Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Le Monde annonce les lois qui existent déjà

Aliocha ayant déclaré forfait pour défendre son confrère de Rue89; je lui laisse une deuxième chance avec Le Monde. Enfin, lemonde.fr, ce n'est pas la même chose, m'a-t-on précisé (mais lors pourquoi laisser le logo en gothique ?), et à partir d'une dépêche de l'AFP.

Deux décrets du ministère de la justice parus vendredi 22 août au Journal officiel[1] autorisent l'inscription d'un fœtus né sans vie sur les registres de l'état civil. Souhaités depuis plusieurs années par de nombreuses associations, ces décrets viennent combler le vide juridique qui existait en France pour les fœtus de 16 à 22 semaines morts in utero ou après une interruption médicale de grossesse. Ils font suite à la décision de la Cour de cassation, qui, en février, avait jugé, dans trois arrêts, qu'un fœtus né sans vie pouvait être déclaré à l'état civil, quel que soit son niveau de développement.

Argh ! Kryptonite ! Ils ont dit les mots interdits ! « Vide juridique » ! Depuis le temps que je m'échine à expliquer que le vide juridique n'existe pas. Même si aucune loi ne règle expressément la question, il y a tout un corpus de droit commun qui s'applique à toutes les situations, et le juge a l'obligation de trancher toute question qui lui est légalement soumise, sans pouvoir invoquer l'absence ou l'obscurité de la loi !

Et là, en plus, il n'y avait pas de vide juridique, comme je l'expliquais en commentant les arrêts de février dernier :

Afin d'aider les parents à surmonter cette terrible épreuve, la loi [du 8 février 1993, elle a quinze ans, cette loi !] a créé pour les enfants ne remplissant pas ces conditions d'accès à la personnalité juridique l'acte d'enfant sans vie. Sans avoir les conséquences juridiques d'un acte de naissance (il figure sur le registre des actes de décès), il permet aux parents de lui donner un prénom, et de réclamer le corps pour procéder à des funérailles (auparavant, il était traité comme un déchet organique et incinéré avec les amygdales et autres appendices iléo-cæcaux, quand il ne servait pas pour former des étudiants).

Notons que la loi prévoit que l'acte d'enfant sans vie doit être dressé à défaut de certificat médical attestant la vie et la viabilité, sans préjuger de ces faits, qui relèvent de la compétence du juge.

Comme vous le voyez, la loi ne pose aucune condition de développement du fœtus.

Alors, à quoi servent ces deux décrets ?

Le premier décret modifie le décret n°74-449 du 15 mai 1974 relatif au livret de famille, en rajoutant un article prévoyant la délivrance d'un livret de famille dans l'hypothèse où le couple n'est pas marié (sinon le livret de famille est remis par le maire dès le mariage célébré) et que l'enfant né sans vie était leur premier enfant (sinon le livret de famille leur a été remis à la naissance du premier enfant). Il ne comble pas un vide juridique : il modifie le droit, qui était que jusqu'à présent, les couples dans cette situation n'avaient pas droit à un livret de famille, dont l'intérêt est plutôt limité d'ailleurs. Cet état du droit était plus probablement dû à une négligence du législateur qu'à un choix éclairé, mais il demeure que c'était l'état du droit.

Le second précise simplement que l'acte d'enfant sans vie est dressé sur production d'un certificat médical lui-même dressé conformément aux dispositions d'un arrêté du ministre de la santé. Arrêté qui est publié plus loin dans le même JO, le modèle étant consultable dans la version PDF. Conformément à la jurisprudence de la cour de cassation, la mention de viabilité n'apparaît pas dans le certificat.

Bref, un non-événement, le droit en la matière étant inchangé sauf pour la délivrance du livret de famille à un couple non marié sans enfant. S'agissant de l'âge du fœtus permettant de dresser un tel acte, l'arrêt de février dernier a interprété la loi et cette interprétation reste valable.

Voilà qui méritait une dépêche, et justifiait l'utilisation d'une photo choc qui fera bien plaisir à tous les lecteurs et lectrices ayant vécu un tel drame personnel.

Aliocha, la parole est à la défense.

Notes

[1] Un, deux.

Commentaires

1. Le vendredi 22 août 2008 à 12:30 par Pax Romana

et on va encore avoir droit aux commentaires disant que c'est une attaque contre la possibilité d'IVG...

2. Le vendredi 22 août 2008 à 12:34 par Hyo

1993 ! si tard...

3. Le vendredi 22 août 2008 à 12:36 par aude

la photo va trop loin en effet, c'était loin d'être indispensable au propos (qui en plus était erroné).

4. Le vendredi 22 août 2008 à 12:43 par brigetoun

mais ceux qui avaient vécu cela savaient que la loi était d'affichage, et sont passés vite pour ne pas ajouter l'agacement ou la colère à la cicatrice

5. Le vendredi 22 août 2008 à 13:12 par Véronique

"Aliocha, la parole est à la défense."

Eh bien, quant à moi je prends la parole de l'accusation.

" vide juridique ", c'est comme pour le mot empathie , une sorte de réflexe et de mécanisme. La répétition forcenée d'une expression ou d'un mot entendu partout, à propos de tout et de n'importe quoi, et qui masque les vides, les insuffisances, les banalités et les paresses intellectuels.

Le gros souci, c'est qu'à force d'être répétés, ces mots et ces expressions ne sont plus contestés nulle part dans les médias classiques et qu'ils adoptent ainsi un statut de vérité indiscutable.

C'est de cette façon qu'on finit par enfermer le lecteur, l'auditeur et le spectateur dans des vérités théoriques plombées. Alors que ceux-ci ne demandent qu'à être informés.

6. Le vendredi 22 août 2008 à 13:20 par X.

Un "vide juridique" peut exister, mais ses conditions constitutives sont telles que depuis la fin des res nulllius ... c'est comment dire... un objet d'étude pour les théoriciens du droit! Ah moins que sur Mars, deux saturniens aient un litige commercial sur le SAV de leur soucoupe :)
En France, le code civil l'exclut formellement...

Eolas:
Là encore, pas de vide juridique : c'est le droit saturnien des contrats qui s'applique.

7. Le vendredi 22 août 2008 à 13:21 par aude

en ce qui concerne le vide juridique, je suis étudiante en droit, et les profs de fac utilisent aussi cette expression... pourquoi?!

8. Le vendredi 22 août 2008 à 13:22 par Cimon

S'il n'existe pas de vide juridique, comment qualifier ces zones blanches, terra incognita du droit ?

Certes, la zone blanche sera coloriée lorsqu'un juge sera saisi, mais en attendant, on doit en rester aux consultations et à la doctrine... parfois partagée.

Je pense en particulier aux innovations du législateur. Par exemple, lorsqu'il a créé les autorités administratives indépendantes, il a fallu attendre quelques temps pour que l'on sache ce que c'était vraiment et quelles conclusions en tirer.

Eolas:
Fallait-il en déduire qu'elles n'existaient pas ? Qualifier de vide ce qu'on ne connaît pas est le sommet de la prétention. Si je ne le connais pas c'est que ça n'existe pas. Si je ne sais pas ce que contient ce pot fermé, c'est qu'il est vide. Vous voyez l'absurdité ?

De nombreuses questions se posent avec l'apparition de nouvelles lois. Tant que la Cour de cassation ou le Conseil d'État n'a pas tranché, on en est réduit aux supputations. Mais des supputations et l'incertitude, ce n'est pas un vide. D'autant que la solution viendra de l'analyse critique des supputations faites jusqu'alors. Donc il n'y avait pas de vide avant.

