport aux critères de sélection de ses écoles (qui sont mauvais selon moi en effet) et que tout se joue bien au Lycée, Collège, Ecole primaine et en famille - comme le dit peu ou prou le médaillé Fields - et que c'est justement un des éléments du problème et non de la solution !

Mais ce n'est pas le lieu comme vous le soulignez. C'est simplement de retrouver à la caricature tout ce qu'il y a de plus mauvais dans notre système de sélection hypostasiée chez une personne et les malheurs directs qui en sont la conséquence qui m'ont fait évoquer ce sujet. Mais je n'essaie plus de convaincre en général tant le tabou est fort (sauf quelques personnes au hasard des rencontres).

41. Le jeudi 9 février 2006 à 11:11 par Salomon Ibn Gabirol

Fonctionnement "normal" de la justice en tant que conforme à la norme positive(principalement le CPP). Mais la norme appliquée est elle-même anormale au regard de ce qu'elle devrait être, au regard des objectifs que doit poursuivre la procédure pénale. Je ne pense pas qu'il faille marteler que Outreau a procédé d'une fonctionnement normal de l'institution judiciaire, dès lors que l'institution judiciaire fonctionnne, de manière habituelle (pour reprendre le vocable utilisé par Neville), anormalement.

Cela dit, je suis de ceux qui considèrent que la seule chose que l'on puisse reprocher au juge Burgaud (et à bien d'autres juges d'instruction d'ailleurs), c'est son inhumanité et son manque d'affect. (J.-C. Kross, le brillant Président de la XVIème chambre du Tribunal correctionnel de Paris, l'a rappelé avec effarement hier soir sur LCI). Il n'est certainement pas le seul responsable d'Outreau et d'autre magistrats impliqués dans le dossier aurait pu et du jouer leur role de garde-fou (parmi lesquels le Procureur qui a requis la détention provisoire et le JLD qui l'a prononcé)

42. Le jeudi 9 février 2006 à 12:01 par Comme d'habitude

Le fonctionnement de la justice n'a pas été "normal" dans cette affaire. Sinon, le désastre aurait été évité. Je refuse de croire que la normalité puisse causer pareille catastrophe.

En revanche, en écoutant Fabrice Burgaud, je me rends compte qu'il ne fait qu'expliquer le fonctionnement "habituel" de l'appareil judiciaire.

Mettez ensemble
- une inquisition accomplie par un juge isolé dans sa tour d'ivoire,
- une confiance aveugle accordée aux experts,
- les doutes qui profitent à l'accusation (il n'y a pas de fumée sans feu, n'est-ce pas?),
- le caractère sacré de l'aveu et
- le corporatisme des magistrats qui hésitent à déjuger le collègue.

Ajoutez à cette liste l'immaturité, et partant, le manque d'humilité du juge, et vous obtenez votre "Outreau."

Sauf que... L'affaire originale a eu cette résonance à cause (ou grâce) au fait que chaque Français peut se reconnaître dans l'un ou l'autre des 13 Acquittés, ce qui n'était pas possible avec les membres du réseau Chalabi.

Salutations,

43. Le jeudi 9 février 2006 à 12:06 par MadCoder

Le manque d'affect est un problème qui me paraît subtil. Ce que je comprend de mon point de vue sans doute étriqué et avec ma réflexion balbutiante sur ce sujet, c'est qu'on demande aux juges de comprendre les gens lors d'un procès avec son affect et ses sentiments humains, sans pour autant considérer les accusés (et autres intervenant) avec autre chose que sa raison et le détachement affectif. (si le juge tombe amoureux de la belle accusée, le résultat va être douteux !).

Bref, autrement dit on lui demande de comprendre les gens dans leur humanité, mais de surtout ne pas y céder. Je trouve un tel exercice vraiment périlleux, et je doute que si j'essayais j'y arriverais. Devant ce constat, il me paraît souhaitable de ne pas reprocher au Juge Burgaud ce dont je ne suis pas moi même capable.

44. Le jeudi 9 février 2006 à 12:12 par MadCoder

@Comme d'habitude:

Le fonctionnement de la justice a été *normal*, mais il est anormal que ce fonctionnement représente la normalité. Ne nous trompons pas de combat, c'est ce que dit, répète et martèle Maitre Eolas (et pas mal de magistrat que j'ai eu le loisir d'écouter sur France Info hier soir font de même).

Mon expérience des communauté soudées est que si un membre de la communauté “fait de la merde”, il est complètement désavoué par tous les autres membres de cette communauté. Ici, tous les magistrats se sentent concernés, et tous auraient pu être des Juges Burgaud. On devrait sans doute faire un procès de la fonction et pas de l'homme. Et c'est exactement ce que soutient la corporation des magistrats, et en tant que citoyen, je les soutiens.

Et pour le réseau Chalabi, les gens qui ont été totalement disculpé de tout lien avec l'organisation terroriste, mais qui ont été inculpés parce qu'ils habitaient à coté d'un terroriste et lui ont adressé la parole en tant que voisin de palier — je doute que la raison soit si naïve, mais j'espère que je me fais comprendre — je pense que tout Français peut s'y reconnaître.

