Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Passe-passe (tour de) : (expression populaire) entourloupe d'une illusioniste

Par Dadouche



Certains, pris dans la torpeur estivale, l'ignoraient peut-être : le Conseil Supérieur de la Magistrature, dans sa composition disciplinaire à l'égard des magistrats du parquet, a rendu le 18 juillet un avis selon lequel il n'y a pas lieu à prononcer de sanction contre Gérald Lesigne, Procureur de la République de Boulogne-sur-Mer et avocat général au procès d'Outreau.

L'avis est disponible in extenso grâce à Pascale Robert-Diard.
Pour résumer, le CSM est d'avis que les griefs formulés par le garde des Sceaux à l'encontre de Gérald Lesigne ne sont pas constitutifs de fautes disciplinaires sauf "la présentation péremptoire, parcellaire et réitérée de faits ne rendant pas compte du contenu réel du dossier", qualifiée de "manquement au devoir de rigueur qu'impose l'état de magistrat et tout particulièrement celui de chef de parquet". Cette faute ayant été commise antérieurement à la loi de 2002 qui a amnistié (entre autres) les faits passibles de sanction disciplinaires non contraires à l'honneur, à la probité et aux bonnes moeurs (pas que pour les magistrats, hein, c'est applicable également aux fautes disciplinaires de tout salarié ou fonctionnaire), elle ne peut donner lieu à sanction.

Les articles 58-1 et suivants de l'Ordonnance du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature traitent de la discipline des magistrats du Parquet.
L'article 65-1 dispose que "Lorsque le garde des sceaux, ministre de la justice, entend prendre une sanction plus grave que celle proposée par la formation compétente du Conseil supérieur, il saisit cette dernière de son projet de décision motivée. Après avoir entendu les observations du magistrat intéressé, cette formation émet alors un nouvel avis qui est versé au dossier du magistrat intéressé. La décision du garde des sceaux, ministre de la justice, est notifiée au magistrat intéressé en la forme administrative. Elle prend effet du jour de cette notification."
En gros, le garde des Sceaux peut prendre une décision de sanction plus grave que celle proposée par le CSM, mais doit d'abord redemander l'avis de celui-ci.[1]

On apprend aujourd'hui, de source bien informée, que : "Le maintien de M. Lesigne dans ses fonctions de procureur à Boulogne-sur-Mer n'est pas une réponse à la hauteur de ces traumatismes. La Garde des sceaux a souhaité qu'il quitte la juridiction de Boulogne-sur-Mer et la cour d'appel de Douai. M. Lesigne quittera donc ses fonctions à la tête du parquet du tribunal de grande instance de Boulogne-sur-Mer et la cour d'appel de Douai dans les prochains mois."

C'est là que l'intoxiqué des chaînes d'info en continu s'imagine avoir été enlevé par des extra-terrestres qui lui ont effacé 24 heures de mémoire vive : comment a-t-il pu louper l'annonce d'une demande de nouvel avis au CSM, qui permet juridiquement au garde des Sceaux de prononcer une sanction contre cet avis ?

Et c'est là que l'on s'aperçoit que le garde des Sceaux a sacrifié aux mânes de Jean-Eugène Robert-Houdin, dans un petit tour de passe-passe de communication.

En effet, aucune sanction n'est prononcée contre Gérald Lesigne, qui a lui même sollicité sa mutation pour, selon la rumeur, un poste de substitut général.
Ce qui, dans le communiqué ministériel, devient (roulement de tambour) : "La Garde des sceaux a souhaité qu'il quitte la juridiction de Boulogne-sur-Mer et la cour d'appel de Douai. M. Lesigne quittera donc ses fonctions."

J'ai mon avis sur l'avis du CSM, et je n'entends pas relancer ici le débat sur la responsabilité des magistrats ou le bien-fondé ou non d'une sanction en l'espèce.
Je ne conteste même pas le fait que, sur le fond, il est sans doute préférable que le Procureur de Boulogne-sur-Mer, à ce poste depuis 1996, se dirige vers d'autres contrées
Mais la procédure disciplinaire a été tout bonnement détournée, profitant du souhait (réel et ancien) de Gérald Lesigne de quitter ses fonctions à Boulogne-sur-Mer.
Il n'est pas anodin de noter que, si Gérald Lesigne occupe statutairement un poste du premier grade[2] en tant que Procureur de la République dans cette juridiction (car classé comme tel lorsqu'il y a été nommé), il s'agit de fait d'un poste de responsabilité supérieure que la Chancellerie classifie désormais comme un poste "hors hiérarchie".[3] Gérald Lesigne, qui a occupé des fonctions de chef de parquet dans une juridiction "HH" (comme on dit affectueusement chez nous), sera donc, sous couvert d'une mutation "à égalité", nommé sur un poste en réalité inférieur[4]

Ça a la couleur d'une sanction disciplinaire, la saveur d'une sanction disciplinaire, l'habillage d'une sanction disciplinaire, mais officiellement ça n'est pas une sanction disciplinaire
La différence est de taille : le Conseil d'Etat n'aura aucune occasion de fourrer son nez avisé dans cette histoire.

En résumé : chapeau l'artiste et Welcome to Cabaret.

J'aurais quant à moi préféré que l'illusionniste se fît plutôt dompteuse et assumât pleinement son désir de satisfaire aux attentes des foules en sollicitant un nouvel avis du CSM et en prononçant, le cas échéant, selon la procédure prévue par la Loi, la sanction disciplinaire qui lui semblait adaptée.
Quitte à faire claquer son fouet devant les magistrats estomaqués et à aller, plus courageusement, fourrer sa tête dans la gueule du Conseil d'Etat.

Notes

[1] En chipotant, on pourrait d'ailleurs s'interroger sur la possibilité de prononcer "une sanction plus grave que celle proposée" alors que l'avis ne propose aucune sanction puisqu'il n'y a selon le CSM pas de faute disciplinaire. J'avoue, je n'ai pas eu le temps de chercher de jurisprudence sur ce point et l'ordonnance de 58 ne semble même pas envisager la possibilité que le Garde ait saisi à tort le CSM, puisque son article 65 ne prévoit que le cas d'un "avis sur la sanction que les faits reprochés lui paraissent entraîner" et non le cas où il estime que les faits n'entraînent pas de sanction.

[2] le corps judiciaire est composé de trois grades : second grade, premier grade et hors hiérarchie

[3] La réforme du statut de 2001 ayant modifié la proportion de chaque grade au sein du corps, un certain nombre de postes ont été selon l'expression consacrée "repyramidés" dans le grade supérieur, mais ce surclassement ne s'applique pas automatiquement à celui qui est en poste lorsqu'il est décidé, mais seulement à son successeur.

[4] Je sais, c'est pas très clair, je crois qu'il faut que je m'attèle à un billet sur le grade et la fonction dans la magistrature, en douze tomes reliés pleine peau vu la complexité.

Commentaires

1. Le mardi 29 juillet 2008 à 21:34 par El Re

On a quand même du mal à comprendre comment ce procureur faisait pour réclamer la condamnation de plusieurs personnes dont la culpabilité était fortement remise en question (ceci est vérifiable, car figure dans la presse judiciaire*). Je ne parle pas ici de l'appel, mais du premier procès.

Sauf à croire que ce serait avouer son tort, puisqu'il avait été le premier à soutenir, vaillamment, toute l'enquête.

Bref, c'est un peu comme la discrimination à l'embauche, il est extrêmement difficile de prouver le tort. Ça justifie néanmoins de ne pas rejeter d'un revers de main les sentiments des gens, qui peuvent à juste titre s'en indigner.

* cf. "faites entrer l'accusé" (ça a beau être une émission de télé, c'est pas forcément "mauvais", ne pas faire de généralités)

2. Le mardi 29 juillet 2008 à 21:40 par Virginie

"si Gérald Lesigne occupe statutairement un poste du premier grade en tant que Procureur de la République dans cette juridiction (car classé comme tel lorsqu'il y a été nommé), il s'agit de fait d'un poste de responsabilité supérieure que la Chancellerie classifie désormais comme un poste "hors hiérarchie"".

Je vais peut-être poser une question idiote, mais cela signifie-t-il que la classification nouvelle ne peut trouver à s'appliquer (ou plutôt ne devient effective) en réalité que lorsque le poste fait l'objet de l'attribution au successeur? (j'espère que ma question est claire...)

3. Le mardi 29 juillet 2008 à 21:41 par No comment

Cette opération de haute voltige communicationnelle visait certainement à l'apaisement des relations tumultueuses chancellerie-magistrature tout en ne paraissant pas céder au prétendu "corporatisme d'une caste de petits pois irresponsables".

Bien tenté.

Seule l'affirmation de Mr Lesigne selon laquelle il était demandeur d'une mutation a grippé la manoeuvre.

"Juridiction HH", kezako?

4. Le mardi 29 juillet 2008 à 21:42 par boratkehul

comme écrit Philippe Bilger dans son blog(www.philippebilger.com/bl... le CSM a choisi de servir l'Etat de droit, la ministre a préféré satisfaire le populisme hostile aux magistrats des citoyens...

décidément, la justice va bien mal dans ce pays...

5. Le mardi 29 juillet 2008 à 21:46 par Cimon

Je dois avouer que je ne comprends pas trop le problème : M. Lesigne part sur sa demande, éventuellement vers un poste en fait sinon en droit de niveau inférieur, mais sur sa demande.
Là dessus, Mme le ministre dit qu'elle a souhaité que M. Lesigne quitte sa juridiction (ce qui est probablement exact) et que d'ailleurs, il la quittera (ce qui est probablement tout autant exact, vu ce qui est dit précédemment).

Ce n'est qu'un habillage de la réalité comme en font très régulièrement les ministres et autres politiques, non ?


Dadouche :
Un habillage qui fait titrer les dépêches : le Procureur Gérald Lesigne sanctionné, comme par exemple (Aliocha, pas taper)

6. Le mardi 29 juillet 2008 à 21:50 par Virginie

Oups, je retire, je n'avais pas lu la note de bas de page 3.

@ No comment: hors hiérarchie

7. Le mardi 29 juillet 2008 à 22:16 par bartabas

Ce qui me surprend surtout, compte tenu du caractère "réel et ancien" du souhait de G. Lesigne d'être muté, c'est qu'il n'y ait pas été fait droit plus tôt...

8. Le mardi 29 juillet 2008 à 22:18 par Lulu

à Virginie;

Puisque j'occupe mon premier poste et que je ne peux pour l'instant guère prétendre à grand chose en terme d'avancement, j'avoue ne pas m'être préoccupé de toutes les subtilités de grades, échelons, etc... Ce que j'ai cru comprendre et Dadouche me détrompera si je me trompe, c'est que les postes classés "Hors hiérarchie" sont généralement assez recherchés car particulièrement intéressants s'agissant de la rémunération. Beaucoup de collègues cherchent ainsi à occuper un poste hors hiérarchie, dans les quelques mois ou quelques années précédant la retraite, afin de pouvoir prétendre à une meilleure pension.

à Cimon;

La situation n'est malheureusement pas aussi simple que "M. LESIGNE veut partir de Boulogne, la Garde des Sceaux veut le voir partir de BOULOGNE et tout le monde est content".

Il semblerait (et je m'exprime avec précaution car je rapporte des informations données par d'autres sur les listes de discussion de magistrats) que M. LESIGNE avait présenté des demandes de mutation, et bien avant le début de l'affaire dite d'Outreau, demandes qui n'avaient pas été satisfaites. Jusque là rien à dire, c'est une situation qui se produit assez fréquemment, dans la mesure où un magistrat n'est jamais muté que sur un poste qu'il demande (ainsi que l'avait expliqué Dadouche au moment de la parution de la "transparence") et qu'il y a forcément des déçus.

Mais il semblerait également que M. LESIGNE a été convoqué la semaine dernière place Vendôme, la veille pour le lendemain, pour un entretien avec Rachida Dati, entretien entre quatre yeux. Au cours de cet entretien, la Garde des Sceaux lui aurait "fortement suggéré" de demander sa mutation, sous peine de sanction disciplinaire.

Soit dit en passant: je peux comprendre que compte tenu de l'affaire d'Outreau, le départ de M. LESIGNE puisse apparaître opportun. Je pense que le principal intéressé lui-même a certainement envie de tourner la page, raison pour laquelle il va sans doute présenter la demande de mutation souhaitée par Mme DATI.

Ce qui me gêne fortement, c'est cette impression de "chantage", de marché proposé par la Chancellerie, tout cela parce le Garde des Sceaux n'ose affronter ni l'opinion publique, ni les magistrats, ni le Conseil d'Etat qui, compte tenu de sa jurisprudence sur l'erreur manifeste d'appréciation, aurait certainement retoqué toute sanction disciplinaire prise à l'encontre de M. LESIGNE.

Le pire, c'est qu'à vouloir ménager la chèvre et le chou, la ministre de la Justice ne satisfait personne: ni l'opinion publique (qui à en croire certains commentaires sur les blogs, veut couper la tête de MM BURGAUD et LESIGNE) ni les magistrats qui ont le sentiment que leurs collègues servent de boucs émissaires.

9. Le mardi 29 juillet 2008 à 22:40 par Lucas Clermont

Je n'y trouve rien à redire. Dans le fond cela permet de ne pas offrir à l'opinion publique un nouveau rebondissement dans cette affaire douloureuse. La mise-au-point de M.Lesigne ne créera une vague polémique que dans quelques milieux restreints, assez loin des émotions de la foule et la sérénité reviendra.

Je doute toutefois que l'analyse des causes de l'affaire d'Outreau aura été propice à réduire le nombre de détentions provisoires.


Dadouche :
Si on fait un bilan rapide, l'analyse des causes de l'affaire d'Outreau a conduit à une réforme du CSM contraire à tous les standards européens sur l'impartialité de la justice, les pôles de l'instruction (alors que par exemple l'USM réclame depuis des années la collégialité au niveau du placement en détention), et quelques réformes fumeuses à l'instruction (dont certaines allongent les délais de traitement). Sans parler de la carte judiciaire (rappelons que le TGI de Boulogne-sur-Mer compte en principe pas moins de 4 juges d'instruction). De réflexion sur le traitement judiciaire des affaires "de moeurs", le principe et la durée de la détention provisoire, de moyens pour raccourcir les délais de traitement et de jugement des affaires (et donc des détentions provisoires), point (à part les réflexions houillonesques du style "quand des magistrats auront été sanctionnés, on verra bien si les délais de détention ne diminuent pas").

10. Le mardi 29 juillet 2008 à 22:55 par mcc

j'avais cru comprendre que le poste de Caen était un poste de substitut général à la cour d'appel, alors qu'il était procureur à Boulogne sur mer, au même grade. J'ai manqué quelque chose, ou je ne vois pas de retrogradation ???
Comme de plus le principal interessé semble content de bouger (qui a dit que c'est le cas de tout le monde qui quitte boulogne sur mer :-) ? ), ou est le problème ?

Dadouche :
Effectivement, statutairement il n'y a pas de rétrogradation. Compte tenu de la réalité des deux postes, c'est un peu plus compliqué.


Mais le corporatisme des magistrats et de leurs syndicats est passé par là. Il vaut mieux faire en sorte que M Lesigne soit malheureux, mais reste à son poste, plutot que de sembler perdre la face.

Dadouche :
Ce n'est pas que Mr Lesigne quitte son poste, y compris pour un poste de fait "inférieur" à celui qu'il occupait qui pose un problème. Encore une fois, il souhaitait son départ et je conçois qu'il aurait été difficile médiatiquement de faire passer sa nomination à un poste d'avocat général (en réalité équivalent mais statutairement supérieur à celui qu'il occupait).
C'est que l'habillage qui nous est servi vise à faire croire que des sanctions ont été prises, alors que la procédure disciplinaire n'est pas respectée. Le côté "regardez moi bien, le CSM et les garanties statutaires qui visent à assurer l'impartialité des magistrats je m'assois dessus parce que moi j'ai compris les vrais gens. Et accessoirement mais ça, chut, faut pas le dire, j'évite de me faire raser au conseil d'Etat".
Indiquer qu'elle se rangeait à l'avis du CSM et faire une simple annonce au moment de la transparence indiquant que "Mr Lesigne, PR Boulogne, est nommé substitut général à Tataouïne" m'aurait paru plus adéquat et conforme à la réalité que ce communiqué. Ou alors il fallait respecter la procédure disciplinaire et assumer le fait de prononcer une sanction.


Voilà qui est digne de notre beau pays...

11. Le mardi 29 juillet 2008 à 23:03 par Damien B

"Quitte à faire claquer son fouet devant les magistrats estomaqués"

Oui, mais un fouet Dior ça ne se claque pas, sinon, on l'abime.

12. Le mardi 29 juillet 2008 à 23:34 par OuvreBoîte

Si elle voulait le muter à un grade supérieur ou équivalent tout en lui infligeant une punition cruelle, avait-elle la possibilité de le nommer à la chancellerie sous ses ordres directs ?

13. Le mardi 29 juillet 2008 à 23:49 par Clems

Un désaccord et une interrogation :

"occupe statutairement un poste du premier grade[2] en tant que Procureur de la République dans cette juridiction (car classé comme tel lorsqu'il y a été nommé), il s'agit de fait d'un poste de responsabilité supérieure que la Chancellerie classifie désormais comme un poste "hors hiérarchie".[3] Gérald Lesigne, qui a occupé des fonctions de chef de parquet dans une juridiction "HH" (comme on dit affectueusement chez nous), sera donc, sous couvert d'une mutation "à égalité", nommé sur un poste en réalité inférieur[4]"

Pas d'accord ce n'est pas une sanction dans la mesure où il est tout à fait courant dans la fonction publique que des postes d'encadrement ou mieux encore soient occupés par des personnes qui n'ont pas le concours et qui donc statutairement sont d'un rang inférieur. Et effectivement lors des mutations on ne prend en compte que le statut. Ce qui généralement provoque des mutations "à égalité" sur des postes de rang inférieurs, parfois c'est l'inverse même en tout début de carrière ! Tout ceci pour des raisons d'économies évidentes, monter quelqu'un en grade ou en échelon coûte.

Dadouche :
On est d'accord : statutairement ça n'est pas une sacntion. Mais ça a été présenté comme tel (et le résultat de fait en est quand même très proche)


Une interrogation :
Si il s'agissait d'apaiser les esprits dans une région, ce qui peut se comprendre vu la situation, pourquoi dans ce cas, ne l'a t' elle pas muté plus tôt ? Vu qu'elle avait son accord, qu'il s'agissait d'un souhait formulé de façon non équivoque ? Cela n'a pas de sens. Dati totalement incompétente sur ce coup.

Dadouche :
J'ai cru comprendre que les demandes de mutation de M Lesigne étaient pré-datiesques.



14. Le mardi 29 juillet 2008 à 23:59 par Eolas

@ OuvreBoîte : N'exagérons rien. M. Lesigne n'est quand même pas Georges Fenech.

@mcc : Au-delà de la question hiérarchique dans l'organigramme du parquet, du prestige d'une cour d'appel par rapport à un TGI, ou de la rémunération, il ne s'agit pas d'une mutation à égalité. Car un procureur de la République est roi en son ressort. C'était lui le chef, ses interlocuteurs habituels étaient le préfet et le procureur général, et il avait sous son autorité une équipe, sans doute réduite, mais aussi toute la police judiciare de son arrondissement. Substitut général, c'est un poste subalterne dans un gros parquet de cour d'appel, et en principe peu d'activité d'audience, réservée aux avocats généraux, au profit de tâches plus administratives. Il ne sera plus le chef, ce sera son procureur général. Et il pourra très bien se retrouver au service de l'exécution des peines, comme Fabrice Burgaud, tâche noble s'il en est mais irrésistiblement éloignée des caméras. Je ne pense pas qu'il bondira de joie en prenant son nouveau poste ; c'est plutôt un poste d'attente, pour amasser quelques points supplémentaires en acceptant de bouger, en attendant d'voir un poste plus intéressant… Las, vu le boulet qu'il se traîne au pied, ça peut aussi bien être un tombeau discret.


Dadouche :
Je ne suis pas tout à fait d'accord avec vous. Un poste de substitut général n'est pas en soi moins intéressant d'un poste de procureur. En ce qui me concerne, je crois que je préférerais être substitut général que Procureur de la République à Belley. Mais Boulogne est une juridiction de taille plutôt importante, à tel point que son président et son procureur sont en principe hors hiérarchie, alors qu'un substitut général est forcément du premier grade. Quant au service d'audience, cela dépend selon les cours d'appel. J'en connais où les substituts généraux vont beaucoup plus à l'audience que les avocats généraux. Paris a, pour de nombreuses raisons, un fonctionnement assez particulier. Quant aux tâches administratives, c'est bien l'une des raisons qui me dissuaderait d'envisager un jour un poste de chef de juridiction

15. Le mercredi 30 juillet 2008 à 00:35 par Augustissime

Content tout de même que le CSM pointe enfin une faute chez un magistrat dans cette affaire, fût-elle amnistiée. C'était un peu agaçant de voir l'affaire mise sur le compte exclusif du législateur ou "de la faute à pas de chance".

Du reste, vous continuez en partie dans cette logique quand, par exemple, vous pointez "le principe et la durée de la détention provisoire" comme si ce problème était d'ordre purement législatif, alors que les textes actuels autoriseraient les JLD à avoir des pratiques très différentes.

Sans aucun doute le gouvernement n'a pas tiré toute la mesure d'Outreau. Mais le monde judiciaire n'a pas fait mieux et les analyses de cette affaire ont rarement dépassé le niveau du corporatisme béat.

16. Le mercredi 30 juillet 2008 à 01:29 par Sans Grade

Gérald, le signe est fort. A la fausse note du CSM, la Garde a voulu opposer le sang du cygne. Qu'il retombe sur nos têtes de petits pois.La cosse n'était pas bonne.


17. Le mercredi 30 juillet 2008 à 01:36 par mcc

@dadouche:
Votre réponse me fait mieux comprendre votre point de vue, et... je suis plutot d'accord avec vous sur la forme de la communication. Mais, faire du vent avec rien, n'est-ce pas le propre du politicien contemporain ?
Je pense que notre ministre de la justice a été à la bonne école pour faire entendre à la majorité ce qui lui fait plaisir, même au prix de quelques tours de passe-passe.
Mais d'un autre coté, je suis tout aussi mécontent de tout ce bruit sur la "punition malgré le CSM".
Je n'étais pas dans son bureau pour savoir si M Lesigne a commis des fautes, mais ce que je devine, c'est qu'il lui est difficile d'exercer à Boulogne avec la sérénité nécessaire. Pour le bien commun, je pense donc qu'il était bien qu'il parte.
Avec tout ce tapage d'ailleurs, je ne suis pas sûr qu'il soit beaucoup plus serein à Caen. Le poste de substitut général peut être justement pour lui un moyen de se faire oublier en attendant de meilleurs jours.

18. Le mercredi 30 juillet 2008 à 01:58 par OuvreBoîte

@Eolas(14)
En fait j'avais envie de revoir les petites vignettes de Dadouche, je les aime bien et elles sont quand même vachement mieux que celles que vous distribuez vous même. Je pensais que mes propos étaient un peu trop désobligeants pour la Garde des Sceaux. Las, les petites piques sur RD semblent être considérées avec indulgence par la magistrature, je vais patienter le temps qu'Augustissime se fasse chopper.

19. Le mercredi 30 juillet 2008 à 02:35 par tschok

Excusez moi Dadouche pour ce com HS que je destine à Fantômette sur le contrôle séquentiel et une ancienne discussion sur cette affaire.

L'avis du CSM contient une illustration parfaite d'une des grandes faiblesses du contrôle séquentiel: la tendance du maillon supérieur à s'en remettre au maillon inférieur pour, durant les événements, le couvrir, et après les événements le sanctionner.

Extrait concernant un point fondamental du contrôle séquentiel, la communication de l'information à l'autorité supérieure :

"Si le principe hiérarchique [comprenez le contrôle séquentiel],inscrit à l'article 5 de l'ordonnance précitée, sur lequel est fondée l'organisation statutaire du ministère public et auquel tout magistrat du parquet est soumis, confère à l'autorité supérieure le pouvoir de donner des instruction, il est également,pour cette dernière,source d'obligations,dont celles de vérifier et valider les informations reçues et transmises [nous y voilà].

Or, l'envoi des rapports administratifs au parquet général de Douai n'a entraîné,de la part de celui-ci, aucune demande de renseignement complémentaire, alors
même que les rapports, en dates des 26 juin, 7 septembre et 21 décembre 2001, étaient accompagnés de pièces de procédure n'en corroborant pas les mentions et qu'une copie intégrale du dossier, en permanence actualisée, était à sa disposition [ hééé oui: pourquoi procéder à des vérifications, puisqu'on fait confiance?].

À aucun moment de la procédure, le parquet général et la direction des affaires criminelles et des grâces, informés du contenu du dossier n'ont appelé l'attention du
procureur e la République sur le décalage existant entre le contenu de ses rapports et les pièces qui y étaient jointes, ni usé de leur pouvoir d'instruction [ et en plus c'est contagieux d'un maillon supérieur au suivant: la chancellerie n'a guère été plus brillante...].

Ce constat n'exonère pendant pas M. LESIGNE de sa responsabilité [ça c'est le côté punition: il faut bien que quelqu'un paye]."

On s'étonne que 60 magistrats, dit on, soient passés à côté de l'affaire sans rien détecter du scandale qu'elle recelait avant l'éclatement final.

Le nombre ne fait rien à l'affaire, ils auraient pu être 120, le résultat aurait été identique, voire pire.

Ici, on voit bien que les incohérences entre les pièces du dossier et l'interprétation qu'en fait M. Lesigne ne sont pas détectées par le système séquentiel.

Cette inefficacité du système a été une des causes principales du déclenchement du scandale et traduit la notion de persistance dans l'erreur. Incapable de détecter l'erreur, le système continue à dysfonctionner tranquillement sans que personne ne s'en inquiète jusqu'au moment où...

Et après, ça tourne au psycho drame.

Bien évidemment, avec la recherche de la sanction personnelle, alors que la faillite est de nature organisationnelle, rien n'est fait pour changer l'organisation même du système, qui conserve donc sa capacité de nuisance, et bien peu est fait pour punir les responsables aux yeux de ceux qui ont souffert.

Donc personne n'est vraiment content.

Comment l'être d'ailleurs?

20. Le mercredi 30 juillet 2008 à 06:31 par Passant

Mon propos débordera nettement du discours initial, mais ne fera guère que démontrer ma curiosité : lecteur de sites web francophones d'actualité juridique depuis qu'il en existe, je ne me souviens pas qu'il ait existé de Garde des Sceaux dont le travail soit même simplement majoritairement loué par les juristes. Le grand public a d'ailleurs parfois un jugement plus sévère encore, constatant la si fréquente apparente lâcheté du titulaire de la fonction. D'où mon interrogation : de l'avis des intéressés, qui aura été le dernier bon Garde des Sceaux ?

21. Le mercredi 30 juillet 2008 à 07:19 par Véronique

Je partage votre analyse au sujet de la forme de la communication de la mutation du procureur Lesigne.

Concernant l'aspect traitement judiciaire du dossier d'Outreau, je rejoins Tschok. Pascale Robert-Diard a finement rendu compte dans son blog de ce qui se jouait lors de la comparution du procureur Lesigne au CMS.

Une accusation dont la logique est de réduire la responsabilité du fiasco au procureur de Boulogne. Un président du CSM qui s'attache à mettre en évidence par ses questions la passivité de la totalité de la chaîne judiciaire.

Quand M. Lesigne avait évoqué au moment de la commission d'enquête parlementaire " le mythe de la pédophilie ", je pense que son explication
était la plus près et la plus juste de la réalité du dossier empoisonné de toutes parts et à tous les niveaux par la prépondérance des dogmes et des représentations.

Faire croire à l'opinion que les dysfonctionnements de ce dossier se résument à une ou deux personnes, c'est priver l'opinion d'un éclairage, selon moi, essentiel et déterminant à sa compréhension de cette affaire.

A savoir une solidarité de vues entre des associations, des services sociaux, des professionnels de la justice, des médias et des politiques. Sans que n’intervienne, quand il est encore temps, le contrôle d’un contre-pouvoir.

Au regard de cet abîme, la communication de la Chancellerie au sujet du procureur Lesigne apparaît pauvre et dérisoire dans sa stratégie et dans l'effet escompté.



22. Le mercredi 30 juillet 2008 à 09:15 par Anatole Turnaround

Lesigne ! Lesigne ! Pourquoi nous as-tu abandonnés ?

Je ne te connais pas et tu ne me connais pas . Mais parle-moi, explique moi !

Tu étais notre fer de lance, à nous tous, magistrats horrifiés secrètement par un pouvoir exécutif insouciant d’écraser les hommes et de piétiner les principes. Notre conseil supérieur, nos sages, t’avaient blanchi de toute accusation. Nous étions confiants dans l’issue du combat. Elle allait renoncer, celle qui veut ta peau pour l’exhiber aux yeux du peuple. Et même si elle s’était entêtée à aller contre l’avis des sages, c’est toi, devant le conseil d’Etat, qui lui aurait fait courber l’échine et baisser le front.

Reviens! Reprends ta parole ! Tu en as le droit puisqu’elle-même te trahi en faisant croire qu’elle a pu te punir alors qu’il n’en est rien.

Reviens tenir tête ! N’accepte pas de disparaître dans le bureau subalterne où on t’envoie, chargé des péchés que d’autres ont commis. Pourquoi prendre le mal sur toi alors que, procureur et simple partie à la procédure, tu n’a pris toi-même aucune des décisions qui ont mené à la catastrophe?

Reviens! Ne cède pas ! Ne la laisse pas faire croire que ce qui est arrivé était la faute d’un seul, où mêmes de deux ! Ne la laisse pas faire croire que ce qui est arrivé était la faute des hommes de justice.

Car a ceux-ci on ne donne plus depuis longtemps le temps d’étudier chaque dossier comme il faudrait l’étudier. Car on les a laissés trop peu nombreux et trop démunis. Car depuis longtemps on les contraint aux négligences qu’on leur reproche maintenant!

Et voilà qu’ils veulent te crucifier pour déguiser leur propre faute, et sans en avoir eux-même la force. Et voilà qu’ils t’ont persuadé de monter de toi-même sur ta croix! Et voilà qu’ils cherchent gloire de ce mensonge.

Reviens, Lesigne! Fais face! Ta capitulation serait notre capitulation. Ton courage sera notre courage. Nous avons besoin de toi.

23. Le mercredi 30 juillet 2008 à 09:18 par Eolas

@ Augustissime : Je sais que l'affaire d'Outreau pour vous doit être vue sous l'angle sinon exclusif du moins principal de la faute des magistrats. Je vous comprends. D'une part, taper sur la justice tout en réfutant tout argument par l'invocation du corporatisme, ça fait du bien et ça ne colle pas une ampoule au cerveau. D'autre part, c'est rassurant : yaka sanctionner les juges, et hop, problème réglé. Mais ça n'empêche pas les esprits honnêtes de lire l'avis du CSM. Quelle faute est reprochée au procureur Lesigne ? D'avoir, dans cinq rapports administratifs destinés à la Chancellerie, fait état d'élements non corroborés par des éléments objectifs du dossier, et d'avoir repris ces éléments non étayés dans quatre des seize rapports destinés à la cour d'appel de Douai qu'il a signés. Ces éléments non corroborés sont, pour simplifier, l'existence d'un réseau de cassettes vidéos vers la Belgique animé par deux des mis en examens, un père et son fils.
Assurément, ce n'est pas bien. C'est une illustration parfaite de l'effet d'emballement qui a saisi cette affaire au début. Mais l'affaire d'Outreau ne se résume pas à ces cinq rapports administratifs erronés. J'ajoute que pour les rapports d'appel (=destinés au parquet général en vue d'une audience devant la chambre de l'instruction, que ce soit sur une demande de mise en liberté, de nullité d'acte ou d'appel d'une ordonnance du juge d'instruction), ces rapports accompagnent l'entier dossier de la procédure. Rien ne dispense le parquet général de prendre lui-même connaissance du dossier pour se forger son opinion. J'ajoute que ces rapports sont accessibles à la défense, qui a également accès à l'entier dossier et peut les contrecarrer. Enfin, ces éléments erronés ne sont plus apparus après le 26 janvier 2002. Or les mis en examens sont restés détenus bien au-delà de cette date.
J'ajoute que tous les autres griefs relevés par la Chancellerie ont été rejetés comme infondés ou non constitutifs d'une faute disciplinaire. Bref, le lion malade la peste crie haro sur le baudet, sous vos applaudissements. Et je me désole de voir que tant qu'on ne cherchera pas les causes de cette affaire au-delà de la faute de quelques uns, ce n'est qu'une question de temps avant qu'une nouvelle affaire n'éclate. Elle est peut-être déjà en cours. Nul doute que là encore, vous nous donnerez la liste des coupables à punir en place public, et ce — comment dit le CSM, déjà ? Ah, oui : en des termes non étayés par les éléments du dossier.

24. Le mercredi 30 juillet 2008 à 09:22 par Eolas

 @ Tschok : Votre analyse montre qu'en réfléchissant soi-même sur le dossier plutôt que se référer aux avis des autres, on découvre plus vite les problèmes. Tschok 1, Augustissime et Chancellerie, 0.

25. Le mercredi 30 juillet 2008 à 09:28 par Eolas

@ Passant : Souvent, ceux qui en font le moins. Guigou et Lebranchu étaient pas mal, même si Elisabeth Guigou, avec sa loi de 1998 sur les crimes sexuels, a jeté les graines de l'affaire d'Outreau. Néanmoins, sa loi du 15 juin 2000 lui assure une place de choix dans mon cœur. Badinter, bien sûr, fut un grand garde des Sceaux, même si j'ignore quelles furent ses relations avec la magistrature. Comme garde des sceaux de droite, il faut remonter je le crains à Jean Foyer (15 avril 1962 - 6 avril 1967) et René Capitant (30 mai 1968 - 28 avril 1969). Depuis, le GDS est devenu le gardien du chenil, chargé de contrôler les limiers qui voudraient mordre les jarrets des amis, et de diriger la meute vers des jarrets ennemis.

26. Le mercredi 30 juillet 2008 à 09:38 par Mathaf Hacker

"On" a cherché les causes de cette affaire, à travers une commission d'enquête parlementaire qui a accouché d'une souris. On peut se demander quelles sont la mission, l'action et le résultat de ces enquêtes parlementaires, à part un concours de lancer de tarte à crème.

27. Le mercredi 30 juillet 2008 à 10:02 par Anatole Turnaround

Le vent du Nord nous apporte la voix du procureur Lesigne, qui fait ses valises.

www.lavoixdunord.fr/Local...

28. Le mercredi 30 juillet 2008 à 10:37 par Motus

A lire ce matin, Libé, enfin si l'on ne craint pas d'avaler son croissant de travers. Danielle Mitterrand pourrait dire que l'article de M. Lecadre, soudain converti au datisme, "sue la haine".
On y apprend que le retrait des fonctions assorti d'un déplacement d'office n'est pas une sanction, "même pas un blâme".
Cet organe de presse nous gâte, un vrai festival !

29. Le mercredi 30 juillet 2008 à 10:41 par indi

@ Tschok

Rien à redire à votre commentaire tout est dit

30. Le mercredi 30 juillet 2008 à 10:42 par Anatole Turnaround

Puisque personne ne semble prêter attention à ma présence dans ce salon, je me répondrai à moi même. A relire mon exhortation au procureur Lesigne, je concède volontiers qu’elle est quelque peu dépourvue de nuances et que ce collègue n’est sans doute pas exempt de reproches, même amnistiables.