9. Le vendredi 22 août 2008 à 13:22 par aude

X a en partie répondu à ma question!

10. Le vendredi 22 août 2008 à 13:49 par firejuggler

si la boite est fermée, elle peut être vide ou remplie... c'est la loi de schrodinger?
/troll

11. Le vendredi 22 août 2008 à 13:50 par X.

@ Eolas

Encore faut il que Saturne dispose d'un Etat, d'un système juridique et d'un droit des contrats...
Or mes connaissances en droit saturnien sont des plus limitées et mon professeur de Droit constitutionnel avait omis l'étude de ce passionnant système...

Historiquement des vides juridiques ont existé en France (avant le code Napoléon) et même avant la création du droit...
Si je troque 3 silex contre 1 peau de bête et que je ne m'acquitte qu'imparfaitement de mon engagement en ne livrant que deux silex, Homo neanderthalensis est régi par quel système juridique ? Par le rapport pur de force ? J'ai un vide juridique dans mon œil droit et c'est assez douloureux :)

Cela fait peut être sourire en 2008 mais sachez que certains Etats actuels (rares) n'existaient pas au XIXème siècle (et encore moins leurs système juridique)...

Sinon je note que vous avez une compétence en droit saturnien des contrats qui sera, semble-t-il, fort appréciée au barreau de Paris... :)

PS: Pour Brice, les saturniens ne sont pas dispensés de visa (cf CESEDA) mais pense quand même aux VTA...

Eolas:
Un de vos collègues d'un TA proche de la capitale m'a un jour fait remarquer que mon recours, c'était du droit saturnien. C'est ce jour là, grâce à ce compliment, que j'ai compris que je connaissais, à ma grande surprise, le droit de cette planète.

12. Le vendredi 22 août 2008 à 13:52 par bob

"Bref, un non-événement,"

Pas de vide de spectateurs pour les publicités =)

13. Le vendredi 22 août 2008 à 14:01 par Cimon

@eolas :

extrait de "vocabulaire juridique", de Gérard Cornu & Association Henri Capitant, PUF, 7ème édition (pour une fois je cite mes sources) :

1. Lacune non intentionnelle du droit (en une matière juridiquement relevante) dont le comblement incombe in casu au juge (lequel ne peut dénier justice - article 4 du code civil), à terme au législateur lorsque l'analogie ne suffit pas à suppléer la loi, la doctrine ayant pour mission de montrer, en raison et imagination, que le vide est souvent plus apparent que réel.

2. Aire du non-droit ; espace de liberté dans lequel le droit est non présent,, qui, en fait, est juridiquement non relevant (même si le droit pourrait avoir la tentation de s'y introduire).


On dira que je comprends plutôt vide juridique selon la définition 1 et vous selon la définition 2 ?

14. Le vendredi 22 août 2008 à 14:07 par PEB

Pas tout à fait un non-évènement.

A la lecture de l'arrêt de la cour de cassation, le pouvoir réglementaire a voulu réorganiser l'application de la loi en levant certaines ambigüités. Un petit texte technique qui ne coûte pas grand chose peut tout de même faire sécher certaines larmes.

Plutôt que "vide juridique", ce substantif est d'ailleurs plus approprié.

15. Le vendredi 22 août 2008 à 14:12 par Vonric

Aliocha doit être en vacances...

16. Le vendredi 22 août 2008 à 14:16 par Mussipont

@Vonric : non, non, elle est là mais pour l'instant elle fourbit ses armes. Ca va chauffer...

17. Le vendredi 22 août 2008 à 14:16 par Fantômette

@ Firejuggler

Non, la loi de Shrödinger, c'est que la boite est vide ET remplie.

Pareil pour les terra incognita du Droit : inconnues, elles ne sont pas vides pour autant, mais sont le lieu où co-existent toutes les interprétations possibles du Droit jusqu'à ce que la jurisprudence fasse petit à petit s'effondrer toutes ces ondes de probabilité, ne laissant derrière elle que le droit applicable.

@ Aude : expliquez cela à vos profs de droit et revenez me raconter comment ils ont réagi.

18. Le vendredi 22 août 2008 à 14:19 par boratkehul

Maître , votre retour de vacances vous a fait le plus grand bien....

Quelle pêche ! deux billets percutants le même jour.... Vous trouvez quand même le temps de vous reposer ?

On est gâtés de vous avoir....

Pour les journalistes qui aiment le "vide juridique", je leur conseille de sauter dedans à l'élastique, il paraît que ça détend....

19. Le vendredi 22 août 2008 à 14:29 par Youpet

Prochain ouvrage dans les librairies :
De l'application de la dualité onde-corpuscule et des ondes de probabilité en droit français.
Exemple d'application :

- Soit un prisonier X, dans sa cellule Y dans un centre de rétention Z.
S'il est situé proche de la sortie, son onde de probabilité peut dépasser de sa cellule. Peut-il être condamné pour tentative d'évasion ?
La condamnation se fera-t-elle au prorata de sa probabilité de présence en dehors de sa cellule ?

20. Le vendredi 22 août 2008 à 15:47 par De passage

@Fantomette :
Allons, allons ! Laissons Schrodinger tranquille ! L'experience de Schrodinger tient juste a illustrer a une echelle comprehensible par l'homme ce qui se passe au niveau quantique... Que l'on peut se situer dans deux etats differents a la fois et que l'observation va fixer un etat. Un chat est dans une boite et a une probabilite d'etre mort au bout d'une minute, le delai est ecoule. Le chat est mort ET vivant par defaut d'observation, il peut etre dans les deux etats a la fois mais l'ouverture de la boite (l'observation donc) revele instantanement si il est mort ou vivant !
On pourrait donc en deduire pour en revenir au sujet du vide juridique qu'il existe ET n'existe pas mais que la probabilite qu'il existe est nul car le juge ne concluera jamais au vide juridique puisque, je cite :
"il y a tout un corpus de droit commun qui s'applique à toutes les situations, et le juge a l'obligation de trancher toute question qui lui est légalement soumise, sans pouvoir invoquer l'absence ou l'obscurité de la loi !"
On pourra toutefois se poser la question de l'interet de l'application des theories de la mecanique quantique au droit, a part faire fonctionner l'industrie pharmaceutique...

21. Le vendredi 22 août 2008 à 15:48 par tschok

Pffffff!

Indéfendable!

Le vide juridique n'existe que s'il n'y a rien pour le réglementer.

Dans tous les autres cas, il n'existe pas.

Les journalistes du Monde devrait le savoir, quand même.

22. Le vendredi 22 août 2008 à 15:50 par tschok

@ Fantômette,

"Pareil pour les terra incognita du Droit : inconnues, elles ne sont pas vides pour autant, mais sont le lieu où co-existent toutes les interprétations possibles du Droit jusqu'à ce que la jurisprudence fasse petit à petit s'effondrer toutes ces ondes de probabilité, ne laissant derrière elle que le droit applicable."

Vous aussi vous plaisantez, ou bien vous être vraiment sérieuse?

23. Le vendredi 22 août 2008 à 16:12 par Scarabée

Il est vrai que l'expression "vide juridique" est souvent employée, et souvent à tort dans un système juridique comme le nôtre.
En pratique, de nouvelles situations se présentent, créent des problèmes inédits et il n'existe pas toujours de loi spécifique pour les résoudre. Dans ce cas, on pourrait être tenté de parler de "vide juridique". On parlera plutôt de "lacune" de la loi pour dire qu'il n'y a pas de texte spécial.