45. Le jeudi 9 février 2006 à 12:25 par BrunoNation

ce qui est reproché est simple : ne pas avoir instruit à charge et à décharge.

Les raisons possibles :

- pression de la hiérarchie
- opportunité de faire un grand coup (mettre tous les membres d'un réseau international de pédophilie en prison)
- hiding an elephant (se rendant compte de l'erreur, essayer - consciemment ou non - de l'étouffer pour que cela passe)
- la personnalité du juge : manque de capacités de jugement (manque évident), de sérieux dans le traitement du dossier.

Pour le point en débat, les sentiments du juge, il faut distinguer : l'inhumanité qui est la conséquence de son instruction (des 4 ensembles de causes identifiées inter alia) et l'inhumanité qui serait un trait de personnalité du juge (ce qui est très possible). Cette seconde est beaucoup plus difficile à qualifier a posteriori et à identifier a fortiori à l'entrée de l'ENM.

Mais ce n'est pas très grave car en l'occurrence même un juge inhumain et indifférent qui aurait à l'inverse été

- indépendant de la hiérarchie
- ne cherchant pas à utiliser une affaire pour favoriser sa carrière à tout prix
- reconnaissant ses erreurs
- ayant des qualités de jugement raisonnables (être dans les 5% les plus intelligents de la population disons ce qui n'est pas tant demander)

aurait évité le désastre.


Le problème est que la solution - mettre le juge sous controle du politique - serait plus un poison qu'un remède. Il faut améliorer le recrutement afin de permettre une meille auto-régulation du corps et permettre à la presse et aux avocats de dénoncer librement les scandales pour exercer un contre-pouvoir raisonnable. La méthode Royaume-Uni de sélection des juges (pas des lay magistrates) me paraît la meilleure.

On choisit sur test d'aptitude (1/3), de connaissance (1/6) et par évaluation dans un assesment center en simulation de cas réels (1/2) des avocats ayant au moins 7 ans d'expérience professionnelle pour les TGI et 12 ans pour les cours d'appel ou Tribunaux administratifs et on les paie très bien pour attirer les meilleurs (150 000 euros pour les premiers et 230 000 euros pour les seconds).

46. Le jeudi 9 février 2006 à 12:34 par Guignolito

Et Voici La Solution Miracle de BrunoNation Qui Va Sûrement Engendrer Un Outreau2 Dans 5 Ans !

47. Le jeudi 9 février 2006 à 12:35 par BrunoNation

nb : il n'y a pas a proprement parler des tribunaux administratif mais des chambres qui ont à connaître des affaires où une institution (lato sensu) publique est concernée (on dirait l'intérêt général en France). Les salaires sont en livres et sont des salaires de début de carrière. tout cela est accessible sur les sites de recrutement des juges avec un coup de google.

48. Le jeudi 9 février 2006 à 12:38 par BrunoNation

@Guignolito : un changement de personnel et de culture prend au minimum 30 ans pour une prise de pouvoir effective des nouveaux recrutés ...
et oui, il vaut mieux miser sur les personnes avec des institutions transparentes et des contre-pouvoirs à mon avis ! Cela n'évitera pas les erreurs mais devrait les diminuer. C'est la raison pour laquelle les entreprises préfèrent la justice privée (arbitrale) d'ailleurs.

49. Le jeudi 9 février 2006 à 13:29 par Guignolito

@BrunoNation
Vous n'avez rien compris, alors je le dis en clair : votre nouveau système sera plus mauvais que l'ancien.

Rien que la phase sur l'examen (1/3 de test d'aptitute, 1/2 d'"assessment center") est à mourir de rire : vous reprochiez plus haut à la France d'avoir un système élitiste pour l'X, Normale, l'ENA, l'ENM, et tout ce que vous trouvez à proposer, c'est un système encore plus élitiste !

Vous voulez les "meilleurs", mais vous allez vous retrouver avec toute la crasse de la création qui voudra passer le concours pour avoir les salaires de rêve que vous proposez.
À ce tarif-là, vous allez avoir des écoles privées qui vont proposer des classes préparatoires aux "assessment centers", des gars qui vont bûcher le concours comme des malades, des profs et examinateurs qui vont profiter de leur position privilégiée, etc...

Bref, au final, vous aurez tout autant d'incompétents qui y arriveront, sinon plus, et moins de gens qui ont vraiment la vocation, car ils seront effrayés par la masse de travail inutile à accomplir et les concurrents qui leur mettent des bâtons dans les roues.

Oui, BrunoNation, vous avez proposé un système de sélection digne des meilleurs énarques ! Vous pouvez être fier de vous ! Ce qui me rappelle l'aphorisme suivant :

"C'est curieux : tout ceux qui savent vraiment comment bien diriger notre pays sont seulement occupés à des boulots comme coiffeur ou chauffer de taxi."