Mais si je m’enflamme pour son maintien à son poste (qui, je le sais bien, n’aura pas lieu, n’est pas souhaitable pour la bonne administration de la justice locale, et provoquerait des émeutes s’il l’on en croit les réactions des lecteurs des articles de presse consacrés à son départ), ce n’est pas sous l’empire du corporatisme béat, dont je crois être autant le comtempteur qu’Augustissime.

Mais la mollesse avec laquelle Lesigne semble s’être laissé embobiner et conduire tout ficelé vers la petite porte de sortie, et bien cette mollesse me consterne !

Cette mollesse me ravage, même.

Parce que ce n’est pas seulement celle du collègue Lesigne qui est impliqué dans un grave échec judiciaire : C’est le symbole de la mollesse du corps des magistrats tout entier.

Lesigne s’est fait mollement entourlouper, comme le corps tout entier s’est mollement laissé voler une partie de son indépendance, à l’occasion de la récente réforme du CSM.

C’est la mollesse du petit pois, qui ne résiste guère sous la dent.


Dadouche :
Si si, on prête attention. Mais la période de service allégé n'a dans certaines fonctions d'allégé que le nom.
J'ai pesté, juré, maugréé, vitupéré, ces dernières semaines, dans mes activités syndicales, contre l'indifférence des collègues, leur mollesse, leur lâcheté. Mais peut être aussi leur usure, leur sidération, leur lassitude, leur côté "pas bouger, pas faire de bruit, on a déjà trop mal au crâne à force de se faire taper dessus". Et je peux aussi le comprendre. Je sais, c'est difficile à admettre, mais, finalement, nous ne sommes pas des héros.

31. Le mercredi 30 juillet 2008 à 11:14 par Humaniste

On sacrifie un pion pour protéger le système.
Le système est clair: si le prévenu n'avoue pas, on le garde en détention pour qu'il ne fasse pas pression sur les témoins et ne compromette pas les preuves.
Si il est innocent, il n'a rien a avouer et reste donc en détention jusqu'au procès.
En plus dans ce genre d'affaire on veut empêcher la réitération des faits et donc on enferme tous les suspect.
Enfin, bien qu'il existe des procédure permettant de remettre en cause la manière de mener l'instruction, les avocats ne les ont pas utiliser pour ne pas ce mettre a dos un juge avec lequel il peuvent être amener d'autres affaires. Quant aux autres magistrat, il ne déjuge jamais l'un des leurs.

Hélas dans cette affaire, les indemnisations sont minable et certains n'ont toujours pas récupérer leurs enfants et tremble devant le JAF.

32. Le mercredi 30 juillet 2008 à 11:18 par Augustissime

@Eolas
Vous avez beau proposer votre propre lecture de l'avis du CSM, vous ne changez rien à son contenu. Le CSM, qui avait sans nul doute bien en tête les éléments que vous développez, a estimé le procureur a commis une faute répétée, sur des points importants du dossier.

Attendons l'avis du CSM sur le juge Burgaud. J'imagine que, si sa responsabilité est mise en cause, vous saurez nous expliquer à nouveau pourquoi il n'a commis que des péchés véniels. Les magistrats sont forcément blancs dans l'affaire, et tout élément contraire doit être nécessairement passé à la trappe. C'est plus simple de rester avec ses certitudes.

Si vous vous désolez qu'on ne cherche pas les causes de cette affaire au-delà de la faute de quelques-uns, beaucoup se désolent que le monde judiciaire ne les cherche pas au-delà de la traditionnelle mise en cause des lois et du pouvoir exécutif. Avez-vous lu une tribune où un magistrat se demande publiquement si la détention provisoire, telle que la loi la prévoit, est appliquée à bon escient par les JLD ? Avez-vous lu autre chose que les traditionnelles litanies sur le thème : "le juge est bien obligé de mettre en détention, sinon on lui reproche son laxisme" ou "la justice n'a pas de moyens, donc elle ne peut traiter les affaires qu'en deux jours (comparution immédiate) ou en 5 ans (le reste des cas)" ? Avez-vous lu un avis de magistrat où la question du professionnalisme et de l'encadrement des juges d'instruction est posée ?

Les réponses du législateur sont sans nulle doute imparfaites. La restitution de l'affaire par la presse est sans doute criticable. Mais les progrès qu'aura permis Outreau, comme l'apparition progressive des caméras lors des interrogatoires, ne sont hélas pas à mettre au crédit de la réflexion constructive du monde judiciaire, qu'on attend toujours.

33. Le mercredi 30 juillet 2008 à 11:20 par Eolas

@ Humaniste : Les indemnisations sont confidentielles, et ont fait l'objet dès 2004 du paiement d'une provision de 100.000 euros. Si vous connaissez le montant exact, il m'intéresse, mais déjà la provision de 100.000 euros; ce n'est pas ce que j'appelle minable : je voudrais que tous les détenus sans cause soient ainsi indemnisés. Quant à ceux qui n'ont pas récupéré leurs enfants, vous pouvez indiquer de qui ii s'agit (accessoirement, ils n'ont aucune raison de trembler devant le JAF, il n'est pas compétent pour statuer, c'est le juge des enfants.

34. Le mercredi 30 juillet 2008 à 11:31 par Eolas

@ Augustissime : Vous êtes fatigant à débiter toujours les mêmes platitudes comme si vous aviez été visité (pas au sens biblique) par le Saint Esprit. Alors, vous voulez une tribune s'interrogeant sur la détention provisoire ? la voici,, intitulée Ruptures, de Serge Portelli, ancien doyen des juges d'instruction de Créteil, vice-président du TGI de Paris, présidant la 12e chambre correctionnelle. la « faute répétée » sur « des points importants du dossier » : lisez ce satané avis, au lieu de répéter bêtement cette sottise : cinq rapports administratifs destinés à informer la Chancellerie, et quatre rapports d'appel sur seize, destinés à donner l'avis du procureur au parquet général, sur une période de six mois. Plus de faute pendant les quatre années qui vont suivre. Cinq griefs relevés par la Chancellerie rejetés. Et voilà, vous avez votre coupable ?
Les instructions qui dirent cinq ans : je n'ose pas vous demander d'où vous sortez ça ? Dans l'affaire d'Outreau, l'instruction, exceptionnellement longue, a duré deux ans et demi, la moitié du délai indicatif. Les exceptions sont les dossiers colossaux, du type crash du mont Sainte-Odile, où le moindre changement de juge d'instruction paralyse le dossier 18 mois rien que le temps qu'il prenne connaissance du dossier (plusieurs centaines de tomes de documents parfois très techniques), affaire de l'hormone de croissance ou sang contaminé, où là ça se compte effectivement en années, mais où personne n'est détenu.
Bon, allez, ça suffit, j'arrête de perdre mon temps avec vous. Je vais plutôt pisser dans un violon, j'ai plus de chance de faire de la musique.

35. Le mercredi 30 juillet 2008 à 11:45 par Véronique

@ Augustissime

" Avez-vous lu une tribune où un magistrat se demande publiquement si la détention provisoire, telle que la loi la prévoit, est appliquée à bon escient par les JLD ? " ( vous à Eolas)

Extrait du Monde du 10-02-06

" Outre que tous les magistrats étaient "dans l'application d'un principe de précaution", le procureur * fait remarquer que le débat devant le juge des libertés et de la détention est artificiel. "Le fond du dossier ne peut être abordé. On est là à faire le constat des conditions de la détention. C'est dramatique." "

* Il s'agit ... du procureur Lésigne lors de son audition par la commission d'enquête parlementaire.

36. Le mercredi 30 juillet 2008 à 11:54 par GRANTUMU

@Anatole T
J'ai prêté attention à vos posts, mais pas en priorité à votre sujet principal.

Je suis avocat, et je constate comme vous que l'on demande à votre corporation de plus en plus souvent de vider des baignoires avec une petite cuillère; et je regrette comme vous que cela n'intéresse pas les marchands de bulles et de fumées.

Ca ne saurait excuser la poignée de nuls, jmenfoutistes, ou/et malhonnêtes qui font taches très grasses, ni justifier qu'on ne cherche jamais à leur coller un coup de bambou à défaut de pouvoir les éjecter.

Mon propos n'étant pas de dire que LECIGNE est de ces derniers, je n'en sait rien; alors que je me suis fait une très mauvaise opinion du sieur BURGAUD après avoir entendu les auditions de la commission parlementaire, les siennes et celles des mis en examen-condamnés-acquittés.

37. Le mercredi 30 juillet 2008 à 12:09 par Lucas Clermont

@ Eolas

Un magistrat, c'est comme un médecin ou un mécanicien ou n'importe quel autre métier fondé sur des diagnostics : le risque c'est de se fourvoyer là où les préjugés veulent bien nous conduire. Dès lors dans l'affaire d'Outreau une faute initiale (les éléments non corroborés) n'est pas anodine même si elle ne se répète plus, passés quelques mois. Difficile pour les magistrats qui sont face à des charges qu'ils croient solides de revenir en arrière dans l'image qu'ils ont de la culpabilité d'un prévenu. Et je doute qu'ils aient le temps de reprendre chaque fois le dossier complet pour vérifier l'argumentation.

38. Le mercredi 30 juillet 2008 à 12:16 par Lulu

à Anatole TURNAROND;

Je vais vous répondre et ne point vous laisser vous enferrer dans votre monologue... Que la magistrature fasse parfois preuve de mollesse dans la défense de l'institution, soit. Ce qui est comique, et profondement déprimant à la fois, ce sont les accusations incessantes de corporatisme, alors que les magistrats manquent justement parfois, à mon sens, d'esprit de corps...

Mais pour ma part, je ne jetterai pas la pierre à M. LESIGNE pour avoir accepté le marché (euh pardon, la proposition) du Garde des Sceaux.

Voilà un collègue qui, depuis près de quatre ans, est désigné à la vindicte populaire. Il suffit de lire les commentaires sur certains blogs pour prendre conscience du ressentiment, voire de la haine, de certains envers lui. C'est dire, on lui dénie même le droit de faire valoir des "arguments à décharge" (quand il avance, par exemple, l'écrasante charge de travail du parquet de Boulogne, on crie au vilain magistrat incompétent qui ne veut pas se déjuger). M. LESIGNE n'a pas pu compter sur un soutien actif et visible de ses collègues; certes les syndicats de magistrats ont pu exrimer leur désaccord sur les poursuites disciplinaires dont il faisait l'objet, mais ce soutien n'est pas allé plus loin.

Alors, je comprends qu'il en est marre, qu'il ait envie de passer à autre chose, surtout s'il présente des demandes de mutation depuis plusieurs années. Bien sûr, il sait que le Conseil d'Etat annulerait probablement toute sanction disciplinaire le concernant; mais une fois qu'il aura eu gain de cause et qu'il sera toujours à Boulogne où il n'a pas envie de rester et où on lui fait comprendre que l'on souhaite le voir partir, cela lui fera une belle jambe...

Je ne suis pas à la place de M. LESIGNE. Ce n'est pas moi qui subit cette pression terrible. C'est la raison pour laquelle je me garderai donc bien de faire le moindre commentaire sur le choix qu'il a fait.

à Augustissime;

C'est amusant, vous reprochez à Eolas de s'agripper à ses certitudes alors que vous vous cramponnez aux vôtres. Ah, le "corporatisme béat" des magistrats, l'alpha et l'omega de ceux qui veulent des réponses simples voire simplistes à des problèmes compliqués...

"Attendons l'avis du CSM sur le juge Burgaud. J'imagine que, si sa responsabilité est mise en cause, vous saurez nous expliquer à nouveau pourquoi il n'a commis que des péchés véniels. Les magistrats sont forcément blancs dans l'affaire, et tout élément contraire doit être nécessairement passé à la trappe. C'est plus simple de rester avec ses certitudes."

Bon sang, j'ai l'impression que Dadouche, ou Gascogne, ou encore les autres magistrats qui s'expriment sur ce blog doivent parfois jouer les disques rayés... Oui, il y a une responsabilité disciplinaire des magistrats. Mais ne vous en déplaise Augustissime, les magistrats ont aussi le droit d'expliquer leur métier, leurs conditions de travail difficiles. Et de dire que le mantra "yaka faire payer le juge" est illusoire et dangereux.

"Si vous vous désolez qu'on ne cherche pas les causes de cette affaire au-delà de la faute de quelques-uns, beaucoup se désolent que le monde judiciaire ne les cherche pas au-delà de la traditionnelle mise en cause des lois et du pouvoir exécutif. Avez-vous lu une tribune où un magistrat se demande publiquement si la détention provisoire, telle que la loi la prévoit, est appliquée à bon escient par les JLD ? Avez-vous lu autre chose que les traditionnelles litanies sur le thème : "le juge est bien obligé de mettre en détention, sinon on lui reproche son laxisme" ou "la justice n'a pas de moyens, donc elle ne peut traiter les affaires qu'en deux jours (comparution immédiate) ou en 5 ans (le reste des cas)" ? Avez-vous lu un avis de magistrat où la question du professionnalisme et de l'encadrement des juges d'instruction est posée ?"

Ah ben si, et contrairement à ce que vous écrivez, les magistrats sont capables de se remettre en question. En interne , les débats sur la question de la détention provisoire sont nombreux (il y a même un stage ENM avocats-magistrats sur la question) et les billets de Dadouche et Gascogne démontrent assez, je pense, que les magistrats se triturent les méninges sur leurs pratiques.

Quant à la pression représentée par l'opinion publique, permettez-nous quand même d'en parler. Parce qu'en 2000, avec l'affaire Bonnal, on ne mettais pas assez en détention provisoire et depuis Outreau c'est le reproche inverse, on envoie trop au trou. Comprenez que cette attente de l'opinion publique est justement ce qui pose souci en matière de détention provisoire. D'où la valse hésitation du législateur sur le critère du trouble à l'ordre public, un temps retiré sauf pour les crimes et les délits punis de 10 ans d'emprisonnement, puis réintroduit, puis supprimé à nouveau sauf en matière criminelle par la loi du 5 mars 2007...

"Les réponses du législateur sont sans nulle doute imparfaites. La restitution de l'affaire par la presse est sans doute criticable. Mais les progrès qu'aura permis Outreau, comme l'apparition progressive des caméras lors des interrogatoires, ne sont hélas pas à mettre au crédit de la réflexion constructive du monde judiciaire, qu'on attend toujours."

Cher Augustissime, un jour où j'aurai le temps et où je n'aurai pas un dossier urgent qui m'attend sur mon bureau, et si le maître des lieux me laisse faire, j'évoquerai en quelques paragraphes les conséquences de la loi du 5 mars 2007. En résumé: une usine à gaz, les pôles de l'instruction, à laquelle personne ne comprend goutte, plus de paperasses pour ma greffière qui doit notifier tout un trac de trucs dont tout le monde se fiche et, cerise sur le gâteau, des délais de l'instruction rallongés, avec des mis en examen qui du coup restent plus longtemps en détention provisoire. Génial, non?

Quant à l'enregistrement des interrogatoires, il y a de gros soucis techniques, compte tenu du matériel fourni par la Chancellerie et de toute façon ça ne sert à rien ou à pas grand chose (puisque la greffière et l'avocat sont là pour attester que je ne tape pas sur le mis en examen).

Au fait, navrée de nos plaintes récurrentes sur le manque de sous et de personnels. Mais enfin, quand comprendrez-vous que le fait que notre budget soit misérable a des conséquences effectives, et concrètes, sur notre travail de tous les jours?

à Humaniste;

Ah, cette légende du JLD qui met en prison "pour attendrir la viande".

Je l'ai déjà écrit je vais le répéter: je ne pratique pas ainsi et mes collègues non plus. Il y a des critères légaux qui justifient la DP et nous les respectons.

Un jour, un sage qui s'appelle Eolas et qui est avocat a dit quelque chose comme: "je ne le reconnaitrai jamais mais dans la majorité des cas que j'ai eu à connaître le placement en détention provisoire était justifié";

N'est-ce pas Maître?

39. Le mercredi 30 juillet 2008 à 12:38 par Leo

pour rebondir sur @19 : ca me fait penser à un certain Kerviel qui a un peu trop joué au Monopoly avec de vrais sous... zero controle tant que ca marche, sanction quand ca pete.

40. Le mercredi 30 juillet 2008 à 12:41 par Passant

Merci pour votre réponse Eolas.

Sans esprit de provocation mais en adoptant un raccourci sans nul doute réducteur, j'aimerais en déduire que les juristes français contemporains plaideraient avec plaisir si l'occasion leur en était offerte en faveur d'une justice très modestement administrée. La forme habituelle d'une telle modestie est la déconcentration, mais celle-ci s'accommode mal de l'impérieuse exigence d'égalité/équité qui fonde une partie du moins de l'institution judiciaire.

Et puisque nous sommes sur un blog en été, risquons-nous à rêver un peu : n'y aurait-il alors pas quelque espoir d'obtenir les bénéfices d'une telle modestie sans nul renoncement aux exigences fondatrices de l'institution en proposant la soumission des administrés du Garde des Sceaux à une institution européenne ou du moins transnationale plutôt que nationale de la justice ?

Après tout, du haut de mon immense ignorance, je ne vois rien qui s'opposerait à ce que, dès aujourd'hui, les carrières des fonctionnaires de l'administration judiciaires soient entièrement gérées à niveau supra-nationale, pour peu que le garant de l'indépendance de la justice puisse y exercer son rôle comme il l'exerce aujourd'hui, ce qui doit pouvoir se régler techniquement sans réelles difficultés pour peu qu'on le souhaite.

41. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:09 par Mussipont

@lulu : il est vrai que le placement en détention provisoire recule petit à petit et c'est une bonne chose je pense. Par exemple, en début de semaine à Marseille, un violeur (avec circonstance agravante) ayant avoué son crime n'a pas été placé en détention provisoire mais seulement sous contrôle judiciaire. Pas sûr quand même que l'opinion publique apprécie...

www.lefigaro.fr/actualite...

42. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:23 par Paralegal

Sans évoquer le fond, et en arrivant un peu tard, je comprends votre irritation sur la forme, Dadouche.

Le problème avec cette communication biaisée, c'est que ça induit les destinataires, citoyens, justiciables et électeurs, en erreur : maintenant on va croire que le Garde des Sceaux peut prendre directement des sanctions contre les magistrats du parquet en passant outre l'avis contraire du CSM (une jurisprudence sur ce point, si elle existe, serait en effet intéressante) et éventuellement sans solliciter son avis à nouveau, qu'une décision du conseil constitutionnel peut être contournée ou que la loi pénale plus sévère peut être rétroactive.

D'aucuns semblent penser qu'il faut se résigner, mais on peut toujours être en droit d'attendre de nos gouvernants qu'ils montrent l'exemple par la rigueur de l'information diffusée, au lieu de faire de la com' et de l'auto-promotion sur des sujets graves.

Et la presse n'est pas en reste [appeau rigolo à Aliocha] : une dépêche AFP reprise par Le Monde titre "Chypre: deux tueurs d'arbres présumés interpellés".
www.lemonde.fr/web/depech... : maintenant le quidam va croire que les victimes d'homicide volontaire peuvent être des arbres ! Ce qui n'enlève rien à la poésie écologique du titre.

43. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:24 par Augustissime

@Eolas
L’avis je l’ai lu, je le trouve accablant. Le CSM écrit que les faits sont « constitutifs d'une faute disciplinaire ». Comment pouvez-vous encore trouver à ergoter ? Il semble que vous êtes entré sur cette affaire dans une de vos phases de blocage absolu qui va jusqu’à nier leur valeur aux mots. Comme on ne vous a jamais vu en sortir sur aucun sujet, il est inutile d’argumenter plus avant.
« Les instructions qui durent cinq ans. » Je n’ai jamais écrit que les instructions ou que les détentions provisoires durent cinq ans. Mais la durée de traitement globale des affaires jusqu’au jugement définitif dépasse souvent ce délai, il suffit de consulter l’annuaire statistique de la justice pour le constater.


@Véronique, Eolas et Lulu
On ne peut pas dire que vos exemples soient très convaincants quant à l'introspection du monde judiciaire sur la détention provisoire : l’article d’un contempteur de la prison qui écrit que « [les magistrats] n’appliquent pas la loi » pour mieux taper sur « l’autorité politique » (qui fait les lois que les magistrats n’appliquent pas), un aveu du procureur Lesigne arraché par une commission parlementaire et de « nombreux débats en interne » (voire un stage avocats/magistrats !) : on est loin d’une analyse générale et sincère.

@Lulu
« Ah, cette légende du JLD qui met en prison "pour attendrir la viande". »
Le JLD n’attendrit pas la viande. Mais le procureur, semble-t-il, a recours à la menace de la détention provisoire assez souvent. Et comme le JLD valide la plupart du temps ses demandes, on peut comprendre que la menace porte. Vous n’étiez pas au courant ?

« Parce qu'en 2000, avec l'affaire Bonnal, on ne mettais pas assez en détention provisoire et depuis Outreau c'est le reproche inverse, on envoie trop au trou. Comprenez que cette attente de l'opinion publique est justement ce qui pose souci en matière de détention provisoire. »
Cet argument est inadmissible. La vocation des juges, leur raison d’être, leur fierté j’espère, c’est d’être indépendants et la loi leur donne des moyens pour protéger les libertés et embastiller à bon escient. Comme pouvez vous attribuer à l’opinion publique la dérive observée dans la pratique de la détention provisoire ?

« Ah ben si, et contrairement à ce que vous écrivez, les magistrats sont capables de se remettre en question. »
Pas assez.

44. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:27 par Humaniste

@Eolas Je ne me souviens pas du nom de la famille qui n'a pas encore récupérer ses enfant.
Je pense que le montant ne devrait pas être confidentiel : il devrait y avoir un jugement publique et motivé.
L'indemnisation devrait couvrir 4 choses a mon sens(mais je ne suis pas juriste):
- les frais de justice: y compris les honoraires d'avocat.
- l'indemnisation du préjudice matériel: par exemple l'huissier devrait de retrouver à la tête d'une étude aussi florissante que s'il avait continuer à la gérer.
- l'indemnisation du temps passer: Les accuse devrait toucher les alaires qu'il n'ont pas toucher car en prison.
- le préjudice morale.Humiliation publique, mauvais traitement en prison etc,etc
Or, en France les indemnisations sont en général inférieur au honoraire d'avocat, qui sur une telle affaire on passés (et donc facturer) des milliers d'heures. Même si l'indemnisation parait énorme, il leur reste en fait des honoraires a payer (Ils le disait dans la soirée spéciale de France2 il y a quelques mois).
C'est bien la que le système est hypocrite: on s'excuse, on avance des chiffres d'indemnisation conséquent laissant penser a une contrition réel de l'état et en fait on indemnise même pas le préjudice matériel: souvenez vous de ce médecin innocenté pour une rumeur d'attouchement et qui ne peut même pas régler son avocat.

45. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:30 par Véronique

@ Mussipont

" Pas sûr quand même que l'opinion publique apprécie..."

C'est tout de même surprenant et irritant cette idée tout le temps que la pression de l'opinion publique serait responsable des détentions provisoires et que son " appréciation" serait déterminante pour expliquer des dérives et des abus de la détention provisoire.

Pour Outreau, comment argumenteriez-vous la pression de l'opinion publique en direction des magistrats, disons, entre juillet 2002 et juillet 2004 ?

46. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:30 par Cimon

@ Dadouche (5) et Lulu :

J'affine un peu ma pensée. Dans le monde de l'assurance, que je connais un peu mieux que celui de la justice, on utilise les mêmes ficelles. Ainsi, en 2004, je lis dans le canard que les assureurs font payer leurs déboires en bourse. Sous entendu : les salauds ! Idem avec la vente à la découpe : ils ont fait des mauvaises affaires en bourse, l'immobilier est au plus haut, alors ils vendent, et leurs locataires avec : les salauds !

Là dessus vient un ministre, qui convoque une conférence de presse où il explique qu'il va rencontrer bientôt toutes ces personnes qui décidément ont abusé et qu'on va voir ce qu'on va voir.

On peut faire les mêmes remarques avec les autres chouchous des médias : les télécoms (voleurs !), les banques (profiteurs !), les fonctionnaires (nantis !).

C'est regrettable, mais le procédé me semble très loin d'être original.

47. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:35 par Humanistae

@LULU
Je ne pense pas que le JLD mais en prison pour attendrir la viande.
Simplement j'ai lu qu'il etait plus facile de lever la detention provisoire de quelqu'un en aveux: il ne cherchera pas a intimider les temoins ou a detruire des preuves.
Celui qui n'avout pas peut lui etre ammener a effacer les preuve.
C'est l'expliquation qu'un juriste avait donner a la mise en libertee de Myriam Badaoui, seul a voir avouer.

Pour les Dani Legrand père et fils le juge était au moins certains qu'un seul était citer dans le dossier, mais il a incarcérer les 2 pour être sur de ne pas relâcher le coupable.

Regarder les comparution immédiate: celui qui la refuse par en général en provisoire pour attendre son procès pendant une durée généralement supérieur a la faible peine encouru: ne le puni-t-on pas de vouloir se défendre?

48. Le mercredi 30 juillet 2008 à 13:49 par Mussipont

@Veronique : Dans le cas de Marseille, il est clair que le JLD n'a pas pris sa décision en fonction de l'opinion publique!

Je me suis mal exprimé, j'aurais dû écrire "Pas sûr que l'opinion publique comprenne". Parce que je pense que beaucoup de gens comprennent que l'accusé reste en liberté parce qu'il est policier alors qu'un quidam lambda aurait gouté aux joies d'un séjour prolongé aux Baumettes.

49. Le mercredi 30 juillet 2008 à 14:00 par musashi

@ véronique, en tapant sur google "outreau juillet 2002 et juillet 2004" je tombe sur un article du monde diplomatique (www.monde-diplomatique.fr... au titre intéressant, soit "Les faits divers, ou le tribunal implacable des médias" ou il est dit, que

"le fait divers d’Outreau, en particulier, n’a pas échappé à une débauche de fausses révélations. Très vite, alors que l’instruction commence, le compte rendu de l’événement s’affole. Un reporter de France 2 ne s’embarrasse d’aucune précaution quand, dans le 20 heures du 15 novembre 2001, il énonce les « faits » : « Les quatre enfants ont d’abord été violés par leur père, puis par des proches. Certains sont des commerçants du quartier. Les parents s’acquittaient ainsi de leurs dettes. » Ailleurs, on mentionne sans précaution les fonctions sociales des « coupables » de crimes imaginaires : « un huissier et son épouse, infirmière scolaire, un prêtre ouvrier, un chauffeur de taxi et les deux propriétaires d’un sex-shop d’Ostende, en Belgique, sont interpellés. »(Le Figaro, 21 novembre 2001.)

Cela ne suffit pas encore tout à fait pour transformer ce fait divers en une « belle » affaire. Il vaut mieux en effet que s’y juxtapose un « réseau », de préférence constitué de « notables ». Le déballement n’en est qu’à ses balbutiements, et déjà TF1 annonce : « On pourrait être face à un réseau pédophile beaucoup plus important qu’il n’y paraît » (16 novembre 2001). Le mot sera répété à longueur d’articles : cinq fois dans Le Figaro du 21 novembre et cinq fois dans Le Monde du 24 janvier 2002, trois fois dans Libération du 11 janvier et trois fois dans Le Parisien du 16 janvier. A l’unisson, les présentateurs des journaux télévisés martèlent la formule : « J’en viens maintenant à ce rebondissement dans une sordide affaire franco-belge d’un réseau de pédophilie dans la banlieue de Boulogne-sur-Mer » (20 heures de TF1, le 10 janvier). « Affaire sordide où le père vendait ses enfants pour assouvir les déviances sexuelles d’un réseau pédophile » (20 heures de France 2, le 11 janvier). De réseau, il ne sera pas question au moment du jugement, en juillet 2004..."

alors, sauf à considérer que les magistrats sont imperméables à la pression médiatique, je pense efectivement qu'il y a eu une "pression de l'opinion publique en direction des magistrats" comme vous dites et j'estime que la presse a une part de responsabilité dans cette affaire,



50. Le mercredi 30 juillet 2008 à 14:00 par Anatole Turnaround

@ Grantumu et Lulu

Merci de vos réponses.

@ Grantumu

D’accord pour applaudir avec vous les coups de bambou donnés à ceux qui manquent fautivement à leurs devoirs, même lorsque c’est un magistrat.

Mais pas d’accord pour entendre le gouvernement proclamer qu’il a puni le fautif alors que:

1. la faute a été amnistiée par le parlement, ce qui montre que la volonté des représentants élus du peuple, exprimée selon les règles de l’Etat de droit, a été négligée au profit de la volonté du peuple perçue au travers des médias; et ce qui confirme que la défense de certains fondamentaux de la République (respect de l’Etat de droit, respect de la volonté des urnes) est sacrifiée à la gestion médiatique d’une seule affaire;

2. Le gouvernement n’a pas sanctionné l’intéressé qui, pour des raisons qui lui appartiennent, a finalement accepté de se punir lui-même (Car c’est bien une punition de quitter un poste de commandement pour rejoindre des fonctions subalternes, même à grade égal).


@ Lulu

Moi non plus je n’ai aucune appréciation personnelle à porter sur notre collègue Lesigne, et je ne le blâme pas du choix qu’il a fait. Je ne connais pas ses raisons profondes, je partage à cet égard vos hypothèses et je n’affirme pas que j’aurais fait mieux que lui.

Mais l’image qu’il a malgré tout donnée ! Convoqué place Vendôme la veille pour le lendemain, reçu en tête à tête par Madame Dati, et acceptant immédiatement de revoir à la baisse ses demandes de mutation, alors qu’il était en position de force après l’avis du CSM ! Quelle soudaineté ! A la trappe le procureur ! Au Goulp ! Et avec lui la loi d’amnistie, le CSM, et le respect des procédures disciplinaires! Telle est la volonté du roi.

Quant au PARADOXE DU PETIT POIS, que vous soulignez et qui consisterait pour les magistrats à être corporatiste sans avoir l’esprit de corps, il m’apparaît correspondre avec exactitude à la morosité molle que j’ai maintes fois côtoyée pendant ma carrière. C’est un corporatisme passif, qui ne s’exprime que dans la râlerie de couloir, à l’exception de quelques rares collègues déterminés que leur pairs soutiennent peu.

Lulu, vous qui confessez être neuf dans notre profession et qui montrez tant d’enthousiasme, le voyez vous ainsi ?

51. Le mercredi 30 juillet 2008 à 14:12 par Bruno

> En résumé : chapeau l'artiste et Welcome to Cabaret.

> J'aurais quant à moi préféré que l'illusionniste se fît
> plutôt dompteuse et assumât

Là, nous avons eu une splendide communication, en pleine lumière, rapidement relayée par les médias.

Cette sphère où tout est du domaine du possible me surprendra toujours.

Une fois encore, merci pour votre billet.

52. Le mercredi 30 juillet 2008 à 14:22 par Véronique

@ musaki

Si vous avez la gentillesse de relire mon post adressé à Mussipont, j'avais pris la précaution de lui proposer la période entre juillet 2002 et juillet 2004, c'est à dire deux années.

Je ne pense pas une seconde que dans le chaud d'une affaire médiatisée à outrance et dans l'outrance, il soit simple pour un magistrat de tenir suffisamment à distance la pression de l‘opinion directement alimentée et sur-alimentée par les exemples médiatiques que vous citez .

Mais une fois les médias partis ailleurs et l'atmosphère générale refroidie au sujet de l‘affaire , il est difficile pour moi d'envisager que la pression de l'opinion publique soit à ce point prégnante et déterminante pour expliquer les détentions provisoires jusqu'au procès de 2004 des personnes mises en cause dans Outreau.

J’ajoute que l’organisation des contrôles dont parle tchok (post 19) pouvait et aurait du permettre une analyse plus apaisée et plus distanciée des dossiers.

53. Le mercredi 30 juillet 2008 à 14:35 par bruno

@Eolas en 23
> ce n'est qu'une question de temps avant qu'une nouvelle
> affaire n'éclate. Elle est peut-être déjà en cours.

Volaire réclamait déjà la réforme en 1771, après ce qu'il a appelé la méprise d'Aras.

54. Le mercredi 30 juillet 2008 à 14:48 par Lulu

à Mussipont;

Attention, le policier a semble-t-il reconnu la réalité de la relation sexuelle mais pensait que la jeune femme était consentante. En résumé, il ne reconnaitrait pas le viol. C'est différent de: "le policier a avoué son crime", non?

Vous voyez, c'est toute la difficulté du travail en matière de détention provisoire. L'opinion publique et la presse prennent parti sur la base d'informations parcellaires parues dans les journaux. Je ne connais pas le dossier et vous non plus. Alors laissons la chambre de l'instruction travailler.

@ Humanistae

A ma connaissance, Mme BADAOUI n'a jamais été mise en liberté mais je me trompe peut-être.

@ Augustissime

Ce que j'aime chez vous, c'est votre propension à balayer d'un revers de main péremptoire et méprisant l'argumentation qui ne vous sied pas.

Je vais faire comme Eolas, retourner à mes dossiers et arrêtez de perdre du temps avec vous.

55. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:12 par Mussipont

@lulu : décidemment j'ai du mal à être clair aujourd'hui, j'ai dit que l'opinion publique aura du mal à comprendre cette décision mais personellement je n'ai porté aucun jugement sur cette décision de contrôle judiciaire. C'est peut être typiquement sur une affaire médiatisée comme celle ci que le JLD devrait expliquer sa décision afin d'apaiser les tensions. Peut être l'a t il fait mais que la presse ne l'a pas repris...

56. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:20 par Le Chevalier Bayard

"A l'ouest rien de nouveau" !

On est là dans le jeu de la reconnaissance réciproque, de la connivence et du corporatisme.

CSM complice ? C'est ce que prétend Dominique Wiel une des victimes du "séisme judiciaire d' Outreau".

C'est excessif et tout ce qui est excessif est insignifiant disait Talleyrand !

Plutôt que de jouer les Apulée (illusionniste ou magicienne ?) notre Garde des Sceaux devrait plaider me semble-t-il pour un renforcement de la présomption d'innocence !

57. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:21 par Mm

Tout le monde s’est excité sur les magistrats après que le Csm ait rendu son avis dans Outreau. Mais tout le monde a oublié la responsabilité des avocats .

Afp : “Jamais un avocat n’est venu me dire attention ils sont en train de faire n’importe quoi (…) on court à la catastrophe “, a fait remarquer l’actuel procureur général de Versailles.” quand il est a été entendu par le Csm .

Qu'avez vous à répondre ??

58. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:25 par Lulu

à Mussipont;

Le JLD n'a pas à faire des opérations de com' pour expliquer ses décisions... On est pas payé pour faire plaisir au peuple (comme celui-ci semble le croire sincèrement de temps à autre).

De toute façon, le JLD est tenu au secret de l'instruction.

Seul le parquet peut communiquer sur une affaire en cours.

En tout état de cause, je constate que la presse disposait de tous les éléments (et notamment l'interview de l'avocate de la défense) pour faire un compte-rendu équilibré et serein de cette affaire.

Mais comme d'habitude, les gros titres ont fait dans les (énormes )raccourcis: de "le policier a reconnu avoir eu des relations sexuelles avec la gardée à vue mais pensait qu'elle était consentante" à "le policier reconnaît un viol et est mis dehors".

59. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:30 par Paralegal

Toujours sur la forme, je ne crois pas que cela ait été signalé ici : le Figaro rapportait hier les propos de l'avocat de M. Lesigne qui déplore «une formulation ministérielle qui semble dictée par des préoccupations de communication vis-à-vis de l'opinion publique».

www.lefigaro.fr/actualite...

60. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:36 par Augustissime

Maitre Eolas cachant une batte de baseball derrière son dos se trouve a coté d'un troll assommé, portant une longue bosse sur le sommet du cuir chevelu. Un texte “Commentaire modéré par troll détector™” surplombe l'image.

61. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:39 par Mussipont

@lulu : sans aller jusqu'à l'opération de com', je trouve vraiment dommage que l'information passe aussi mal entre la justice et le bon peuple. La presse est elle seule responsable? Pas sûr quand même.

Enfin, vous pouvez "charger" la presse, aliocha est en vacances depuis hier! ;)

62. Le mercredi 30 juillet 2008 à 15:44 par GRANTUMU

@Triste Mm
Si l'actuel Procureur Général de PAPEETE déclarait quelque chose, via l'agence REUTER, informez nous.
Cacahuète contrefaite!

63. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:13 par Mm

@GRANTUMU Donc si je comprends bien , les avocats ont fait tout ce qu'ils pouvaient faire, et par conséquent quand les magistrats se plantent , il n'y rien à faire pour les empêcher de se planter ?

64. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:30 par Augustissime

@Eolas
Vous avez toujours la même propension à considérer comme excessif ce que vous pratiquez vous-même.

65. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:38 par arg

Dadouche, en robe de magistrat et coiffée comme la princesse Leïa tient un sabre laser à la main et regarde d'un air mauvais un Dark Vador vert qui tient un panneau 'Troll' ; Un texte 'Commentaire modéré par troll détector(tm)' surplombe l'image.

66. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:39 par Augustissime

@Mm : Les avocats peuvent voir leur responsabilité engagée par leurs clients beaucoup plus facilement que les juges par les justiciables.

Dans le cas d'Outreau, les victimes de l'affaire n'ont pas choisi de poursuivre leurs avocats, mais s'ils l'avaient fait il auraient semble-t-il eu des chances de succès.

67. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:43 par Mm

Dadouche, en robe de magistrat et coiffée comme la princesse Leïa tient un sabre laser à la main et regarde d'un air mauvais un Dark Vador vert qui tient un panneau 'Troll' ; Un texte 'Commentaire modéré par troll détector(tm)' surplombe l'image.

68. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:48 par GRANTUMU

Mm
Bien vu. Les magistrats n'étant pas des légumes (valables pour tous en début de carrière, pour quasiment tous à la fin), peuvent se planter seuls.

69. Le mercredi 30 juillet 2008 à 16:59 par Siskotte

@arg : vous vous répétez, sinon s'il était possible de ne pas faire de faute au nom du juge ....et je ne ferai aucun autre commentaire concernant votre post

70. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:00 par vent de l'ouest?

Dadouche, en robe de magistrat et coiffée comme la princesse Leïa tient un sabre laser à la main et regarde d'un air mauvais un Dark Vador vert qui tient un panneau 'Troll' ; Un texte 'Commentaire modéré par troll détector(tm)' surplombe l'image.

71. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:04 par Petruk

Je rejoins Mm pour constater qu'il est extrêmement difficile pour le profane de se faire une idée à peu près correcte de la situation dans cette affaire.

Il y a un gouffre abyssal entre la présentation de la responsabilité de M. Lesigne faite sur ce blog et celle faite dans la presse. Je reconnais au blog de Maitre Eolas une qualité et une profondeur que j'aimerai retrouver au moins de temps en temps dans les journaux que je lis.

Néanmoins, la tentation du sensationnel n'est à mon sens pas suffisante pour expliquer ce décalage.

Un point m'a plus particulièrement frappé. Je lis dans le monde ici :
www.lemonde.fr/old-societ...
que M. Lesigne a notament renvoyé Franck Lavier pour des faits de viol sur l'un de ses enfants qui n'était pas encore né.

Ce point a été repris par le rapporteur, Philippe Houillon. C'est énorme. Il ne me semble pas très compliqué de s'assurer que la victime était bien née au moment des faits.

Concernant ce point précis, y a t'il quelque chose qui m'a échappé ou bien a t'on réellement accusé un homme du viol d'un de ses enfants non encore né?

Si c'est le cas, il me semble que cela constitue une faute grave (amnistiée?).

72. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:17 par Paralegal

@ Dadouche :

Comme j'aime bien chipoter aussi, voici de premiers éléments de réponse à votre note n° 1 : "En chipotant, on pourrait d'ailleurs s'interroger sur la possibilité de prononcer "une sanction plus grave que celle proposée" alors que l'avis ne propose aucune sanction puisqu'il n'y a selon le CSM pas de faute disciplinaire (…)"

Le Conseil d'Etat a rappelé le 18 octobre 2000 (N° 208168) que "lorsque le Conseil supérieur de la magistrature, dans sa formation compétente à l'égard des magistrats du parquet, est appelé à connaître, en vertu de l'avant-dernier alinéa de l'article 65 de la Constitution, de l'éventualité d'infliger une sanction disciplinaire, il ne dispose d'aucun pouvoir de décision et se borne à émettre un avis à l'autorité compétente sur le ++principe++ du prononcé d'une sanction disciplinaire et, s'il y a lieu, sur son quantum."

Et surtout, par deux décisions récentes (CE 20 juin 2003 n° 248242 et CE 12 janvier 2004 N° 248702) et dans les mêmes termes, le CE a précisé qu':

"il appartient ensuite au garde des sceaux d'exercer son pouvoir disciplinaire pour, ++s'il estime qu'une faute peut être reprochée à ce magistrat++, déterminer, au vu tant de l'avis du Conseil supérieur de la magistrature - qu'il ++peut++ consulter à nouveau dans les conditions prévues à l'article 66 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 - que de l'ensemble des circonstances de l'affaire, celle des sanctions figurant à l'article 45 de l'ordonnance du 22 décembre 1958 qui lui paraît devoir être infligée ;"

J'en déduis :

1. que le Garde des Sceaux dispose d'un pouvoir souverain d'appréciation de l'existence d'une faute, quelle que soit la teneur de l'avis du CSM sur ce point ;

2. que par conséquent, dans l'hypothèse où le Garde des Sceaux estime qu'une faute a été commise alors que ce n'était pas l'avis du CSM, il peut néanmoins déterminer la sanction selon lui encourue ;

3. qu'aucune sanction n'ayant pu être préconisée par le CSM, celle choisie par le Garde des Sceaux ne peut avoir le caractère de sanction "plus grave" visé par l'article 66 alinéa 1er de l'ordonnance du 22 décembre 1958 ;

4. que par conséquent le Garde des Sceaux a, dans ce cas, la faculté mais pas l'obligation de consulter le CSM une seconde fois.

J'espère que vous trouverez le temps de lire ces décisions pour apporter votre éclairage sur ce point de "chipotage".

73. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:22 par Audrey

Ah tiens, je me doutais bien qu'Augustissime allait s'en prendre un.

Encore une fois, cette histoire de "sanction mais pas vraiment sanction" prouve à quel point ceux qui devraient représenter le corps de la magistrature le piétinent. Voilà la magistrature de demain:
- un CSM réformé, avec une majorité de non magitrats qui jugeront les "fautes" des magistrats et, de toute façon, des ministres qui se contrefoutent des avis rendus par le CSM,
- un concours d'entrée à l'ENM réformé en profondeur avec des tests psychologiques visant à rechercher un bon profil de magistrat (c'est à dire pour le coup, des petits pois, même calibre même saveur)
- des magistrats responsables de leurs erreurs de jugement comme le souhaite Nicolas Sarkozy (et dans le même temps un président irresponsable)
- une diminution phénoménale du nombre de magistrats (pour info 80 postes au 1er concours cette année) ce qui conduira à une charge de travail accrue, des délais infiniment longs, des traitements (trop) rapides des (petits) dossiers voire des erreurs...

Et malgré tout ça, des magistrats sans réaction. Des magistrats pas contents, des magistrats qui râlent tous les jours dans leur bureau en écoutant les attaques dont ils sont victimes par ceux-là même qui sont censés les représenter, des magistrats dépités devant les dossiers qui s'empilent, les avocats qui s'impatientent et les justiciables en colère, qui ne les comprennent plus. Je ne fais pas partie de votre corps. Je ne connais pas vos moyens d'action, même si je sais que la grève vous est interdite. Mais la tournure que prennent les évènements et cette manière dont tout le monde semble courber l'échine en attendant que ça passe me terrifie. Surtout lorsqu'il s'agit de la Justice.

74. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:25 par tschok

@ Dadouche,

Cette fois-ci, un com que j'espère dans le sujet.

La nuit porte conseil et le sujet que vous avez traité m'a tenu éveillé juste ce qu'il faut pour qu'il soit recouvert par la chape du sommeil et pour que les éléments qui me semblent les plus déterminants émergent à mon réveil.

1 - "Nul ne plaide par procureur"

Vous êtes particulièrement bien placée pour le savoir.

Vous ne pouvez pas plaider à sa place la cause de M. Lesigne, qui a par ailleurs été défendue, notamment, par Me Forster, qui n'est pas malhabile.

Si l'intéressé a fait des demandes de mutation, il lui appartient de les accepter, puisque finalement il y est fait droit.

S'il est mécontent, qu'il le dise lui-même.

C'est l'économie judiciaire.

Dadouche :
Je ne plaide pas la cause de M Lesigne. Je m'agace de la présentation mensongère d'une réalité pourtant simple : il a demandé une mutation et elle va lui être accordée.



2 - Il faut transiger:

Si j'étais l'avocat de la chancellerie dans cette affaire, je lui conseillerais de transiger.

Madame Dati hérite l'affaire d'un gouvernement précédent. Le mal a été fait, il faut gérer les séquelles. M. Lesigne en fait partie.

Vous avez rappelé quelles sont les options qui s'offrent au GDC:

- Punir le PR: c'est très compliqué en réalité. Il y a une loi d'amnistie qui se trimbale dans le décor, il y a une qualification juridique discutable qui s'applique à des faits qui sont ou non contraires à "l'honneur ou la probité", et en bout de chaine un Conseil d'Etat qu'on nous présente tour à tour comme une juridiction soumise à l'Etat ou comme un gardien vigilant du droit, notamment celui des magistrats. Aléa judiciaire élevé, donc.

- Ne pas punir: mais alors, il faut affronter une opinion publique qu'on imagine idéale et qui attend, tel le dieu vengeur de l'ancien testament, d'appliquer avec force la "justice immanente": Ne pas punir en droit revient à provoquer une punition d'une autre nature. Dans une démocratie, la punition est la perte d'une élection, ce dont tout gouvernement a horreur (mais également ses électeurs, il faut le rappeler).

Il est très naïf de votre part de croire que vous pourriez attendre votre autorité de tutelle en embuscade à l'entrée du palais royal (plus exactement à la sortie), alors que le pouvoir va choisir une troisième voie.

Dadouche :
C'est vrai, il est naïf de ma part de penser que le garde des Sceaux va se conformer à la loi.


Du reste, l'avis du CSM rappelle quels sont vos devoirs réciproques: vous informez le maillon supérieur, en contrepartie, il vous contrôle et peut vous diriger. Contrepartie: le mot est gênant. Mais, c'est un privilège d'être dirigé. Je veux dire, d'être bien dirigé. Un honneur et et plus, un plaisir.

Développer une mentalité de rebelle dans une relation de ce type me semble contre productif et, pour tout dire, immature: le parquet est soumis, ce qui n'exclut pas l'intelligence. Il vous appartient de servir, avec intelligence. Le service appartient à tous, votre intelligence n'appartient qu'à vous et l'intelligence n'est pas interdite (Eh oui, Bilger, encore lui...)

Ou alors, devenez juge du siège. Choisissez, vous êtes libre. Et votre choix m'est sacré. Mais une fois que vous y êtes, ne mollissez pas, comme dit Anatole T.

Dadouche :
Ca tombe bien, je suis juge des enfants après avoir été juge d'instruction.


Qu'est ce qui vous choque dans la solution qui a été adoptée et, aux dernières nouvelles, finalement acceptée par l'intéressé?

Dadouche :
Ce qui me choque c'est la présentation qui en est faite.


Le non respect d'un principe qui vous semble essentiel?

Mais depuis son commencement cette affaire est un moulin à café de principes essentiels. On a tous trinqué dans l'histoire: victimes, experts, avocats, journalistes, magistrats, citoyen... Et vous, vous refusez de boire la coupe?

Allez, du courage: il faut la boire, cette fichue coupe.

Dadouche :
Vous n'avez pas l'impression qu'on l'a déjà bue au delà de la lie la coupe ?


Vous refusez?

Parce que c'est Madame Dati qui la tient?

Elle n'y est pour rien, pour le coup. Pour une fois. C'est juste un hasard électoral. Une péripétie. Mais elle ne perd rien pour attendre, pour toutes ses maladresses.

Dadouche :
Encore une fois, le départ de M Lesigne n'est pas une mauvaise chose. Et il n'était évidemment pas possible de le nommer à un poste d'avocat général auquel il aurait, dans d'autres circonstances, légitimement pu prétendre.
Mais si on choisit délibérément de le présenter comme une sanction, alors il faut prendre une sanction.



3- Vous appartenez à un corps d'élite

Vous êtes des magistrats.

Vous devez tenir votre rang.

On vous dit incapables d'autocritique: je ne vous fréquente qu'à titre professionnel, mais rien qu'à ce titre, j'ai remarqué, par rapport à d'autres, que vous avez une très grande capacité d'autocritique, bien supérieur au commun des mortels. Je ne rigole pas. J'ai affaire à des clients très difficiles et j'ai avalé des couleuvres (mais qu'est ce que c'est long une couleuvre, je préfèrerais encore une vipère!)

Bien sûr il existe des magistrats nazes et médiocres. Ces magistrats-là ne l'intéressent pas.

J'ai un profond mépris pour eux au point que l'insulte ne suffit pas à exprimer ce qu'ils me font ressentir et que je serais même capable de violence.

La peur de la prison me fait reculer. Que les choses soient claires: il y a des cons méchants parmi vous. Mais ce n'est pas ça la justice.

On vous dit malhonnêtes: le dernier magistrat que j'ai vu courir après un passant qui avait perdu son portefeuille juste avant de monter dans un bus doit encore courir après le bus, si personne ne l'a arrêté.

Vous en êtes même chiants d'honnêteté.

La vie suppose une certaine capacité à donner des coups sous la ceinture et vous êtes là, comme des arbitres dans un match de boxe, à ne vous préoccuper que des sacro saintes règles! Pffffff!

On vous dit incompétents: je ne compte plus les magistrats qui m'ont sauvé.

La pudeur m'oblige à taire ces défaites qui se sont transformées en victoires grâce à vous, pour toutes ces victoires qui se sont transformées en défaites à cause de vous.

On vous dit insensibles à la souffrance humaine: vous la voyez tous les jours. Elle vous marque, plus même, elle vous traumatise. Elle vous impacte. Elle vous motive aussi.

Bref, vous avez un ensemble de qualités qui donne à l'expression "primus inter pares" un sens palpable, en votre personne.

Mais alors il y a un truc pour lequel vous êtes cons, mais alors cons au delà de tout ce qu'il est possible d'imaginer.

A bouffer du foin, vraiment.

Si vous êtes individuellement vertueux, vous êtes collectivement lâches.

Et ça, je ne me l'explique pas.

Je ne comprends pas comment autant de talents individuels ne parviennent pas, en s'additionnant simplement, à produire un effet sur la société qui vous environne, et à laquelle vous appartenez, et un effet à la hauteur de vos talents.

Et du coup, moi qui suis un libéral, je me pose des questions sur le rôle de l'institution par rapport au contractuel, à l'individuel.

Logiquement, en tant que somme d'individus, vous auriez pu avoir une action décisive sur le tout.

Or, vous ne l'avez pas.

C'est assez inattendu, je dois dire, si j'en juge par ce qu'il s'est produit dans le champ économique, ou du spectacle.

C'est une pensée que je vous livre et qui ne vaut peut être pas grand chose par rapport aux aspects purement techniques que vous soulevez dans votre post.


Dadouche :
Je vous rejoins sur une forme de lâcheté du corps.
Ce n'est pas dans notre culture de faire des vagues. Ce n'est pas dans notre culture de dire "stop, ça suffit, tant pis pour ceux qui attendent que leurs dossiers soient jugés, il faut ralentir sinon on va faire du mauvais boulot".
Ce n'est pas dans notre culture de regarder ce qui se passe chez le voisin de bureau.
Ce n'est pas dans notre culture de devoir nous défendre médiatiquement, nous qui "communiquons" sur nos décisions par la seule voie légale : la motivation des décisions.
Ce n'est pas dans notre culture de nous organiser collectivement.
Ce qui est très paradoxal, c'est que le taux de syndicalisation dans la magistrature est plutôt élevé (l'USM à elle seule compte plus de 2000 adhérents aux dernières nouvelles). Mais la culture syndicale de nombreux magistrats, c'est de payer sa cotisation (et de temps en temps de râler contre certaines jurisprudences du CSM en matière de nominations).
D'une certaine façon, nous avons confiance dans l'ordre établi, puisque nous sommes chargés de la faire respecter. Quand une loi est démocratiquement votée, nous l'appliquons, dans toutes ses nuances, et en conscience, mais nous l'appliquons.
Mais quand on nous livre des injonctions paradoxales, nous sommes sonnés. La justice, c'est important, on crée des droits opposables, on pénalise de nombreux comportements, on met les magistrats à toutes les sauces, on nous dit que le plus important c'est la victime, que les peines doivent être exemplaires et dissuasives. Et puis on nous dit que la victime on a été bien bêtes de la croire, que finalement les peines on va les aménager quasi-automatiquement, que la justice c'est pas grave si elle s'éloigne géographiquement.
Finalement, je ne crois pas qu'on soit lâches. On est plutôt déprimés, dépités, déboussolés, anesthésiés. Notre efficacité, elle vient de la crédibilité de nos décisions, qui ne seront exécutées et respectées que si nous avons cette légitimité.
On a pas choisi ce métier pour être populaire et que tout le monde nous trouve formidables. Nos décisions font mécaniquement toujours (ou presque) au moins un mécontent. Mais on se prend depuis quelques temps un tombereau de haine, qu'on peut maintenant voir jusque dans certains commentaires de ce blog qui en était plutôt épargné jusque là. Je ne parle pas de notre mémé à moustache ou de nos maltraiteurs de drozophiles (la contradiction est toujours intéressante), mais de certains commentaires qu'on commence à voir apparaître sur le thèmes "magistrats coquins", "tous pourris" et autres gracieusetés des plus élaborées. Et à chaque réforme, on est un peu plus sidérés de la malhonnêteté intellectuelle des politiques de tous bords, qui ont profité d'Outreau pour redorer leur blason à peu de frais, sans vouloir se poser la question de l'économie générale de l'institution judiciaire, ses grands principes, ce qu'ils veulent lui assigner comme but. N'en déplaise à Augustissime, les magistrats tentent, par leur rappels "corporatistes" des grands principes, de tirer la sonnette d'alarme. Si, chacun dans nos bureaux et nos salles d'audience, nous essayons de faire au mieux (et souvent avec succès), je crois que nous sommes nombreux à avoir conscience que le navire se dirige droit vers l'iceberg et que les coups de barre désordonnés ne feront que précipiter la chute.
Après ce léger coup de déprime, je voudrais vous répondre sur autre chose. Je suis profondément en désaccord avec vous sur un point : le magistrat n'est pas là pour faire bouger la société, pour la modeler. Nous sommes là pour faire respecter loyalement les règles dont elle a choisi de se doter, en les appliquant, humainement, à chaque situation individuelle, qu'il s'agisse de trancher un litige privé ou de réprimer des atteintes à des intérêts plus collectifs. Certes, nos décisions influent parfois, et même souvent. Mais c'en est une conséquence, pas un but

75. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:26 par Xa

En tant que sanction disciplinaire déguisée, le CE ne pourrait t'il pas mettre son nez dedans ?

76. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:32 par Guile

De mon point de vue, la justice serait sortie grandie s'il y avait eu une vraie sanction, ni excessive, ni dissimulée, ni laxiste...

Alors soyons sérieux, ce qu'il vient de se jouer, n'est qu'un simulacre de sanction. Elle n'est même pas assumée par notre Garde des Sceaux, et ne peut contenter personne.

Finalement, ordonner la mutation (avec le concours de l'intéressé) d'un magistrat qui a commis une faute aussi grave, ne pourra satisfaire le citoyen, profane en la matière.
Cela ne contente pas plus "les autres petits pois", puisque la fonction n'est pas respectée, jusque dans le mode opératoire pour "sanctionner" un juge fautif. Cela me semble d'ailleurs logique, car procéder par réunion en "catimini", à la lueur d'une lampe torche, pour négocier une mutation/sanction... C'est proche des pratiques de République bananiaire!!!

Bref, c'est ce que certains appellent un compromis, moi je parlerais volontier de gachis....

77. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:38 par Mm

Dadouche, en robe de magistrat et coiffée comme la princesse Leïa tient un sabre laser à la main et regarde d'un air mauvais un Dark Vador vert qui tient un panneau 'Troll' ; Un texte 'Commentaire modéré par troll détector(tm)' surplombe l'image.

78. Le mercredi 30 juillet 2008 à 17:43 par Claire

Alors comme ça, ce Lesigne n'aurait commis qu'une faute vénielle et comme par hasard amnistiée!
Et moi je pense qu'il a manqué cruellement de discernement. Qui osera soutenir le contraire?
Et qu'on ne vienne pas me dire qu'on ne pouvait pas savoir au début, tant qu'on ne connaissait pas la fin de l'histoire! Enfin, comment ne pas se rendre compte que quelque chose "clochait" dans cette affaire?

N'étant pas inamovible, puisque appartenant au parquet, je crois que Mme la Garde des sceaux a parfaitement le droit de le muter d'office, pour son "manque de discernement". Je ne crois pas que son communiqué dise autre chose.

79. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:06 par Eolas

@ Claire : Le CSM ose. Sur 14 pages. Au fait, en 2001, vous étiez en train de crier “Mais mais, quelque chose cloche dans cette affaire !” ou bien “Ces pédophiles, il faudrait leur couper les couilles” ?

80. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:11 par tschok

@ Arg,

Oui, ils le savent.

Ce sont les Français qui ignorent ce que leurs magistrats pensent d'eux.

Et les magistrats n'ont ni plus ni moins de préjugés que n'importe lequel d'entre nous.

Mais ils ont une qualité que nous n'avons pas tous: ils changent d'avis.

de deux manières:
- Profondément.
- Rapidement.

Si la magistrature était un corps de manœuvre je t'apparenterais plus à la cavalerie, plutôt qu'à l'artillerie ou l'infanterie.

Quoique pour cette dernière je réserve mon jugement, puisque selon l'expression consacrée, elle procède par "bons successifs".

Et c'est une attitude typique "magistrat".

81. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:14 par Eolas

@ Guile : Depuis le temps qu'on se tue à vous répéter que ce magistrat n'a pas commis de faute, hormis produire des rapports administratifs (5) et d'appel (4 sur 16) non étayés par le dossier dans les premiers mois du dossier, et que cette dernière faute ne saurait être considérée comme la cause de l'affaire dite d'Outreau. Cette obstination à ne pas vouloir comprendre pour préférer des boucs émissaires est affligeante. Ajoutons l'erreur à l'erreur, ça réparera.

82. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:16 par pepe

@eolas 79
un peu énervé peut-être ?
je pense que claire pensait en fonction de la présentation des journalistes
ce qui n'est pas bien grave vu qu'elle n'avait pas aucun pouvoir de décision dans cette affaire
faire fausse devant sa télé, ça n'est pas bien méchant

83. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:17 par Eolas

@ pepe : dans ce cas, qu'elle garde ses réflexions pour sa télé.

84. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:30 par nap1128

Bonjour,

(H.S.) trouvé au hasard du net : Eolas fait une version du site pour les "djeuns" en parlant leur langage !

Ce doit être dans le cadre d'un programme du gouvernement pour sensibiliser la "racaille" à la procédure pénale...
La preuve :
kikoolol.memepasmal.net/?...

;o)
@+

85. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:36 par Mm

JUSTICE ET FOOTBALL

Il n’y a pas faute au sens juridique.
Mais il y catastrophe et manque de compétence de toute la chaine, donc faute au sens commun.
Sens commun ou juridique c’est (peut-être) là l'un des problèmes.
Si la justice est rendue au nom du peuple, il faut que le peuple comprenne, et ce n’est pas le cas!
Si le Csm ne peut envoyer un message fort quand il y a faute au sens commun, le csm ne sert à rien !
Si le peuple ne comprend pas toutes ces constructions intellectuelles qui constituent les mécanismes de la Justice, elles ne servent à rien, puisque l’on aboutit à un sentiment d’injustice et à un divorce magistrats/ justiciables.

La justice devrait être comme le foot-ball. Arbitres , footballeurs et spectateurs comprennent tous les mêmes régles, immédiatement et sans avoir à se casser la tête.

86. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:40 par aliocha

@Tscok 77 : Décidément Tschok, j'aime beaucoup vos interventions. Et je partage en particulier votre étonnement sur le comportement collectif des magistrats. Il y a deux ou trois ans de cela, j'ai assisté à la remise du rapport annuel du CSM. L'ambiance était morose, les critiques contre la magistrature battaient leur plein. Et je songeais en entrant dans les locaux du Quai Branly qu'on allait sans doute assister à une rébellion. Oh une rébellion bien sûr toute en finesse, comme il se doit entre magistrats et politiques. En fait, de rébellion, il n'y en eut point. Ou plutôt si, l'un des membres du CSM n'attendit même pas la fin de la conférence de presse pour aller fumer une cigarette au fond de la salle en lisant Le Monde. Il signifiait ainsi que tout cela n'était que pantalonnade. Quant aux autres, ils se contentèrent de finir de ânonner leur présentation sur un ton morne et découragé. L'un de mes amis, membres de l'institution vint me voir à la fin pour me demander ce que j'avais pensé de tout cela. Je n'ai pas pu m'empêcher de lui lâcher, dans un mouvement de colère : "si vous voulez être respectés, commencez par être respectables". J'étais écoeurée par cette ambiance de renoncement. Avec le recul cependant, je me dis qu'à force de taper sur une institution, de l'étrangler financièrement, de la priver de reconnaissance ou même simplement de respect, on ne peut qu'en arriver à ce type de comportement. J'aurais aimé plus de fierté, mais est-on capable encore de fierté collective dans de telles situations ?
Sur l'affaire Outreau, je suis tentée de faire un parallèle avec l'affaire de la Société Générale. Tout le monde se souvient que le 24 janvier la Société Générale a annoncé qu'elle venait de perdre 6 milliards dont 4,9 par la faute disait-elle d'un de ses traders. Une fois n'est pas coutume, ce jour-là, c'est Paris qui fit trembler New-York ! Le coup de grisou sur les marchés mondiaux fut mémorable. On nous expliqua que le trader aurait pris des positions dépassant les autorisations et obligé la banque une fois les faits découverts à vendre en catastrophe alors que les marchés étaient en pleine tourmente. Résultat de la manoeuvre, des pertes abyssales. Mais déjà on se demandait dans les salles de marché comment il était possible qu'un trader éclate ses plafonds d'autorisation sans que personne ne s'en rende compte. Lorsque l'inspection interne de la banque s'est penchée sur cette question, elle a découvert qu'il avait fallu 75 alertes sur une durée d'un peu plus d'un an, avant que quelqu'un se soucie de vérifier ce qui se passait. Le plus drôle dans cette affaire, c'est que la Société Générale se vantait d'avoir les meilleurs systèmes de contrôle de risque possible. Et pour cause, depuis 10 ans, ce sont les patrons de la banque qui sont les grands théoriciens en France du gouvernement d'entreprise. Mais alors, que s'est-il passé ? Sur ce point le rapport de l'inspection interne est édifiant. On y découvre qu'à chaque alerte, celui qui était censé vérifier ce qui se passait a bien demandé des explications au trader, mais il s'en est tenu là alors même qu'il ne comprenait pas la réponse. Pourquoi ? Parce que les procédures imposaient de poser la question, mais pas de comprendre la réponse. Dans d'autres cas, il n'était pas précisé qu'il fallait informer la hiérarchie, on s'est donc contenté de noter qu'un problème avait été détecté mais sans en tirer aucune conclusion. Vous songerez sans doute qu'on est loin d'Outreau. Pas tant que cela. Dans les deux cas, les principaux protagonistes du dossier n'ont commis que des erreurs vénielles, mais ils ont été à l'origine d'un emballement du système. Pourquoi ? Parce que le système était réputé infaillible ou s'appuyait sur des éléments infaillibles, les meilleurs procédures de contrôle interne du monde à la SG, la parole au-dessus de tout soupçon des enfants et des experts dans l'affaire Outreau, ainsi que le strict respect des procédures par les juges. Et puis on a découvert en regardant les choses de plus près après ces catastrophes que dans le cas de la SG, ce magnifique contrôle interne avait été défaillant à 74 reprises. Et dans l'affaire Outreau, que les experts étaient mal payés, que les enfants pouvaient mentir et que la procédure même parfaitement respectée ne devait pas exclure le jugement humain. Il me semble que dans les deux cas, le système a souffert d'un excès de confiance en lui-même et que la hiérarchie elle-même a tenu pour acquis qu'il était infaillible, s'exonérant ainsi d'une partie de sa charge qui consiste à surveiller et contrôler le travail des subordonnés. Avec les résultats que l'on sait.

87. Le mercredi 30 juillet 2008 à 18:56 par aliocha

@Mussipont 61 : Loupé mon Cher, je ne me déconnecterai que ce soir ! D'ici là, gare à qui charge la presse injustement ;) Ensuite, vous serez tous tranquilles pour une petite vingtaine de jours !

88. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:03 par pepe

@eolas 83
vu la pertinence de son propos, je me disais que c'est peut-être ce qu'elle pensait faire face à l'écran de son PC...

89. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:14 par Augustissime

Eolas : « Depuis le temps qu'on se tue à vous répéter que ce magistrat n'a pas commis de faute, hormis… »
Le CSM : « Les faits, constitutifs d'une faute disciplinaire, relevés à l'encontre de M. LESIGNE, … » (p. 13 de l’avis)

C’est une faute disciplinaire vénielle ?

« Au fait, en 2001, vous étiez en train de crier “Mais mais, quelque chose cloche dans cette affaire !” ou bien “Ces pédophiles, il faudrait leur couper les couilles” ? »
Je pense que Claire attendait simplement que justice soit faite. Qu’elle a constaté comme chacun que l’affaire a tourné au fiasco. Et qu’elle pense que toutes les conséquences n’en ont pas été tirées. C’est une position respectable qui ne mérite aucun mépris condescendant.


Dadouche :


Chère Mémé,

J'ai bien reçu ta carte postale dans laquelle tu te demandais : "Avez-vous lu une tribune où un magistrat se demande publiquement si la détention provisoire, telle que la loi la prévoit, est appliquée à bon escient par les JLD ? Avez-vous lu autre chose que les traditionnelles litanies sur le thème : "le juge est bien obligé de mettre en détention, sinon on lui reproche son laxisme" ou "la justice n'a pas de moyens, donc elle ne peut traiter les affaires qu'en deux jours (comparution immédiate) ou en 5 ans (le reste des cas)" ? ".
Je n'ai pas eu le temps de répondre plus tôt, parce que j'étais occupée à fouiller le grenier et j'ai retrouvé ça.
Tu ne te souviens pas de ce jour où Tonton Eolas nous avait fait jouer à "Soyez le JLD" ? C'était peut-être un jour où tu boudais dans ton coin. Mais moi j'avais joué, je me souviens très bien. Oh, ça n'était pas une tribune, et je ne connais pas tous les JLD. Et puis, comme je suis d'un corporatisme béat, je ne pars pas du principe que tous les JLD sont des gros nuls qui font rien qu'à faire ce que le procureur demande. Mais j'avais essayé d'expliquer comment on réfléchissait pour appliquer la loi. Même que j'avais trouvé ça vachement compliqué d'appliquer la liberté comme principe, mais de devoir motiver le fait de ne pas placer en détention.
J'ai essayé de trouver d'autres exemples, mais le grenier de Tonton Eolas est tellement mal rangé que j'ai renoncé quand je me suis pris l'intégrale d'Harry Potter sur la tête.
En soignant ma bosse, je me suis rappelé d'un truc que j'avais signé il y a un peu plus de deux ans. Tout un tas de magistrats avaient demandé à être entendus par la commission parlementaire, et certains l'ont été. Bien sûr, eux, c'est pas passé en direct sur TF1/France2 et LCI. Mais comme ils avaient envie que ça se sache un peu, ils ont rassemblé leurs contributions ici. Tu devrais aller voir, c'est vachement intéressant. Je ne me fais pas d'illusion, tu vas encore dire que c'est bouffi de corporatisme. Mais moi je trouve qu'ils se posent des questions intéressantes.
Bon, je dois te laisser, mais je te fais quand même une bise malgré ta moustache qui pique.

90. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:16 par arg

vu le nombre de messages censurés , il est difficile de suivre le fil...........
ce qui est hallucinant , c'est de vous voir , vous , gens de justice (magistrats , avocats ) en majorité je suppose sur ce site , discutailler si , oui ou non ,sanction il y a , tout en vous passant de la pommade ( corps d'élite .......) : un proc embastille la moitié de la ville sur des arguments plus que discutables, accuse un pere d'avoir violé un enfant pas encore né ...un inculpé se suicide et au final : RIEN , et vous vous dicutez de savoir si c'est une mutation sanction ou une mutation volontaire ou une mutation promotion déguisée.............continuez à etre autiste , un jour les français redescendrons dans la rue ..........

91. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:21 par Augustissime

@Aliocha
Je suis assez d'accord avec vous. La responsabilité ne s'arrête pas au respect formel plus ou moins marqué des procédures en place. Les responsables directs de J. Kerviel ont été virés. Le patron de l'armée de Terre a démissionné à la suite de la fusillade accidentelle de Carcassonne.

Le patron d'un service qui dispose d'une délégation importante a une responsabilité qui dépasse largement ses actes individuels et ses éventuelles fautes personnelles.

Dans la plupart des organisations, y compris dans la police, un responsable du niveau du procureur Lesigne aurait présenté sa démission depuis longtemps... ou aurait été invité fermement à le faire.

92. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:21 par Mm

@arg
Pas de "trollage" sur Pascale Robert-Diard,
prdchroniques.blog.lemond...

ou sur philippe bilger
www.philippebilger.com/bl...

93. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:33 par Atreyuh

@ Augustissime

"Mais le monde judiciaire n'a pas fait mieux et les analyses de cette affaire ont rarement dépassé le niveau du corporatisme béat."

Car il est clair que vos propres analyses méritent de figurer dans la nouvelle édition du Bouloc-Stefani-Levasseur...

"Avez-vous lu une tribune où un magistrat se demande publiquement si la détention provisoire, telle que la loi la prévoit, est appliquée à bon escient par les JLD ?"

Absolument cher ami, mais vu le niveau de vos lectures vous ne risquez sûrement pas de tomber dessus...

@ arg

".continuez à etre autiste , un jour les français redescendrons dans la rue .........."

L'apprentissage de l'écriture de la langue française semble être une priorité avant que vous ne "redescendiez" dans la rue...

94. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:36 par Antatole T.