Mais le droit ne se résume pas aux lois spéciales. Les juges peuvent puiser le fondement juridique de leurs décisions dans un ensemble de règles existantes, et notamment dans un ensemble de principes et de règles générales.

Par exemple, en matière de contrats, avant que n'existe le droit de la consommation, les juges confrontés à des problèmes inédits, tels que le défaut d'information des contractants, ou encore les clauses abusives des contrats standardisés, avaient recours aux règles du "droit commun des contrats" (articles 1101 et suivants du Code civil). Avant que n'existe l'obligation d'information de l'article L. 111-1 du code de la consommation, il existait la sanction du dol par réticence (le fait de taire à son cocontractant une information essentielle pour le tromper et le déterminer à contracter), sur le fondement de l'article 1116 du Code civil. En attendant le vote de la loi "pour la confiance en l'économie numérique", il était fait application du droit commun des contrats pour la conclusion des contrats par voie électronique, via Internet. Cette loi a introduit dans le code civil un certain nombre de dispositions adaptées aux contrats conclus par Internet et qui complètent le "droit commun". En pratique, chaque fois qu'apparaît un contrat d'un type nouveau, et qu'on ne pourra pas le ranger dans une catégorie existante (ex : contrat de bail, contrat de vente, contrat de travail), on dira que c'est un contrat "sui generis", mais son régime, les règles qui lui sont applicables seront celles du droit commun. Il n'y aura donc pas de vide juridique.

Comme en matière contractuelle, la plupart des situations de fait peuvent être attirées dans une catégorie juridique à laquelle correspond une solution, un régime juridique spécial ou de droit commun. Il est certes possible que la catégorie juridique choisie, et le régime appliqué ne soient pas toujours entièrement satisfaisants.

Mais il n'y a pas à proprement parler de "vide juridique", seulement des incertitudes, une insécurité juridique, liées aux difficultés d'adaptation du droit aux situations sociales, économiques nouvelles dans une société qui change vite; et qui n'ont rien d'anormal à condition qu'elles demeurent temporaires. Dans un premier temps cette tâche est dévolue aux juges, qui ne peuvent pas commettre de déni de justice et doivent fonder juridiquement leurs décisions.

L'expression "vide juridique" semble plutôt traduire l'idée que les solutions juridiques proposées ne correspondent plus par exemple à ce que la morale réprouve, ou à ce que les "bonnes moeurs" commandent, qu'elles ne répondent pas entièrement à des besoins nouveaux, qu'elles ne correspondent plus à ce à quoi la société aspire.

Peut être en est il autrement dans d'autres lieux, notamment ceux qui n'ont pas d'Etat, de Constitution, et de système judiciaire. Il n'est pas nécessaire je crois d'aller sur Mars pour en trouver. Et encore pourrait on peut être considérer qu'il existe en ces lieux une forme de "droit". Mais cela relève davantage de l'anthropologie juridique.

@ X.:
"Historiquement des vides juridiques ont existé en France (avant le code Napoléon) et même avant la création du droit..."

A partir quelle date situez-vous la création du droit ?


24. Le vendredi 22 août 2008 à 16:13 par jules

Comment expliquer que la doctrine réflechisse à ce point au problème des "lacunes en droit" ?
Est ce si différent des vides juridiques ?

Eolas:
C'est la différence entre l'inconnu et l'inexistant.

25. Le vendredi 22 août 2008 à 16:30 par Renato

Cher Eolas,

j'interviens avec quelque retard sur le débat concernant les circulaires réglementaires, qui s'est tenu sous un précédent billet.

Si je ne suis pas en désaccord complet avec votre présentation des circulaires réglementaires, je souhaite apporter une petite précision de publiciste.

1- Le débat entre circulaires interprétatives (ce qu'elles devraient être en principe) et réglementaires (ce qu'elles sont parfois) concerne en premier lieu leur justiciabilité, c'est-à-dire la possibilité pour un requérant de les contester devant le juge de l'excès de pouvoir.

Si les premières échappent au contrôle du juge de l'excès de pouvoir - tandis que les secondes peuvent utilement être déférées à sa censure - c'est en raison du fait qu'elles ne constituent pas des actes [i]faisant grief[/i], cette condition étant essentielle du point de vue de la recevabilité d'un recours en contentieux administratif.

La question de leur légalité ne se pose que dans un second temps, et donc à l'égard des seules circulaires réglementaires.

2- Sur la légalité des circulaires réglementaires, je partage votre présentation de la JP ND du Kreisker, à savoir qu'un ministre n'a pas de pouvoir réglementaire sans texte, et qu'il ne peut donc ajouter à la loi sans que son arrêté ou sa directive soit immédiatement censuré... en cas de saisine du JA dans le délai de recours contentieux ! (ou par voie d'exception d'illégalité ; je bénis chaque jour cette création prétorienne...).

Toutefois, vous omettez il me semble l'hypothèse de la JP Jamart de 1936, en vertu de laquelle un ministre dispose, en sa qualité de chef de service (cette précision est bien entendu importante), d'un pouvoir réglementaire pour les nécessités du service, en direction des personnes se trouvant en relation avec le service (collaborateurs ou usagers) et dans le respect des dispositions légales et réglementaires.

Autrement dit, créer des règles à destination de l'administration en vue de la bonne application de la loi ou d'un décret, oui, mais pas contra legem évidemment (je simplifie).

En pratique, ce pouvoir réglementaire sans texte est cependant fort circonscrit, les limites du service apparaissant bien vite.

En espérant que cette précision aura été utile.

26. Le vendredi 22 août 2008 à 16:33 par Pax Romana

@ De passage (20)

« Le chat est mort ET vivant par defaut d'observation, il peut etre dans les deux etats a la fois mais l'ouverture de la boite (l'observation donc) revele instantanement si il est mort ou vivant ! »

Non, vous vous trompez. Le chat est mort et vivant, et ce n'est pas par défaut d'observation. L'observation ne révèle pas l'état du chat : elle le PERTURBE, et fait le chat passer de l'état « à la fois mort et vivant » à l'un des deux états « mort » ou « vivant ».
Si bien que l'interprétation de Fantômette est très pertinente, tandis que votre analogie est plus que douteuse.


@ tschok (22)

« Vous aussi vous plaisantez, ou bien vous être vraiment sérieuse? »

Elle s'est sans doute référée à Schrödinger sur un ton léger, mais j'espère bien qu'au fond elle est sérieuse, car son parallèle est remarquablement bien trouvé.

27. Le vendredi 22 août 2008 à 16:52 par tschok

@ Pax Romana,

Oui, bien trouvé en effet, ce d'autant que les parallèles plus concrets, comme le kiosque à journaux ou le magnétoscope virtuel en ont pris plein la figure ces derniers temps.

:)

Longue vie à la boîte à chat!

28. Le vendredi 22 août 2008 à 18:32 par julien

En fait, l'expérience de Schrödinger illustre un paradoxe du changement d'échelle de la physique quantique à la physique classique; elle se manifeste sous la forme du mécanisme qui va tuer le chat actionné par la détection de la désintégration d'un atome radioactif ayant une probabilité de 0,5 de se désintégrer à un instant t. Or, avant cette détection par le mécanisme, l'atome, en vertu des lois quantiques, est à la fois désintégré et non désintégré; par extrapolation, du point de vue de l'observateur, le chat est donc également à la fois mort et vivant !

C'est cette notion de EN MÊME TEMPS mort et vivant qui fait le sel de ce petit jeu, car Schrödinger faisait comprendre que ce que nous pouvons reconnaître au non-visible (un atome), nous aurions beaucoup plus de mal à l'admettre pour quelque chose relevant de notre monde visible immédiat (un chat).