50. Le jeudi 9 février 2006 à 13:58 par MadCoder

@Guignolito, Brunonation:

le plus rigolo dans l'histoire, c'est que ce système pose un énorme problème de bootstrap¹ comme on dit en informatique. Si on part du constat de BrunoNation que les magistrat actuels sont des guignols incompétents, comment vont-ils être capables de tester et évaluer les étudiants (parce que je pense que ce sont des magistrats que vous voulez mettre dans ces “assessment centers” pour noter les candidats) ?

D'autre part, sortant de mes études de manière récente, si on prend le cas des soutenance de thèse, il est clairement connu que dans les gens présent à une soutenance de thèse, tout aussi brillant qu'ils soient, peu sont capables d'avoir assez de recul pour noter la thèse, et ce qu'on note souvent², c'est la confiance que les rapporteurs de thèse ont en le laboratoire et le personnel qui a encadré le thésard pour présenter un candidat qui a fait un travail décent et de valeur.

En fait, le seul jugement de valeur, est d'être jugé par des gens qui font le même métier, dans la même spécialité que ce que vous allez faire plus tard, ce qui pour une école d'ingénieur généraliste par exemple, est tout bonnement impossible, et ce pour deux raisons :
 - parce que le nombre de débouchés d'une telle école est trop important pour pouvoir connaître le bon évaluateur qui *en plus* aie envie de faire cette évaluation à l'avance ;
 - parce que nombre d'élèves ne savent de toute façon pas du tout ce qu'ils veulent faire en sortant de l'école !

Réapprendre aux gens à penser par eux même, à développer un sens critique, un goût pour le travail bien fait, la passion de leur métier, l'application et la concentration³ en toute choses, et surtout une recherche constante de l'amélioration (et la conscience de sa propre perfectibilité) me paraît être bien plus important, et suffisant. Et ça, c'est le collège surtout, puis le lycée qui donnent ces enseignement. En sortant du Lycée, ce qu'on va devenir est plus ou moins formé, rien de définitif, mais c'est suffisement précisé pour que faire de grand bouleversement de mentalités soit impossible.

¹: Problème de poule et d'œuf diraient d'autres.
²: Bien sur il existe des thèses brillantes, et il faut être aveugle pour le rater, mais ça n'est pas la moyenne des cas tout de même.
³: je suis bien souvent consterné par les capacités inexistantes de concentration dans ma génération. Nombreux sont les jeunes qui ne savent pas se concentrer sur le même problème plus d'une demie-heure — lorsqu'ils y arrivent.

51. Le jeudi 9 février 2006 à 14:00 par Corinne

Pendant l'audition du juge Burgaud, j'étais d'un côté soulagée de voir que cette audition ne se transformerait pas en cirque médiatique comme je l'eus craint au départ et d'un autre côté très décue et passablement agacée (tout comme certains parlementaires il me semble) par les phrases non finies et les non-réponses du juge. Passe encore qu'il n'ait aucun recul sur sa fonction même après cinq ans d'expérience maintenant, quoique...

Certes, je comprends que les circonstances et la pression ambiante n'aidaient pas.

Néanmoins, le juge a évoqué la difficulté de parler de cette affaire en invoquant le devoir de respect du secret de l'instruction. Ne connaissant pas les détails de ce devoir de respect, qu'est-ce qui en dehors des noms de certains personnes, notamment les enfants, faisant partie du dossier (et dont la censure audio à l'antenne assurait le relatif anonymat) peut expliquer les réponses évasives et confuses du juge sur le déroulement de l'instruction?

52. Le jeudi 9 février 2006 à 15:42 par Citronelle

Attaque personnelle bête et méchante supprimée.

53. Le jeudi 9 février 2006 à 16:11 par BrunoNation

@Guignolito :

Je n'ai jamais critiqué l'élitisme mais la qualité de la sélection des Grandes Ecoles. Je ne me suis pas prononcé sur votre opinion concernant ma proposition. Par ailleurs, même si j'étais chauffeur de taxi (je n'ai pas le permis) ou coiffeur (avec ma maladresse, pauvre clients) , je ne vois pas en quoi cela disqualifierait mes propos. Les arguments Ad Hominem n'ont aucune portée logique. Ils éclairent simplement sur les valeurs de celui qui les profère.


@MadCoder :

1- non pas de bootstrap. Parce ce que celui qui réalise les tests (en particulier un groupe) n'a pas l'obligation de faire partie de ceux qui les réussirait le mieux (ni même de faire partie du groupe visé) et que par ailleurs pour réaliser les évaluations de type étude de cas/jeux de rôle on peut sélectionner dans la population cible (les magistrats) via les tests les personnes qui correspondent. Je vous avais dit que les différences inter-individuelles sont plus importantes que les différences entre groupe. Cela vaut ici aussi.