@ Augustissime

Et le PG ? Le procureur général, qui n'a pas vérifié ce qu'on lui racontait et dont les substituts généraux ont apparemment toujours requis sans hésiter le maintien en détention devant la chambre d'instruction, aurait-il du lui aussi démissionner ? (il n'est d'ailleurs pas trop tard)

Et sinon pourquoi ?

95. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:48 par Atreyuh

@ arg

"à atreyuh: tres fin comme analyse.... tres peremptoire...."

Merci du compliment l'analphabète!


Dadouche :
Bon, les enfants, c'est pas bientôt fini ?

96. Le mercredi 30 juillet 2008 à 19:54 par tschok

@ Aliocha,

Autant pour moi (si, autant pour moi). Je suis presque confus d'avoir à vous dire que je pense la même chose de vos interventions, que je trouve non seulement frappées au coin du bon sens, mais encore moulées dans le marbre de la pratique (olala, c'est nul).

Vous me parlez de choses qui me parlent. A la base je suis de formation fiscaliste, puis pénaliste, puis généraliste en droit des affaires, avec des pôles de compétences... ici et là.

Le contrôle sur pièces et le contrôle sur place signifient quelque chose pour moi.

Un journaliste est quelqu'un qui se déplace, pour, sans titre, faire souvent un contrôle sur place, à ses risques et périls, sous la critique ou les quolibets d'une foule peu prompte à être informée, et presque lascive et volontaire à se faire "baiser". Et pourtant, je ne croit pas que cela soit la volonté commune.

Deuxième point, je connais la séparation entre les ordonnateurs et les comptables. Mesure de sécurité hélas illusoire dans un monde où l'argent est dématérialisé, comme le pouvoir.

je m'explique brièvement: l'argent c'est assez simple. Un euro c'est un euro et un bilan doit être équilibré. Le pouvoir, c'est autre chose. Notamment, il découle - Alvin Toffler l'avait prédit depuis 20 ans - de la maîtrise d'un système d'information.

Vous vous référez au cas d'un grouillot qui a compris comment manipuler ce système d'information pour gagner de l'argent, et votre rapprochement avec l'affaire d'Outreau, qui a vu l'une des accusés manipuler le système d'information pour en tirer profit à son propre niveau, ne me semble pas éloigné du sujet, mais au cœur du sujet.

Ici une parenthèse: dans l'affaire d'Outreau, la justice n'a pas été dupée que par elle-même. Elle a aussi été dupée par l'un des acteurs du crime, ce qui rend cette affaire encore plus scandaleuse. Ce n'est pas seulement que l'innocence a été bafouée, c'est que les criminels ont pris la conduite de l'instruction, par jeu et goût du vice, au risque de faire condamner des innocents.

C'est de cela dont doivent répondre MM. Lesigne et Burgaud. La faute est si grande que nous ne pouvons tout simplement pas l'assumer. Cette affaire, c'est la défaite de 1940.

Cette parenthèse n'est pas inutile puisque il s'est produit le même phénomène, non pas à l'égard de magistrats, mais à l'égard de ceux qui doivent vérifier que l'argent des déposants n'est pas utilisé contrairement à l'objet social de la banque.

Et dans le même ordre de grandeur: tant d'euros perdus que cela devient "inassumable"

On parle de sommes qui font douter de... l'obligation de payer ses impôts, tout simplement.

Avant ce scandale il y en a eu d'autres ("executive life").

On perd pied.

Alors, je ne sais pas quoi dire.

Troisième point: si, je peux vous dire que vous avez raison de vous "déplacer" et de laisser filer votre regard sur le moindre détail ( il fume, il vous dit que...) Tout cela est extrêmement précieux.

Le contrôle sur place, il n'y a que ça de vrai.

Je recoupe ça par rapport à ma propre expérience: un dossier, ça se consulte, sur place, même si on peut en obtenir une copie. Un juge, ça va se voir, même si on peut lui téléphoner. Un détenu, ça se visite, même si on peut lui écrire. Une scène de crime, ça s'ausculte même si on peut lire des rapports d'experts, etc.

Un bon avocat ,comme un bon journaliste, doit faire des kilomètres dans sa journée.

Voilà, c'est peu.

C'est tout ce que j'ai à opposer au sentiment de scandale qui me prend quand je lis votre témoignage.


97. Le mercredi 30 juillet 2008 à 20:10 par aliocha

@augustissime : Ne préjugez pas de l'issue de l'affaire de la Générale. Elle pourrait être surprenante. Rien ne dit que ceux qui ont été virés ne sont pas des boucs-émissaires. Je vous rappelle que la justice n'a pas fini son travail. Ma comparaison visait simplement à montrer l'étrange lien entre ces deux affaires. Deux jeunes professionnels font voler en éclat tout un système sans qu'on puisse leur reprocher une faute à la mesure du sinistre, deux systèmes se sont emballés et ont été victimes de leur logique, l'un faire de l'argent, l'autre faire justice et les deux ont abouti au résultat inverse. Je n'y ai pas réfléchi assez pour vous faire une belle démonstration, mais il me semble qu'il y a des analogies troublantes. Le trader n'est pas un voyou qui s'est enrichi personnellement, il voulait juste devenir une star des marchés. Le juge n'a rien fait d'autre que son travail comme il pensait devoir le faire avec le souci louable de protéger des enfants. Ensuite, tous les gardes-fous ont été défaillants, au moins pendant un certain temps, sans que l'on puisse identifier une faute à la mesure du dommage. C'est cela que je trouve personnellement passionnant.
Pour le reste, si on considère que la responsabilité dépasse le strict respect des procédures, le problème c'est "quels critères de jugement pour cette responsabilité là ?" Votre réponse m'intéresse.....

98. Le mercredi 30 juillet 2008 à 20:33 par Augustissime

@Dadouche
Je connaissais le site que vous mettez en lien. On ne peut pas dire qu'on y lise force remises en cause, plutôt les litanies dont je parle. Et on peut jouer à "soyez le JLD", "soyez le supérieur de J. Kerviel", "soyez un policier lors d'un braquage", ça n'exonère pas de se poser la question des pratiques des uns et des autres et de leurs responsabilités individuelles.

@Anatole T
Dans une entreprise privée, je pense que l'équivalent du PG aurait été viré illico. C'est que, passé un certain niveau de responsabilité, on considère que vous avez suffisamment d'autonomie et de moyens pour être jugé sur les résultats, sauf cas de force majeure avéré.

99. Le mercredi 30 juillet 2008 à 20:42 par Le Chevalier Bayard

@ Aliocha

L'approche et la mise en abyme du risque systémique dans les deux affaires ne sont pas dénuées de sens. Ce qui me plaît assez.

Sauf que pour Outreau les "pertes" sont humaines !

100. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:12 par Rossel

C'est tout de même extravagant de considérer que le procureur de Boulogne n'aurait commis aucune faute de nature à fonder une sanction et que le procureur général de Paris (Bot),dans la même affaire, ait pris la peine en pleine audience d'appel de s'excuser pour les dysfonctionnements de la justice !

101. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:25 par Anatole T.

@ Rossel 99

Cher Rossel, je comprends votre réaction. Mais je vous en prie, allez lire le rapport du CSM. Il est accessible et ne comprend que 14 pages. Lisez et comprenez.

Le CSM examine un par un tous les griefs que la chancellerie a formulé contre le procureur.

Tous sont rejetés, de façon convainquante selon moi.

Sauf un: Il y a bien eu une faute (mal informer sa hiérarchie de l' évolution du dossier).

Mais les députés, sur proposition du gourvernement, ont voté l'amnistie de cette faute, comme d'ailleurs de beaucoup d'autres.

Donc: Il y a eu faute. Elle est amnistiée. Elle ne peut donc être sanctionnée (c'est le but de l'amnistie).

Prenez vous-en à ceux qui pensent qu'il faut amnistier les fautes disciplinaires (présidents de la République, ministres, parlementaires).

Ce sont les mêmes que ceux qui pensent qu'on peut faire tourner la justice avec un budget ridicule et des procureurs noyés sous la masse des dossiers, qui ne peuvent guère que bâcler le plus urgent en abandonnant le reste.

Vale.

102. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:38 par Anatole T.

@tschok 74

Bravo, bravissimo, pour votre charge déterminée conte la morosité molle des magistrats.

Post-scriptum qui n'a rien à voir: Vous écrivez "Autant pour moi" ? Et bien, au temps pour vous, si l'on en croît les maîtres du bon usage (www.langue-fr.net/index/a...

103. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:39 par Anatole le nul en hyperlien

www.langue-fr.net/index/a...

104. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:41 par Augustissime

@arg (#89)
Vous avez raison de constater que les échanges prennent une tournure non seulement corporatiste, comme d'habitude, mais aussi tout à fait condescendante vis-à-vis des non juristes, qui sont pris pour des non-comprenants bornés par nos valeureux experts pleins d'introspection (surtout quand la dite introspection porte en fait sur Madame Dati ou le législateur).

Pour ma part, face à la suppression injustifiée et scandaleuse de mon commentaire n°60, pourtant long, argumenté et autrement plus courtois que bien des commentaires et des réponses ici, j'ai décidé une mesure de boycott d'une semaine de ce blog.

105. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:52 par Claire

@ eolas
Mais je n'ai nullement prétendu qu'un manque de discernement était une faute disciplinaire.
Je me répète, si aucune autorité judiciaire ne reconnaît ce manque de discernement, alors le fossé entre la justice et les citoyens ne sera jamais comblé. Et si le CSM ne le dit pas dans son avis de 14 pages, alors cette institution ne sert à rien dans cette affaire.

Pourquoi aurait-il fallu crier quelque chose en 2001? Je crois au contraire que tant qu'une instruction est en cours, il faut se taire.

Ainsi donc, vous affirmez que personne n'avait compris, avant le procés, qu'avec cette affaire, la justice courrait au désastre! C'est sans doute exact, mais alors comprenez que les justiciables ne soient pas rassurés.




106. Le mercredi 30 juillet 2008 à 21:59 par Passant

Juste en passant, on est pas si mal lotis que ça en France à en croire :

tpmmuckraker.talkingpoint...

107. Le mercredi 30 juillet 2008 à 22:00 par OuvreBoîte

@Augustissime
(103)
Êtes vous bien sûr que la peine soit assez sévère, une semaine c'est peu finalement
(97)
si vous pensez que Dominique Perben aurait dû être viré, on va tomber non pas sur un point de désaccord mais sur une difficulté pratique : il était déjà parti, muté d'office sur un poste de grade "équivalent" : ministre des trains, des avions et des autoroutes (toute ressemblance avec la promotion de Mr Lesigne serait purement fortuite).

108. Le mercredi 30 juillet 2008 à 22:10 par Mussipont

@mémé : "j'ai décidé une mesure de boycott d'une semaine de ce blog." oui mais au moment ou tout le monde part en vacances, ça ne va pas trop se voir...

109. Le mercredi 30 juillet 2008 à 22:21 par Lulu

Hourah!!!!!!!!!!! Augustissime se tire!

Quand vous aurez fini de bouder, Augustissime, il faudra que vous m'expliquiez quelque chose: "les échanges prennent une tournure non seulement corporatiste, comme d'habitude, mais aussi tout à fait condescendante vis-à-vis des non juristes, qui sont pris pour des non-comprenants bornés par nos valeureux experts pleins d'introspection (surtout quand la dite introspection porte en fait sur Madame Dati ou le législateur)."

Puisque vous méprisez tant ce blog, pourquoi venez-vous y traîner vos guêtres si souvent? Pour apporter la bonne parole aux valeureux experts pleins d'introspection?

110. Le mercredi 30 juillet 2008 à 22:36 par Audrey

Eh oh!!! Vous avez tout suivi là?? Mémé a décidé de se faire la malle! Faut faire quelque chose!

Sur le corporatisme des magistrats:
Oui les magistrats sont corporatistes. Ils se soutiennent envers et contre tous, parce qu'ils savent que dans la précipitation que l'on exige d'eux et la tonne de dossiers qui leur incombe, aucun d'eux n'est à l'abri d'une erreur. Ils ont également pleinement conscience que leur erreur peut conduire à des drames humains, alors pour cela, ils font front, ensemble. Si une faute est commise par l'un d'eux dans l'exercice de ses fonctions, ils le soutiennent lorsque cette faute est due à un envahissement de dossiers, à la pression médiatique et populaire, parce qu'ils savent qu'à tous, il pourrait arriver la même chose.

Vous les accusez de coporatisme car vous envisagez votre situation en tant que justiciable, potentiellement victime de l'erreur d'un magistrat. Mais placez vous en tant que citoyens. Exigez une justice dotée de moyens humains et financiers, apte à réaliser les objectifs qui lui sont assignés. Exigez de ceux qui nous gouvernent qu'ils assurent une véritable indépendance du corps plutot que d'essayer sans cesse de lui faire courber l'échine. Alors seulement lorsque notre justice répondra à ces qualités, la justice ne se repliera pas sur elle même et sera à même d'entendre des critiques constructives et non de simples accusations.

Lorsque le système changera, les juges changeront. Plus vous leur taperez dessus, plus les politiques leur taperont dessus, plus le corporatisme sera fort.

111. Le mercredi 30 juillet 2008 à 22:59 par Claire

@arg
Tu commences à me fatiguer avec ton antienne "les magistrats ne sont responsables de rien". Tu as l'air d'ignorer que les magistrats sont contrôlés en permanence par les organes juridictionnels supérieurs. Il n'y a sans doute pas beaucoup d'autres professions qui soient autant contrôlées. Et quand la Cour de cassation fait mal son boulot, elle peut même être contrôlée par la Cour européenne des droits de l'homme.


Pour en revenir à l'affaire d'Outreau, aucun contrôle n'a fonctionné. Pourquoi?

112. Le mercredi 30 juillet 2008 à 23:13 par Lucas Clermont

Un corporatisme efficace des magistrats, je n'y crois pas une seconde ; deux ou trois commentateurs et Dadouche ont signalé l'inconsistance des réactions et de la capacité à agir ensemble. En revanche, il est difficile de nier des travers et des blocages dans la perception du problème, une difficulté à envisager qu'un magistrat puisse se tromper.

Dadouche :
Je crois qu'il y a un malentendu récurrent là dessus. Oui il y a eu des erreurs dans la conduite de l'affaire d'Outreau. Oui les magistrats peuvent se tromper. Oui ils en ont conscience. Oui les détentions provisoires sont trop longues et les mentalités doivent continuer à évoluer sur la DP pour les éviter au maximum. Non la justice n'est pas irréprochable dans la conduite des affaires "de moeurs".
Le risque d'erreur est consubstantiel à l'acte de juger. Tout magistrat s'est planté un jour et se plantera encore. Les conséquences peuvent en être extrêmement graves. Mais le risque de plantage est quand même moindre quand on prend une décision en ayant en main toutes les informations, en prenant le temps nécessaire à l'audience, en ayant de la documentation à jour, en ne jugeant pas 10 heures d'affilée, en n'étant pas soumis à des modes ou lubies (un jour la présomption de crédibilité de l'enfant, le lendemain la présomption d'innocence en fonction du nombre de demandes de mise en liberté), en ayant 70 dossiers dans son cabinet d'instruction plutôt que 180, en faisant de la fonction de JLD une fonction spécialisée plutôt qu'un service dévolu au dernier arrivé qui fait ça en plus de beaucoup d'autres choses, en ayant un greffier à l'audience.
Tout ne se résume pas à la question des moyens, mais pour prendre du recul et se remettre en cause, il faut pouvoir lever le nez du guidon. c'est un luxe que très peu peuvent se permettre.


Nous sommes d'accord sur le manque de moyens qui ne permet pas de travailler dans des conditions efficaces, manque de temps, de moyens matériels, de personnels, etc. Cela n'exclut pas qu'il ne puisse y avoir des erreurs d'appréciation. On notera que le CSM ne demande pas de sanction contre M. Lesigne parce que les fautes sont amnistiées. Elles existent pourtant en amont de la construction de l'erreur judiciaire (l'amnistie qui n'efface pas les faits cela se télescope avec le billet de Gascogne de hier et sa polémique avec Eolas).

Dadouche :
A mon sens, ce n'est pas une erreur d'appréciation qui a été qualifiée de faute par le CSM, mais un défaut de rigueur. Et l'avis du CSM est intéressant parce qu'il replace un certain nombre de choses dans le contexte d'une juridiction très chargée, qui souffre d'un important turn-over et d'un manque d'encadrement intermédiaire.


Il est une faute toutefois qu'on ne peut taire : comment, les magistrats peuvent-ils accepter de travailler dans ses conditions, alors même que leurs décisions peuvent avoir des conséquences majeures dans les vies des personnes qu'il jugent ?


Dadouche :
C'est une très bonne question et je suis moi même plongée en plein paradoxe à ce sujet. Prenons l'exemple de la présence du greffier à mes audiences d'assistance éducative. Elle est prévue par la loi à peine de nullité du jugement, et pourtant mon greffier n'assiste jamais à mes audiences d'assistance éducative. Parce que sinon, les convocations pour lesdites audiences ne seraient pas envoyées, les jugements ne seraient pas notifiés etc...Je pourrais faire un caca nerveux et exiger qu'on m'affecte un greffier supplémentaire. Par exemple, en menaçant de ne tenir que le nombre d'audience que mon greffier pourra traiter de bout en bout. Dysfonctionnement ! A Tataouïne, le juge des enfants laisse rentrer chez eux faute de renvouellement de placement des mineurs maltraités et juge deux ans après des sauvageons qu'on a pas sur arrêter à temps. Admettons qu'on m'affecte un greffier. Il faudra bien qu'il soit "désaffecté" d'un autre service. Dysfonctionnement ! A Tatouïne, il faut six mois pour obtenir la copie d'une décision du juge aux affaires familiales indispensable pour faire payer la pension alimentaire !
On peut prendre aussi l'exemple des audiences correctionnelles : Mr Machin, il est 17 heures, le Parquet vient de nous annoncer 3 comparutions immédiates, on ne va pas pouvoir vous juger aujourd'hui parce qu'à 22 heures, quand on aura achevé notre huitième heure d'audience correctionnelle, on ne sera plus dans un état de fraîcheur suffisant pour examiner les faits qui vous sont reprochés. Revenez dans 7 mois. Vous aviez pris votre journée et ça fait des heures que vous poireautez ? On est vraiment désolés.
Intellectuellement, je suis la première à dire : y'a qu'à dire non. Mais quand je me retrouve devant mes placards remplis par plus 400 dossiers, je n'arrive pas à dire à ma greffière : venez à l'audience, on se contentera de traiter les situations les plus inquiétantes.
Et comment les médecins peuvent-ils accepter d'enchaîner les gardes ? Et les chauffeurs poids-lourds de ne pas s'arrêter pour les temps de repos réglementaires ?



P.-S. Augustissime a peut-être les excès d'un polémiste ; cela peut pourtant être un signal utile lorsqu'on se fourvoie dans une mauvaise piste consensuelle. Comme à Outreau !

113. Le mercredi 30 juillet 2008 à 23:23 par Le Chevalier Bayard

"Le démon corporatiste ou la conscience du juge dans la tradition juridique française"

Si les magistrats se montraient dignes du statut auquel ils aspirent, ils seraient les premiers à affirmer que l'indépendance ne peut être, synonyme, pour eux, d'impunité. Mais au lieu d'aborder de front la question, ils préfèrent ruser en expliquant que la meilleure réponse se trouve dans le libre jeu de leur conscience et dans leur déontologie.

La conscience intime devenue l'apha et l'omega de la responsabilité !

Seul le règne du "politiquement correct" dans le domaine judiciaire permet d'expliquer que de telles sornettes soient accueillies dans un silence respectueux et approbateur ! Ainsi, dans un jeu normal de pouvoirs et contre-pouvoirs, une responsabilité accrue devrait accompagner une indépendance désormais incontestable.

Le corporatisme judiciaire fonctionne avec une telle efficacité que, bien au contraire, c'est l'impunité qui, elle, se renforce pour le plus grand confort des magistrats.

L'indépendance naît normalement de la volonté d'assurer à la démocratie des "cheks and balances" (expression culte, dans le monde anglo-saxon, pour désigner en démocratie l'équilibre des pouvoirs).

114. Le mercredi 30 juillet 2008 à 23:32 par CEH

@ arg 114

Par curiosité combien d'heures avez-vous travaillé depuis lundi matin jusqu'à l'heure où je vous écris ?

115. Le mercredi 30 juillet 2008 à 23:39 par Clems


"Ça a la couleur d'une sanction disciplinaire, la saveur d'une sanction disciplinaire, l'habillage d'une sanction disciplinaire, mais officiellement ça n'est pas une sanction disciplinaire"

Hors il pourrait y avoir officiellement sanction disciplinaire du mois requalifiée comme telle.

Si la mutation dans un poste inférieur est nous l'avons vu dans la fonction publique un phénomène tout à fait normal qui s'explique par les souhaits, les postes disponibles et les personnels déjà sur place (difficile de prendre la place de quelqu'un qui statutairement occupe la place importante = qui a le statut correspondant ou qui bénéficie du privilège de l'ancienneté)

Si l'annonce de la mutation faisant suite à l'examen d'une possible sanction disciplinaire, n'est en soit, seule, la démonstration de l'existence d'une sanction.

Cependant, le fait de ne pas saisir le CSM d'un nouvel avis n'est à mon sens qu'une faute relative à la forme. Ce n'est pas en soit la preuve que cette mutation n'est pas une sanction.

Il faut donc examiner si la mesure légale, normale, n'est pas en réalité une mesure -purement vexatoire- à l'encontre du procureur LESIGNE et donc un abus de droit.

Hors il s'avère que l'annonce publique de la mutation, concomitante à l'avis du CSM dans des termes qui visent à le contredire, ne laisse guère de toute quand au caractère punitif et vexatoire de cette mutation.

Bref, non seulement il y a bien une sanction, ce qui la caractérise dans les faits est cette annonce de presse, mais également une violation du droit quand à la procédure employée. C'est à dire l'absence de procédure.

En droit du travail, vous pourriez avoir ce type de cas avec la rétrogradation ou le licenciement d'un salarié protégé sans l'accord de l'inspection du travail. En gros DATI vous traite comme dans le cadre d'une relation employé/employeur où l'on peut violer la forme sans pour autant se compromettre avec certitude sur le fond.

@claire
Pour cette histoire d'amnistie, "comme par hasard". Il faut savoir qu'elle fonctionne également en droit du travail. Donc comme par hasard un employeur pourrait dire je ne peux plus licencier untel ou untel pour tel fait... Comme par hasard. Si le but est de raisonner par expression, vous pourriez préférer "pas de bol".

116. Le jeudi 31 juillet 2008 à 00:20 par Claire

@Clems
Je n'ai pas choisi par hasard l'emploi de cette locution "comme par hasard"; et je n'ai rien compris à ton histoire de "pas de bol".
Pour exprimer plus clairement ma pensée: le peuple français ne peut pas se contenter d'un avis du CSM qui ne trouve rien à redire dans cette affaire d'Outreau, sauf pour des faits amnistiés.

C'était peut-être l'occasion d'expliquer aux français ce qui n'avait pas fonctionné dans ce cas. Il me semble que l'on est en droit d'attendre de telles explications de la part du CSM (ou d'une autre institution judiciaire), et que c'est même nécessaire.

117. Le jeudi 31 juillet 2008 à 00:30 par Clems

Ah je ne savais pas que vous me représentiez ? Si vous voulez des gens qui trouvent à y redire vous pouvez toujours lire le rapport de la commission d'enquete parlementaire pour l'affaire Outreau ou visionner les bandes vidéos de la Chaine parlementaire lors des auditions.

Personnellement, je ne suis pas intéressé par un avis du CSM juste pour me faire plaisir.




118. Le jeudi 31 juillet 2008 à 00:30 par ramses

"Tout ça pour ça" ?

Une telle gabegie, au terme de laquelle "on allait voir ce qu'on allait voir"... Commission d'enquête, "plus jamais ça"...

On a vu...

Un Juge non sanctionné,

Un procureur "muté à sa demande" !

Circulez, y a plus rien à voir, affaire suivante :)

Plus que lamentable, c'est quoi ? Le mot m'échappe...

119. Le jeudi 31 juillet 2008 à 00:37 par Clems

@Alio
"Sur ce point le rapport de l'inspection interne est édifiant. On y découvre qu'à chaque alerte, celui qui était censé vérifier ce qui se passait a bien demandé des explications au trader, mais il s'en est tenu là alors même qu'il ne comprenait pas la réponse. Pourquoi ? Parce que les procédures imposaient de poser la question, mais pas de comprendre la réponse."

Je vois cela sans arrêt. Cela se nomme de la rétention d'information et la peur de passer pour un incompétent. C'est aussi simple que cela, je vous donne une réponse bidon dans des termes incompréhensibles avec autorité. Vous verrez que peu importe l'entreprise, personne ne revient à la charge de peur de tomber sur une réponse limpide mise en copie vers votre supérieur qui vous ferait passer immédiatement pour un incompétent.
Donc là le cadre, et bien c'est trés simple, il ne met pas en doute le bien fondé de la chose mais simplement sa propre compétence à comprendre. Pour lui la seule chose qui pourrait ressortir si il insistait c'est l'affichage de son incompréhension du terrain. Et de cela il n'en veut pas. En résumé, les cadres dans les entreprises sont incompétents, ne servent à rien et sur le plan opérationnel font des dégâts. Comme ils le savent et bien ils ne vont jamais sur ce terrain là.


120. Le jeudi 31 juillet 2008 à 01:14 par Claire

@Clems
Je ne sais pas si tu t'adressais à moi , mais je vais faire comme si.
J'ai vu l'audition du juge Burgaud à la TV et cela m'a fortement déplu; j'ai eu l'impression qu'il avait été "jeté en pâture ".

Encore une fois, je demande une réflexion collective de la part de la magistrature; il ne s'agit pas d'un avis pour faire plaisir, mais d'une analyse didactique: je crois que les français ne comprennent pas leur justice. J'imagine que c'est l'une des raisons qui explique qu'ils ne l'aiment pas.

121. Le jeudi 31 juillet 2008 à 04:46 par béatrice

Comme un cheveu dans la soupe..."A Sainte Pélagie sous ce règne élargie"...(Gérard de Nerval)

122. Le jeudi 31 juillet 2008 à 06:21 par Joel

@105

Je ne peux pas repondre pour lui, mais je tiens a dire que je trouve que les messages d'Augustissime
apportent presque toujours quelque chose a la discussion, meme quand je ne suis pas d'accord avec lui,
comme c'est souvent le cas, et dans cette discussion en particulier.

Je ne sais pas pourquoi son message 60 est passe au Troll Detector, mais je me dis "il y a du louche dans cette affaire".


123. Le jeudi 31 juillet 2008 à 06:52 par Véronique

Juste une question en rapport avec les titres de la presse et les annonces télé de 2001 que cite musashi (post 49).

Comment a été organisée l'information par l'Institution judiciaire de l'affaire d'Outreau aux médias ? En fonction de quelles sources ces articles et ces reportages ont-ils été rédigés ?

@ Dadouche

" Prenons l'exemple de la présence du greffier à mes audiences d'assistance éducative..." (votre réponse à Lucas Clermont (post 108) ?

Les audiences des chambres d'instruction d'Outreau fonctionnaient-elles comme vos audiences d'assistance éducative ?


Dadouche :
Mon propos était très éloigné d'Outreau et ne visait, dans cette partie de ma réponse, qu'à illustrer les paradoxes où l'on se trouve parfois, à sacrifier certains principes (le respect de la loi, quand même) pour satisfaire à certaines exigences de nos missions.

124. Le jeudi 31 juillet 2008 à 07:59 par Mathaf Hacker

Je n'ai jamais eu à me plaindre d'une décision de justice, sur une dizaine d'actions que j'ai pu engager dans le domaine professionnel ou privé. Je suis assez sensible aux arguments de Dadouche, mais je les trouve un peu trop défensifs. Cela relève d'un excès d'humilité qui voudrait que le magistrat n'aît aucune marge de manoeuvre. En tant que parfait béotien, ce qui m'a choqué dans le cas du juge Burgaud, c'est sa ligne de défense : "je n'ai fait qu'appliquer la loi". Il aurait dit "j'ai appliqué la loi comme un con", on l'aurait pardonné. Même chose pour Lesigne: tout est pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles, c'est bien court.

125. Le jeudi 31 juillet 2008 à 10:08 par Boratine

Ca a l'air tres compliquée ce systeme de sanction du conseil superieur de la magistrature, lent et obscur encore plus que leur systeme de mutation..

Aux Etats Unis, les procureurs de la République et les juges sont élus au suffrage universel.

www.judgetriana.com/index... (example de campagne d'un juge)

La sanction est faite par les citoyens qui ne reelise pas les procureurs et les juges qui ont fait de graves fautes professionnelles ou qui ont une politique penale qui ne leur plaise pas...

Pour ma part je ne voterai pas pour un procureur qui demande la prison ferme les voleurs de supermarché et le sursis les cols blancs qui detourne des millions.

De meme un procureur qui n'ouvre jamais d'information judiciaire dans des cas de violences policieres ou de mort suspecte dans les locaux de police.

Enfin je ne voterai pas pour un procureur qui ne visite pas regulierement les locaux de garde à vue et les hopitaux psychiatriques comme la loi le lui donne l'obligation.

C'est vrai que cela pourrait etre sympa d'avoir un procureur qui demande 5 an ferme (le max) pour des violences volontaires sans ITT (un souflet par exemple) avec 2 circonstances aggravantes (sur un eleve et dans une ecole par example) comme la loi le prevoit. Cela nous montrerait qu'il faut des lois avec des peines realistes et que le code penal est legerement absurde sur le quantum des peines...

J'entends deja ici les voix qui montent, mais vous voulez faire voter le peuple mais vous etes fou! Oui d'accord il n'est pas encore assez mature, heuresement que nous avons de braves ministres bien posés qui deposent des lois (retention de surete) en violation avec les conventions internationales signées (pacte des droits civils et politiques, convention europeene des droits de l'homme)...le systeme francais est decidement le meilleur..cocorico!!! hourra!!

126. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:04 par Anatole Turnaround.

Bon sang, Turnaround n'aime pas qu'on tourne en rond !

Arrêtez de vous battre bêtement pour savoir si ce sont les hommes ou le système qui a failli.

Ce sont les deux en même temps, bien sûr.

D'un côté le système judiciaire qui n'a pas les moyens matériels et humains de ses ambitions. Voir les exemples si vrais de Dadouche, que la plupart des magistrats pourraient multiplier à l'envi. De ce côté là, que le personnel soit bon ou mauvais, fortement ou légèrement sanctionnable, il ne peut que fonctionner en état d'insécurité pour les usagers. Un bateau ne peut qu'être dangereux lorsque les matelots sont à demi-effectif et que le commandant doit les aider à nettoyer le pont au lieu de vérifier la bonne marche du bâtiment.

Solution: Plus de moyens.

De l’autre côté des hommes qui peuvent se tromper où négliger leur tâche, qui doivent être sanctionnés (OUI, C’EST UN MAGISTRAT QUI VOUS PARLE DE SANCTIONNER DES MAGISTRATS).

Solution: Formation continue et procédures disciplinaires.

Comme chacun le voit, les deux aspects du problème appellent des réponse différentes qui peuvent coexister.

Mais là, dans notre cas, ça ne va pas du tout.

Si le scandale d’Outreau, c’est l’emprisonnement d’innocents, je voudrais que soient au premier rang des magistrats accusés CEUX QUI ONT PRIS LES DECISIONS DE DETENTION.

Le juge d’instruction BURGAUD et le procureur LESIGNE n’ont JAMAIS pris une décision de détention.

Ils n’en avaient pas le pouvoir. Ils n’ont pu que demander la détention aux juges des libertés et de la détention (les JLD) qui se sont succédé dans le dossier. Demander, c’est à dire poser une question et attendre qu’on leur réponde oui ou non. Celui qui décide est celui qui dit oui ou non. C’EST LE JLD. En cas d’appel des décisions des JLD, ce sont les magistrats de la chambre de l’instruction, à la cour d’appel, qui ont pris les décisions.

Les JLD (qui décident seuls) et les magistrats de la chambre de l’instruction (qui décident à trois), s’ils ont fait leur travail, ont intégralement lu le dossier d’Outreau à chaque fois qu’il leur a été soumis, et se sont demandés, soit en leur for intérieur, soit lors d’une discussion à trois, si la détention était justifiée au regard du dossier et des arguments du détenu.

Les décisions qui scandalisent sont les leurs. Pas celles de Burgaud et Lesigne.

Pourquoi ne sont-ils pas devant nous, aujourd’hui, comme Burgaud et Lesigne?

Sont-ils des fantoches dont les décisions étaient tellement télécommandées par le parquet et le juge d’instruction qu’il serait indécent de leur reprocher une activité qui consistait à rendre des services plutôt que de véritables jugements?

Je ne connais pas le chiffre précis, mais il semble que des dizaines de magistrats aient statué sur la détention des mis en examen d’Outreau. Aucun n’a vu de problème dans le dossier ? Alors quoi ? Tous des fainéants ? Tous des incompétents ? Tous des gens débordés qui n’exercent les attributions de JLD que ponctuellement, en plus de leur service régulier, et qui préfèrent aller voir leur collègue juge d’instruction pour lui demander ce qu’il veut, plutôt que de passer plusieurs heures à se plonger dans un dossier volumineux et complexe ?

Croyez-moi, ayant exercé les fonctions de parquetier, de juge d’instruction et aussi de JLD, je la connais la mécanique. La vérité c’est que, comme le dit Dadouche, les fonctions de JLD sont souvent distribuées à tour de rôle, une semaine chacun, à des gens qui n’ont pas que ça à faire, qui ne sont pas tous pénalistes, qui ne sont pas assez forts dans leur fonction de JLD pour accepter de mécontenter le juge d’instruction ou le procureur, et qui parfois ne s’impliquent pas dans le dossier comme s’ils devaient obligatoirement le suivre dans la durée, car ça ne vaut pas le coup de se mettre à coup sur en retard dans ses jugements de divorce, ses affaires de construction immobilière ou de responsabilité médicale, pour une affaire de JLD qu’on n’aura peut-être plus jamais à examiner.

Oui, cent fois oui, il faut sanctionner les défaillances professionnelles des juges !

Le problème, c’est que dans l’affaire d’Outreau, il faudrait sanctionner tous ceux qui ont placé ou maintenu en détention les mis en examen, c’est à dire tous les JLD et les conseillers de la Chambre de l’instruction.

Or ils semblent se compter par dizaines.

Il faudrait donc reprocher des fautes personnelles à plusieurs dizaines de magistrats.

C’est à dire, pour la Chancellerie, admettre un énorme problème de qualité du recrutement, qui n’est pas crédible vu le niveau d’études requis et le sérieux de la formation donnée.

Autant de magistrats fautifs en raison de négligences personnelles dans le traitement d’une seule affaire. Qui le croira?

A une telle quantité de dysfonctionnements, on revient à la question de l’organisation du système, et à l’éternel mais réel manque de moyens. Mais, comme toujours, pas question de le traiter sérieusement.

Alors pas possible d’accuser les véritables décideurs de la détention des accusés d’Outreau. Trop nombreux. Trop voyant.

Alors nécessité pour le ministère de présenter aux peuples deux épouvantails qui seront châtiés pour satisfaire la colère légitime du peuple.

La colère sera calmée. Le mal n’aura pa été soigné. Et les JLD continueront à travailler comme avant.