29. Le vendredi 22 août 2008 à 19:26 par Augustissime

@julien
Tous les physiciens ne reconnaissent pas la réalité de la superposition des états, même au niveau atomique. La mécanique quantique est un modèle, certes très performant, mais qu'il serait hasardeux de voir comme une description exacte de la réalité du monde.

Je pense que la plupart des scientifiques ont compris que ni la réalité ni la vérité ne peuvent se connaître avec certitude.

30. Le vendredi 22 août 2008 à 19:34 par Augustissime

Arrivé sur une île déserte, je nomme le premier crabe venu juge suprême et décide qu'il tranchera en dernier recours tout ce que la loi de l'île ne prévoit pas, par un savant hochement de pinces.

Eh bien, figurez-vous que par ce simple décret je viens d'un coup d'un seul de faire disparaître tout vide juridique de la surface de mon île, sans me donner le mal de rédiger le plus petit code.

Astucieux ? A moins qu’il ne s’agisse tout bêtement d’une compréhension naïve du terme « vide juridique », qui désigne non pas ce que le juge ne peut trancher, mais ce que la loi ne prévoit pas et laisse à son entière appréciation.

Eolas:
Si votre île est déserte, il n'y a pas de droit. Le droit apparaît dès qu'il y a deux êtres humains. Ca ne crée pas un vide juridique, mais constate une inutilité du droit.

31. Le vendredi 22 août 2008 à 19:39 par jaques

Pour ce détendre après les vides juridiques :

www.dailymotion.com/Josel...

32. Le vendredi 22 août 2008 à 19:44 par Le Chevalier Bayard

Le "vide législatif"...OUI !

Et dans de nombreux domaine il ne peut être que sidéral !

Le "vide juridique"...NON !

33. Le vendredi 22 août 2008 à 20:17 par Le Chevalier Bayard

@ Cimon

Dans la "8 ème édition augmentée" ni à vide ni à juridique l'expression n'apparaît ?

Cette lacune (du latin lacuna : trou, manque) ne traduit-elle pas un renouvellement du questionnement ?

34. Le vendredi 22 août 2008 à 20:20 par Augustissime

Et l'eau ferrugineuse ?

35. Le vendredi 22 août 2008 à 20:46 par Le Chevalier Bayard

@ Augustissime

Vous reconnaissez mes classiques, j'apprécie votre humour !

36. Le vendredi 22 août 2008 à 21:54 par meteo

Et ça passe meme au 20H !!

37. Le vendredi 22 août 2008 à 22:35 par Gary

Que voulez-vous Maître, Le Monde (ou sa filiale du même nom.fr) donne dans le sensationnel en ce moment : photo choc à défaut de poids des mots dans ce que vous nous relatez ; informations pour le moins contestées sur la raison ayant conduit au drame de lundi en Afghanistan. Dans Le Figaro d'hier, page 22 - dans le fameux cahier "saumon" - vous avez un article vantant les mérites de RTL et de l'émission "Le Grand jury", et vous pouvez y lire ceci : "Les 120 journalistes de la rédaction ont ainsi reçu pour ordre de mission de sortir des informations exclusives toutes les semaines". Cela n'est pas dit, mais c'est sous-entendu, et ça va mieux en le disant : "quitte à les inventer, ou à les hypertrophier". Je ne sais pas s'il y a vide juridique ou non, mais il y a, me semble-t-il, un certain vide dans la profession journalistique...

38. Le vendredi 22 août 2008 à 23:24 par El Re

@Eolas:
<<
Qualifier de vide ce qu'on ne connaît pas est le sommet de la prétention. Si je ne le connais pas c'est que ça n'existe pas. Si je ne sais pas ce que contient ce pot fermé, c'est qu'il est vide. Vous voyez l'absurdité ?
>>

Je suis d'accord sur ce point, mais ma position est plus nuancée. Lorsqu'un juge tranche, il peut le faire dans un sens ou dans l'autre, et dire que le résultat de cette décision est contenu dans les textes préexistants me semble faux. La façon dont un juge interprète une loi dépend des circonstances, de la manière dont la société a tendance à voir certains délits (typiquement cette fameuse affaire où une loi interdisait la sodomie aux Etats-Unis, qui a été successivement reconnue par la cours suprême dans les années 80, puis déclarée non constitutionelle).

Je pense que dans votre argumentation ce qu'il y a dans le pot dépend de la personne qui l'ouvre.

39. Le samedi 23 août 2008 à 00:07 par El Re

Pour préciser un peu ma pensée: quand les lois ne traitent pas expressément un cas donné, le juge recours aux principes du droit.
Dans un monde parfait, le juge a un rôle "passif" et se contente d'appliquer les lois ou du moins l'esprit de la loi. Du coup il n'y a jamais de vide juridique. Ca c'est en théorie, mais dans la réalité les juges ne sont que des hommes ou des femmes, et fatalement, sa décision est influencée par sa subjectivité, qu'il le veuille ou non. Dire que l'esprit de la loi permet de répondre à toutes les questions de droit me semble quelque peu exagéré. Tout au plus, dans plein de situation, l'esprit de la loi permet au juges de rester objectif et juste.

Eolas:
Avez-vous un exemple de cas où la loi (pas son esprit, ce qu'elle dit) n'a pas permis de répondre à une question juridique ? Que la solution ne soit pas satisafisante, c'est autre chose. Prenez l'exemple de l'affaire des mariés de Bègles. Les mariés affirmaient que le code civil n'interdit pas expressément le mariage entre deux personnes du même sexe (c'est exact) et en déduisaient qu'il était autorisé. Les journaux fleurissaient de "les mariés se fondent sur un vide juridique". Le TGI de Bordeaux, confirmé par la cour d'appel de la même ville, confirmée par la cour de cassation ont montré qu'il n'en était rien.

40. Le samedi 23 août 2008 à 00:08 par El Re

Pour ne pas être uniquement critique, au passage, merci encore pour cet excellent billet.

41. Le samedi 23 août 2008 à 00:42 par Simplet

Donc à la limite, en cas de mutisme de la loi sur un point donné, le magistrat en ultime recours a la possibilité de juger en fonction de ses convictions personnelles, ou des convictions du petit monde des juristes, sans s'appuyer sur rien qui ait reçu un assentiment démocratique?

Je crois que je préférerais nettement le vide juridique.


Eolas:
Pas du tout. Vous avez zappé ce passage du billet : Même si aucune loi ne règle expressément la question, il y a tout un corpus de droit commun qui s'applique à toutes les situations. Le juge ne tranche jamais en fonction de ses convictions personnelles, mais du droit.

42. Le samedi 23 août 2008 à 01:09 par Firejuggler

Ou sur les jurisprudence proche (coutume et usage aussi).
admetton que le vol a l'étalage de fruit ne soit pas prevu par la loi. En revanche, imaginons que la loi prevoit une peine d'un coup de baton pour le vol d'unte botte de radis. il y a de forte chance pour que le vol de fruit soit lui aussi puni d'un coup de baton.

pour les coutumes et usage .. ( nan pas sur les droit de passage, ni les droits du travail: jour chomé, pont...)

tirer la langue a son camarade est puni ( c'est la coutume) par un envoyage au coin...
tirer la langue du prof pourrait risquer la meme chose , non pas par jurisprudence mais par coutume.

les juges ne rendent pas des descision au petit bonheur la chance.