2- La recherche est un merveilleux exemple en effet. La France a le record en Europe après l'Espagne) du recrutement local dans le supérieur (70% contre 20% environ aux US, info Eurostat pour processus de Bologne). Si dans les 30% on retranche les premiers concours d'agrégation du supérieur (droit, éco, gestion) où le recrutement est fonction du classement et le quasi-recrutement local par affinité de diplôme d'origine qui prévaut pour le quasi-corps des ENS (un individu du labo X recrute un docteur du labo Y parce qu'ils ont la même formation Z en l'occurennce une ENS), on devrait certainement être proche des 90/100% ! Comme il n'y a aucune concurrence dans la sélection des chercheurs (sans parler de la suite), il ne faut pas s'étonner de ce que nous sommes parmi les derniers en nombre de publications mais surtout dans la qualité des publications (% d'articles qui font partie des 1% les plus cités). Les ratios comparés avec les UK et USA sont consternants.

Une population médiocre recrute des candidats médiocres qui ont des résultats m-------- (deux mots possibles :-)).

oui, je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il est très difficile de juger une personne et son travail hors contexte , c'est là qu'on a le plus de chance de se tromper. Donc dans la vie, une bonne pratique est de se fier à ses préjugés en effet. Mais pour avoir de bons résultats, surtout quand on est dans un cadre institutionnel, il faut bien oser juger sur pièce (comme le font sur de mauvais critères les grandes ecoles) mais c'est ce que ne peuvent pas faire des personnes incompétentes soit par manque de qualité de jugement soit par manque de connaissances (ou les deux). D'une certaine façon, ce qui passe est quasiment acceptable étant donné la qualité globale d'un point de vue micro (dans votre labo disons!). Mais on est issue dans un cadre de généralités et on refait le monde, non ?

Bon je retourne balayer la cour guignolito :-)











54. Le jeudi 9 février 2006 à 16:48 par MadCoder

@BrunoNation:

sur (2) :

Pour la recherche, il y a un tas de gens français brillants qui partent aux États-Unis, et qui ne font pas monter les stats des labos Français. De plus, il y a une grosse masse d'étudiants étrangers (plus de 50% dans certaines universités américaine en informatique, genre au MIT) — Indiens, anglais, français et autres pays — qui y vont parce que ce sont des pôles d'excellence réputés, et qui eux aussi font monter le compteur de ces labos.

La recherche en France est complètement non attractive (et c'est d'ailleurs pour ceci que j'ai cessé ma thèse — entres autres).

sur (3):
justement, je ne suis pas d'accord, je doute que jugement sur pièce soit la bonne méthode, parce qu'elle est vraiment inapplicable, et pure théorie. Refaire le monde c'est intéressant, mais j'aime bien que ça puisse s'intégrer dans le monde réel de manière satisfaisante. Et il se trouve que il me paraît bien plus facile de réapprendre aux enfants de primaire et aux collégiens à travailler, plutôt que de encore mieux les trier.

Mais sans doute suis-je trop optimiste ?

Bref, de toute façon, nous nous éloignons beaucoup du sujet, et je ne sais pas si le maître de céans va tolérer cette digression encore longtemps ;)

55. Le jeudi 9 février 2006 à 17:12 par BrunoNation

"oui, je suis d'accord avec vous sur le fait qu'il est très difficile de juger une personne et son travail hors contexte , c'est là qu'on a le plus de chance de se tromper" --> donc je n'ai pas dit que vous étiez d'accord avec ma proposition ! pourquoi est -il si difficile de lire ? je suis d'accord avec le fait - qui était implicite dans votre commentaire et que j'ai explicité - qu'il est plus difficile de juger hors contexte qu'en contexte mais - contrairement à vous - je pense qu'il faut le faire pour avoir des résultats probants.

D'ailleurs je suis parfaitement d'accord avec vous (attention, il y a encore un piège si on veut !) avec le fait que le niveau au primaire et secondaire détermine dans le contexte actuel l'entrée ou non dans la Grande Ecole et la suite. Hélas, contrairement à ce que vous pensez, le niveau a encore augmenté (primaire + secondaire + grande ecole) ce qui est ... une catastrophe.

Les malheureux étrangers (les nôtres et ceux des autres ) sont une variable d'ajustement à la mode en France d'explication tantôt pour nos échecs ou difficultés internes, tantôt pour les succès à l'étranger et parfois même pour les menaces des PECO dans le cadre des accords d'adhésion du 1er mai 2004 :-) .

Non, la recherche en France est super attractive. Dite à un américain qu'il aura un salaire garanti à vie + Sécu + retraite (sauf effondrement du Trésor) sans aucune contrepartie en termes d'horaires ni même de publications et que son salaire sera multiplié par deux sur 30 ans averc un ajustement (certes faible ces derniers temps ) à l'inflation et une probabilité de licenciement proche de 0 ! je pense qu'il n'y aurait aucun problème d'attractivité !!!!


56. Le jeudi 9 février 2006 à 17:32 par Matthieu

Vous êtes trop critiques avec la formation au sein de l'ENM et plus largement avec la gestion des ressources humaines au sein de la justice. Le billet de Maitre Eolas montre une chose évidente : la section antiterroriste avait eu le nez creux en recrutant ce juge.
En plus de sa technicité juridique, son aptitude s'aveugler sur l'implication réelle des personnes mises en cause, cette capacité qu'il aurait eu à mettre en prison non seulement les apprentis terroristes mais également tout leur entourage (voisins, amis) avec honnêteté et bonne conscience, tout cela faisait de lui le postulant idéal.
Il y avait là une carrière, pour ce jeune homme. Il y aurait fait des merveilles.