Il y a bien un espoir: Les juges d’instruction vont bientôt travailler à plusieurs sur un dossier. Finie la solitude du jeune Burgaud. A trois, c’est plus difficile de se tromper et demander au JLD une détention qui ne devrait pas avoir lieu. Ca devrait aller mieux, non ?

Oui, mais à condition que chaque juge d’instruction puisse travailler sur les dossiers de ses collègues en plus de ses propres dossiers. A condition qu’il ait le temps de connaître 300 dossiers au lieu de 100. Et ça, à personnel constant, ce n’est pas gagné parce que cent dossiers d’instruction à suivre en même temps, ça vous occupe le juge le plus travailleur.

Alors voilà, il y a eu une catastrophe, les causes demeurent, et ont fait croire au peuple que le problème est réglé parce qu’on a plus ou moins sanctionné deux hommes. Et tout pourra recommencer ...

Vous, les non juristes, les citoyens non-spécialistes, et ceux qui ont le courage de venir s’exprimer sur ce blog même sans maîtriser la langue aussi bien que d’autres, essayez de comprendre qu’on vous trompe.

Les sanctions contre Lesigne et Burgaud sont peut-être méritées. Mais elles ne sont pas un remède suffisant au mal qui a engendré Outreau. Sanctionner les hommes est une chose. Donner aux hommes les moyens d’accomplir correctement la tâche qu’on leur confie en est une autre.

Il faut faire les deux. Mais ça ne semble pas prévu.

Peut-être faudrait-il que chacun en parle à son député ?

127. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:19 par Siskotte

@Anatole : très bien dit !

128. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:34 par Doc

@ Anatole : "Non juriste non pénaliste" ,je peux effectivement entendre et respecter une telle façon d'expliquer les choses. Merci.
Si vous ne voulez pas que des citoyens qui pâtissent du même type de difficultés et de mensonges que vous, sans se sentir entendus, soient un peu moins inquiets et en colère au sujet de notre justice, je pense qu'il faut expliquer ainsi.

129. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:40 par Mussipont

@Anatole : très très bonne synthèse du problème, merci de la part d'un non juriste!

130. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:44 par Véronique

@ Augustissime

" Avez-vous lu une tribune où un magistrat se demande publiquement si la détention provisoire, telle que la loi la prévoit, est appliquée à bon escient par les JLD ? " ( vous à Eolas, post 32)

" On ne peut pas dire que vos exemples soient très convaincants quant à l'introspection du monde judiciaire sur la détention provisoire: (...) un aveu du procureur Lesigne arraché par une commission parlementaire (...) (à mon attention, post 43)

Réponse:

"(...) La création du juge des libertés et de la détention a constitué un mauvais pas dans la bonne direction. Le législateur avait bien conscience qu'il fallait rompre le monopole de l'instruction et introduire plus de garanties. Mais au lieu de hâter le regard public et désinfectant de l'audience, il a fragmenté et dupliqué le pouvoir du juge d'instruction. La garantie s'est dissoute dans une division du travail déresponsabilisante. Tout a été dit sur ce débat " tronqué ", " artificiel ", " en trompe-l'oeil "qui se déroule devant le juge des libertés et de la détention et qui se solde dans 90% des cas par une confirmation. Comment croire qu'un seul juge après le travail préalable de ses collègues va tout remettre en cause à lui tout seul, dans l'urgence, et la discontinuité, sans l'aide d'un débat public et avec une défense intermittente ? "

Extrait de " Les nouvelles sorcières de Salem: leçons d'Outreau " - A. Garapon, D. Salas (octobre 2006)

NB: A. Garapon et D. Salas sont tous les deux magistrats.

@ Anatole Turnaround

Je l'ai dit dans le blog de Philippe Bilger. Les non juristes qui se sont sérieusement intéressés à Outreau ont compris depuis longtemps que ce qui était en cause dans cette affaire allait très au-delà de la désignation de deux magistrats.

131. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:52 par Simplet

@ anatole turnaround: "Les JLD (qui décident seuls) et les magistrats de la chambre de l’instruction (qui décident à trois), s’ils ont fait leur travail, ont intégralement lu le dossier d’Outreau à chaque fois qu’il leur a été soumis, et se sont demandés, soit en leur for intérieur, soit lors d’une discussion à trois, si la détention était justifiée au regard du dossier et des arguments du détenu."

Ne croyez vous pas que justement le problème, c'est que le simple soupçon de pédophilie ait suffi pour évacuer complètement de l'esprit des juges le contenu du dossier, ainsi que les arguments des détenus?

132. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:55 par henriparisien

La justice c’est une organisation et des hommes. Tout comme, puisque le parallèle est fait avec l’affaire Kerviel, une salle de marché, ou une compagnie aérienne.

Quand il y a une défaillance, la cause est à rechercher sur l’organisation ou sur les hommes. Il existe un critère simple qui permet de discriminer : les défaillances sont-elles régulières ou pas ?

Je n’ai pas l’impression – peut-être à tord – qu’il y a un outreau tous les mois, ou même tous les ans. Il me semble donc que les causes du problème sont plus à chercher du coté des hommes.

Quand Anatole écrit « Je ne connais pas le chiffre précis, mais il semble que des dizaines de magistrats aient statué sur la détention des mis en examen d’Outreau. Aucun n’a vu de problème dans le dossier ? Alors quoi ? Tous des fainéants ? Tous des incompétents ? Tous des gens débordés ... » on peut peut-être mettre en cause le dossier. Et ce dossier, il y avait quand deux personnes qui en avait la charge.

Tous les juges sont confrontés à une charge de travail importante, à une pression psychologique forte, à de mauvaises conditions de travail. Tous ne se plantent pas.

Dadouche :
Tous, s'ils exercent leur fonction dans toute sa plénitude, se plantent un jour ou l'autre. Même les plus compétents ou consciencieux. Prendre une décision, dans beaucoup de matières, c'est souvent prendre un risque. Par exemple, le seul moyen de ne pas se planter pour un juge d'application des peines, c'est de refuser tous aménagements, permission de sortir, réductions de peine et autres. On ne prend ainsi aucun risque, mais remplit-on son office ?

133. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:59 par Petruk

@ Anatole T (122)

J'ai lu votre post avec intérêt. Je reconnais qu'il y a un manque de moyens évident. On parle parfois de la situation de l'Allemagne où les juges sont beaucoup plus nombreux en proportion mais comme il faudrait se donner les moyens si on voulait s'en inspirer...

Mais nous évoquons ici plus spécifiquement le cas du procureur Lesigne. Il me semble qu'il y a une certaine incohérence à affirmer tout d'abord que ni le procureur ni le juge d'instruction ne décide de la mise en détention pour poursuivre ensuite en admettant que les JLD ont trop peu de temps à consacrer à leur fonction et qu'ils laissent précisément le procureur et le juge d'instruction décider à leur place.

134. Le jeudi 31 juillet 2008 à 11:59 par GRANTUMU

@AnatoleT 122
Très très bien dit.

135. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:11 par JLouis

Bravo Anatole pour cet éclairage honnête et franc.

Par contre, pourquoi il ne serait "pas possible d’accuser les véritables décideurs de la détention des accusés d’Outreau. Trop nombreux. Trop voyant." ?

Sommes-nous trop idiots pour accepter que le système juduciaire doit être modifié et que les fautifs peuvent être nombreux dans une même affaire ?

Dans une affaire de délit d'initiés récente, c'est l'ensemble du staff d'une entreprise européenne qui est impliqué et tout le monde comprend, il me semble, que tous doivent être sanctionnés même si la dite entreprise en subit des conséquences importantes.

Le nombre de magistrats dont la responsabilité devrait être engagée et la ou les fautes sanctionnées, reste petit par rapport à la masse des personnels du corps et l'institution ne pourrait que ressortie 'grandie' de son honnêteté et de sa transparence.

Le citoyen lambda a tendance à estimer qu'il existe des justices à plusieurs vitesses et des justiciables plus ou moins facilement appréhendables. Il me semble illogique que la magistrature elle-même ne soit pas exemplaire bien qu'humaine et que l'incompréhension collective lui serve d'alibi !


136. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:13 par Anatole T.

@ simplet 127.

Le soupçon de pédophilie ne devrait guère impressionner un magistrat pénalite moyennement expérimenté, pour qui le récit de viols d'enfants commis de façon variée et répétée et par des personnes différentes fait hélas partie du quotidien. De toute façon, le travail d'un magistat est précisément de savoir se garder des syndromes Dutrou ou autre fantasme de réseau pédophile, pour s'en tenir à un dossier, qu'il doit lire et auquel il doit réfléchir calmement, hors de toute urgence. Le travail d'un magistrat est, aussi, à mon avis d'envisager systématiquement la thèse inverse de celle qu'on lui propose. Qu'on lui demande de mettre untel en prison et il doit aussitôt imaginer la faisabilité du projet inverse.

@ Henriparisien 128.

Je suis d'accord: Récompensons ceux qui ne se plantent pas, sanctionnant ceux-qui se plantent.

Mais ajoute: Ne gardons pas des conditions de travail qui favorisent autant le plantage.

Les hommes + le l'orgainisation. Les deux. OK?

137. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:30 par Fantômette

@ Tschok

Oui, cela m'a également frappé à la lecture de la décision.

Je vous réponds plus longuement plus tard.

Pour ceux que le com 19 de Tschok aurait laissé sur leur faim, la discussion que nous avions eu à ce sujet se trouve sous le billet suivant (plutôt vers la fin des commentaires) :

www.maitre-eolas.fr/2007/...

138. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:31 par Véronique

@ Anatole

" Le soupçon de pédophilie ne devrait guère impressionner un magistrat pénalite moyennement expérimenté, pour qui le récit de viols d'enfants commis de façon variée et répétée et par des personnes différentes fait hélas partie du quotidien. " (à Simplet)

Oui.

Sauf si le dogme de la parole des enfants est alors la croisade d'associations très actives au niveau judiciaire, politique et médiatique. J'ai lu, mais je ne sais plus où, qu'avant le procès d'assises d'Outreau, D. Perben envisageait une loi qui avait pour objet de valider la parole de l'enfant. Sans compter la position publique et très médiatisée de S. Royal à ce sujet-là.

Il peut aussi y avoir chez des magistrats un défaut de séparation intellectuelle avec les dogmes dominants qui ne sont plus alors contestés dans le débat intellectuels ou judiciaires, et à plus forte raison dans les relais médiatiques.

139. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:37 par Mami

M. Bilger a écrit sur son blog
"on s'était bien gardé d'embarquer dans le vaisseau disciplinaire tous ceux qui auraient du s'y trouver".

- Pourquoi n'y a-t-il pas eu un mouvement d'ensemble pour protester ?
- Après Outreau les Français ont-ils plus confiance ou moins confiance en leur Justice ?

Pouvez vous répondre ?


Dadouche :
Non

140. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:41 par Abadir

@Dadouche ! J'attends plutôt un (déjà pas mal ou suffisant?) recueil relié plein cuir HERMES avec, en titre, "D.. Sa vie. Son Oeuvre".

Non, non, j'parle pas de DRACULA ....

Et pour reprendre, en l'adaptant, cette déclaration du poète : alors là ! Elle m'épate, elle m'épate !

141. Le jeudi 31 juillet 2008 à 12:43 par tschok

@ Dadouche,

Oups! Excusez-moi, j'ai confondu: vous n'êtes pas du parquet. Je m'y perds un peu avec tous ces pseudos (rigolos d'ailleurs).

Pour ce qui est de la légère déprime que vous évoquez: on ne peut pas empêcher les imbéciles de raconter n'importe quoi sur les juges, alors que ceux qui en pensent du bien n'en diront rien, tant ils trouvent que c'est naturel de le penser.

Il y a toujours une sorte d'effet de loupe qui est donné à la bêtise, ce qui ne veut pas dire que l'intelligence et la sensibilité sont rares.

Vous abordez ensuite un sujet qui mérite réflexion en affirmant que la jurisprudence est une réponse à une évolution de la société, dont elle est une conséquence, et qu'elle n'a pas pour but de provoquer une évolution ou de modeler la société.

Ca, c'est un vrai sujet.

Vous êtes partisan d'une justice modeste, loin du "gouvernement des juges". Un service public, comme EDF avant sa privatisation.

Une justice aux petits pieds, quoi.

Je serais incapable de vous dire si vous avez tort ou raison.

Je remarque simplement que nous vivons dans une société qui atomise les pouvoirs, les disperse, comme s'il était dangereux de concentrer le pouvoir pour le rendre capable d'agir.

De fait, dans l'affaire d'Outreau, nous en sommes bien en peine de désigner LE ou LES responsables de façon objective (je ne vous parle pas de cette parodie qui consiste à offrir au public deux coupables désignés, sans êtes foutu de les punir, par dessus le marché).

Anatole Turnaround avec justesse, il me semble, relève que c'est à la fois un système et des hommes qui ont failli, ce qui ajoute à la complexité.

C'est dire aussi que cette atomisation des pouvoirs ne préserve même pas d'un dysfonctionnement grave.

Alors peut être est il temps de prendre le commandement?

Je vous signale que l'exécutif le fait, lui. Il se remanie autour de la figure du président, pour se reconcentrer sous la forme d'un "régime présidentiel à la française".

Ce type de régime suppose un parlement fort. Précisément, les prérogatives du parlement sont en voie de renforcement.

Mais ce type de régime suppose également un judiciaire fort.

Alors, je vous dirais que ce n'est pas le moment d'être modeste.


Dadouche :
Pour moi, un judiciaire fort, ce n'est pas un judiciaire qui exercerait sa puissance sur la société. C'est un judiciaire suffisamment protégé des pressions des autres pouvoirs pour être impartial, suffisamment respecté pour que ses décisions le soient et remplissent donc leur office régulateur des conflits. L'idée qu'il est impunément possible de ne pas respecter une décision de justice suffit à lui faire perdre son utilité.
La récente réforme de la composition du CSM, en donnant au politique (exécutif et législatif mêlés) la haute main sur les nominations de magistrats, rend de ce fait notre régime bancal, en affaiblissant (un peu plus) le judiciaire.

142. Le jeudi 31 juillet 2008 à 13:02 par tschok

@ Anatole Turnaround,

Si vous êtes Anatole T: oui, je sais pour "autant pour moi" :)).

Merci quand même pour le lien.

Sur les moyens: désolé, il y a une mauvaise nouvelle. Le déficit budgétaire.

En période de faible croissance, ce qui est notre cas, il condamne un Etat qui veut éviter une hausse des prélèvements obligatoires, déjà élevés, à une meilleure productivité de ses services, afin de reconstituer une capacité d'investissement.

Et, dans notre cas, tous simplement reconstituer une capacité de remboursement du capital de la dette (aujourd'hui on ne rembourse que de l'intérêt et on emprunte pour cela).

Pour l'instant, il n'est donc question que de faire un effort de productivité (mieux pour moins cher).

L'investissement viendra plus tard. Toujours plus tard (les lendemains qui chantent).

Faut il avoir une mentalité de "génération sacrifiée"?

Optimiste de nature, je dirais plutôt que c'est le moment rêvé pour avoir une mentalité de pionnier, parce que la recherche de la productivité oblige à un effort d'efficacité, donc d'inventivité.

Et c'est une certaine forme d'aventure qui a ses aspects positifs.

143. Le jeudi 31 juillet 2008 à 13:13 par tschok

Bonjour Fantômette,

Prenez votre temps.

L'avis du CSM mérite d'être décortiqué.

A ma connaissance, c'est l'un des rares documents qui entre assez profondément dans la matière de façon synthétique en pointant la faiblesse majeure du contrôle séquentiel en matière de justice.

C'est un document élaboré par des personnes venant d'horizons diverses en relativement peu de temps, sur un sujet actuel.

A enregistrer, donc.

D'ailleurs, c'est fait: il est sur le disque dur.

144. Le jeudi 31 juillet 2008 à 13:38 par tschok

@ Lulu (com 105)

J'aime bien votre humour! Voir un juge d'instruction faire du chahut (vous êtes bien juge d'instruction, vous, hein? Ou je me goure encore?) est un spectacle qui vaut son pesant de cacahouètes.

145. Le jeudi 31 juillet 2008 à 13:52 par Mami

J'attire votre attention sur une proposition du Cosal

"Chaque avocat devra pouvoir saisir le Conseil Supérieur de la Magistrature en cas de dysfonctionnement grave de l'institution judiciaire constaté dans le cadre de son activité professionnelle. "
www.cosal.net/index.php?p...

Le respect de la procédure et les recours n'empêcheraient donc pas les graves dysfonctionnements ?



146. Le jeudi 31 juillet 2008 à 14:13 par tschok

@ Augustissime,

Là où ça colle: on est tous d'accord pour dire que le chef est sur un siège éjectable et doit l'être. C'est sa juste place.

Reste le golden parachute. On peut en discuter, mais c'est un autre sujet.

Là où ça ne colle pas: en matière de justice, il n'y a justement pas de siège éjectable.

Le système ne marche pas comme ça. Il marche autrement.

On est tous désolés d'avoir à vous le dire, et à vous le répéter, mais la justice n'est pas une entreprise. C'est une aventure. Ca y ressemble, mais c'est très différent.

Il faut trouver un autre "truc" que le siège éjectable pour que le chef (c'est à dire le juge) soit responsable.

C'est très compliqué, mais si vous avez des idées, je suis preneur.

Mais pas des idées à la con.

J'en ai déjà plein par moi-même.

147. Le jeudi 31 juillet 2008 à 15:18 par ramses

@ tschok 141

"On est tous désolés d'avoir à vous le dire, et à vous le répéter, mais la justice n'est pas une entreprise. C'est une aventure. Ca y ressemble, mais c'est très différent."

Une aventure ? C'est très inquiétant pour les justiciables !

Les justiciables avaient compris depuis fort longtemps que leur sort se jouait souvent à la roulette russe.

Toutefois, après le désastre judiciaire d'Outreau, lorsque fut créée la "Commission d'enquête", ils pensèrent naïvement que les magistrats fautifs seraient châtiés (une fois n'est pas coutume !)

Résultat : le Juge Burgaud n'est pas sanctionné et le Procureur Lesigne précise que sa mutation est faite à sa demande !

Aucun autre magistrat n'est mis en cause (notamment le JLD, qui a autorisé les incarcérations).

Cette "Commission d'enquête" aurait eu une utilité si elle avait eu le pouvoir de sanctionner. Elle n'a été que de la poudre aux yeux, coûteuse de surcroît.

Le peuple d'actionnaires, qui paie sa Justice avec ses impôts, devra se contenter d'approuver son Conseil d'Administration, qui n'a de comptes à rendre à personne...

Effectivement, on est loin du monde des Entreprises :)




148. Le jeudi 31 juillet 2008 à 15:25 par Petruk

@Tschok (146)
Pourquoi ne pas prévoir une assurance professionnelle?
En fait je me souviens d’un débat récent autour du concept de responsabilité sans faute.

A la lecture des commentaires sur les fautes amnistiés de M. Lesigne je me suis demandé si M. Lavier ne pourrait pas poursuivre civilement M. Lesigne au sujet de son fils déjà victime mais pas encore né au moment des faits.

Je subodore que cela doit être impossible mais quelqu’un ici pourrait il expliquer pourquoi ? Et si l’action peut se reporter sur l’Etat français ?

149. Le jeudi 31 juillet 2008 à 15:26 par Mami

J'attire votre attention sur une proposition du CNB

Contribution de la Profession d'Avocat aux travaux de la Commission DARROIS :
Lettre No 57 - juillet 2008
www.cnb.avocat.fr/lettre_...

"b) La régulation de la profession
Il est nécessaire de renforcer le traitement des réclamations des plaignants et le suivi des poursuites disciplinaires devant les conseils régionaux de discipline.

Plusieurs pistes de réflexion ont été ouvertes pour répondre à cette problématique :

La mise en œuvre d’une procédure préalable de conciliation ou d’une procédure permettant la saisine de l’autorité de poursuite en cas d’inaction du bâtonnier.
L’intervention du plaignant dans le procès disciplinaire. "

Est-ce à dire que
- si un avocat plante son client et que le bâtonnier botte en touche, le justiciable est fichu ?
- si ce cas se cumule avec celui d'un grave dysfonctionnement de l'institution judiciaire, cas soulevé par le Cosal (message Mami 145) le justiciable est fichu de chez fichu et qu'il ne trouvera plus personne pour défendre valablement ses droits ?



150. Le jeudi 31 juillet 2008 à 15:47 par GRANTUMU

@Ramses
On s'éloigne des oignons de Dadouche.
Vous vous méprenez sur la commission parlementaire Outreau: les travaux étaient passionnants, et l'entreprise très nouvelle. Cette commission n'a jamais été juridictionnelle et n'avait donc pas à sanctionner ou proposer de sanction.
Je peux vous dire que pour une foule de modestes basochards un tantinet calimérisés (de Caliméro; n'interrogez pas le site Total-Fina) comme moi, ce fût une bouffée d'oxygène; et pour nombre de mékeskidis de ma connaissance, une immersion passionnante dans le fonctionnement (un peu dysfonctionnant en l'espèce) du monde judiciaire pénal.


Dadouche :
Pour revenir à mes oignons, je pense que la commission parlementaire a été une grande occasion manquée et un traumatisme durable pour la justice pénale, réduite à une affaire, parasitée par les enjeux émotionnels, les auditions spectaculaires et le désir de certains d'en faire une tribune pour servir leurs propres intérêts.
J'aurais tellement aimé une commission sur la détention provisoire, ou sur le traitement judiciaire des affaires de moeurs, qui sont les vrais et seuls problèmes soulevés par Outreau. Au lieu de cela, on a eu la curée, des échanges surréalistes sur les modes de confrontation, une fascination pour la douleur des acquittés, qui a disqualifié d'emblée le propos de tous ceux qui avaient "trempé" dans l'affaire, tout cela sans que certaines choses puissent être dites sous peine de violation du secret de l'instruction ou des délibérés.
L'Assemblé Nationale, si elle a assurément trouvé là un moyen efficace de redorer son propre blason à peu de frais, a perdu une occasion en or d'agir sur le fond. Et contribué un peu plus à l'affaiblissement du judiciaire.

151. Le jeudi 31 juillet 2008 à 16:21 par Tschok

@ Ramses,

Vous avez oublié le rouleau compresseur.

La justice c'est de la roulette russe, plus le rouleau compresseur.

Effectivement, on savait que c'était de la roulette russe.

Avec Outreau, on vient de comprendre, pour le rouleau compresseur.

Faut pas circuler dans l'aire de manœuvre (c'est marqué dessus en plus).

Quand je pense que les gens veulent que la justice soit proche d'eux... Mais ils sont fous à lier!

:)

152. Le jeudi 31 juillet 2008 à 18:24 par Billy Budd

Sans moi-même vouloir revenir dans le débat etc ... Je doute que, dans cette affaire, ô combien médiatisé dès l'origine, la Chancellerie n'ait point donné d'instructions audit Procureur

153. Le jeudi 31 juillet 2008 à 19:48 par arg

dadouche a dit : Et comment les médecins peuvent-ils accepter d'enchaîner les gardes ? Et les chauffeurs poids-lourds de ne pas s'arrêter pour les temps de repos réglementaires ?

voici un bon exemple de votre meconnaissance et constitue meme un aveu ( hummm , on aime bien les aveux je crois en justice ....) sur le fait que vous ne savez pas comment fonctionne le monde reel :

1)un medecin est obligé de prendre un repos apres sa garde , d'ailleurs , à l'instar des USA , lorsqu'il y a un grave probleme dans le cadre de son travail , la premiere chose que regardent les assureurs , c'est si celui ci était de garde la veille. si c'est le cas , il en prend plein la poire et ne sera pas couvert . ensuite , si il se plante , il sera sanctionné ( penal , civil )

Dadouche :
Il faut suivre, la discussion portait sur l'acceptation de pratiquer certains métiers dans des conditions inadéquates (voire inacceptables dans leur principe), mises en balance avec les autres impératifs de ces métiers.


2) vous evoquez souvent la charge de travail : lorsqu'un medecin est condamné parce que , aux urgences par exemple , il aurait fallu etre trois et qu'il est seul et que deux problemes surgissent en meme temps , les juges s'assoient royalement sur le fait que la charge de travail était surhumaine...et le sanctionne .

Dadouche :
Curieux, les investigations quand ces dossiers viennent au pénal portent justement souvent notamment sur le personnel, le nombre de patients, l'organisation du service, le contexte quoi.


3 ) le routier , dans son gros camion , il a un mouchard ( appareil enregistreur ) qui retranscrit tout : le temps de conduite , la pause pipi , le temps de repos . les gendarmes peuvent meme le sanctionner si ils decouvrent qu'il y a 3 jours , il a dépassé la vitesse autorisé .......donc la loi est respécté , en general , puisque tous leurs faits et gestes sont notés......

Dadouche :
Ah mais, maintenant que vous me le dites, tous ces cercles cartonnés marqués de diagrammes cabalistiques que j'ai vus dans les procédures où j'ai condamné des chauffeurs pour non respect des temps de repos parce qu'ils tablaient sur le fait qu'ils ne seraient pas contrôlés, c'était des mouchards ???


donc voila deux professions qui ne sont pas de bons exemples pour votre remarque et qui elles , sont respnsables de leurs erreurs , contrairement aux magistrats......

on va voir combien de temps ce post reste en place mais vu qu'on n'aime pas la contradiction.....


Dadouche :
On aime les arguments (l'orthographe et l'accentuation aussi, accessoirement).

154. Le jeudi 31 juillet 2008 à 20:27 par Doc

à propos du post d'arg , avant qu'il ne disparaisse: oui, tout ceci est vrai . D'ailleurs il y a quelques années , effectivement , les médecins enchaînaient les gardes, et puis : les règles ont changées. Elles ne sont pas absolument toujours respectées, parce que qu'est-ce qu'on fait quand des postes sont vacants ,ou ne sont pas créés , alors que les malades arrivent? On fait face. Mais à un moment, quand on se rend compte de ce qui se passe en cas de pépin, on arrête. Ca, plus d'autres facteurs: numerus clausus, des médecins qui ont envie d'avoir une vie plus "ordinaire" (c'est à dire en ne travaillant pas 72h toutes les semaines) : vous savez pourquoi vous aurez de plus en plus de mal à vous faire soigner dans les années à venir.

155. Le jeudi 31 juillet 2008 à 22:43 par Lulu

Et bien, depuis que Augustissime et Arg ne fréquentent plus ce blog (même si Arg ne boude pas totalement...), les échanges se sont apaisés, et n’en sont pas moins passionnants!

J’en profite pour soumettre à la sagacité des blogueurs mes réflexions sur ce que je crois être deux idées reçues:

1) “Comment croire qu'un seul juge après le travail préalable de ses collègues va tout remettre en cause à lui tout seul, dans l'urgence, et la discontinuité, sans l'aide d'un débat public et avec une défense intermittente ?”

Idée reçue n̊1: les JLD sont de simples chambres d’enregistrement, qui se contentent d’accueillir favorablement les demandes d’un parquet et d’un juge d’instruction qui ne songent qu’à embastiller le pauvre justiciable.

Certes, dans la plupart des cas, les JLD prononcent le mandat de dépôt qui leur est demandé.

Mais il n’est venu à l’esprit de personne que si la majorité des débats JLD donne lieu à un placement en détention provisoire, c’est parce que les demandes du parquet (puis du juge d’instruction) en la matière sont justifiées?

Je parle ici de mon expérience personnelle. Je suis en poste depuis peu de temps certes, et j’ai pris mes fonctions après le début de l’affaire dite d’Outreau, de sorte que je ne suis pas nécessairement capable d’indiquer si les pratiques étaient différentes il y a quelques années.

Mais les demandes de mon parquet en matière de mandat de dépôt m’apparaissent raisonnables; dans les clous des critères légaux, bien évidemment et quand la détention provisoire apparaît réellement nécessaire (je n’ai pas de statistiques en tête mais s’agissant des défèrements, je crois recevoir plus de réquisitions de contrôle judiciaire que de saisines du JLD).

Et puisque ces réquisitions de mandat de dépôt m’apparaissent dans la très grande majorité des cas raisonnables et justifiées, je fais le plus souvent suite à ces réquisitions, en saisissant le JLD.

Qui lui-même, estime souvent justifié le prononcé d’un mandat de dépôt.

On parle souvent de collusion entre parquet, juge d’instruction et JLD pour expliquer la raison pour laquelle les JLD suivent, dans la plupart des cas, les réquisitions du parquet.

Pour ma part, je conteste complètement ce terme de collusion. Des magistrats, à des étapes différentes de la chaîne pénale, estiment en leur âme et conscience que les critères de la détention provisoire sont réunis. Ni plus, ni moins.

A vrai dire, je serais assez inquiète si j’étais systématiquement en désaccord avec le parquet sur ce qui justifie, ou ne justifie pas une détention provisoire.

De même, je me poserais beaucoup de question si mon (ou plutôt mes JLD) mettaient systématiquement sous CJ les mis en examen pour lesquels j’ai demandé une détention provisoire.

Cela voudrait dire qu’il y aurait des divergences d’appréciation importantes et fréquentes sur la nécessité ou l’inutilité d’une détention provisoire. Des désaccords importants et fréquents quant à l’interprétation des critères légaux de la détention provisoire.

Et je ne crois pas que ces divergences seraient très bon signe pour le justiciable!

C’est la raison pour laquelle à mon sens, des audiences JLD collégiales ne changeraient pas grand-chose aux statistiques de la détention provisoire. Certes, une collégialité est préférable à un juge unique, surtout sur des questions aussi sensibles que celle de la détention provisoire.

Mais je suis bien persuadée que ces collégialité JLD suivraient également, dans la majorité des cas, les réquisitions du parquet. Parce que, comme je l’ai déjà écrit, lorsque le parquet demande une détention provisoire, c’est très généralement justifié.

Et oui, il arrive quelquefois que le JLD ne donne pas suite aux réquisitions du parquet et place sous CJ. Tant mieux, cela prouve qu’il joue son rôle dans les cas où la question de l’absolue nécessité de la détention provisoire se pose avec d’avantage d’acuité.

Sur ce, je voudrais rendre hommage à mes JLD (car dans mon tribunal ils “tournent”) qui n’ont pas choisi cette fonction, qui ont plein d’autres choses à faire et qui après une journée chargée en audiences, trouve encore de l’énergie pour se plonger dans un dossier d’instruction volumineux et pour mener un débat JLD approfondi. Non franchement, les JLD que je connais sont tous sauf des chambres d’enregistrement.

Chers amis, retenez-ceci: le plus grand scandale d’Outreau, c’est la longueur des détentions provisoires. Dieu sait si c’est un problème récurrent; mais je ne trouve pas acceptable qu’un type, présumé innocent, et ce même s’il a reconnu les faits et anticipe une lourde peine, attende deux ans, trois ans, pour être jugé aux Assises. Entre mon ordonnance de mise en accusation et l’audience aux Assises, il se passe au mieux dix mois voire un an. Est-ce acceptable? Non, bien sûr. Cabinets d’instruction surchargés, experts surchargés, parquetiers surchargés et Cours d’Assises qui croulent sous les dossiers.

2) “Ne croyez vous pas que justement le problème, c'est que le simple soupçon de pédophilie ait suffi pour évacuer complètement de l'esprit des juges le contenu du dossier, ainsi que les arguments des détenus?”

Idée reçue n̊2: Il n’y avait rien, dans le dossier d’instruction suivi par M. BURGAUD, strictement rien, sinon les fantasmes de réseaux pédophiles, bon sang ça crevait les yeux.

Ça crevait tellement les yeux que dans les premiers jours de l’audience à SAINT-OMER, certains avocats de la défense sollicitaient les journalistes afin qu’ils ne publient pas leurs noms dans leurs canards. Car ces auxiliaires de justice ne voulaient pas que l’on sache qu’ils défendaient ceux que tout le monde considérait alors comme des “monstres” (et tous les autres termes charmants parus dans la presse de l’époque). Mauvaise publicité.

L’audience a “explosé” au moment des révélations de Mme BADAOUI.

Certes, il y aurait certainement beaucoup à dire, et à discuter, sur le déroulement de l’instruction, le recueil de la parole de l’enfant, le poids des expertises psychologiques et psychiatriques, etc...

Mais il me semble parfois que ce que l’on reproche à M. BURGAUD, M. LESIGNE et d’autres collègues, c’est de ne pas avoir deviné ce qui allait se passer à l’audience. En bref, de ne pas avoir eu la science infuse.

On leur reproche d’avoir pris des décisions, reproches fondés sur des éléments que ces magistrats ne connaissaient pas au moment où ils ont pris leurs décisions (le fait que Mme BADAOUI mentait notamment).

Au fond, je ne suis pas certaine que le grand public comprenne bien le rôle du juge d’instruction.

Il est vrai que le Code de procédure pénale est complexe et que les séries télévisées, dans lesquelles le greffier d’instruction arrose les plantes vertes et nourrit le poisson rouge, ne facilitent pas forcément la compréhension de ses missions.

Le juge d’instruction n’a pas pour mission de dire qui est coupable ou qui est innocent. Il n’est pas Madame SOLEIL.

Le juge d’instruction enquête. Pour simplifier à l’extrême, il prépare un dossier pour l’audience. Il entend les parties, les témoins. Il fait effectuer des investigations par des enquêteurs. Il diligente des expertises (dont les conclusions sont toujours notifiées aux parties qui peuvent demander compléments et contre-expertises).

Au terme de cette enquête, il peut estimer que les éléments ne sont même pas suffisants pour justifier un débat devant la juridiction de jugement. C’est un non-lieu.

Il peut aussi estimer que les charges sont suffisantes pour justifier l’examen de l’affaire par une juridiction de jugement. Cela veut dire qu’il estime nécessaire un débat public, contradictoire sur l’affaire. Débat qui parfois révèle des éléments nouveaux, inconnus du juge d’instruction, surtout aux Assises, tant une audience d’assises est tout sauf un long fleuve tranquille.

A Saint-Omer, et comme chacun sait, beaucoup d’éléments nouveaux ont surgi à l’audience. Justifiant les acquittements que tout le monde connaît.

Voilà j’espère ne point trop vous avoir ennuyé. Augustissime, je sais que vous vous étranglez à la lecture de mon post mais restez poli, car Troll Détector veille.

156. Le jeudi 31 juillet 2008 à 22:45 par arg

Dadouche :
Il faut suivre, la discussion portait sur l'acceptation de pratiquer certains métiers dans des conditions inadéquates (voire inacceptables dans leur principe), mises en balance avec les autres impératifs de ces métiers.

Dadouche :
Curieux, les investigations quand ces dossiers viennent au pénal portent justement souvent notamment sur le personnel, le nombre de patients, l'organisation du service, le contexte quoi.

en effet, ce que vous refusez à certaines professions ( la surcharge de travail ) , en ce qui vous concerne , devient un justificatif du travail baclé ( on a beaucoup de dossiers , pas de greffiere , pas de moyens , pas de scotch....alors on fait de l'abattage : c'est vous qui l'avez ecrit.)


Dadouche :
Ah mais, maintenant que vous me le dites, tous ces cercles cartonnés marqués de diagrammes cabalistiques que j'ai vus dans les procédures où j'ai condamné des chauffeurs pour non respect des temps de repos parce qu'ils tablaient sur le fait qu'ils ne seraient pas contrôlés, c'était des mouchards ???

et oui , encore une profession qui , elle est responsable de ses actes et decisions( et pour en revenir à ce billet : un procureur non sanctionné, lui ).