(et vive mes cours d'éco droit de mon BTS, pardon si j'ai dit des conneries)

43. Le samedi 23 août 2008 à 01:15 par Firejuggler

erraum : pour avoir tiré la langue au prof, ce sera le coin plus une colle, on ne defie pas l'Autoritée.

44. Le samedi 23 août 2008 à 01:33 par Simplet


Dire que voler une botte de radis quand c'est explicitement interdit c'est assimilable à voler des fruits quand rien n'est prévu dans ce cas, C'EST prendre une décision au petit bonheur la chance. Les radis (de vulgaires racines) ne sont pas plus des fruits que des kiosques à journaux!... Quoi qu'une intéressante fiction juridique permettrait peut être... hum hum...

Ce que j'aimerais savoir, dans le cas hypothétique du vide juridique inexistant parce qu'il est forcément rempli par une des potentialités quantiques de l'interprétation juridique, c'est quelle serait la voie de recours qui me serait offerte si j'estimais être mal jugé?
Et sur quoi se fonderait le jugement d'appel ?



45. Le samedi 23 août 2008 à 01:46 par Firejuggler

SUpprimé à la demande de l'auteur

46. Le samedi 23 août 2008 à 01:48 par Firejuggler

Supprimé à la demande de l'auteur.

47. Le samedi 23 août 2008 à 02:07 par Firejuggler

Je m'enfonce , je m'enfonce, mes commentaire 43 et 44 sont inutile. Maitre? virez les

Quelle serait la voie de recours qui me serait offerte si j'estimais être mal jugé?

Si ce n'est pas en premier et dernier ressort , et bien.. la cour d'appel correspondant au tribunal qui vous a jugé.

la cour d'appel rendra son jugement en se basant sur ce qui a été exposé en premiere instance (tribunal de police, tribunal correctionnel, Cour assise), et eventuellement des autres piece que vous apporterez.(condamné pour vol dans une bijouterie? en appel, apporter le PV que vous avez reçu pour depassement de vitesse a 500 km du lieux d'icelle. a la meme heure, de preference)

48. Le samedi 23 août 2008 à 09:28 par salah

Tel un insecte figé dans de la résine jaunâtre ,qui pourrait être l’œuvre d’un artiste du groupe Pop ‎Art ou celui du Nouveau réalisme ,le journaliste du monde point fr ,n’a pas mâché
ses « maux » ‎pour illustrer son article avec la photo du fœtus dans le bocal.
Est-ce pour combler un vide dans ‎l’imagination du lecteur ?‎

Il ne va pas de main morte pour réveiller les plus dubitatifs sur le statut d’être humain du fœtus. ‎Quel âge a le fœtus figé dans le formol ? On n’en sait rien ? ‎

Conjuguer des commentaires écrits avec la photo d’un cadavre ,ne donne pas plus de puissance ‎argumentative .Cela ne produit que de l’effet .‎

S’il y a un vide dans l’obscénité et l’impudeur , avec cette image il a été réquisitionné .‎

49. Le samedi 23 août 2008 à 09:56 par Simplet

@ Firejuggler

Gros problème que celui de la jurispudence.
Raisonnons simplement, ce qui va faire hurler Eolas, et par équivalences genre kiosques à journaux, sur votre exemple de radis et de fruits (pour simplifier je réduis les fruits aux pommes), dans un monde ou on supposera que le juge est obligé de juger, et où votre seule obligation de citoyen est de connaître la loi (et non les opinions des juges) Eolas: J'interviens dès à présent pour vous signaler que je ne vais pas hurler, mais je ne vais pas non plus perdre mon temps à lire un propos si mal engagé, fut-il travesti en argument. Je vous laisse à vos kiosques qui vendent des radis, je suis sûr qu'avec une telle prémisse, votre démonstration sera ébouriffante.
-équivalence: dans votre monde de radis et de pommes, il y a aussi un code de la route qui interdit explicitement - et c'est la seule interdiction formulée par la loi - de franchir une ligne continue. Devez vous vous abstenir de franchir une ligne discontinue, sous prétexte que finalement, c'est la même manoeuvre au volant, et que vous userez de la même manière l'autre côté de la route? Je dis non, satisfaisant ainsi à la lettre de la loi que je suis censé connaître; en toute logique vous me dites oui, au nom de considérations certes intéressantes, mais que rien ne m'oblige à prendre en compte, ni à leur accorder une quelconque valeur.
-Vous me dites de la même manière que voler la botte de radis, c'est un préjudice équivalent à voler des pommes. Parce que voler c'est pas bien (alors pourquoi le législateur n'a t-il pas simplement interdit de voler tout court? plutôt que de spécifier que le vol des radis est interdit?), et qu'il y a équivalence de préjudice... selon votre sentiment, en fait. Je peux soutenir au contraire que si voler une botte de radis est interdit, c'est selon 'mon' sentiment parce que pour faire une botte de radis, il vous faut les déterrer, les grouper et les relier en bottes, ce qui est un travail que je me serais approprié, tandis qu'une pomme de plus ou moins sur votre arbre, n'est pas de votre fait et ne constitue en rien, toujours selon mon appréciation, quelque chose dont je vous aurais spolié.
Nous allons devant le juge pour cette histoire de pommes. La loi telle qu'elle est rédigée, la seule chose que je suis censé connaître et à laquelle j'ai obligation de me conformer, voudrait qu'il tranche en ma faveur. S'il tranche en la vôtre, il aura élargi de son fait et de son opinion la loi à quelque chose d'autre: "le vol est interdit".
Au bout de tout cela, selon votre loi il y a le bâton et ça fait mal (et celui de troll détector n'est pas loin non plus je sens ça, mais c'est week end)
Dès lors, si je suis promis à la bastonnade à cause de la décision du juge en votre faveur, alors que j'ai strictement respecté mes obligations de citoyen, je suis fondé à considérer que le juge a outrepassé ses pouvoirs, et à ne pas accepter le bâton. Le juge dira si si, vous aurez le bâton parce que je suis le juge et j'ai décidé d'élargir la loi selon mon sentiment, que j'appelle jurisprudence, et que mes considérations valent mieux que les vôtres (et en cela il a l'agrément de tous ses collègues qui trouvent son raisonnement très très subtil, et intellectuellement élégant)
Comment on fait alors ? J'appelle mes copains, le juge convoque les forces de l'ordre, et on décide par une bataille rangée quelle sera l'opinion qui prévaudra.
Ca s'appelle un rapport de force, et c'est au bout du compte tout ce qui assoit le jugement.

C'était l'exposé intitulé: "De la création de pseudo lois par la jurisprudence" Par Simplet.
Merci de votre attention.

Oulà oulà... Pas taper...

50. Le samedi 23 août 2008 à 10:38 par Flo

@Simplet et Firejuggler

Vos histoires de radis et de pommes me font penser à un billet passé : maitre-eolas.fr/2007/09/1...
Une des conclusions de ce billet était que le juge ne bricole pas avec la loi pénale.

Avec votre loi, mangeons des pommes, sans que cela ne nous coûte un radis.

51. Le samedi 23 août 2008 à 11:35 par PEB

@49: l'exemple cité par Firejuggler est un jugement en équité, typique des droits coutumiers.

En revanche, en droit Français, la loi a une portée générale et se contente de punir le vol, peut importe l'objet du larcin. Le juge peut cependant ajuster le quantum en fonction des circonstances mais sans jamais aller au-delà du législateur.

52. Le samedi 23 août 2008 à 12:38 par Firejuggler

J' aurait mieux fait de revoir mes cours de droit , moi, plutot que de l'ouvrir sur les voleurs de pomme.