57. Le jeudi 9 février 2006 à 17:46 par Patrick

Moi je suis indigné. Je suis indigné parce qu'il n'est pas normal qu'une personne puisse décider de la liberté des personnes et puisse ensuite se prévaloir d'un manque d'expérience pour s'exempter de responsabilité.
Je suis indigné parce que dans une entreprise privée il y a longtemps que ce manque de professionnalisme l'aurait fait mettre à la porte.
Je suis indigné que le fait d'être fonctionnaire puisse lui apporter une totale exemption de ses responsabilités.
Je suis indigné parce qu'il semble que nous vivions dans une société à deux vitesses, ou d'un côté la moindre faute est sanctionnée et que de l'autre rien ne se passe.
Je suis indigné parce que j'avais appris, dans ma jeunesse, elle est lointaine, que les serviteurs de l'État étaient les meilleurs du monde, que nous avions la meilleure administration du monde.
Je suis indigné par les nombreuses tentatives d'excuses que cet homme reçoit.
Je suis indigné, car il continuera dans sa carrière, bardée d'une expérience tellement négative qu'elle devrait donner des résultats positifs.
Je suis indigné tout simplement et profondément.

58. Le jeudi 9 février 2006 à 18:37 par jules

Ce n'est pas le juge d'instruction qui décide du placement en détention provisoire, mais le juge des libertés.

Les magistrats sont justiciables de leurs fautes devant les instances disciplinaires, et, au cas ou la responsabilité de l'adminsitration serait reconnue à l'occasion de l'exercice de leurs fonctions, il lui appartient de se retourner vers le magistrat.

Je ne sais de quand date votre jeunesse, mais les meilleurs serviteurs du monde n'ont guère hésité avant de jurer allégeance au régime de Vichy. Et leur carrière n'en a pas tant souffert, comme en témoigne l'exemple de Maurice Papon.

59. Le jeudi 9 février 2006 à 19:06 par MadCoder

@BrunoNation

pour votre §1, j'avais bien compris que vous ne supposiez pas que j'étais d'accord. Ma tournure maladroite soulignait le fait que je ne suis pas du tout d'accord avec vous sur le fait qu'il faut juger les gens ainsi. Non pas parce que c'est trop risqué, mais parce que c'est voué à l'échec. Je vous avais bien lu, j'ai juste mal répondu.

quant au §2 je ne suis pas d'accord avec votre affirmation sur le fait que le niveau du primaire augmente. Ou alors je comprend mal ce que vous voulez dire. J'en parlais encore hier soir avec une (jeune) prof de français en 6ème, qui est simplement affolée du fait que ses élèves, après presque 6 mois de cours, ne sachent toujours pas tous trouver le verbe dans une phrase. Sans parler du fait que sortant du CM2, il n'est plus obligatoire aux enfants de savoir poser une division !

Enfin, ce que je demande n'est pas spécialement d'augmenter le niveau, mais d'apprendre à travailler, à s'intéresser, se passionner, s'investir. Quelqu'un qui sait apprendre et qui sait s'investir, se passionner, etc… d'une part ça sera bien plus facile pour lui de trouver une voie, dans laquelle il s'investira beaucoup plus, beaucoup mieux, et inévitablement avec plus de résultats.

L'assurance, la connaissance, et la qualité du travail viennent naturellement avec.

> Non, la recherche en France est super attractive.

pourtant sur 10 thésards que je connais (moi y compris), 4 ont arrêté leur thèse, 5 autres ont réfléchi à un moment ou a un autre très sérieusement à l'arrêter — et pour 2 c'est pas clair qu'ils ne le fassent pas, vu qu'il leur reste plus d'un an à tirer — et sans doute 1 seul finira chercheur.

Pour un milieu attractif, on repassera.

Sans parler des conditions de travail pour certaines matières, du passage obligé pour la plupart par l'enseignement (qui n'est pas adapté à tous, et qui fait que la faculté a des cours d'une qualité douteuse dans certaines matières), etc …

60. Le jeudi 9 février 2006 à 20:08 par Fred

Parler de déni de présomption d'innocence est un peu culotté maître, sauf votre respect.

Je crois que les justiciables aimeraient eux aussi être éligibles à cette légitime revendication. Pour des faits autrement moins graves un citoyen lambda serait incarcéré pour bien moins que cela, vous êtes bien placés pour le savoir.

Mais je suis d'accord avec vous, lâchons les baskets de M. Burgaud, mais aussitôt après qu'il aura été révoqué.

Jeudi 9 février 2006, 20h06
Les magistrats ne voient toujours pas l'ombre d'une raison pour laquelle on leur demande de s'expliquer

Au hasard je les aide: c'est paraît t'il en notre nom qu'ils "rendent justice", enfin il paraît.