Dadouche :
On aime les arguments (l'orthographe et l'accentuation aussi, accessoirement).

j'ai surement moins de temps que vous pour soigner ma syntaxe ( vu que vous avez éffacé mon post ou je répondais à CHC en lui disant que je fais 74 h de travail cette semaine ( 78 en fait mais je ne suis plus à 4 h pres ....)

mais continuez votre post , c'est vraiment tres interessant d'entendre un autre sn de cloche que dans les medias et à la fois inquietant de constater que vous ne compreniez pas pourquoi les français sont abasourdis d'apprendre que le procureur n'est pas sanctionné. la suite en septembre

157. Le jeudi 31 juillet 2008 à 22:47 par Le Chevalier Bayard

@ 150 GRANTUMU

A propos de la commisssion parlementaire et au delà de sa théatralisation outrancière ou l'on a vu un "petit juge" engoncé dans ses "pseudo-certitudes" (véritable bouc émissaire dans cette pitoyable affaire), il est vrai qu'à certains moments elle ne manquait pas de sel !
.
Et je ne n'ai pas regretté de l'avoir visionné en boucle sur la chaîne parlementaire à l'époque !

Deux avocats ont retenu particulièrement mon attention.

L'avocate de Madame Badaoui Maître Pascale Pouille-Deldicque (quelle élégance!) et surtout quel talent dans la défense des intérêts de sa cliente ("la menteuse") !

Elle a bien fait de moucher l'arrogance crétine du sieur Georges Fenech magistrat et député qui traîne de notoriété publique "quelques casseroles"..après lui avoir rappelé, non sans pointe d'ironie, les fondamentaux déontologiques de sa noble profession.

Enfin, le deuxième un bon dans sa spécialité ! Maître Dupond-Moretti digne d'un Floriot !

158. Le jeudi 31 juillet 2008 à 23:47 par Lucas Clermont

@ Dadouche

Merci pour votre longue réponse argumentée. Elle pose, entre autres, le problème de la soumission des magistrats à leur emploi du temps épuisant, et j'observe à ce sujet que le CSM pointe que M. Lesigne a décliné l'appui d'un deuxième magistrat pour conduire l'accusation. Peut-être un symptôme. Il reste toutefois qu'il n'est pas acceptable qu'on jette des magistrats en pâture à l'opinion publique — même lorsqu'ils ont pu faillir — parce que c'est tout le système judiciaire, et le respect nécessaire à la fonction de magistrat qui sont ébranlés.

159. Le vendredi 1 août 2008 à 00:07 par Clems

Et moi je vais bouder. Je ne saurai pas si mon analyse consensuelle lui convient.

160. Le vendredi 1 août 2008 à 00:15 par Simplet

@ Lucas Clermont 58:
"Il reste toutefois qu'il n'est pas acceptable qu'on jette des magistrats en pâture à l'opinion publique — même lorsqu'ils ont pu faillir — parce que c'est tout le système judiciaire, et le respect nécessaire à la fonction de magistrat qui sont ébranlés."

Oui et alors? D'autres professions sont salies de la même manière quand un de leurs membres qui a failli est jeté en pâture à l'opinion publique, et on n'en fait pas une affaire.

Et puis rassurez vous: Dans la vraie vie bon nombre de justiciables ne se conforment pas aux décisions du juge par respect pour sa profession ou sa personne, mais plus simplement par ce qu'il a le pouvoir de faire intervenir les forces de l'ordre, ou d'ordonner une saisie.
S'il n'y avait pas le petit personnel, la décision du juge, le respect, tout ça tout ça... bof bof...

161. Le vendredi 1 août 2008 à 00:46 par ramses

@ Lucas Clermont 58

"Il reste toutefois qu'il n'est pas acceptable qu'on jette des magistrats en pâture à l'opinion publique — même lorsqu'ils ont pu faillir — parce que c'est tout le système judiciaire, et le respect nécessaire à la fonction de magistrat qui sont ébranlés."

Redescendez sur terre, je vous prie :)

Il n'y a plus qu'un personnage intouchable en France, c'est le Président de la République, et encore, pendant la durée de son mandat.

Le temps où un Magistrat n'aura pas de comptes à rendre de ses errements est révolu, même si le CSM a cru pouvoir mener un barroud d'honneur dans l'affaire d'Outreau, qui ne le grandit pas.

162. Le vendredi 1 août 2008 à 07:16 par Véronique

@ Lulu

Honnêtement, je pense que l'analyse d'A. Garapon et de D. Salas au sujet de l'inefficience des JDL dans l'instruction d'Outreau est à prendre en considération, et ne relève pas d’une idée reçue. Surtout si nous raisonnons leur phrase dans le contexte de cette affaire.

Il ne s'agit pas de dire que le juge d'instruction - au passage, je rappelle que deux juges d'instruction ont été chargés du dossier d'Outreau, le second remplaçant le premier -, le procureur de Boulogne et le(s) JDL devaient avoir la science infuse.

A lire le livre d'A. Garapon et de D. Salas, il apparaît clairement que la création alors récente du JDL n'a pas eu l'effet escompté, comme possibilité de contre-pouvoir dans cette affaire.

Quant à la chambre d'instruction.

Après tout, nous pouvons envisager que cette instance répond aux critères d'une audience. Nous pouvons poser que les magistrats de cette chambre ne sont pas dans l'urgence, la désorganisation, et n'interviennent pas dans le chaud et les aigus du dossier.

Je ne parle même pas des échelons supérieurs qui, eux peuvent plus aisément encore se dégager d’une atmosphère passionnelle.

Mme Godard, une des personnes acquittées, lors de son audition devant la commission d'enquête:

" Devant la chambre de l'instruction, j'ai toujours eu l'impression de ne pas être écoutée. Sauf pour ma mise en liberté. Mais cette fois-là, ce n'étaient pas les mêmes magistrats. C'étaient des magistrats de remplacement, pour l'été. Ceux-là m'ont posé des questions, se sont intéressés à l'affaire. Et je suis sortie comme cela. J'ai eu de la chance, en fait. "

Ce qu’AG et DS relèvent dans leur livre, c’est le fait que la fonction contradictoire de l’audience n’a pas rempli son rôle plus tôt dans l’analyse des dossiers. Avant l’Audience " reine " du procès d’assises. Alors que, si j’ai bien saisi leur propos, ce temps d’audiences et de débats (pluriel) est prévu.

163. Le vendredi 1 août 2008 à 10:19 par Fantômette

Cher Tschok,

Un mot donc sur la décision du CSM, fichtrement intéressante, en effet.

L’avis du CSM retient trois griefs à l’encontre de M. Lesigne, tous situés dans la même partie, intitulée « les relations entretenues avec le parquet général ». C’est très intéressant, parce que cela nous situe radicalement et d’emblée dans la thématique accidentologique que vous définissiez en décembre dernier.

Il ne s’agit pas de faits personnels et isolés mais de faits s’inscrivant DANS UNE RELATION, qui plus est une relation hiérarchique. Il s’agit donc d’une faillite de la relation, d’un désordre relationnel (vous faites un peu de droit de la construction, non ?)

Les trois griefs retenus sont les suivants :

- une présentation « péremptoire, parcellaire et réitérée des faits ne rendant pas compte du contenu réel du dossier », soit un défaut de rigueur, dans les rapports administratifs,
- Idem dans les rapports d’appel,
- Enfin, une carence, non fautive, dans la production de comptes rendus administratifs, qui a cessé sur la période du 16 janvier au 10 octobre 2002.

Echelon n°1, M. Lesigne, fautif d’avoir manqué de rigueur dans la rédaction des rapports destinés à sa hiérarchie. Une faute à l’égard de sa hiérarchie, donc. Mais celle-ci n’est pas en reste.

Echelon n°2, le Procureur Général. Ici également, constat d’une défaillance, qui n’est pas qualifiée ainsi, et pourtant, tout est là, et tout est dit. Il est écrit noir sur blanc que si le principe de l’organisation hiérarchique du Ministère Public autorise l’autorité supérieure à donner des instructions, ce pouvoir s’accompagne, comme toujours, d’une obligation, dont « celle de vérifier et valider les informations reçus et transmises ».

Le CSM dit « obligation » et il aurait pu dire: « responsabilité ».

Par parenthèse, le PG lui-même transmet des rapports administratifs, dans des affaires un peu signalées, non ? A la chancellerie, non ? Ou me trompé-je ? N’était-ce pas le cas pour Outreau ? Parce que ce modèle de raisonnement vaudra pour l’échelon qui suit, je ne vois pas pour quelle raison il en irait autrement.

C’est notamment sur le fondement de cette responsabilité du PG que le troisième grief est qualifié de non fautif, alors que pour les deux premiers, il est au contraire indiqué clairement que l’absence de diligence du PG à l’égard des discordances perceptibles entre les rapports et les éléments du dossier n’exonère pas pour autant le procureur.

Donc, à mon avis, nous avons deux analyses différentes – et complémentaires - à faire de cet avis, toujours dans les termes de votre analyse accidentologique.

Premièrement, le CSM analyse clairement et synthétiquement la manière dont le contrôle séquentiel (d’une instance par une instance supérieure) n’a pas fonctionné.

Ce sont les deux premiers griefs analysés.

Pour ceux-ci, on est dans l’insécurité type entraînée par le système de contrôle séquentiel. Le procureur ne tire pas toutes les conséquences des éléments à sa disposition. Les mêmes éléments sont à la disposition du PG, mais il tend à valider le travail accompli par son subordonné sans y prêter suffisamment d’attention. Parce que sa tâche de contrôle s'est transformée peu à peu en un travail d'enregistrement.

Je m’interrogeais en décembre dernier sur les raisons qui pouvaient nuire à ce point à la sécurité d’une organisation de type séquentiel. Il faut peut-être y voir une mauvaise lecture de la notion d’autorité. Une autorité qui ne se définit que comme telle, sans se donner de pouvoir de direction comme vous dîtes (parce qu’en l’occurrence, la direction exercée par le PG, où est-elle ?), est concernée avant tout par la nécessité de se maintenir en tant que telle. Le dysfonctionnement se produit dès lors que le simple fait que ses subordonnées lui rendent compte de leur activité lui suffit. Et effectivement, dans ce seul cadre, extrêmement limité, c’est suffisant. En fait, il est impressionnant qu’un tel système produise aussi peu d’accident. C’est vraiment la valeur des personnalités composant le système qui sauve le système.

Mais ici, cela n’a manifestement pas suffi.

Persistance et renforcement de l’erreur, qui n’explose qu’en bout de circuit, devant la Cour.

Deuxièmement, le troisième grief fait ressortir une analyse d’un autre ordre des rapports procureur / PG.

Le défaut de production de rapport sur une période significative est une carence, certes, mais non fautive. Et alors que pour les deux premiers griefs, il était indiqué que la propre carence du PG n’exonérait nullement le procureur ici, c’est le contraire qui se produit.

Je crois que le CSM introduit des impératifs de contrôle parallèle dans un système de contrôle séquentiel. Regardez ce passage (p12, dernier §) « …le procureur général avait également le devoir d’assurer le suivi de la procédure et de solliciter des éléments complémentaires. »

Assurer le suivi, ce n’est pas contrôler. Solliciter des informations complémentaires, ce n’est pas sanctionner. Bref, il me semble que nous changeons de système. Le caractère non fautif de l’absence de rapports administratifs sur la période concernée me semble pouvoir être interprété comme signalant une défaillance d’un système de contrôle parallèle, et non plus séquentiel.

Dans le fond, le CSM, tout en éclairant les faiblesses inhérentes au contrôle séquentiel, n’offre t-il pas là une piste pour y remédier, en suggérant de faire d’un travail de direction un travail de coopération, plus que de vérification ? Volontairement ou non, le CSM tente de répondre à la question que nous nous posions en décembre dernier : comment faire pour injecter du contrôle parallèle dans un univers de contrôles séquentiels ?

Je trouve effectivement cet avis assez instructif car il pose une grille de lecture des responsabilités plus subtile qu’il n’y paraît.

Outreau y est analysé à l’aune de défaillances, multiples et similaires, plus globalement situées ici dans le cadre d’une défaillance générale du rapport hiérarchique Procureur/PG. En d’autres termes, on y décrit effectivement le point faible du mécanisme de contrôle séquentiel.

Outreau, c’est la faillite de la parole partagée. C’est un accident de communication. C’est quand tout le monde monologue, à tour de rôles, mais que plus personne ne dialogue.

C’est une analyse plutôt intelligente, qui pourrait être fructueuse, mais le sera t-elle ?

C'est-à-dire, la rendrons-nous (nous) fructueuse ?

164. Le vendredi 1 août 2008 à 10:31 par Fantômette

@ Dadouche

Pardon pour le commentaire précédent, trop long et probablement abscons à qui n'a pas suivi une passionnante discussion à trois (Tschok, Véronique et moi) qui date de décembre dernier, mais dont le souvenir m'est impérissable.

165. Le vendredi 1 août 2008 à 10:51 par Mami

@Fantômette
"Le PG lui-même transmet des rapports administratifs, dans des affaires un peu signalées, non ? A la chancellerie, non ? Ou me trompé-je "

J'ai demandé à Nallet de confirmer Warsmann

forums.nouvelobs.com/1182...
www.assemblee-nationale.f...

Question de : Internaute

Relativement au suivi des affaires sensibles par la Chancellerie, confirmez vous les propos de M.Warsmann ASSEMBLÉE NATIONALE - 3e SÉANCE DU 23 JUIN 1999 - page 06418 - << Il faut que vous sachiez, mes chers collègues, qu´à chaque affaire un peu sensible dans un parquet, par exemple une affaire vous mettant en cause, vous, élus, elle devient affaire signalée. Cela veut dire que les actes de procédure vont systématiquement être transmis au procureur général, puis à la Chancellerie. Cela veut dire aussi qu´à la Chancellerie il y a plusieurs fonctionnaires dont le seul travail est de recueillir tous les procès-verbaux, tous les actes de ces procédures et d´en informer le ministre. >>

Réponse : Evidemment et pour la bonne raison que le Garde des Sceaux est constitutionnellement le responsable de l´action publique et qu´il a autorité sur tous les membres du Parquet. Ces derniers signalent dons à leur hiérarchie toutes les affaires qui peuvent avoir un retentissemnt politique ou médiatique (il n´y à pas que les élus qui font l´objet d´une attention particulière!) et la chancellerie en fait le tri avant d´en informer le Garde des Sceaux qui, chaque matin, découvre sur son bureau la liste des affaires signalées...


166. Le vendredi 1 août 2008 à 11:06 par Fantômette

@ Arg

Ce qui cloche dans cette affaire - c'est le sujet de la discussion avec Tschok - c'est que l'affaire d'Outreau est le résultat d'un processus. Je sais que j'ai l'air de vouloir noyer le poisson, mais c'est faux : je tente de comprendre le problème pour empêcher qu'il ne se reproduise.

C'est le résultat d'un processus, donc. D'un enchaînement de décisions et d'actes pris sur le fondement de ces décisions. Certes, prises par des personnes, on est d'accord, je ne dis pas le contraire.

En cherchant à isoler des responsables / personnes physiques, on contente à peu de frais le désir de désigner un coupable, mais au prix de la disparition du processus au profit de ses étapes.

En d'autres termes, pour comprendre le temps, vous désossez une horloge et examinez les rouages. Vous n'arriverez à rien en procédant ainsi.

Pour comprendre un processus, il faut l'étudier dans son mouvement, il faut l'étudier, non seulement dans ses étapes, mais dans la façon dont elles s'enchaînent entre elles. Si vous l'interrompez vous modifiez l'objet de votre étude, et donc vous n'analysez plus correctement le problème.

On ne comprend pas un processus en l'interrompant.

Ici, ce sont les rapports des acteurs entre eux qui ont principalement, je crois, dysfonctionnés.

La procédure inquisitoire est un mécanisme où doivent s'articuler les fonctions et les compétences de nombreuses personnes : procureur, juge des libertés, juge d'instruction, avocats de la défense, avocats des parties civiles. Ici aussi, juge des enfants, PG, experts psychiatres, experts psychologues, police et autorités judiciaires belges...

S'articuler, et non pas se juxtaposer.

C'est la raison pour laquelle il est difficile de mettre le doigt sur une faute, au sens légal, qui serait le fait d'un intervenant ou d'un autre.

Pour reprendre la métaphore horlogière, pris un par un, les rouages étaient enssentiellement en bon état, conformes à ce qu'ils devaient être. Mais le problème s'est trouvé dans leur coordination, si vous voulez.

S'il l'on découvre que le problème est dans l'agencement des pièces entre elles, dans l'architecture globale de l'horloge, le problème est institutionnel. Il faut changer de procédure pénale. Mais je ne crois pas vraiment que c'était le cas ici.

L'agencement n'a pas de raison de ne pas fonctionner.

Le problème est plus subtil et plus fin que cela.

Je vais avoir du mal à filer la métaphore jusqu'au bout.

C'est un problème de coordination des actions entre elles. Le système permet théoriquement de détecter les erreurs, dès lors qu'il autorise l'intervenant qui la découvre à en faire part aux autres intervenants, et aux autres intervenants à l'intégrer et à en tirer les conséquences procédurales.

Ici, cela s'est effectivement produit, mais tardivement, puisqu'il a fallu attendre le procès.

Donc, deux problèmes :

- un problème non pas institutionnel mais organisationnel : l'alliance des intervenants judiciaires au stade de l'instruction n'a pas permis 1 : soit de détecter l'erreur, 2 : soit d'en tirer toutes les conséquences.

- un problème qui est nullement secondaire, mais qui fut bien trop peu évoqué. Le risque zéro n'existe pas. Il faut tout faire pour tendre vers le risque zéro, mais le pragmatisme nous impose de prévoir l'hypothèse que des personnes soient mises en examen pour des faits qu'elles n'auront pas commis. Le problème qui se pose alors, c'est celui de la détention provisoire. Ces personnes, comment s'assurer qu'elles n'échappent pas à la justice ? Si elles sont coupables, elles peuvent être tentées de s'y soustraire (si elles sont innocentes, mais d'un naturel angoissé aussi, d'ailleurs.)

Je pense, comme beaucoup d'autres ici, que la détention provisoire est probablement trop souvent utilisée. Mais c'est aussi parce qu'elle est la plus fiable pour parvenir à l'objectif recherché : garder les mis en examen sous la main de la justice.

Il faut prendre le risque d'en voir s'échapper. Un risque mesuré, les mesures alternatives à l'emprisonnement sont relativement fiables.

Ici également le risque zéro n'existe pas. Ce n'est plus le même. On prendra le risque de voir des coupables échapper à une juste sanction.

Moi (je suis avocate), je souhaite prendre plutôt ce risque là.

Et vous ?

167. Le vendredi 1 août 2008 à 11:14 par Véronique

@ Fantômette

" Je crois que le CSM introduit des impératifs de contrôle parallèle dans un système de contrôle séquentiel. "

Si vous avez l'occasion de lire l'ouvrage d'A. Garapon et de D. Salas - dont la lecture utile et éclairante, m'avait été recommandée par aliocha -, vous verrez aussi qu'AG et DS vont au-delà encore de ce qui est suggéré par le rapport du CSM. Ils introduisent la notion d'un regard neuf et désenclavé du tout juridique et judiciaire.

168. Le vendredi 1 août 2008 à 12:10 par JLouis

@ Fantômette 166

"- un problème non pas institutionnel mais organisationnel : l'alliance des intervenants judiciaires au stade de l'instruction n'a pas permis 1 : soit de détecter l'erreur, 2 : soit d'en tirer toutes les conséquences."

Dans le cas présent, les dysfonctionnements n'ont pas de causes matérielles comme des moyens de communication qui n'auraient pas fonctionnés ou des documents qui se seraient égarés en chemin ou auraient été volé dans un cabinet...

Il semble s'agir ici uniquement de magistrats qui n'ont effectué qu'une partie de leur fonction au sens où ils se sont contentés de collecter des rapports, les 'survoler' et valider les actes de
leurs subalternes sans que rien ne soit jamais remis en cause avant l'appel.

Pourquoi au prétexte qu'il s'agit de magistrats, devrait-on accepter ce comportement laxiste et prétendre n'y rien changer et n'avoir personne à sanctionner ?

Il me semble que dans un quelconque contexte différent avec des enjeux bien moins importants que la vie humaine, un dysfonctionnement de ce type aurait immédiatement eu des conséquences individuelles adaptées !

Comment peut-on imaginer dans ces conditions, que 62 millions d'individus comprennent et acceptent le fonctionnement de 8000 d'entre eux qui se satisfont de celà ?

169. Le vendredi 1 août 2008 à 16:54 par mcc

@JLouis 168 :
"un dysfonctionnement de ce type aurait immédiatement eu des conséquences individuelles adaptées !"
Vous voulez parler d'une promotion ? (Ne m'en veuillez pas, je travaille actuellement pour une société ex-nationale.....)

Pour redevenir sérieux, en relisant les posts de cette discussion, quelques idées me semblent tomber sous le sens :
Il est clair que peu de cas nécessitent réellement de la détention provisoire. Garder cette possibilité pour les cas les plus graves, et utiliser des moyens alternatifs pour garder les personnes "sous la main" de la justice (bracelet ou autre). Cela permettrait d'ailleurs de désengorger les prisons.
Pour ce qui est du processus qui a amené à l'échec d'Outreau :
Je suis assez d'accord pour penser que seul un nouveau paradigme permettrait de progresser. Rajouter de nouveaux contrôles ne ferait que diluer les responsabilités.
Cela me fait d'ailleurs penser à un parallèle avec la gestion de la production :
Au milieu des années 80, les constructeurs japonais qui cherchaient le zéro défaut pour des raisons de coûts se sont rendu-compte que malgré toujours plus de contrôles qualités, les problèmes restaient. Les hommes n’étant pas parfaits, il ne servait à rien de punir ou de changer les contrôleurs, les erreurs se produisaient toujours.
Ils ont alors inventé des systèmes qui plutôt que de détecter les erreurs, les empêchaient de se produire, l’idée du « poka-yoke ».
A quand l’invention d’un « poka-yoke » pour la justice ?

170. Le vendredi 1 août 2008 à 17:06 par Antatole Turnaround

QUI VEUT PERDRE DES MILLIONS ?
(Jouons encore au JLD, mais cette fois dans le FUTUR !)

Imaginez que vous êtes magistrat en juin 2018.

La situation a évolué. Vous êtes maintenant responsables sur votre fortune personnelle de vos fautes professionnelles, comme dans une Vraie Entreprise du Privé.

Vous êtes le JLD. On vous apporte un nouveau dossier en fin d’après-midi. Une plainte pour viol déposée par une jeune femme dépressive. Elle a invité un garçon de rencontre chez elle, a partagé avec lui une bouteille d’alcool et quelques joints. Ils sont ivres. Elle lui a demandé de ne pas la laisser seule lorsqu’elle a voulu aller dormir et que le jeune homme a proposé de partir. Ils ont une relation sexuelle et le garçon s’en va aussitôt. Le lendemain, la jeune fille porte plainte pour viol.

Elle explique qu’elle ne voulait pas de rapports sexuels, qu’il a insisté, qu’elle ne s’est pas débattue et n’a pas crié; elle lui a bien dit d’arrêter, au début, mais il ne l’a pas écoutée, et elle n’a plus rien dit, renonçant à l’empêcher d’abuser d’elle et craignant de le mettre en colère.

Les examens gynécologiques confirment le rapport sexuel. Pas de traces de violences. Le sperme du garçon est détecté dans les prélèvements vaginaux.

L’examen psychologique révèle une jeune femme prostrée, en profond désarroi et que la vie n’avait pas épargnée puisque née de père inconnu et rejetée par sa mère à l’âge de quatre ans, elle avait passé son enfance de familles d’accueils en foyers, où elle aurait déjà été victime d’agressions sexuelles.

Le garçon est interpellé, placé en garde à vue et interrogé. Il commence par contester l’existence d’un rapport sexuel, puis, informé de la présence de son ADN dans le vagin de la plaignante, affirme qu’effectivement il y a eu rapport sexuel, mais totalement consenti de part et d’autre. Il explique que s’il a nié et menti au début de sa garde à vue, c’est parce qu’il n’avait pas mis de préservatif et qu’il avait peur qu’on le lui reproche. Il conteste farouchement avoir contraint la victime, même s’il admet qu’elle avait beaucoup trop bu, tout comme lui..

Il a 19 ans, a déjà été condamné deux fois lorsqu’il était mineur, pour violences légères et vol a l’étalage. Il redouble sa terminale et se présente au baccalauréat dans quinze jours.

Le parquet et le juge d’instruction vous demandent un mandat de dépôt.


CAS NUMÉRO 1: INCARCÉRATION.

Malgré la jeunesse du mis en examen, malgré l’importante échéance scolaire qui approche, malgré les incertitudes sur ce qui s’est véritablement passé, vous soulignez d’emblée que le jeune homme a menti dans sa première audition en niant le rapport sexuel, ce qui montre qu’il n’a pas la conscience tranquille, vous retenez que l’enquête en est à ses débuts, que des témoins doivent être entendus, que la plaignante, particulièrement vulnérable en raison de sa dépression, doit être protégée de toutes pressions et de toutes représailles, au moins jusqu’à la confrontation dans quelques mois, et que le jeune homme a déjà été condamné deux fois, ce qui ne permet pas de laisser en liberté sous contrôle judiciaire, mesure qui suppose un minimum de confiance.

Un mois plus tard, le jeune homme, qui vous écrivait chaque jour pour crier son innocence et auquel vous aviez fini par ne plus répondre, est retrouvé pendu dans sa cellule. De son côté, la plaignante, après un séjour en hôpital spécialisé, reconnaît lors de l’expertise psychiatrique qu’ en réalité elle n’était pas opposée au rapport sexuel mais qu’elle avait vécu comme un abandon insupportable le fait que le jeune l’homme s’en aille aussitôt après le rapport sexuel, sans plus lui manifester le moindre intérêt, ce qui lui avait donné le sentiment d’avoir été violée affectivement.

La justice a incarcéré un innocent qui est mort en prison.

Forte émotion populaire, médiatique et politique. On vous reproche votre aveuglement.

QUESTION: Trouvez-vous normal d’être sanctionné? Etes-vous d’accord pour vendre votre maison et indemniser vous-même les parents du jeune homme décédé en prison (ou payer une coûteuse assurance professionnelle)?


CAS NUMÉRO 2: REMISE EN LIBERTÉ.

Vous privilégiez le fait que même si la plaignante est indiscutablement digne de compassion, elle a tout fait pour que le jeune homme puisse se sentir en droit de parvenir à ses fins, et notamment ne soutient pas véritablement avoir résisté, ce qui est corroboré par l’absence de traces de violences. Vous pensez que l’implication du jeune homme dans un rapport sexuel forcé est trop douteuse pour l’envoyer en prison à 19 ans, lui faire perdre toute chance d’obtenir son diplôme, bref vous vous méfiez, vous vous souvenez que légalement la détention provisoire doit rester exceptionnelle, et vous le placez donc sous contrôle judiciaire avec interdiction de contacter la plaignante, de paraître aux abords de son domicile, et obligation d’aller signer au commissariat une fois par semaine.

Pas de chance ! Un mois plus tard, le jeune homme, qui vient d’avoir son bac, fête ce succès par une absorption massive d’alcool et se retrouve impliqué avec deux copains dans le viol collectif d’une adolescente de 14 ans, qui tente de mettre fin à ses jours, reste plusieurs semaines entre la vie et la mort au service de soins intensif de l’hôpital, puis décède.

La justice a laissé en liberté un dangereux criminel déjà mis en examen pour viol et qui a recommencé, provoquant la mort d’une jeune fille.

Forte émotion populaire, médiatique et politique. On vous reproche votre laxisme.

QUESTION: Trouvez-vous normal d’être sanctionné? Etes-vous d’accord pour vendre votre maison et indemniser vous-même les parents de la jeune fille décédée (ou payer une coûteuse assurance professionnelle)?


Qui ne voit que la décision à prendre dans un tel cas, dans un sens comme dans l’autre, peut exposer la justice au reproche, selon ce qui se produira ou non une fois cette décision rendue?

Mais quittons la jurisfiction et revenons maintenant en 2008:

Qui ne comprend que la décision en matière de détention provisoire est parfois un pari que fait le juge en fonction de ce qu’il connaît au travers d’un dossier encore incomplet, de ce qu’il croit plus ou moins devinable ou prévisible, et d’une hiérarchisation des priorités qui n’a rien de mathématique et relève autant de la connaissance du code que de la connaissance des hommes: C’est à dire avec un risque d’erreur important.

Et qui n’admettra pas que la décision est déjà assez difficile à prendre comme çà et qu’il ne serait pas très bon que le juge doivent en plus se demander qui, du mise en cause ou de la plaignante, risque le plus de lui faire un procès si ça tourne mal ?

Voyez-vous, moi, si un jour j’ai à trancher avec dans les plateaux de la balance d’un côté une jeune et riche héritière prête à surpayer les meilleurs avocats spécialisés, et de l’autre un immigré sans papier qui sera reconduit à la frontière avant d’avoir pu déposer son dossier d’aide juridictionnelle, je saurai vite d’où pourraient venir les ennuis si les plaideurs sont autorisés à me faire des procès en responsabilité personnelle à la suite de mes décisions.

Et je ne veux pas avoir à rendre la justice en tenant compte de ce genre de paramètres.

171. Le vendredi 1 août 2008 à 17:29 par Audrey

@ arg:
Vous écrivez au sujet de Dadouche : j'ai surement moins de temps que vous pour soigner ma syntaxe ( vu que vous avez éffacé mon post ou je répondais à CHC en lui disant que je fais 74 h de travail cette semaine ( 78 en fait mais je ne suis plus à 4 h pres ....)

Voilà, c'est typiquement avec ce genre de mépris que vous renforcez ce que vous et les piliers de bars appelez "le corporatisme" des magistrats. Ah ben ouais, tu parles, un juge c'est un fonctionnaire. Et les fonctionnaires c'est bien connu ça glande rien de la journée. C'est toujours en congé, ça arrive à 11h, ça repart à 13 h....

Mais nom de Dieu, allez en juridiction, allez assister à des audiences correctionnelles. Allez voir des audiences qui commencent à 9 h le matin et qui finissent à 22h le soir. Allez voir comment on y carbure au café mais pas trop quand même parce que le café, ça fait faire pipi et on n'a pas le temps pour ça. Renseignez-vous sur les audiences de 35 bis interminables du dimanche... Vous croyez qu'ils ont l'oeuil sur la montre ces juges qui passent leur nuits et leurs dimanches sur leurs dossiers? Vous croyez vraiment que ça ne leur ronge pas le ventre l'idée de faire une connerie? Et vous croyez vraiment que c'est en vous posant en victime que vous faites avancer le débat?

Tous les magistrats ne sont pas de gens biens. Il y en a des mauvais, des feignants, des lâches... Mais dans leur grande majorité, ce sont des gens qui ont choisi ce métier parce qu'ils ont une très haute idée de la Règle, de la loi et de l'être humain. Ce sont des gens qui appliquent la loi. Ils commettent parfois des erreurs, c''est pour cela que la collégialité existe, c'est pour cela qu'un juge d'instruction, un JLD, un Procureur collaborent. C'est surtout pour cela qu'il y a un double degré de juridiction et une cour de cassation pour les erreurs de droit. La honte n'est pas dans le fait que les juges se trompent. La honte, comme le dit Lulu, c'est que les DP soient si longues, parce que les instances ne peuvent aller plus vite que les moyens offerts. La honte, c'est que nos prisons soient dans un tel état que ceux qui passent leurs portes en ressortent traumatisés.

Que l'on sanctionne le juge qui commet une faute grave dans l'exercice de ses fonctions, c'est déjà le cas. On met à pied un magistrat qui emprunte la carte bleue d'une cllègue pour aller au bordel, on renvoie l'auditeur qui casse le nez d'un père de famille incestueux qui lui répond qu'il fait ce qu'il veut avec ses gosses. Les magistrats ne bénéficient pas d'une immunité totale. Mais qu'on commence à les sanctionner pour leurs erreurs de jugement, leurs erreurs d'appréciation, et c'est la fin de l'indépendance et de l'impartialité de la justice.

NB: Juste pour vous faire remarquer que les magistrats et les élèves magistrats ne sont pas irresponsables: un auditeur s'est fait renvoyer de l'ENM cette année. Il était passioné de son métier mais l'école a jugé qu'il n'était pas apte aux fonctions judiciaires. Je ne juge pas la décision de l'école. Mais voilà. Aujourd'hui, on prend des précautions. Il s'est suicidé.

172. Le vendredi 1 août 2008 à 17:30 par JLouis

@ Anatole 170,

Votre exemple est bien sûr bien choisi et très pédagogique mais vous n'évoquez que le cas du magistrat isolé qui prend seul une décision avec tous les risques que çà comporte.

Dans mon post précédent, j'évoquai le laxisme de la hiérarchie qui se contente d'enregistrer des rapports au lieu de comprendre, de vérifier, de discuter, d'éventuellement remettre en cause et d'intervenir le cas échéant. L'intérêt majeur d'une structure hiérarchique, quoi !
Ce n'est pas l'échelon décisionnaire qui est fautif, c'est sa hiérarchie !

Ce n'est pourtant pas très éloigné de ce que pratiquent quotidiennement tous les chefs d'entreprises privées dont les décisions d'aujourd'hui peuvent être considérées comme responsables des difficultés de demain ou les médecins au sein d'un établissement... sauf dans les conséquences !

173. Le vendredi 1 août 2008 à 17:43 par Humaniste

@166 Fantomette vous avez tout a fait raison: on attaque les individus pour ne pas attaquer le système et donc l'institution.

Le choix que vous exposer est simple: faut-il mieux un coupable en liberté qu'un innocent enferme: je préfère le coupable en liberté.

Dans les but de la provisoire il y d'empêcher la pression sur les témoins et de la disparation des preuves: c'est pour cela que celui qui a avouer est plus facilement libérer dans la mesure ou il n'essaiera pas de détruire les preuves d'un crime avoué.

174. Le vendredi 1 août 2008 à 18:00 par Doc

@ Anatole: merci pour votre exemple didactique. Il décrit tout à fait la situation des médecins, souvent seuls (en particulier en libéral), constamment responsables de tels choix qui engagent la santé voire la vie d'autrui, s'appuyant sur le savoir médical comme le juge sur le droit, mais comme lui travaillant avec des êtres humains et donc dans l'incertitude.
Par contre, à la question "trouvez-vous normal d'être sanctionné? Etes-vous d'accord pour vendre votre maison ou payer une coûteuse assurance professionnelle?" , on y a déjà répondu pour eux!
Et ça n'a pas eu que des effets bénéfiques sur leur pratique.

175. Le vendredi 1 août 2008 à 18:20 par Anatole T.

@ Doc 173

Un juge trop exposé aux sanctions disciplinaires devient un juge aux ordres.

Un juge exposé au risque de condamnation pécuniaire devient un juge complaisant aux puissants, qui seuls auront les moyens de lui faire un procès.

Les juges complaisants et aux ordres ne vous rendront jamais une justice équitable et impartiale.

Comme c’est pourtant l’objectif, il faut maintenir les juges à l’abri d’une pression disciplinaire forte et d’une pression financière quelle qu’elle soit.

Il est possible que le prix à payer soit une certaine difficulté à sanctionner les dysfonctionnement. A chacun de faire son choix.

Notez bien que je ne parle ici que des juges (qui selon moi doivent rester indépendants des différentes formes de pouvoir) et non des procureurs (qui sont hiérarchisés, ne sont pas indépendants, et se limitent, devant les juges, à présenter des demandes ou donner des avis).