53. Le samedi 23 août 2008 à 14:04 par Guile

AH le vide juridique!!!
Cela déclenche toujours le combat sans concession auquel nous venons d'assister...
N'en déplaise à ceux qui croient au mythe du vide juridique, lisez Jean CARBONNIER, l'un des plus grands juristes du 20ème siècle (décédé en 2004 je crois). Il a démontré de manière fort brillante, que le vide juridique n'existe pas, pour toutes les raisons déjà énoncées par Eolas, et par bine d'autres.
Lui peut être, arrivera à vous convaincre.

N'oubliez pas que vide juridique voudrait dire qu'aucune règle ne peut trouver à s'appliquer au cas. Or, c'est tout simplement impossible.
S'il existe une règle spéciale, qui correspond au cas soumis, elle va s'appliquer. S'il n'existe aucune règle spéciale, mais seulement des règles générales, elles vont s'appliquer aussi, car tant que la règle spéciale n'a pas été créée, le juge DOIT appliquer la règle générale, même si celle ci n'est pas bien adaptée à la situation.

Il ne faut pas confondre "une mauvaise règle" avec "pas de règle".

54. Le samedi 23 août 2008 à 14:40 par Fantômette

Et pour compléter le post de PEB, à l'attention de Firejuggler et Simplet :

Votre problème est le suivant : vous semblez ignorer que ce qui n'est pas interdit est permis.

Du coup, vous cafouillez dans vos histoire de vols de pommes ou de radis, parce qu'en réalité, vous errez entre une hypothèse de départ fantaisiste, certes, mais que l'on peut admettre pour fonder une démonstration, et la conviction que le vol, sémal, et qu'il faut donc en tout état de cause arriver par raisonnement à la conclusion qu'il est interdit.

Hypothèse : j'habite un pays qui interdit le vol de radis, et je vole une pomme. Y a t-il un vide juridique ? Non. J'ai accompli une action qui n'est juridiquement pas répréhensible, le juge n'en est même pas saisi. S'il était saisi, il me relaxerait, je n'ai commis aucun délit.

Je rajouterai que le raisonnement par analogie en droit pénal est interdit. Le principe est celui dit de l'interprétation stricte de la loi pénale.

C'est-à-dire que si effectivement un législateur fou s'était mis à vouloir interdire le vol, non pas en général, mais en particulier, en réprimant spécialement le vol de chaque chose à laquelle il va pouvoir penser, une par une. S'il pense à faire du vol de pomme un délit, mais oublie de viser le vol de poire, le juge a interdiction de procéder par analogie avec le vol de pomme. Il constate simplement qu'aucune loi n'interdisant le vol de poire, le vol de poire n'est pas répréhensible, et qu'aucune poursuite ne peut être exercée de ce chef contre qui que ce soit.

En d'autres termes, vous pensez parler de vide juridique, mais vous parlez en réalité de faits qui ne sont pas pénalement répréhensibles. Cela n'a rien à voir. Vous réduisez le Droit à la seule fonction de fixer des interdits. C'est - précisément - très réducteur.

55. Le samedi 23 août 2008 à 15:00 par Fantômette

@ Tschok

C'est Pax Romana qui a raison.

Je parle de Shrödinger avec une légèreté que vous me pardonnerez, je raffole de toutes ces histoires quantiques, de théories des cordes, et de principe d'incertitude, et d'effondrements d'ondes de probabilité.

J'aime ces histoires en grande partie parce que, ne maitrisant pas le moins du monde ces concepts, ils font simplement naître des idées et des images qui me fascinent. Ils m'ouvrent des perspectives.

J'adore les histoires scientifiques qui commencent par "en fait, tout se passe comme si...".

Ceci dit, pour être tout à fait franche, je pensais mon analogie du #17 plutôt juste.

56. Le samedi 23 août 2008 à 15:13 par Firejuggler

Je me suis relu, et effectivement, je me suis mal exprimé. Mon exemple sur le vol est edffectivement, totalement hors de propos. peut être aurrait t'il été plus indiqué de parler des MP3?

en revanche, pour les usages et coutme, j'ai pas dit de conneries?

57. Le samedi 23 août 2008 à 15:17 par holden

@Eolas (41) :

"Le juge ne tranche jamais en fonction de ses convictions personnelles, mais du droit".

Ne faut-il pas distinguer deux registres : celui de l'argumentation du juge (avec des références aux textes de droit), et celui de ce qu'il fait vraiment, ou pour le dire autrement, le processus psychologique qui préside à l'élaboration de norme ( et qui repose en grande partie sur son intime conviction).

Si l'on considère que l'application d'un texte suppose une interprétation, et qu'une interprétation repose sur un choix entre plusieurs significations, alors ce choix renvoie aux convictions personnelles du juge.

58. Le samedi 23 août 2008 à 16:39 par gwynplain

Maître, une chose me chiffone dans l'une de vos formulations. Vous vous échinez à expliquer que le vide juridique n'existe pas, et je l'ai bien compris, seulement, dans le paragraphe suivant, vous écrivez: "Et là, en plus, il n'y avait pas de vide juridique." Ne reconnaissez-vous pas par là, en creux, l'existence du vide juridique : en expliquant que dans ce cas précis il n'y en avait pas, vous laissez sous-entendre que dans d'autres cas il en existe, non ?

59. Le samedi 23 août 2008 à 16:50 par Augustissime

Déformer la définition d'une expression pour la vider de son sens n'est pas une démarche très productive. Les définitions citées par Cimon (#13) rappellent ce qui est couramment désigné par le terme "vide juridique" et devraient clore le débat : la notion existe, est pertinente, et désigne de nombreuses situations réelles.

"Le juge ne tranche jamais en fonction de ses convictions personnelles, mais du droit."
Le juge tranche TOUJOURS en fonction du droit ET de ses convictions personnelles.

Eolas:
Un mois d'abstinence ne vous a pas changé. Vous procédez toujours par voie d'affirmation péremptoire. Je vais donc faire comme vous. La notion n'existe pas, n'est pas pertinente, et ne désigne aucune situation existante. Et le juge ne tranche jamais en fonction de ses convictions personnelles. Le jour où un avocat comprend cela, il peut espérer devenir un bon avocat. En attendant, je vous laisse à vos démarches improiductives, vous êtes un expert.

60. Le samedi 23 août 2008 à 17:40 par Véronique

Sur le vide juridique, et me guidant à l'aide de la lecture du discours de J. E. Portalis.

" l'office de la loi est de fixer par de grandes vues, les maximes générales du droit; d'établir des principes féconds en conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière. C'est au magistrat et au jurisconsulte, pénétrés de l'esprit général des lois, à en diriger l'application."

Qu'une loi existante soit insuffisante et qu'elle soit comme muette pour un question particulière ou nouvelle est, pour ainsi dire, le propre de la loi.

L'expression "vide juridique" devient alors une sorte de réplique évidente et commode, au sens où elle suggère fortement que la solution de bon sens pour résoudre une insuffisance ou un silence de la loi serait de créer une nouvelle loi. Mais il y aurait ainsi, en permanence, pour la société une multitude de vides à combler.

Portalis pose le principe qu'une loi doit être suffisamment riche, dense, souple et imprégnée de ce qu'il appelle le droit naturel pour être capable d'intégrer le particulier dans le général.

Solliciter sans cesse le législatif pour " combler les vides " fragilise, selon Portalis, un principe essentiel de la loi, celui de sa stabilité.

Par ailleurs, il écrit une chose que je pense très juste, c'est qu'une loi bien pensée et bien rédigée travaille d'abord pour l'avenir.