61. Le jeudi 9 février 2006 à 20:13 par fred

@MadCoder /59

Ce genre de discours sur le niveau des élèves, vrai ou faux je l'ignore, je l'entendais déjà il y a 20 ans lorsque je passais le bac.

Je ne saurai l'interpréter n'étant pas moi même enseignant, si ce n'est qu'en 6ème je faisais du latin et un jour on nous a fait traduire un texte sur les jeunes soi disant pires qu'avant.
Le texte datait ... de la Rome antique.

Alors laissons le niveau réel ou supposé vivre sa vie, apparemment c'est ce qu'il fait d'ailleurs

62. Le jeudi 9 février 2006 à 21:05 par BrunoNation

@Madcoder :

l'attractivité dans ce cadre est l'intérêt pour les candidats d'être recrutés et pas l'inverse. Et après tout ce que j'ai dit, il s'agit d'un fromage à se partager entre amis ou afidés et certainement pas de convaincre le faqueux - indépendamment de ses qualités quand il en a - de venir s'attabler au CNRS ou ailleurs. D'ailleurs ce que tu décris, année de thèse à tirer, petit boulot d'enseignement, etc. montre bien l'ambiance de précarité qui règne pour les non titulaires.

c'est comme les profs qui prétendent être sous-payés dans le public et qui savent (du moins je l'espère) qu'ils n'ont aucune chance de gagner autant dans le privé avec le même travail mais bon l'aveuglement à du bon. Et je n'ai rien contre les profs - ni contre les chercheurs - surtout les oisifs qui sont plus cultivés et plus sympa. J'ai un copain ingénieur très sympa reconverti en agrégé + docteur en physique qui est ingénieur de recherche, je pense que les seuls calculs qu'il fait dans sa vie sont le nombre de paquets de couches qu'il doit acheter en fonction des diarrhées de sa progéniture par semaine et la compta du cabinet d'architecture de sa femme. Comme il est métro-sexuel et beaucoup plus sexy qu'autre chose, je lui conseille de faire de devenir acteur/mannequin ou de rentabiliser son petit cul (sauf si cela posait des pbs d'image avec son labo :-) . Comme il a lu un folio de Prigogine et un autre de Bitbol, il envisage plutôt de se reconvertir en épistémologie.

63. Le jeudi 9 février 2006 à 22:31 par Francesco

Si on fait une petite revue des commentaires et du billet, il semble de bonne augure de défendre le pauvre juge Burgaud qui est lachement donné en patûre à la haine populaire...
Si vous me permettez l'expression : 'Mouais.... Bof !'

Il me semble qu'en grande partie à cause de ce juge et de son instruction uniquement à charge, de nombreuses personnes ont été déposseder d'une partie de leur vie.
Alors qu'il passe devant une commission pour expliquer ses choix et se faire un peu taper sur les doigts ne me semble pas immoral, on est bien loin d'un emprisonnement et du traitement réserver aux (pseudo) pédophiles en prison...

64. Le vendredi 10 février 2006 à 07:01 par Pierre

Le juge qui a repris l'instruction en 2002 est-il entendu par la commission ? Je suppose que oui, mais on ne parle que du juge Burgaud...

65. Le vendredi 10 février 2006 à 09:45 par BrunoNation

je crois qu'il sera entendu, mais c'était en août 2002 et il a renvoyé l'affaire en chambre d'instruction (suivant les instructions orales de B. probablement). Donc son rôle est minime dans les faits car il a hérité du dossier vers la fin. Le juge des libertés lui a un rôle bien plus important. Il se serait par ailleurs fait remarquer des services de police comme l'indique le Canard (il se serait trouvé à plusieurs reprises en dehors d'un magasin sans avoir préalablement réglé les marchandises en sa possession). Il aurait été muté à Fort de France.

66. Le vendredi 10 février 2006 à 11:42 par Pierre

Le Nord semble peu propice à un service public de qualité : santé, justice...

67. Le vendredi 10 février 2006 à 18:28 par coco

Madcoder, Brunonation,

ne croyez-vous pas que l'âge de recrutement des magistrats pose également problème? Pourquoi cette limite d'âge ridicule? (moins de 28 ans si mes souvenirs sont bons)? Résultat : des morveux qui se croient sortis de la cuisse de Jupiter parce qu'ils ont bien bachoté pendant la prépa, et qui sont appelés à décider du sort d'autrui. (bon j'exagère, ok, mais le système "grandes écoles" en soi me pose problème).

Eolas,

Bravo d'évoquer l'affaire Chalabi, qui a été assez scandaleuse dans son genre.

68. Le vendredi 10 février 2006 à 19:32 par MadCoder

@coco: La valeur n'attend point le nombre des années.

Et le morveux vous remercie.

Plus sérieusement, il faut bien commencer par quelquechose. Mais demander aux juges d'avoir 10ans d'expérience ça veut dire quoi ? qu'il faut qu'il ait observé ses semblables pendant 10ans avant de juger ?

pourquoi personne ne parle de *paires* de juges ? avec un vieux et un jeune ?