176. Le vendredi 1 août 2008 à 18:28 par Anatole T.

@Jean-Louis 171

Comme je viens de le rappeler, un juge n’a pas de hiérarchie. Il ne reçoit d’ordre de personne. Il ne peut être sanctionné pour le contenu de ses décisions. Il est inamovible. Ce sont les conditions de son indépendance.

Dans Outreau, les décisions relatives à la détention des acquittés sont celles des juges des libertés. Je vous renvoie sur ce point à mon post n̊ 126.

177. Le vendredi 1 août 2008 à 18:34 par JLouis

Si le juge qui commet des erreurs ou des manquements, sans que son patrimoine personnel serve à indemniser sa propre victime puisqu'il agit pour le compte de l'Etat qui peut assumer ce rôle, il peut néanmoins être jugé et reconnu coupable et responsable de ses actes professionnels et à ce titre condamné au moins professionnellement et publiquement.

Je pense que le citoyen lambda a besoin aussi de savoir qu'un magistrat n'est pas devenu ni surhumain, ni inhumain ni au-dessus des lois en passant par l' ENM.

178. Le vendredi 1 août 2008 à 18:39 par JLouis

@Anatole 175

Je l'avais lu en temps réel et commenté en 135... sans écho

179. Le vendredi 1 août 2008 à 18:44 par Anatole T.

@ Jlouis 176

Je suis d’accord avec vous. Le juge ne dois pas être à l’abri de tout contrôle disciplinaire. Et je précise qu’il ne l’est pas, ainsi que nous l’a rappelé Gascogne sur ce blog.

Voici le lien : www.maitre-eolas.fr/2007/...

180. Le vendredi 1 août 2008 à 18:45 par Véronique

@ Anatole T

A mon sens, le souci majeur du juge enfermé avec une épée de Damoclès du type "responsabilité professionnelle " (procès, assurances etc.), est que dans ce cas de figure le juge n'est plus un juge. C'est à dire que sa fonction et ce qu'il représente ne sont plus hors et ailleurs de la société habituelle. Le juge ( la fonction) se banalise et l'autorité qui va avec nécessairement.

@ Doc

Il y a tout de même une différence. Le médecin est une profession libérale. Il ne représente pas une autorité.

ps: des juristes sauraient mieux que moi traduire plus clairement ce que je veux dire.

181. Le vendredi 1 août 2008 à 18:46 par Doc

@ Anatole: je veux bien vous croire: l'exposition excessive des juges auraient donc AUSSI un effet délétère sur leur fonction, comme elle en a eu sur la fonction des médecins.

182. Le vendredi 1 août 2008 à 18:58 par Anatole T.

@ JLouis 135 et 176

"Par contre, pourquoi il ne serait "pas possible d’accuser les véritables décideurs de la détention des accusés d’Outreau. Trop nombreux. Trop voyant." ?

Sommes-nous trop idiots pour accepter que le système juduciaire doit être modifié et que les fautifs peuvent être nombreux dans une même affaire ?"

Ce n'est pas à moi, modeste magistrat blogueur, de répondre.

C'est le gouvernement qui décide de poursuivre disciplinairement. Je pense pour ma part que le gouvernement ne peut pas assumer simultanément autant de poursuites disciplinaires qu'il le faudrait pour rechercher les éventuelles fautes de tous les juges qui ont statué sur la détention des accusés d'Outreau. Ni matériellement, ni, surtout, politiquement. Ce serait une déclaration de guerre à la magistrature, pour une issue finale des plus incertaines sur le plan légal. Ce serait aussi un aveu de mauvaise gestion du corps depuis des années. Beaucoup trop risqué politiquement.

Et le citoyen lambda risquerait de ne pas comprendre ce qu'on veut qu'il comprenne.

En revanche, punir seulement le juge qui dirigeait l'enquête et le procureur qui la suivait, même s'ils n'ont pas pris les décisions qui fâchent, c'est moins difficile , moins cher et moins risqué, et ça donne l'impression que le job est fait.

183. Le vendredi 1 août 2008 à 19:29 par Doc

@ Véronique: libéral ou hospitalier, ce n'est pas la question. Jusqu'à il y a peu encore, un médecin remplissait une fonction et endossait une responsabilité . Son autorité n'avait rien à voir avec un pouvoir, comme cela a été répété jusqu'à écoeurement, mais était une charge et un honneur . Que les médecins se transforment de plus en plus en prestataires de service comme les autres n'est pas une bonne nouvelle pour ceux qui leur demanderont leurs soins, non pardon: pour les usagers qui souhaiteront passer contrat avec eux.

184. Le vendredi 1 août 2008 à 19:49 par JLouis

Le gouvernement ne devrait avoir rien à faire là dedans ! Si la justice doit être indépendante, elle devrait l'être jusqu'au bout !

Les justiciables lésés devraient pouvoir saisir eux-mêmes la justice, peut-être une chambre spéciale ? qui diligenterait une enquête débouchant éventuellement sur procédure et des sanctions...

C'est un peu le principe dans la Police avec l'IGS sauf qu'eux s'arrêtent là et passent le relais à la Justice, qui dans le cas des magistrats pourrait aller jusqu'au bout, non ?

185. Le vendredi 1 août 2008 à 20:04 par Monsieur Turnaround

C'est énervant ces numéros de post qui changent tout seuls. Les références précises qu'on met dans les réponses deviennent inexactes et ne renvoient plus à la question à la quelle on voulait répondre. Quelqu'un trafouille tout ça en douce ?

186. Le vendredi 1 août 2008 à 21:10 par Eolas

@ Monsieur Turnaround : Certains commentaires suspects sont mis en quarantaine avant affichage. Quand je les valide, ils apparaissent à leur heure d'enregistrement, bousculant ceux mis ensuite. Cela explique le décalage de numérotation croissante. Plus rarement, des commentaires s'étant néanmoins affichés sont supprimés, provoquant un décalage décroissant. C'est notamment le cas du gentil lecteur qui crie dans le vide à la censure, puisque ces messages ne s'afficheront pas, qui a mis plein de commentaires courts et creux, selon une technique appelée le flooding, de l'anglais inondation. C'est le pendant internet de ces avocats qui n'ont rien à dire et pourtant vont parler durant des heures. Vous voyez ce que je veux dire ?

187. Le vendredi 1 août 2008 à 21:16 par arg

à audrey 171 : héhé , vous partez au quart de tour , c'est bien. ce que je reproche aux magistrats , entre autres ,c'est qu'ils se plaignent d'avoir trop de dossiers ( ils font probablement beaucoup d'heures, ça , je ne leur enleverais pas ), le probleme , c'est qu'ils font le travail à moitié ( un chirurgien ne t'enleveras pas la moitié de ta tumeur sous pretexte qu'il a plein de gens à operer ou un menuisier ne te rendra pas un demi meuble sous pretexte qu'il a trop de boulot....) et qu'au final , ils se forgent une opinion biaisée vu qu'ils n'ont pas tous les elements en main ( parce que l'enquete est mal faite ou qu' ils n'ont pas tout lu dans le dossier ) . ces deux là seront soit sanctionnés soit mettront la clef sous la porte .

pour en revenir à ce billet : lesigne a ignoré un rapport de police qui n'allait pas dans son sens , il n'a pas fait son boulot ( à charge et à decharge) , il ne sera pas sanctionné. si la principale affabulatrice n'avait pas fait des aveux , aujourd'hui , une douzaine d'innocents seraient toujours en taule , et pour longtemps.

188. Le vendredi 1 août 2008 à 21:26 par A. Turnaround

Oui, Maître, je vois assez bien.

Et je profite de ce bref échange avec vous pour vous remercier d'avoir créé ce merveilleux blog.

189. Le vendredi 1 août 2008 à 21:36 par arg

à fantomette 166: pour un moi , un innocent en prisson est ce qui peut arriver de pire , et ce devrait etre une préoccupation majeure de la justice , or ce n'est pas le cas .

decortiquer pourquoi on en est arrivé là ?? faites , mais cela a deja été fait , et des outreau , il y en a tous les jours . lorsque les magistrats instruiront à charge et à decharge, demanderont une enquete complete et toutes les pistes explorées , alors peut etre que les erreurs diminueront. Se cacher derriere la pile de dossiers restant à faire me revulse .

qu'en serait il aujourd'hui si l'affabulatrice n'avait pas craché le morceau ??? des histoires comme ça il y en a des tas et si un jour l'accusateur (trice ) n'est pas pris de remord et avoue , le présumé coupable continue de croupir dans un cachot digne du moyen age.
je pense que le dysfonctionnement majeur a été l'ensemble des personnes qui ont mis leur nez dans le dossier ( un juge ne "dejuge " jamais un collegue ) et que c'est la culture etl'enseignement de l'ENM qui est à revoir

190. Le vendredi 1 août 2008 à 22:23 par stellar

à doc

Il me semble qu'il y a (au moins théoriquement) une différence entre la responsabilité d'un médecin et celle qui est réclamée par beaucoup pour les juges ("le juge qui a fait une erreur -c'est à dire emprisonné un innocent ou libéré un futur récidiviste - doit payer".

Les médecins sont, sauf exception, soumis à une obligation de moyen : l'absence de guérison ne signifie pas une erreur du médecin, heureusement dans certaines spécialités. De l'autre côté, juger un magistrat sur des éléments futurs (l'innocence révélée ou la récidive) lui impose une obligation de résultat.

191. Le vendredi 1 août 2008 à 22:43 par Lulu

à Arg;

Heureusement, qu'il y a des gens comme vous, qui ont tout vu, tout compris et tout analysé.

Avez-vous déjà mis un pied à l'ENM pour juger si sévèrement ses enseignements?

De même, vous êtes-vous donné la peine de discuter avec un magistrat avant d'asséner que tous ne font "que la moitié de leur boulot"?

Ironie du sort: vous reprochez aux magistrats d'être ce que vous êtes: un type pétri de certitudes.

192. Le samedi 2 août 2008 à 00:38 par arg

à 191: et vous , avez vous discuté avec des français ?? trouvez vous normal qu'en affaires familiales , le dossier soit expedié en 15 minutes ?? c'est professionnel ? suffisant ?? qu'un mec en detention depuis 3 ans n'est été entendu que 3 h en 3 ans , et encore , par le remplaçant du juge ..... normal ??? si moi je bossais comme ça , j'aurais été viré depuis longtemps voire en prison.

Eolas:
Et ce sera le dernier mot de arg. On lui dit tous au revoir, il part en vacances, faire un stage de bonnes manières.

193. Le samedi 2 août 2008 à 06:52 par Véronique

@ Doc

Que les médecins représentaient hier une autorité faite de savoirs et une autorité morale tout court, je ne le discute pas.

En mode très simple.

Quand je parle d'Autorité pour le juge, je fais référence au Pouvoir judiciaire comme troisième pouvoir inscrit dans la Constitution.

Vouloir raisonner le mot responsabilité du juge comme devant se confondre avec la notion de responsabilité professionnelle type chef d'entreprise ou profession libérale c'est, à mon avis, faire fausse route. Au sens où la fonction serait irrémédiablement dénaturée.

Ce que je retiens de cette discussion, c'est qu'il n'est plus possible de faire des lois qui prévoient de nouvelles dispositions sans, de la part du législateur, intégrer dans son raisonnement le volet application concrète de la loi.

Par exemple, créer le JDL, c'est bien. Mais ignorer au moment du projet de loi l'aspect concret, opérationnel et organisationnel que cette transformation va entraîner n'est plus tenable aujourd'hui. Entre l'audience finale du procès public et le départ d'une instruction, il me semble que les audiences intermédiaires devraient être organisés comme des débats à part entière, où le contradictoire puisse s'exprimer, prioritairement par l'implication des avocats.

Je pense que raisonner le mot responsabilité et l'adapter dans le concret des méthodes, des usages et des habitudes de travail au quotidien, au fond, est beaucoup plus difficile et exigeant. Mais plus sûr et plus fiable que de vouloir fabriquer des lois abstraites au sujet de "la responsabilité" des magistrats.



194. Le samedi 2 août 2008 à 07:20 par Doc

à stellar:
votre réponse est juste, bien-sûre, mais théorique. C'est pourquoi je trouvais l'exemple du vrai-faux violeur d'Anatole (170) tellement intéressant, et je crois vraisemblable. Si vous me permettez de filer un peu l'analogie sans vous offenser, les procès parfois faits aux médecins posent le problème d'être faits dans l'après coup (eh oui, bien evidemment) ce qui permet de reprocher de n'avoir pas respecté l'obligation de moyen. Concrètement dans l'hypothèse 1 d'Anatole "vous n'avez pas placé ce jeune homme en préventive, vous ne vous êtes pas donné les moyens d'éviter la récidive!" et dans l'hypothèse 2 : "vous avez placé en préventive alors que la règle et de respecter au maximum la présomption d'innocence , vous ne vous êtes pas donné les moyens d'éviter ce suicide!" .Et je crains qu'il puisse arriver que les médecins experts soient eux aussi quelque peu entraînés dans ce sens à l'occasion, parce que c'est le sens du courant, et puis parce que les médecins qui ne sont pourtant pas du tout omniscients comme on voudrait qu'ils soient... rêvent parfois eux-aussi de l'être! Ou se croient tenus de l'être.
D'ailleurs j'étais drôlement respectueuse des réponses qu'avaient donnés dans l'affaire d'Outreau les experts psychiatres (c'est à dire les médecins, je ne parle pas de tous les experts ), puisque il me semble qu'on pourrait les résumer par "nous ne sommes pas omniscients!"
Je me sens gênée de plaider avec autant d'insistance , et apparemment hors sujet en plus, mais si quelqu'autre médecin me lit et est en désaccord avec ceci, il me corrigera: notre profession a été profondément bouleversée , dans un sens qui était peut-être inévitable, mais quand je vous entend expliquer qu'un bouleversement du même type pour les magistrats, nuirait gravement , non pas seulement à eux, mais surtout à la possibilité même de remplir leur fonction, je n'arrive pas à m'empêcher d'intervenir.





195. Le samedi 2 août 2008 à 07:49 par Doc

Je parle des réponses des experts psychiatres quand on leur demandaient durant l'instruction "ces gens là présentent-ils les traits d'abuseurs sexuels?" (pardonnez moi si ce n'était pas les termes exactes, mais je ne crois pas en être éloignée) et qu'il répondaient non. De tels traits, identifiables médicalement avec certitude, n'existent pas. Mais ce n'était pas tellement l'ambiance pour le dire, ainsi que le rappelait Eolas, quand ça criait "ces pédophiles, ils faudrait leur couper les ..."

196. Le samedi 2 août 2008 à 09:11 par Véronique

@ Doc

En réaction à votre réponse à Stellar

Pour Outreau, le souci quand même c'est que, par exemple, "les diagnostics" d'assistantes maternelles non contrôlés et analysés par leurs encadrements ont été, pour ainsi dire, mis sur un pied d'égalité avec des expertises psychiatriques.

"L'ambiance" du moment selon votre formule a eu aussi pour conséquence que "l'expertise" devient l'affaire de tous et de n'importe quoi.

197. Le samedi 2 août 2008 à 11:03 par JLouis

Pour en revenir aux oignons de Dadouche qui doivent commencer à sentir un peu le roussi depuis le temps qu'on digresse, il me semble qu'apporter des réponses politiques à des problèmes fondamentaux nous éloigne à chaque fois un peu plus de leur résolution.

Avoir le courage de reconnaître publiquement l'existence d'un dysfonctionnement, être capable d'en analyser et d'en exprimer honnêtement les causes et/ou les responsables, d'en tirer avec le maximum de transparence toutes les conséquences tant vis à vis des méthodes, des moyens ou des hommes qui les servent, serait, je le crois, l'unique moyen de retrouver le respect et la confiance dans une institution indispensable qui a perdu l'un comme l'autre pour beaucoup.

Mais l'intérêt général est aujourd'hui très loin derrière les intérêts personnels...

198. Le samedi 2 août 2008 à 11:20 par Fantômette

@ Véronique

Vous êtes gentille, j'ai évidemment déjà lu l'ouvrage de Garapon et Salas : je suppose que vous parlez des nouvelles sorcières de Salem. Il n'est pas inintéressant, quoique je me souviens n'avoir pas été tout à fait d'accord avec ce qui y était écrit.

J'ai eu l'occasion de les entendre en conférence, et j'ai surtout lu (je cite de mémoire les titres, vous retrouverez facilement sur electre) : la justice et le mal (sous la direction de Salas, dont j'apprécie davantage le travail que Garapon d'une façon générale, mais avec un collectif d'auteurs). Le Procès Pénal, de Salas est un must pour tout étudiant en master 2 de pénal. Il est chez PUF et il s'agit de la publication de la thèse de Salas. Le Tiers Pouvoir n'est pas ininteressant non plus, mais m'a paru un peu confus, du moins à la première lecture.

La République Pénalisée, est un ouvrage court, qui me semble pouvoir être lu facilement, et pose des problématiques actuelles et cruciales. Si vous avez l'occasion de le lire, il se pourrait que vous décidiez d'en enrichir votre fonds juridique.

Enfin, vous devriez totalement craquer pour le livre, signé cette fois du seul Garapon, Bien Juger : Essai sur le rituel judiciaire. Chez Michalon de mémoire. Mon conseil : vous lisez d'abord l'introduction attentivement. Ensuite, allez assister à quelques audiences. Et puis revenez lire la suite.

199. Le samedi 2 août 2008 à 12:06 par Axonn

Je me permets un com HS : je n'avais jamais vu la bannière du troll detector de Dadouche. Elle est superbe.

On remarque le sabre rouge, dont un stéréotype très répandu veut qu'il soit l'attribut des méchants. Mais ceux qui connaissent l'univers étendu de Star Wars (les romans après les films) savent que Leia est un très bon exemple de Jedi du Côté Lumineux utilisant un sabre rouge. Or Dadouche a bien la coiffure de la princesse. Pas d'inquiétude, Dadouche n'est pas une Sith.

200. Le samedi 2 août 2008 à 12:50 par Fantômette

@ JLouis

Comment imaginer que 62 millions de personnes comprennent ? Peut-être parce qu'ici au moins on essaye d'expliquer, non ?

Vous n'avez pas compris le commentaire que j'adressais à Arg (qui ne me manquera pas comme interlocuteur au vu de la réponse qu'il a faite à ce commentaire auquel j'avais pourtant pris grand soin, merci Eolas.)

Je n'ai certes pas prétendu qu'il s'agissait de problèmes matériels type fax encombrés, ou téléphones en panne.

Le procureur avait des interlocuteurs, pas seulement une hiérarchie. Et sa hiérarchie elle-même était un interlocuteur, en plus d'être une hiérarchie.

La propre carence de la hiérarchie est pointée du doigt dans l'avis du CSM, je vous signale, mais comme cette hiérarchie (le PG) n'étant pas elle-même poursuivie, aucune sanction n'est prononcée à son encontre. Ceci dit, il m'étonnerait que cet avis soit passé inaperçu auprès des personnes concernées.

La carence du PG est soulignée, à la fois dans son rôle d'autorité supérieure : elle n'a effectivement pas perçue elle-même, alors que l'entier dossier était à sa disposition, que les rapports administratifs transmis par son subordonné présentaient les faits de façon parcellaire.

Mais également dans son rôle d'interlocuteur. Elle n'a pas assuré le suivi du dossier. Elle n'a posé aucune question, n'a sollicité aucune information, même quand elle a cessé de recevoir des rapports administratifs sur une période d'à peu près 9 mois.

Ce n'était pas le seul interlocuteur du procureur.

Les avocats sont présents pendant la procédure d'instruction. Ils ont accès au dossier, et mieux encore, ils rencontrent les mis en examen (seulement leurs clients, bien sûr), assistent à leurs auditions... Ils ont logiquement du repérer dans le dossier les contradictions qui devaient in fine innocenter leurs clients.

Nous avons donc au même moment, dans un même dossier, des personnes qui poursuivent des intérêts différents, et c'est justement prévu pour permettre de lire un même dossier avec des perspectives différentes.

Certains ont vu le lièvre, d'autres non. En soi, ce n'est pas grave. Cela n'a pas empêché l'erreur d'être commise, ce qui n'est pas forcément grave non plus en soi. Mais cela n'a surtout pas empêché qu'elle persiste trop longtemps. Là, on a un dysfonctionnement, et donc un dysfonctionnement dans la communication. Comme je le disais plus haut, la procédure a permis à chaque intervenant de monologuer dans le dossier, mais n'a pas permis de forcer le dialogue.

Tschok, dans une discussion à laquelle il fait référence au post 19 (j'ai mis un lien vers la discussion dans un commentaire qui suit), a évoqué le sujet dans une analyse qui posait le problème dans les termes d'une défaillance de contrôle.

Un contrôle peut s'exercer soit en parallèle, soit en séquentiel. En parallèle, il est exercé par une personne solidaire de la première, le travail est effectué en commun. Les deux personnes en question doivent se sentir coresponsable du travail commun. En séquentiel, il s'agit plus typiquement d'une organisation de type pyramidal, où l'un des intervenants fait un travail complet, qui est par la suite transmis et doit être relu et vérifié par une instance supérieure.

Or il a été maintes et maintes fois constaté - empiriquement - qu'un système de contrôle parallèle produit moins d'accident qu'un systéme de contrôle séquentiel.

Quand on a un impératif de sécurité prépondérant, le travail s'organise toujours de façon à permettre un contrôle parallèle des tâches : c'est le cas dans le nucléaire, c'est le cas dans la sécurité aérienne.

Un système organisé séquentiellement présente en effet une pente dangereusement glissante. Le subordonné peut avoir tendance à faire son travail trop rapidement, se disant que de toute façon, il est relu à l'échelon supérieur. Le supérieur peut faire une relecture rapide, car il fait globalement confiance à son subordonné. Cela donne lieu à un phénomène d'erreur, puis de persistance dans l'erreur, car, si j'ose dire, la pente va en s'accentuant.

Vous allez me dire : ça n'empêche pas que l'on sanctionne ceux qui ont commis des erreurs. Non, ça n'empêche pas.

Ceci dit, premièrement, cela ne préviendra nullement la réitération de telles erreurs, puisqu'il s'agit de la faiblesse du système tel qu'il se présente.

Deuxièmement, attacher des conséquences personnelles désastreuses (une sanction disciplinaire, la responsabilisation que vous appelez de vos voeux) à une organisation de type séquentiel a toutes les chances d'accentuer, à mon avis, le phénomène de persistance dans l'erreur. Cela sera donc contre-productif. C'est du moins mon hypothèse.

Ce que je tente d'expliquer donc au 62 millions de non comprenants que vous évoquez, c'est qu'ici, en plus d'essayer de leur expliquer, on tente d'analyser ce qui s'est passé, et la raison pour laquelle un système qui a à peu près correctement fonctionné - qui a en tout cas fonctionné "by the book", conformément au droit en vigueur - a produit un accident.

Comment une horloge dont tous les rouages étaient en parfait état de marche a fini par donner une heure totalement fausse.

201. Le samedi 2 août 2008 à 12:52 par Fantômette

@ Anatole Turnaround
aka d'Anatole T
aka Monsieur Turnaround

Sous quelque pseudonyme que vous utilisez, bienvenu à vos précieux commentaires.

202. Le samedi 2 août 2008 à 14:06 par CEH

@ Fantômette (et Tschok)

Peut-être n'avez vous pas pour l'heure convaincu 62 millions de personnes, pour autant vos échanges avec Tschok concernant le caractère accidentogène du contrôle séquentiel m'ont d'ores et déjà fait réflechir sur ma propre organisation professionelle et sans doute ne suis-je pas le seul.

203. Le samedi 2 août 2008 à 14:07 par Simplet

Peut être une idée stupide, mais puisque vous envisagez les avantages comparés des contrôles séquentiels et parallèles, pourquoi ne pas envisager un contrôle transversal, par des personnes extérieures au dossier, non concernées par son aboutissement dans un sens dans un autre, et pourquoi pas extérieures au monde judiciaire, mais qui auraient accès à la totalité des pièces? Ou l'analyse d'un simili dossier, mais par exemple anonymisé, par des juges d'un autre ressort, ou par des universitaires ?

204. Le samedi 2 août 2008 à 14:56 par Dadouche



Des codes rouges successifs m'ont éloignée de tout ceci pendant quelques jours, et je n'ai pu que survoler les commentaires et répondre brièvement à certains.
On est bien loin du sujet du billet (pour mémoire : la communication autour de la mutation de M Lesigne). Mais la discussion qui s'est engagée malgré quelques fâcheux est très intéressante.
Pour la clarté du débat, parce que j'ai l'impression que tout le monde ne parle pas de la même chose, je voudrais rappeler quelques points.

Sur le rôle du CSM :
le CSM a été saisi, non pas pour faire la lumière sur un dossier et analyser l'ensemble des dysfonctionnements, mais pour statuer sur l'existence de fautes disciplinaires commises par le magistrat déféré devant lui.

Sur la déception ressentie par certains à l'annonce de l'avis qu'il n'y avait pas lieu à sanction :
Cette décision était prévisible (et prévue notamment par les magistrats), non en raison d'un quelconque copinage, mais tout simplement parce que les faits ne caractérisent pas une faute disciplinaire (sauf une qui est amnistiée). La ministre ne s'y est d'ailleurs pas trompée, puisqu'elle n'est pas allée au bout de sa logique et n'a pas prononcé de sanction, qui aurait très certainement été invalidée par le Conseil d'Etat.
En toute logique, le CSM , dans la composition qui se penchera sur le cas de Fabrice Burgaud, ne devrait pas non plus considérer qu'il y a de faute disciplinaire, tout au moins quant aux décisions juridictionnelles qu'il a prises. Les choses seront peut être différentes s'agissant de certains propos qui lui ont été prêtés par les acquittés, s'ils sont considérés comme établis (ce qui reste à démontrer).
L'erreur n'est pas en soi une faute disciplinaire, pour les raisons exposées par Anatole dans son exemple de jurisfiction.

Sur le contrôle séquentiel :
Le débat engagé sur ce point est passionnant (merci notamment Fantômette pour cette analyse brillante).
On peut d'ailleurs noter que c'est par une analyse proche que beaucoup s'élevaient contre la création du JLD, dont on pensait (peut être pas à tort), qu'il contribuerait à déresponsabiliser le juge d'instruction (pas au sens légal) qui, dans les cas "limite" où il n'aurait pas lui même placé en détention tendrait à saisir le JLD, ne serait-ce que pour qu'il y ait un débat sur la question. La création d'un échelon supplémentaire contribue à diluer le contrôle.
Un système de contrôle parallèle est-il pour autant possible ou souhaitable dans le processus judiciaire ? C'est ce qui est me semble-t-il tenté avec les pôles de l'instruction. Anatole a là encore très bien expliqué en quoi le manque de moyens réduira à néant le contrôle espéré.
Si j'ai bien compris les raisonnements sur les différents modes de contrôle, le processus judiciaire mêle des contrôles parallèles (la collégialité) et séquentiels (les voies de recours). On peut noter que la tendance de ces dernières années a été l'abandon de la collégialité dans de nombreuses matières, et le renforcement de contrôles séquentiels (exemple : le juge des victimes qui vérifie ce que fait le juge d'application des peines, l'évocation régulière des procédures criminelles par la chambre de l'instruction).
Le défaut de communication pointé par Fantômette est sans doute une clé importante pour comprendre les dysfonctionnements dans Outreau. Je me demande si la multiplicité des passages aux points de contrôle n'a pas aussi joué un rôle. Je m'explique : on part du raisonnement que la chambre de l'instruction, qui n'est pas directement saisie du dossier et intervient en principe très ponctuellement, a plus de recul pour analyser le dossier que le juge d'instruction ou le JLD qui est en plein dedans. Or, dans Outreau, je crois que le dossier venait à la chambre de l'instruction presque chaque semaine, compte tenu de la multiplicité des demandes de mise en liberté, des demandes d'acte et autre. C'était devenu le dossier de la chambre autant que celui du JI et du JLD. Etait-elle encore en position d'être une instance de contrôle ? Ce que rapporte Véronique sur la libération de Mme Godard semble montrer le contraire. Il n'est pas question dans mon propos d'envisager de limiter les voies de recours ou de multiplier encore les intervenants susceptibles d'avoir un regard neuf (on serait vite à court de munitions dans certains dossiers), mais je m'interroge, à cet égard, sur la pertinence de la multiplication des interventions obligatoires de la chambre de l'instruction, qui risque de lui faire perdre sa position de contrôle.

Mémé va encore dire que je rapporte tout au manque de moyens, mais on remarquera que, quelque soit le mode de contrôle, c'est toujours l'attribution des moyens adéquats qui conditionne son efficacité.

Sur "la pédophilie" :
Je voudrais revenir sur ce point dans l'analyse des causes d'Outreau.
Je soutiens depuis le début que les deux problèmes véritablement posés dans cette affaire sont la détention provisoire (et notamment sa durée) et le traitement judiciaire des affaires de moeurs et notamment celles impliquant des mineurs.
Pendant des années, ces affaires ont été insuffisamment prises en compte par l'institution judiciaire, qui leur appliquait rigidement sa grille de lecture pénale en matière de preuve (importance de l'aveu, recherche de preuves matérielles non équivoques).
Or, les affaire de ce type présentent des particularités que la justice pénale a tatonné à prendre en compte.

- l'absence de preuves matérielles évidentes : dans la majorité des cas, les actes commis laissent peu de traces. Des attouchements, une fellation, tout cela est sans conséquence physique pour les victimes. On résume souvent ces affaires à "c'est parole contre parole". Ce sont en réalité, sur la base des paroles des protagonistes, des faisceaux de faits qui sont recherchés (confidences faites à un proche à l'époque des faits, concomitance avec une dégradation de l'état psychologique de la victime, possibilité matérielle). Et il est plus difficile de se forger une conviction.

- le temps écoulé : dans ce type de dossier, les faits sont souvent révélés longtemps après leur commission. Parfois quelques mois, parfois des années. Et le législateur a renforcé cette tendance en augmentant petit à petit les délais de prescription. La recherche d'éléments matériels devient encore plus difficile, les témoignages sont fragilisés.

- l'exploitation de la parole des uns et des autres : le témoignage humain est fragile, ce n'est pas nouveau. La perception d'une même scène peut être différente pour chacun et des divergences apparaissent souvent. Il est particulièrement difficile d'avoir une grille de lecture raisonnée des témoignages. On a tendance à penser que si un élément est faux, tout le reste l'est nécessairement. Et pourtant, particulièrement s'agissant d'enfants, et encore plus quand les faits sont anciens et ont été répétés, la non réalité d'un élément n'invalide pas pour autant le reste. J'ai le souvenir notamment d'un dossier, où les faits étaient reconnus, et où les récits de la victime et de ses deux agresseurs divergeaient notablement sur les lieux (elle situait la plupart des agressions dans une chambre, ses deux frères dans une autre pièce) et les dates (à l'âge qu'elle pensait avoir au moment de certaines agressions ses frères ne résidaient plus au domicile). Chacun d'eux était pourtant sincère dans son récit.

- la réprobation sociale qui s'attache à ce genre de faits : les agresseurs sexuels, particulièrement ceux qui s'en prennent à des enfants, sont fortement réprouvés. Un homme qui tue sa femme pourra espérer garder le soutien de sa famille et de ses proches. Un agresseur d'enfant qui le reconnaît perd tout. Ce sont des faits extrêmement difficiles à admettre, parce qu'il leur est même souvent difficile de l'admettre en leur for intérieur. Les dénégations des coupables sont aussi fortes que celles des innocents. Il n'est pas rare qu'un agresseur qui reconnait les faits dans le cabinet du juge d'instruction continue à protester de son innocence devant ses proches.

Toutes ces particularités bousculent les repères judiciaires. Faut-il les prendre en compte et traiter différemment les affaires de moeurs, avec des exigences différentes en matière de preuve ? Faut-il au contraire leur appliquer la même grille de lecture et les mêmes standards qu'aux autres infractions ?
La justice pénale a oscillé (et oscille sans doute encore) entre ces deux positionnements, qui portent chacun en germe des risques d'erreur judiciaire, dans des sens opposés. Une lecture non spécifique conduit à innocenter des coupables, une lecture sur-adaptée amène le contraire.
Le choix devrait être facile à faire : celui de la présomption d'innocence.

Les repères se sont pourtant progressivement brouillés en la matière. Le législateur a délibérément fait le choix de privilégier de plus en plus les victimes, pour des raisons au fond tout à fait louables. Par exemple, l'allongement des délais de prescription, s'il a pu être une avancée quand on a retardé leur point de départ à la majorité de la victime, devient délirant. En faisant croire que l'on peut établir des faits de ce type (s'ils ne sont pas reconnus) parfois vingt ou trente ans après les faits, on fait porter sur la justice pénale un poids qui pousse insensiblement à baisser un peu le curseur en matière d'exigences de preuves. Et on favorise la religion de l'aveu, on se raccroche au moindre point reconnu par les mis en examen.
De même, les dispositions de la loi de 1998 sur l'enregistrement des auditions des mineurs victimes pour éviter d'avoir à les multiplier durant la procédure ne sont évidemment pas mauvaises en soi. Mais en "vendant" l'idée qu'il n'y aurait qu'une seule audition, on pousse là encore la justice pénale à la faute. Faut-il, parce que la victime est un enfant, dénier au mis en examen le droit à une confrontation ? Faut-il, alors que des incohérences apparaissent, s'empêcher de poser de nouvelles questions ? C'est pourtant à cela qu'ont parfois abouti ces dispositions. Et on a baissé un peu plus le curseur.

Et puis il y a l'accroissement de la place des expertises psychologiques dans les procédures de ce type. En l'absence de preuves matérielles, en présence de deux versions contradictoires, il est facile et tentant de chercher ailleurs des éléments que l'on espère solides. Parce qu'on lui demande parfois l'impossible, la justice pénale a essayé de trouver des réponses auprès des experts. Qui n'ont pas refusé. Et le législateur a aussi poussé à la roue, en encourageant ce type d'expertises.
Le développement d'une certaine idéologie sur la parole de l'enfant n'a pas aidé. Rappelons que, pendant l'instruction d'Outreau, des parlementaires (parmi lesquels certains membres de la Commission parlementaire qui s'est penchée sur cette affaire, et qui n'ont pas eu de mots assez durs pour stigmatiser ces benêts de magistrats qui avaient aveuglément "suivi" les enfants), ont proposé une loi visant à créer une présomption de crédibilité de la parole de l'enfant.

La compassion pour les victimes, surtout celles-là, a favorisé un activisme qui a poussé à brouiller les principes. Ainsi, on note de plus en plus d'exceptions au principe selon lequel seule la victime directe de l'infraction peut se constituer partie civile. La place prise par certaines associations dans quelques procédures a contribué un peu plus à faire de la lutte contre les atteintes aux mineurs une espèce de grande cause sacrée qui pouvait justifier qu'on abaisse un peu plus le curseur. Et qui a aussi contribué à ce que l'on recoure à des détentions provisoires longues fondées en réalité uniquement sur la gravité des faits reprochés.