61. Le samedi 23 août 2008 à 22:27 par Le Chevalier Bayard

A propos des définitions relevées par @ 13 Cimon dans le "Vocabulaire juridique" de l'association Henri Capitant dans sa 7 ème édition celles-ci apparaissent, dans une certaine mesure, hérétiques depuis l'édition de 2000 dans une démarche sociolinguistique.

En effet, la seule référence au terme "vide" est qualifié de légisaltif au détour du mot - comblement - page 161 :

1. Fait de combler une lacune du droit de remplir un vide législatif. (Ex., pour le juge de résoudre le litige - même dans le silence de la loi (art. 4 du C.civ.) - en complétant celle-ci)

2. Opération consistant à compléter ce qui est lacunaire ou insuffisant.

"Vocabulaire juridique" Gérard Cornu Association Henri Capitant (PUF -8 ème édition - revue et augmentée - février 2000 page 161.)

En substance, dans son avant-propos le professeur MALINVAUD Président de l'association Henri Capitant rappelle que la refonte du Vocabulaire s'avérait nécessaire, il fallait à la fois conserver et retrancher et renouveler, en bref assurer la continuité et le changement.

62. Le samedi 23 août 2008 à 23:16 par Augustissime

Sur le « vide juridique », on va reprendre une dernière fois.

Vous définissez en gros cette notion comme « un point sur lequel la justice devrait statuer mais ne le peut pas », ce qui rend d’évidence l’expression absurde puisque la justice statue toujours quand elle le doit.

La plupart des usagers de notre langue commune utilisent la notion de « vide juridique » en suivant à peu près les définitions de Cimon, ce qui permet des discussions riches; c’est souvent le cas d’ailleurs quand on adopte des définitions qui ne correspondent ni à des tautologies ni à des ensembles vides.

Comme vous êtes fâché avec les définitions, je sais vous préférez être seul à utiliser la vôtre plutôt que de changer d’avis. Dont acte.

En ce qui concerne les convictions personnelles des juges, je vous renvoie simplement à votre analyse de la relaxe des faucheurs volontaires d’OGM :
« Le danger de ces plants n'est pas démontré, et pour tout dire, il repose plus sur des pré-supposés idéologiques qu'une quelconque réalité scientifique. Le tribunal n'essaye même pas d'affirmer que ces plants étaient dangereux, d'ailleurs. Il prend un chemin de traverse en retenant que le danger était la diffusion incontrôlée des gènes modifiés pouvant être la source d'une contagion génétique. »

Les pré-supposés idéologiques, c’est de la jurisprudence ?

63. Le dimanche 24 août 2008 à 10:29 par Djoulay

Propos croustillants choisis dans les commentaires suite à l'article du monde (la palme revient au dernier) :

MCR
23.08.08 | 08h07
Un décret ! Aucun débat, circulez, y a rien à voir ! Ce gouvernement nous impose en douce des décisions dont il nous interdit de facto d'évaluer les implications. C'est grave, 43% au second tour est loin d'être une carte blanche.

Karmagnol
22.08.08 | 19h32
Pourquoi le Ministère de la justice en France peut-il prendre un décret sans avoir organisé un débat public de grande ampleur? C'est un déni de démocratie pour un problème concernant en fait la laïcité, les rapports entre les religions et l'Etat. Le néo-conservatisme français affiché par Sarkozy dépasse toutes les bornes. Si un foetus a une identité sociale même s'il est mort-né, cela signifie qu'il est considéré comme être vivant dès la conception.

ChrisB
22.08.08 | 10h23
L'article ne traite pas du point important: ces revendications cachent des enjeux économiques considérables: le fait d'avoir un enfant supplementaire meme décédé à la naissance, donne souvent de multiples droits à des prestations sociales. Un foetus mort né figurant dans le livret de famille permettra t-il de "rajouter" un enfant a la liste pour beneficier de retraites anticipées, avantages fiscaux, cartes de reduction etc.? C'etait un des objectifs cachés des lobbies conservateurs pro-famille.

64. Le dimanche 24 août 2008 à 16:34 par Humstel

Aux amoureux de Schrodinger: qui a dit : "Je me l'explique mais il y a beacoup de maths dedans" ?

@ Augustissime sur les scientifiques qui "ne reconnaissent pas la réalité de la superposition des états, même [?] au niveau atomique" (le point d'interrogation est de moi): auriez-vous d'autres noms que Einstein ?

@ Augustissime/Eolas sur la definition du vide juridique : la vision d'Eolas n'est-elle pas que sitot qu'un ensemble de personnes se sont mis d'accord (generalement en ne denoncant pas cet accord) qu'il existe un droit qui regit leur vie en communaute (et des juges pour l'interpreter/l'appliquer) alors il n'existe pas de situation echappant a ce droit et donc pas de vide juridique mais seulement de l'inconnu juridique. Alors effectivement on est bien dans la tautologie : gens vivant sans loi = gens vivant au sein d'un vide juridique. (Ensemble, loi : le premier qui me sort la theorie des ensemble va jouer avec le chat).
Aussi pour mettre tout le monde d'accord, et puisque "Le Monde" lit ce blog, suggerons-leur le terme d'"inconnu juridique" ou "legitima terra incognita" ou "Lieu juridique ou vivent les dragons" (comme quoi ma culture manga me sert parfois). Autres propositions bienvenues.

Enfin j'abonde avec Augustissime : en modifiant la definition de ce vide juridique i.e. en introduisant un petit peu de mauvaise foi, on peut avoir un debat/une discussion (ya une nuance chez wikipedia) un peu plus interessant. Je cite Eolas (approximativement, car c'est de memoire): "Il y a toujours un peu de mauvaise foi dans les debats interessants".

Pour terminer quelqu'un peut m'expliquer la reference du Chevalier Bayard (33) ? C'est du Fernand Reynaud ?

65. Le dimanche 24 août 2008 à 17:35 par Axonn

Le bon côté des choses avec les législateurs qu'on oublie vite fait, c'est que Dati ira probablement aux poubelles de l'Histoire. Dans 10 ans on se souviendra mieux de Badinter que d'elle.

Eolas:
Madame Dati appartient à l'exécutif, elle n'est pas législatrice.

66. Le dimanche 24 août 2008 à 17:54 par Sans pseudo

@ Humstel
Non, c’est du Bourvil :
www.youtube.com/watch?v=F...

67. Le dimanche 24 août 2008 à 18:15 par Fantômette

@ Augustissime

Vous n'y êtes pas.

Pour commencer, Eolas ne définit pas le vide juridique comme vous le dites, il commente un article dans lequel le vide juridique est implicitement défini comme une question sur laquelle le pouvoir législatif et/ou règlementaire ne s'est jamais penché auparavant, ou une question que le pouvoir législatif et/ou réglementaire n'a jamais spécifiquement abordée et résolue par avance.

C'est cela la définition du "vide juridique" dans le langage courant (une simple recherche de l'expression sur google actualités suffira à vous le montrer).

Or, d'une part, le fait qu'une question PRECISE n'ait jamais fait l'objet d'une loi PRECISE réglant PRECISEMENT cette question, ne signifie pas qu'elle n'est pas réglée par des dispositions générales de la loi.

D'autre part, il ne faut pas confondre activité juridiquement indifférente et vide juridique.

Illustration de la première proposition. Aucune disposition du code pénal n'interdit le meurtre d'une personne d'un coup de fusil de chasse dans la tête. Faut-il parler de vide juridique ? Ou pourra t-on se contenter d'une disposition qui interdit le meurtre, en général ?