Personnellement, pour Chalabi, le juge Bruguières (homme pourtant remarquable, pour l'avoir vu en conf — accompagné de pas moins de 4 gorilles, même dans les amphis de l'école — et qui respire la maîtrise et le pouvoir, mais ça peut tout autant être une impression je le reconnais), qui s'occupe _seul_ de cette affaire, ça me fait me poser des questions. Il est très clair que certaines affaires sont plus épineuses que d'autres, et je ne comprend pas qu'un homme unique puisse s'en occuper.

Mais sans doute y a-t-il de bonnes raisons (autres que financières) à cela ?

69. Le vendredi 10 février 2006 à 21:41 par BrunoNation

Un autre aspect monstrueux de la tactique employée par le magistrat était d'insister énormément sur les crimes perpétrés sur les enfants par les personnes condamnées ce qui permettait à la fois de justifier faussement son attitude et de jeter un doute sur les acquittés. C'était tellement systématique et méthodique que cela ne pouvait être que prémédité. Comme si le fait qu'il se passe un meutre à côté de chez soi horrible permettait de placer tout le voisinage en détention parce que les meutriers prétendraient que l'action était collective.

Tout était vraiment écoeurant et je comprends parfaitement l'indignation de Patrick. Je m'imagine à la place des malheureux inculpés.

70. Le dimanche 12 février 2006 à 10:51 par coco

madcoder,

pour le morveux je pensais plutôt à Burgaud, si jeune, et déjà en charge d'un dossier pareil.

Je me demande sincèrement dans quelle mesure les magistrats ne sont pas recrutés trop jeunes. Observer ses semblables, comme vous dites, mais aussi vivre soi-même un certain nombre d'expériences, avant de trancher en tant que magistrat, ne me semble pas totalement inapproprié.

71. Le dimanche 12 février 2006 à 20:00 par Bib2

Jeu de cons...
A ceux qui croient que le collège de juges est la panacée, je propose les six combinaisons de juges d'instruction suivantes :

- Un Burgaud + un vieux con
- Un Burgaud + un vieux sage
- Un Burgaud + un Burgaud
- Un vieux con + un vieux con
- Un jeune humaniste + un vieux sage
- un vieux sage + un vieux sage.

Des trois premières combinaisons, seule la deuxième peut améliorer le résultat en faveur des innocents jugés.
Le temps ne faisant rien à l'affaire (cf. Brassens), l'urgence est de s'assurer d'abord des capacités intellectuelles et qualités humaines de chaque juge. Et non plus seulement de ses connaissances techniques.
L'autre urgence est de diminuer le nombre de dossiers alloués à chaque cabinet, pour laisser davantage de place à la réflexion.
La question de multiplier le nombre de juges autour d'un même dossier n'est donc pas prioritaire, surtout dans une situation de pénurie de juges.

72. Le samedi 25 février 2006 à 16:11 par Octave

Dans toute cette affaire le milieu judiciaire a brillé par un grand corporatisme. On peut le voir sur ce blog ou l'on observe un grand écart entre la position des professionnels (fonctionnement normal de la justice, absence de pistes de réformes, raisonnement en termes de moyens, ...) et celle des autres citoyens (indignés, scandalisés, ...). Et je passe sur les commentaires un brin condescendants quand un simple citoyen se mèle de donner son avis sur la justice.

Le sommet est atteint par le CSM qui trouve que l'audition d'un juge par une commission d'enquête parlementaire est une atteinte à la séparation des pouvoirs. Comme si l'on s'indignait quand un membre de l'éxécutif (haut fonctionnaire, ministre, ...) est auditionné !

Bref tout le monde a un peu oublié que la justice est rendue au nom du peuple français. Elle c'est une chose trop importante pour être laissée aux juristes et il est temps que soient réaffirmés des exigences de base pour n'importe quel service public : délai, efficacité, responsabilité des acteurs impliqués.

Merci, Octave, merci de vos propos si profonds et intelligents, que seul mon corporatisme chevillé au corps m'empêche d'accepter comme une vérité définitive. Car vous avez mille fois raisons de rappeler le corporatisme qui unit avocats et magistrats, surtout les procureurs, ce même corporatisme qui fait que quand un procureur poursuit un de mes clients, je ne peux que dire "vous avez raison", et quand un confrère assigne un de mes clients, je ne puis qu'acquiescer.

Vous avez raison de dire que j'affirme que l'affaire d'Outreau n'a rien de scandaleuse, et que je ne comprends pas de quoi osent se plaindre les accusés, vous avez parfaitement saisi mon propos, plus finement encore que je ne saurais l'exprimer.

Merci de rappeler la séparation entre "le milieu judiciaire" et "les autres citoyens", ces derniers ayant forcément raison, le premier forcément tort, quiconque ayant l'outrecuidance de faire remarquer que le simple citoyen qui porte des jugements scandalisés ignore tout de ce dont il parle n'étant qu'outrecuidance et condescendance. Vous avez raison de considérer que mon blog n'est pas fait pour faire passer cette connaissance, mais n'est fait que pour déverser ma suffisance sur les ignorants pécores à qui on a confié une carte d'électeur contre mon opinion, vous avez raison de renvoyer le CSM à ses chères études, quand bien même il n'a absolument pas dit ce que vous lui faites dire : vous êtes un "simple citoyen", la rigueur ne vous est pas imposée, c'est vous qui l'imposez aux autres.