Et les magistrats au milieu de tout ça ? N'est-ce pas aussi leur rôle de garder un peu de raison au milieu de tout cela ? Ils essayent de le faire. Contrairement à l'idée répandue par certains au moment d'Outreau, toutes les dénonciations ne sont pas suivies de poursuites, d'instructions et de détentions provisoires quasi arbitraires. Beaucoup de faits signalés sont classés sans suite, faute d'élément suffisants.
Mais les magistrats ne sont pas imperméables à la compassion pour les victimes, et peuvent être ponctuellement aveuglés. Et puis il y a une certaine expérience de ce genre de dossier, qui conduit à ne pas refuser de croire ce qui peut paraître improbable ou impossible au plus grand nombre. Anatole écrivait : "Le soupçon de pédophilie ne devrait guère impressionner un magistrat pénaliste moyennement expérimenté, pour qui le récit de viols d'enfants commis de façon variée et répétée et par des personnes différentes fait hélas partie du quotidien." pour en tirer la conclusion que (si j'ai bien compris) cette habitude lui permettait de garder son sang froid et procéder, malgré la charge émotionnelle qui s'attache à ce genre de chose, à une analyse rigoureuse du dossier. Je suis d'accord, mais je pense que cette expérience en la matière conduit aussi le magistrat pénaliste moyen à savoir que l'Homme est capable de tout. Quand on a vu certaines photos pédophiles, on peut, je trouve, plus difficilement rejeter d'emblée certains récits qui pourraient paraître délirants. On essaye de vérifier. Cette mithridatisation à l'horreur, particulièrement dans les juridictions du Nord, fausse également la perception.

Après ce très long développement, j'en viens (enfin) au coeur de ce que je voulais dire : Outreau est le paroxysme des tatonnements (peut être des errements) de la justice pénale en matière d'affaires d'atteintes sexuelles sur mineurs. Tout y est, pêle mêle : la difficulté à faire le tri dans la parole des uns et des autres, les fragilités des expertises, la peur de prendre le risque de laisser s'en tirer des monstres supposés, le refus des confrontations avec les enfants, la pression exercée par l'idéologie de la parole de l'enfant, des détentions d'une longueur à mon sens injustifiable compte tenu des garanties de représentation de certains, le poids phénoménal des aveux de certains pour retenir des charges contre les autres, tout cela dans un certain émoi médiatique.
Ce cocktail explosif (ajouté encore une fois au manque de moyens qui, comme le rappelait Anatole, favorise les plantages), on ne peut en faire porter la responsabilité à ceux qui, individuellement, ont traité cette affaire hors-normes suivant les mêmes standards que ceux auxquels tous nous ont poussés. C'est une responsabilité collective de l'institution judiciaire d'abord, de ne pas avoir su y résister, mais aussi dans une certaine mesure des politiques et notamment du législateur, qui en a semé les germes . Et c'est ensuite la responsabilité des politiques d'avoir attisé le feu et focalisé le débat sur cette affaire particulière au lieu d'en examiner les ressorts plus profonds, ce qui n'a abouti qu'à bloquer l'institution judiciaire dans une positions défensive peu propice à l'analyse de ses propres dysfonctionnements.
Je crois que c'est aussi à la société dans son ensemble, par la voix du législateur et de l'exécutif, de faire un choix clair : faut-il faire passer en priorité les intérêts des victimes ou ceux de ceux qu'elles accusent ? Une position intermédiaire peut sans doute être trouvée, et je pense que les pratiques sont désormais à des standards plus proches de ceux des affaires traditionnelles, mais on en revient à la spécificité de ces affaires : il y aura toujours des erreurs dans un sens ou dans l'autre. La réforme du CSM, l'élargissement de la responsabilité disciplinaire ou l'enregistrement des interrogatoires d'instruction n'y changeront rien. Du tout.

205. Le samedi 2 août 2008 à 17:55 par medicastre

Le départ de M. le Procureur exposé par le communiqué officiel comme étant la réponse au "traumatisme d'Outreau" peut apparaître comme une sanction décidée par la GDS.
Mais M. le Procureur subit-il un préjudice? Il est d'accord pour partir, il n'a pas semble-t-il de pénalités financières, et s'il a une famille ce ne devait pas être évident pour celle-ci de rester à Boulogne.
La mutation de ce magistrat a-t-elle besoin d'être motivée? Entraîne -t-elle un préjudice pour d'autres magistrats?
La décision de la GDS est-elle susceptible de recours dans ce cas, autre que celui éventuellement formulé par l'intéressé?

Je pense que les magistrats, mais aussi les avocats et les experts ou autres témoins qui ont été peu ou prou impliqués dans cette affaire montée par une manipulatrice dans un contexte favorable, ne doivent pas toujours bien dormir, tous comme ceux qui ont été innocentés.

@Doc
La responsabilité pécuniaire des magistrats sur leurs biens personnels n'est pas envisageable pour qu'ils puissent garder leur indépendance spirituelle; mais leur manque de diligence devrait aboutir à un arrêt de leur progression dans la grille indiciaire.
La rémunération des magistrats est difficile à connaître, -primes incluses-!
Le médecin expert s'efforce de répondre aux questions posées par le magistrat sous le contrôle des avocats des parties, doit savoir dire qu'il ne peut pas parfois y répondre et même ne pas pouvoir accomplir la mission.
Et les dépassements d'honoraires des praticiens ne sont pas étrangers dans la nouvelle relation qui s'établit entre le "prestataire de services" et le consommateur de soins qui croit devoir exiger l'obligation de résultat ....



206. Le samedi 2 août 2008 à 22:16 par Anatole Turnaround

@ Fantômette

Aka ?


Dadouche :
Also Known As (alias)

207. Le dimanche 3 août 2008 à 00:45 par ramses

@ Dadouche 204

Clap clap clap...

Cette belle démonstration n'explique pas pourquoi le Juge Burgaud a toujours écouté Mme Badaoui et jamais les mis en examen...

Ni pourquoi le Procureur Lesigne a refusé les renforts qu'on lui proposait, alors que vous soulignez la faiblesse des moyens...

Pour le CSM, il ne s'agit pas de sanctionner, mais de faire un pied de nez à Rachida Dati...

L'affaire est entendue, les victimes seront dédommagées (sauf le mort, mais il a sans doute des ayants-droits), NEXT...


Dadouche :
Je ne dis pas que ça explique tout, ni que tous les magistrats auraient fait exactement la même chose qu'eux à toutes les étapes du dossier. Je pense que c'est une des clés.
Mais évidemment, c'est tellement plus simple de chercher une seule cause, de préférence des défaillances individuelles. Ca ne demande pas de gros efforts de réflexion, et le problème est résolu par des sanctions individuelles. Et hop, NEXT, jusqu'au prochain problème.
Vous avez raison, restez dans vos certitudes.

208. Le dimanche 3 août 2008 à 01:17 par ramses

@ Tschok 151

Au fond, je m'en veux de m'être accroché avec vous dans cette affaire du Concorde. A la réflexion, j'avais pris au premier dégré ce qui n'était qu'une analyse désabusée, mais très conforme, de la "Théorie du Bordel ambiant" (Roland Moreno).

209. Le dimanche 3 août 2008 à 07:58 par Véronique

Merci Dadouche pour votre intervention qui structure bien, selon moi, ce que Outreau a mis en évidence et à jour.

@ ramses

Pour qui souhaite comprendre ce que l'affaire d'Outreau enseigne, il n'y a pas d'autres façons que de se mettre en position d'ouverture intellectuelle, d'intégrer peu à peu dans notre raisonnement ce que nous ignorons du fonctionnement en réel de la justice, et d'accepter de penser contre soi.

J'emprunte la formule " penser contre soi " à Philippe Bilger.

Sans vouloir apporter de la gravité et du plombant à la discussion initiée par le billet de Dadouche, force est de reconnaître, à vous lire, que cette méthode de réflexion - accepter de penser contre soi - est d'une difficulté extrême. Mais c'est à ce prix que se gagne une liberté et une indépendance intellectuelles.

@ Fantômette

Merci pour les titres que vous me communiquez.

Le livre d'A. Garapon et de D. Salas est, à mon avis, une bonne introduction pour poser la question qui me semble la plus prioritaire:

" Qu’est-ce qui s'est passé ?

Ce livre a le mérite de pouvoir s'adresser sans difficultés à des non juristes. Il adopte le parti pris lucide et serein du " qu'est-ce qui s'est passé ? ".

210. Le dimanche 3 août 2008 à 15:00 par ramses

@ Véronique 209

"Pour qui souhaite comprendre ce que l'affaire d'Outreau enseigne, il n'y a pas d'autres façons que de se mettre en position d'ouverture intellectuelle, d'intégrer peu à peu dans notre raisonnement ce que nous ignorons du fonctionnement en réel de la justice, et d'accepter de penser contre soi."

Si je vous suis bien, après avoir intégralement lu l'avis du CSM du 18 juillet, il faudrait non seulement admettre qu'aucune faute n'a été commise dans la conduite de cette affaire, mais en plus s'en vouloir profondément d'avoir pu souhaiter que tel ou tel magistrat soit reconnu coupable d'une telle gabegie ?

Dadouche :
On va la refaire une dernière fois: aucune faute DISCIPLINAIRE n'a été commise (sauf une, amnistiée).


Franchement, c'est au-dessus de mes forces... Sans doute n'ai-je pas "l'ouverture intellectuelle" suffisante pour parvenir à une telle abnégation (je n'appartiens pas non plus à la magistrature).

D'ailleurs, quand on relit bien le billet, c'est Rachida Dati qui est visée, par M. Lesigne...

Dadouche :
Je commençais à me demander si le sujet du billet était suffisamment clair...


"le garde des Sceaux peut prendre une décision de sanction plus grave que celle proposée par le CSM, mais doit d'abord redemander l'avis de celui-ci.[1]"

Comme le souligne le renvoi [1], la sanction initiale étant inexistante, il serait diffcile d'en réclamer une "plus grave"...

Alors... même pas cap' Rachida Dati ?



211. Le dimanche 3 août 2008 à 20:31 par JBpoquelin

bien d'accord avec ramses : à vous lire , c'est : <<il ne s'est rien passé, d'ailleurs c'est le CSM qui le dit ( ....) >>.....
Je tiens donc à remercier le CSM pour cet enterrement de premiere, bravo !
quant à Veronique qui cherche à comprendre malgré tout : on ne mesure de la fièvre avec un thermometre cassé.

212. Le lundi 4 août 2008 à 01:15 par ramses

Dadouche :
On va la refaire une dernière fois: aucune faute DISCIPLINAIRE n'a été commise (sauf une, amnistiée).

Je ne voudrais pas jouer les Cassandre, mais je crains qu'avec des arguments tels que ceux-là, l'indépendance du CSM ne soit largement remise en question dans les mois qui viennent...

Depuis l'affaire du sang contaminé, l'argument "Responsable mais pas coupable" ne convainc plus personne.

Eolas:
Je vais donner des vacances à Dadouche en répondant à sa place. Ce que vous dites n'a aucun sens, et l'amalgame que vous faites avec une affaire qui a fait 1500 morts est écœurante. Marrant comme la certitude d'avoir la morale de son côté dispense de la respecter par la suite. Allez, partez en vacances, vous en avez besoin et nous aussi.

213. Le lundi 4 août 2008 à 07:40 par Adrien

Si je resume la position de Dadouche et des autres, le drame d'Outreau est donc essentiellement du au processus de la justice, et n'est pas imputable a une personne en particulier. Fort bien. Mais quelque chose me gene quand meme.

Il y a une autre affaire qui selon moi ressemble fortement a Outreau. C'est l'affaire Baudis. Une personne fait des revelations a la justice. La presse, s'empare de l'affaire, et c'est le lynchage mediatique. De memoire, je revois au moins un plan aerien sur france deux montrant un des lieux ''des parties fines'' soit disant organisee par Baudis et ses amis, et surtout, summum selon moi de l'horreur journalistique, l'interview d'un des ''temoins'' par Karl Zero, pour le vrai journal, avec temoin masque, voix deformee, et hochement de tete de Karl Zero, face camera chaque fois qu'elle balancait une bonne saloperie de plus. (desole pour le gros mot, mais je vois pas quoi dire d'autre pour qualifier cela). Baudis demissionne du CSA, de la mairie de Toulouse, trahis par ses amis. Bref il subit de plein fouet cette affaire. La s'arrete la ressemblance avec Outreau.

Car alors que tous s'acharnent, la justice suit sont cours calmement, montre que toutes les accusations sont fausses, voir carrement fantaisistes. Pour finir, Baudis est totalement blanchi. Et ce n'est que justice. Ici, la machine judiciaire merite des felicitations.

Mais, comment un processus normalise peut amener a deux resultats si differents? Si dans un cas il marche, comment expliquer que dans l'autre il ait echoue? Je ne peux m'empecher de croire, que c'est parce que le processus a ete mal utilise. Et donc qu'il y a bien un homme, ou plusieurs, qui est responsable de cette erreur.

Aussi, je me sens mal a l'aise, quand on me repond ''c'est la faute a pas de chance, tout le monde a fait son travail correctement...''

Certes, il ne faut pas qu'accuser les juges, et je m'en garde bien, chacun a sa part de responsabilitee, mais vouloir l'occulter au pretexte de ''c'est pas moi mais j'etais pas tout seul'' me semble assez innaproprie. Hors, j'avoue que c'est un peu mon impression a la lecture de ce billet et de ces commentaires.

Je m'excuse des fautes d'ortaugraffe et du manque d'accent, mais j'ai pas de clavier francais sous la main.

214. Le lundi 4 août 2008 à 10:02 par JLouis

@ Fantômette 200 et Dadouche 204

Merci pour ces éclairages passionnant tout comme l'est ce blog dans son ensemble. Donc merci Maître !

Je doute toutefois, qu'il soit lu assidûment par 62 millions d'individus et regrette donc l'éclairage médiatique reçu par la majorité d'entre nous.

L'absence de faute disciplinaire, sauf une prescrite..., conduisant naturellement à ne pas sanctionner les acteurs et permettant logiquement au commun des mortels d'en déduire que l'absence de sanction démontre ou découle d'un fonctionnement normal de la Justice, il me parait logique que le l'incompréhension et la défiance gagnent du terrain.

Bonnes vacances à ceux qui partent !

215. Le lundi 4 août 2008 à 15:02 par Fantômette

@ Ramses (com 208)

Voilà, nous y sommes : kiséti donc qui avait raison à propos de Tschok ? Hé oui, je suis calme, patiente et flegmatique, mais j'ai également une excellente mémoire.

216. Le lundi 4 août 2008 à 15:30 par Fantômette

@ Dadouche

Tu as très bien compris ce qu'avait expliqué Tschok en son temps, me semble t-il.

Ce qui est un peu surprenant, et en même temps assez encourageant, c'est que, lors de la discussion de décembre dernier, nous nous étions fait la réflexion que si la construction juridique de l'instruction, en général, n'autorisait que très peu de contrôle parallèle, la pratique tendait à réintroduire une forme de "contrôle parallèle discret".

Par exemple, à l'époque, j'avais entrepris d'expliquer que le JLD ne contrôlait pas l'opportunité d'une détention sur le critère de la plus ou moins grande probabilité de la culpabilité d'un mis en examen. Eolas m'avait repris, et m'avait renvoyé à un billet de Paxatagore, en expliquant que si c'était exact en droit, dans les faits, un avocat pouvait ne pas se priver d'aborder ce point devant le JLD, qui en pratique, le prend aussi en compte. Et j'avais pu me convaincre de la véracité de ce qu'il avançait très peu de temps après en fait.

Donc, alors que le JLD ne permet pas ++dans les textes++ de jouer un rôle de contrôle parallèle, en pratique, cela se peut.

C'est aussi Eolas qui m'a appris que l'on pouvait tout bêtement aller parler d'un dossier à l'instruction avec un juge d'instruction, sans attendre une audition, ou autre. De façon informelle. Honnêtement, avant qu'il n'en parle dans son blog, cela ne me serait pas venu à l'idée : on me l'avait jamais dit, ni à la fac, ni au crfp.

Là aussi, dans les termes d'une analyse accidentologique, la pratique développe extra legem un certain contrôle parallèle, qui peut s'avérer efficace quand les deux parties concernées jouent le jeu (avocat et juge d'instruction).

Et cette autre pratique, qui fait toujours un peu râler les avocats, les contacts informels entre parquetier et juges d'instruction sur un dossier commun. Là aussi, cela m'avait frappé, toujours relu dans ces termes, c'est une pratique qui instinctivement corrige une faiblesse du système. Il ne faut pas y voir forcément un problème, mais peut-être une solution. A CONDITION évidemment, que les avocats de la défense le fassent également.

Intuitivement, j'ai tendance à penser que la simple constatation d'une pratique qui vient (tenter de) contre-balancer cette faiblesse montre la justesse des termes de cette analyse.

Une autre piste de réflexion : toute l'organisation judiciaire est structurée par le contrôle séquentiel : l'organisation du parquet, des juridictions, etc. C'est la nature même du système, on ne luttera pas contre cela, et cela n'est même pas souhaitable.

On peut aussi cependant peut-être réfléchir à la façon, non pas seulement de renforcer ou créer des systèmes, même ponctuels, de contrôles parallèles, mais également de lutte contre le phénomène de persistance dans l'erreur.

A t-on perdu Tschok ?

217. Le lundi 4 août 2008 à 17:01 par tschok

Bonjour Fantômette,

Arf!

Je suis là, mais par épisode et je reviens juste pour avoir le sentiment de mon inutilité à la lecture de votre analyse de l'avis du CMS: si vous l'analysez avant de me laisser le temps de peaufiner ma propre analyse, je n'ai plus qu'à partir en vacances (youpiiii!)!

Vous avez fait le boulot. Et comment, en plus!

:)

Sur votre question à la suite de votre conclusion:

"Outreau, c’est la faillite de la parole partagée. C’est un accident de communication. C’est quand tout le monde monologue, à tour de rôles, mais que plus personne ne dialogue.

C’est une analyse plutôt intelligente, qui pourrait être fructueuse, mais le sera t-elle ?"

Alors ça, c'est l'enjeu.

Maintenant qu'on tient une piste, il faut la faire passer dans le réel. Et là, cela devient extrêmement compliqué.

L'une des difficultés, et non la moindre, est de faire accepter à l'opinion publique que le système peut s'améliorer sans passer par la sanction.

Comment faire accepter par une opinion publique dont la sensibilité pro répressive a été flattée, que la justice, désormais considérée comme un système faillible, puisse s'améliorer d'une autre façon qu'en sanctionnant ceux là même qui sont chargés d'appliquer la punition, alors précisément que la punition n'est socialement acceptable que parce qu'on est tous égaux devant la loi?

Un défi, donc...

J'entrevois deux axes possibles: la communication en temps de crise qui consiste à ne pas tricher sur la matérialité des faits tout en contingentant l'information, avec un agenda précis step by step, ou bien la communication de style jésuistique, qui suppose d'accepter que le transfert de l'information passe par un stade de non dit, qui permet finalement une meilleure compréhension de l'information, mais dans un terme incertain.

Mais avant cela, il y a encore un énorme travail théorique à faire et un travail de "libération de la parole" par les principaux acteurs: il faut que les juges parlent, et surtout, se parlent. Et pas seulement eux d'ailleurs.

De quoi s'occuper pendant les vacances aoûtiennes que je vous souhaite les meilleures, si vous en prenez.

PS: Dadouche: désolé pour ce com HS et merci pour vos réponses.

@ Ramses: mais je vous en prie, il n'y a pas de mal.

218. Le lundi 4 août 2008 à 18:15 par Fantômette

@ Tschok

Je SUIS en vacances. Plus pour très longtemps, snif.

Prenez les vôtres, mais promettez-moi qu'un jour j'aurai votre propre analyse de la décision du CSM entre les mains. Sinon, je vous accuserai de prêcher le travail en parallèle sans le mettre vous-même en application.

@ CEH

Je me souviens vous avoir déjà lu ici ou là, mais ne sait pas (ou plus) quelle est votre profession (désolée...) ?

Je suis avocat, collaboratrice libérale. En ce qui me concerne, j'aimerais assez pouvoir travailler en parallèle sur certains dossiers. La somme de travail, et la relative petite taille de la structure qui m'exploi.. pardon, qui me fait vivre et à qui je dois tout, fait que nous ne travaillons qu'en séquentiel. Si lorsqu'il s'agit de rédiger une assignation en acquisition de clause résolutoire, ou une injonction de payer, je me débrouille toute seule sans flipper, il est des dossiers où je regrette clairement ne pas pouvoir en discuter au fur et à mesure de leur avancement. Je trouve que c'est un métier où l'on se sent seul, le métier d'avocat.

Ceci est un commentaire que nous qualifierons de commentaire "à message", plus particulièrement adressé à tous ceux qui emploient des collaborateurs.

@ JLouis

Parce que ces millions de personnes ne vont pas jusqu'au bout du raisonnement.

Si on leur dit : Tout fonctionne correctement, et Outreau peut se produire (et se reproduire, ne vous leurrez pas).

Le Droit est rigoureusement respecté tout au long de la procédure, et Outreau peut se produire.

L'étape qui leur manque, à eux qui se contentent de réagir sans réfléchir, c'est celle qui consiste à dire : mais alors, que faut-il modifier à ce fonctionnement, et au Droit, pour qu'Outreau ne puisse plus se reproduire (et c'est un objectif que l'on peut se fixer mais que l'on atteindra jamais, je brise vos illusions immédiatement, cela fait partie de mes obligations professionnelles).

Le problème réside dans le fait que beaucoup confondent souvent la faute et le dommage. Si l'on dit : "il n'y a pas eu de faute commise par le juge d'instruction ou le juge des libertés", combien parmi eux s'écrient : "ah bon, parce que mettre des innocents en prison, ce n'est pas une faute !"

Confusion. Emotion. Incompréhension.

Mais le temps des explications n'est pas celui de l'émotion. Si l'on prenait le temps d'écouter aujourd'hui les auditions des magistrats interrogés par la commission, si un travail quasiment littéraire pouvait être fait sur la réthorique utilisée par les questionneurs et les questionnés, à l'instinct, je vous répondrai que l'on concluerait à l'existence de deux champs lexicaux très différents.

Le jugement moral, l'émotion, la colère, la compassion.... du côté des questions (et des mis en examen innocentés).

La raison, le droit, la pédagogie, du côté des réponses. Mais ceux qui ont parlé rationnellement étaient donc littéralement "à côté de la plaque". Inaudibles et incompréhensibles.

Vous croyez que ça se serait passé comment, si au milieu de nos savants commentaires sur les faiblesses du contrôle séquentiel, l'un ou l'autre des accusés innocentés était venu crier sa douleur d'avoir été faussement accusé ?

219. Le lundi 4 août 2008 à 18:30 par Fantômette

@ Simplet

"... pourquoi ne pas envisager un contrôle transversal, par des personnes extérieures au dossier, non concernées par son aboutissement dans un sens dans un autre, et pourquoi pas extérieures au monde judiciaire, mais qui auraient accès à la totalité des pièces? Ou l'analyse d'un simili dossier, mais par exemple anonymisé, par des juges d'un autre ressort, ou par des universitaires ?"

Peu praticable. La phase de l'instruction est secrète. Pour une bonne raison, c'est que, pour simplifier, il s'agit d'une phase d'enquête. Les éléments récoltés ne peuvent pas facilement être diffusés dans le public sans mettre en péril l'enquête. Les personnes concernées disparaitraient rapidement, les preuves encore plus vite, etc.

J'ai bien compris qu'il s'agirait d'un public restreint dans votre idée, mais tout de même.

Et par ailleurs, introduire encore de nouveaux intervenants, je ne sais pas si c'est bien utile, qu'ils soient universitaires, magistrats ou justiciables.

Je vous rappelle que selon les chiffres qui circulent, on parle d'une soixantaine de magistrats qui ont eu, à un moment ou à un autre, à un titre ou à un autre, accès à tout ou partie du dossier d'Outreau. Je ne sais combien d'avocats, experts, etc ont pu également en prendre connaissance, en tout ou partie.

Il ne s'agit donc pas de faire intervenir d'autres personnes, à mon avis, il en intervient déjà suffisamment.

Le problème, comme j'ai tenté de l'expliquer, est de ne pas simplement juxtaposer leur travail, mais de faire en sorte qu'il puisse être fait en commun.

Pas tout le temps. Pas tout le monde avec tout le monde.

Mais au moins de façon à permettre des relectures, qui seront peut-être partiales et subjectives, mais complémentaires.

220. Le lundi 4 août 2008 à 19:50 par Lucas Clermont

Si je puis me permettre, la précieuse synthèse de Dadouche #204 est perdue pour le plus grand nombre si elle n'est pas remontée au rang de billet. Je sais bien que sur ce blogue il y a du doping mais vu ce que me coûte d'écrire trois lignes sa longueur m'incite à penser que le canon du stylo de Dadouche a mis pour refroidir un certain temps. Bête de perdre ce travail !


Dadouche :
Au moins ça a fait fuir les trolls. Plus efficace que le sabre-laser : le somnifère.


Quant au tout aussi précieux débat autour de Fantomette à propos du contrôle dans une organisation : il y en a partout ! Là aussi on — la foule heureuse et épanouie dont Eolas n'a pas encore fustigé l'apparence du bon sens — gagnerait à le regrouper ou bien à en faire un bref billet pour lancer ce thème. Ça plairait à tout le monde parce qu'on pourrait tout aussi bien conclure à : ya-pas-d'argent-pour travailler ou bien ils-se-la-pètent-qu'est-ce-que-tu-veux-qu'ils-contrôlent.


221. Le lundi 4 août 2008 à 20:16 par Shell

L'avis d'un expert


Van Ruymbeke veut supprimer
le juge d'instruction
Le magistrat estime qu'il devrait être remplacé par un système accusatoire à l'américaine.


Le juge van Ruymbeke (Sipa)


Interrogé sur le scandale judiciaire d'Outreau, le juge Renaud Van Ruymbeke a estimé jeudi 19 janvier qu'il fallait "supprimer le juge d'instruction".
"Il faut supprimer le juge d'instruction", a affirmé le magistrat dans une interview au Monde daté de vendredi.
"Parce qu'il a une double casquette. Il est à la fois enquêteur et arbitre, donc pris dans une contradiction intellectuelle. D'un côté, il doit développer son enquête, de l'autre, il va en tirer les conclusions, décider du renvoi ou non des personnes devant le tribunal", a-t-il expliqué, se déclarant "favorable" au système accusatoire à l'anglo-saxonne. Dans un tel système, "le parquet ferait l'enquête lui-même, à condition bien sûr qu'il soit indépendant".

"Un rôle central"

Pour lui, le juge Fabrice Burgaud, le magistrat instructeur de cette affaire de pédophilie mis en cause par les acquittés, "a un rôle central dans cette affaire puisque c'est lui qui a mené les investigations, recueilli les témoignages, décidé de renvoyer les personnes devant les assises...".
"Mais il n'a pas non plus à assumer toute la responsabilité.

Ce n'est pas lui qui a placé les gens en détention, c'est un juge du siège, le juge des libertés et de la détention (JLD), créé il y a quelques années afin justement de lutter contre les abus de la détention provisoire !", a-t-il ajouté.
"La seule question à propos du juge, c'est de savoir s'il a instruit objectivement ou pas", a-t-il affirmé, relevant que "toutes les décisions du juge ont été avalisées par la chambre de l'instruction, composée de trois magistrats expérimentés de la cour d'appel".
"Il ne s'agit donc pas du fait d'un juge isolé, même s'il a une part de responsabilité, mais d'un système, je dirais même d'un corps, puisque finalement, on s'aperçoit que multiplier les garde-fous n'empêche pas les erreurs", a jugé le magistrat pour qui "il faut remettre tout notre système, qui est archaïque, à plat".
Le juge Van Ruymbeke a par ailleurs estimé que le juge doit "être responsable, mais pas de ses actes juridictionnels".


Dadouche :
Le problème, c'est que le système accusatoire n'évite pas vraiment les erreurs. La seule différence, c'est que le sens de l'erreur est plus souvent lié à l'épaisseur du portefeuille de l'accusé. Je pense que le développement de la collégialité pour certaines décisions (si les moyens nécessaires y étaient consacrés) est une piste plus intéressante que la suppression du juge d'instruction, particulièrement alors que le contrôle du parquet par l'exécutif est de plus en plus fort.
Je serais en garde à vue en ce moment dans l'Ain, je serais plutôt rassurée de savoir que c'est un juge d'instruction qui va chapeauter la suite de l'enquête concernant les faits dont je serais soupçonnée plutôt que le procureur qui a multiplié les déclarations sur mon implication et ma santé mentale, sous le regard approbateur du garde des Sceaux. Mais bon, je suis un peu psychopathe.
En ce qui concerne la responsabilité disciplinaire, les magistrats SONT responsables, sauf de leurs actes juridictionnels. On peut s'en faire une idée

222. Le mardi 5 août 2008 à 08:13 par Véronique

@ ramses

" Si je vous suis bien, après avoir intégralement lu l'avis du CSM du 18 juillet, il faudrait non seulement admettre qu'aucune faute n'a été commise dans la conduite de cette affaire, mais en plus s'en vouloir profondément d'avoir pu souhaiter que tel ou tel magistrat soit reconnu coupable d'une telle gabegie ? "

Pardonnez-moi de ne vous répondre que maintenant.

Ma réaction à votre post était liée à votre réaction à l'intervention de Dadouche, que j‘ai lue comme sommaire et injuste par rapport à un positionnement de Dadouche qui était celui de la sincérité intellectuelle .

Dadouche a repris point par point les éléments qui, de son point de vue de magistrat, ont contribué à faire, qu'ensemble, pour une même affaire l'institution judiciaire a déraillé gravement.

Si vous sélectionnez un point ou un autre soulevé par Dadouche, vous vous rendrez compte que votre parti pris du départ - tel ou tel magistrat est coupable, forcèment coupable - confronté a tel ou tel environnement intellectuel ou fonctionnel de cette affaire n'est pas aussi simple à établir.

Je pense que dans votre postulat de départ, vous faites la même erreur que celle que vous reprochez à la justice dans cette affaire. Votre instruction ne consiste qu'à justifier des éléments à charge de votre croyance initiale: la culpabilité.

Pour qui veut comprendre Outreau, il est plus utile, à mon avis, de commencer par lister les environnements idéologiques, politiques, sociétaux, sociologiques, médiatiques, l’histoire, les contextes, les fonctionnements d’un tribunal comme celui de Boulogne-sur-mer. Par exemple, ceux des habitudes et des usages professionnels qui structurent alors les rapports d'un tribunal avec les services sociaux d'un département.

D’autre part, à peu près au même moment, la justice a " réussi ", ailleurs, à Angers, une instruction de grande ampleur se rapportant à des faits de pédophilie et d‘inceste.

Sans vouloir comparer abusivement et maladroitement le " résultat " judiciaire d’Outreau et celui d’Angers, il me semble que cet élément est à prendre en compte.



223. Le mardi 5 août 2008 à 13:37 par ENTOURLOUPE

On est passé à coté des vraies responsabilités dans l'affaire d'Outreau. On ne peut pas blâmer M.BURGAUD d'avoir était un Juge d'instruction incompétent. C'était son premier poste à la sortie de l'ENM. Même s'il devait bien sentir qu'il n'était pas compétent pour exercer de telles responsabilités ( il l'a d'ailleurs reconnu ), il a préféré prendre le poste plutôt que de démissionner et d'aller pointer à l'ANPE. C'est humain. En revanche il était de la responsabilité des magistrats qui l'ont formé de refuser sa titularisation. Ce sont eux les vrais responsables. Or on remarque que dans la commission d'enquête parlementaire figurait le député M.Jean-Paul GARRAUD qui a été responsable à l'ENM de la formation des magistrats durant la scolarisation de M.BURGAUD. Etonnant non? Mais y a-t-il eu une procédure disciplinaire à son encontre? où est-ce le tour de passe-passe que personne n'avait relevé?

224. Le mardi 5 août 2008 à 18:14 par Fantômette

@ Shell

Je rejoins l'opinion de Dadouche.

C'est d'ailleurs une autre lecture possible de l'avis du CSM. Je crois que le CSM rappelle au procureur que son rôle N'EST PAS celui d'un "avocat de l'accusation" et qu'il lui reproche au contraire un certain dérapage vers une conception un peu trop accusatoire de sa fonction.

Quand le CSM reproche au procureur d'avoir établi des rapports administratifs et des rapports d'appel "parcellaires" et "péremptoires", il lui reproche de ne pas avoir été suffisamment objectif, et même impartial.

Ce n'était pas son rôle dans la procédure inquisitoire. Cela se serait davantage conçu dans la procédure accusatoire.

On peut toujours discuter pour savoir laquelle des deux procédures - inquisitoire ou accusatoire - est la plus sûre, la plus efficace, la moins chère, ou la plus télévisuelle.

Mais faire du système accusatoire un système moins "accidentogène", pour reprendre notre petite sous-thématique, que le système inquisitoire, c'est une erreur, à mon humble avis. Dieu sait que des Outreau, les Etats Unis en ont connu, et de grande envergure.

225. Le mardi 26 août 2008 à 03:24 par ramses

@ Fantômette 224

Bonjour, je reprends le fil de cette discussion à mon retour de vacances.

Tout d'abord, ne prenez pas mon commentaire à Tschok comme un revirement sur l'affaire "Concorde", simplement comme un effet "second degré" de quelque chose que j'avais mal encaissé au premier degré. Je ne connaissais pas Tschok et j'ai pu en effet me rendre compte au fil du temps que c'était une personne très cultivée et objectivement désabusée sur les comportements humains en général.

Pour en revenir à l'affaire Outreau, vous écrivez :

"Dieu sait que des Outreau, les Etats Unis en ont connu, et de grande envergure."

Aux Etats-Unis, quand une erreur est commise par l'Administration, on recherche les responsabilités (cf. Katrina à La Nouvelle-Orléans).

Ce qui me choque dans cette affaire, c'est que personne n'ait l'air responsable du fait que des innocents aient été incarcérés abusivement, que des vies aient été dramatiquement brisées... Pire, que les auteurs d'une telle gabegie puissent continuer leur petite carrière peinards... Comme si de rien n'était...

Dadouche rajoute à ma confusion :

"En ce qui concerne la responsabilité disciplinaire, les magistrats SONT responsables, sauf de leurs actes juridictionnels"...

J'aimerais, en l'occurence, savoir DE QUOI ils sont responsables ?

Dans le privé, un cadre est responsable de ses décisions. Celles-ci, lorsqu'elles sont inadéquates, peuvent entraîner son licenciement.

Pourquoi en serait-il différemment des Juges ?




226. Le jeudi 28 août 2008 à 08:11 par Fantômette

@ Ramsès

Je prends note que, tout en exprimant des regrets pour vous être accroché avec tschok sur l'histoire du Concorde, vous estimez néanmoins excessif de dire que vous êtes revenu sur vos premières impressions en ce qui le concernait.

La description - quelque peu péremptoire - que vous faites de notre ami m'a bien fait rire, mais il se pourrait qu'il se soit agi d'un rire nerveux, j'étais plutôt fatiguée hier soir.

Si j'avais pu le tirer par la manche quelque part sur le blog, je lui aurais indubitablement demandé : "vite, répondez-moi: êtes-vous objectivement désabusé sur les comportements humains en général ?" (et, finalement, vous voyez, ce n'était peut-être pas que la fatigue, ré-écrire ces mots me fait encore sourire.)

Sur la seconde partie de votre intervention, non, non, non. Un juge n'est pas un cadre, et la Justice n'est pas une entreprise, combien de fois faudra t-il le répéter, bon sang.

La Justice est une fonction du pouvoir souverain, avec les fonctions législative et exécutive.

J'accepterai qu'un juge soit sanctionné disciplinairement pour s'être trompé dans un acte juridictionnel quand les parlementaires le seront également à chaque loi dont l'effet sera néfaste, de même que les représentants de l'exécutif à l'origine du projet de loi, ou de leurs décrets d'application.

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