Octave Président !

Eolas le Condescendant.

73. Le samedi 25 février 2006 à 16:47 par Sans pseudo

« Dans toute cette affaire le milieu judiciaire a brillé par un grand corporatisme. On peut le voir sur ce blog ou l’on observe un grand écart entre la position des professionnels (fonctionnement normal de la justice […] »

Cher Octave Prud’homme,
Maître Eolas vous a répondu par anticipation :
« Et c’est là mon seul propos : le fonctionnement normal de la machine judiciaire n’est pas satisfaisant, voilà ce qu’a montré une fois de plus cette affaire. »

Comme il écrit mal et qu’il est difficilement compréhensible je vais tenter de l’expliquer mieux que lui : le fonctionnement normal indique que c’est un fonctionnement conforme à la norme, aux règles du Code de procédure pénale.
Et que justement c’est cela qui est inquiétant.
Et c’est aussi cela que Maître Eolas désapprouve : « Et c’est là mon seul propos : le fonctionnement normal de la machine judiciaire n’est pas satisfaisant, voilà ce qu’a montré une fois de plus cette affaire. »

74. Le dimanche 26 février 2006 à 18:19 par Bib2

Cher Octave,
Merci de relancer le débat, c'est sain... Et on commençait à s'ennuyer depuis une semaine.
Mais vous feriez bien de mieux lire à l'avenir les opinions de chacun : Me Eolas et "Sans Pseudo" viennent de vous moucher proprement.

Ne pratiquant moi-même que peu l'ironie et conscient du fait qu'elle est souvent mal interprétée (le même Sans Pseudo" s'y est laissé prendre un jour), je souhaite apporter mon grain de sel : je fais partie de ceux que vous nommez les simples citoyens et suis en effet scandalisé par l'affaire d'Outreau. Si je suis ici, c'est pour analyser, comprendre et débattre - dans l'ordre qu'il vous plaira.

Ce que j'ai compris en quelques semaines, c'est que quelques dizaines d'acteurs de la justice sont vraisemblablement coupables d'avoir enfermé trop longtemps des gens majoritairement innocents, que leurs confrères ne les défendent pas unanimement, que les médias et les simples citoyens partisans du lynchage ont largement contribué à cette erreur judiciaire. Les politiques ont enfin pris conscience qu'il y a urgence à essayer de trouver des moyens pour éviter que ce type d'erreur tristement "normale" ne se reproduise pas trop souvent.

Je veux croire que cette fois la pression citoyenne ira dans le bon sens, aux côtés de celle des professionnels de la justice exempts d'esprit corporatiste.

75. Le lundi 27 février 2006 à 20:26 par Octave

Je ne vois pas en quoi le fait que procureurs et avocats se confrontent dans les prétoires les exonère de tout soupçon de corporatisme. A ce compte là les avocats sont assurés de la plus absolue objectivité du simple fait qu’ils peuvent eux aussi se trouver opposés ; et la parole du prophète Eolas prend de ce fait valeur divine. Le souci rhétorique fait parfois faire des raccourcis un peu pauvres.

Sur le raisonnement de notre hôte, je ne peux que reprendre les citations relevées par Paul :
« l'affaire d'Outreau n'est pas un dysfonctionnement de la justice. »
« Ce n'est pas une révolution culturelle que j'appelle de mes vœux, c'est un retour aux principes fondamentaux qui ne nécessite pas de changer un iota aux textes actuels. »
« Je maintiens que c'est la machine qui pose problème, pas les hommes, dans cette affaire. »
Les torrents de science que déverse Maître Eolas avec une grande modestie ne m’ont donc toujours pas lavé de mon ignorance crasse sur ses propositions quant à ce douloureux dossier. Il me manque peut-être encore une dose de la brillantissime vulgarisation de Sans Pseudo.

On peut débattre longuement de l’avis du CSM, qui écrit :
« [Les principes de séparation des pouvoirs] impliquent que les pouvoirs publics se gardent de toute ingérence dans la prise de décision du magistrat. » (alors que la décision est déjà prise depuis longtemps !)
« le Conseil supérieur de la magistrature déplore que [les magistrats] aient été interrogés sur l'élaboration de leurs décisions juridictionnelles. »
Il s’agit bien pour moi d’une contestation du droit pour le parlement d’auditer le fonctionnement de la justice sur la base de cas précis. Est-ce qu’une commission d’enquête s’interdit de demander à un ministre ce qui a motivé une (mauvaise) décision ?

Pour finir, cher Maître, notez que quand il y a désaccord entre « le milieu judiciaire » et « les autres citoyens », ces derniers ont effectivement forcément raison. Cela s’appelle la démocratie.

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