Illustration de la seconde proposition. Tous les matins, j'ouvre mes volets, et aucune disposition d'aucun code - à ma connaissance - ni ne me l'interdit, ni ne m'impose de m'y prendre d'une certaine manière. Faut-il parler de vide juridique ? Ou puis-je espérer continuer d'ouvrir mes volets comme je l'entends sans voir débouler le législateur dans ma chambre sous le prétexte de venir combler un vide juridique ?

Croire qu'il y a un "vide", c'est croire qu'il y a un manque. Croire au manque, c'est croire au besoin de combler le manque.

Contrairement à vous, je pense que l'expression "vide juridique", non seulement n'a pas de sens, mais qu'elle ne permet pas la discussion. Au contraire. Elle l'élude. Elle la décourage. Elle lui fait prendre un mauvais chemin, car elle la fait partir d'une prémisse fausse.

Elle fait croire à la création d'un droit, alors qu'elle en propose une modification. Il n'est pas indifférent à la clarté du débat de bien faire ressortir la nuance.

68. Le dimanche 24 août 2008 à 20:25 par Scarabée

@ Fantômette

Je suis tout à fait d'accord, c'est ce que je tentais d'expliquer dans le commentaire 23 mais votre explication est mille fois plus claire.

69. Le dimanche 24 août 2008 à 21:25 par Humstel

@ Sans pseudo - 66 : Huhu merci. Je cherchais l'allusion dans le commentaire 33 au lieu du 32 (ce qui ne m'a pas empeche de confondre Fernand Raynaud et Bourvil).
@Fantomette -67
Voyons si on peut aller un peu plus loin.
Si je reprends vos deux exemples (meurtre par fusil de chasse/ouvrir les fenetres), il n'y a pas de vide juridique car ils sont du ressort du droit a chaque fois : des lois traitant des meurtres par armes a feu pour le premier, du principe juridique expliquant que tout ce qui n'est pas interdit est autorise (et c'est ecrit ou, ca d'ailleurs)
La confusion vient d'un besoin (moral en general) de voir traiter par la loi un sujet donne de maniere explicite. Le lobby des deputes qui reve de fermer les volets des avocat(e)s reve toutes les nuits d'une loi allant dans leur sens ; pour eux, il est limpide qu'il y a vide juridique sur la fermeture des volets des avocats, vous vous rendez compte de la vie de ces pauvres betes, etc.
Donc pas de vide jurdique en droit.
Mais le droit est-il partout ? J'ai ete frappe par la deuxieme definition de Gérard Cornu & Association Henri Capitant, PUF, 7ème édition (Cimon, 13) : "Aire du non-droit ; espace de liberté dans lequel le droit est non présent, qui, en fait, est juridiquement non relevant (même si le droit pourrait avoir la tentation de s'y introduire)."
Il y a des espaces de liberte ou le droit est absent (premier choc) et ou il est tente de s'introduire (choc 2).
Alors la, je suis paume. Cette definition sur l'aire de non-droit semble finalement plus relever de la philo que du droit a proprement parler. C'est la que Fantomette intervient : epistologque que vous etes (apres tout nous avons brillamment demontre que le droit est une science), vous ne nous feriez pas un gentil topo sur les sources du droit, sa relation avec la liberte, ses axiomes, etc. ?

En definitive, le droit a reussi une prouesse que la nature n'a jamais pu accomplir : se debarasser du vide (qu'elle a en horreur, pourtant).

70. Le dimanche 24 août 2008 à 23:41 par Yves D

Du droit en général ... et du vide en particulier.

Eolas nous rappelle régulièrement que les mots, en Droit, ont une importance capitale quant à leur signification. Et cela va au-delà du "jargon" purement propre au métier du droit (comme il existe un jargon dans chaque métier).
Bien.

En suivant ce principe, Eolas, comme fantomette et d'autres ici, refusent l'expression "vide juridique", car, si je l'ai bien compris, il ne s'agit pas d'un vide (d'un néant, d'une absence), mais plutôt d'une "indétermination" (pour reprendre l'image quantique de Fantomette), ou d'une non connaissance explicite.

Car, toujours si j'ai bien compris, ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de texte (de droit) explicite qui s'applique à une situation que l'on pourrait la qualifier d'être dans une zone de "vide juridique".

J'avoue qu'en effet, qualifier un ensemble (de cas, de situations, possible et imaginables) par l'expression "vide" me gêne un peu.
Et pour reprendre l'exemple des volets de Fantomette, ce n'est pas un cas de "vide juridique", mais simplement un cas qui n'est ni civilement ni pénalement répréhensible. En bref : le droit ne l'interdit pas, ni ne l'oblige ... Et cette phrase, où le droit intervient, montre bien que ce cas est couvert par le droit ...

On est pas dans un cas de "vide", mais dans un cas où il n'y a rien (ni obligation, ni interdiction) ... Subtile, non ??

Donc j'ouvre mes volets moi aussi, sans faire de bruit excessif, tous les matins. Mon voisin qui cherche à me nuire, décide de porter l'affaire devant un juge, en argüant que je défigurerait la vue qu'il a de sa maison en ouvrant mes volets ...
Si j'ai bien compris, le juge ne peut pas "créer du droit", et tout ce que le "droit" (jurisprudence comprise) lui donne comme matière (au juge) est que ce n'est pas répréhensible. Le juge, en se fondant donc non pas sur du vide, mais sur le corpus existant du droit, déboutera donc mon voisin.

Maintenant, si un législateur (mon voisin étant Député) décide de modifier le droit pour rendre répréhensible l'ouverture des volets face à sa maison ...

Post scriptum:

Les discussions sur cette nuance subtile de vocabulaire m'ont permis de mieux comprendre ce qu'est le droit et ce que peut faire un juge.

Cependant, il convient de distinguer l'acception "commune" de certains mots, de celle du métier du droit.
Par exemple, Eolas se fache dès que l'on utilise le mot STIPULER (voir en Com # 27 ici maitre-eolas.fr/2008/08/2... )
Il n'a pas tort ... mais pas raison non plus !
En effet, depuis des années, l'Académie Française reconnait deux acceptions (dont une juridique) pour ce verbe ... Et le sens courant est "faire savoir de façon impérative, expressément".
atilf.atilf.fr/dendien/sc...

71. Le lundi 25 août 2008 à 00:37 par Augustissime

@Humstel
Il y a par exemple Heisenberg, ou plus récemment Hawking et bien sûr tous les intrumentalistes.

@Fantômette
Prenez une troisième illustration : celle du spamming, au début des années 2000. Voilà une pratique nuisible récente que nulle loi ne réprimait. Forcément, par défaut, la pratique était autorisée, mais ce n'était pas ce qui était souhaité : il y avait bien un vide juridique.

Eolas:
Ce qui était souhaité... par qui ?

72. Le lundi 25 août 2008 à 09:42 par aliocha

Oups ! Me voici, un peu tard néanmoins, je le crains. Voilà qui m'apprendra à ne pas aller à la campagne profiter des derniers rayons de soleil de l'été en oubliant mon ordinateur......Or donc, on attaque de nouveau mon métier, on critique, on stigmatise, on vilipende. Qu'à cela ne tienne.

@gary : "Les 120 journalistes de la rédaction ont ainsi reçu pour ordre de mission de sortir des informations exclusives toutes les semaines". Cela n'est pas dit, mais c'est sous-entendu, et ça va mieux en le disant : "quitte à les inventer, ou à les hypertrophier".
Il me semble que vous devriez vous féliciter de ces consignes au lieu de les critiquer. Quand on demande à une rédaction de sortir des exclusivités, c'est qu'on veut réveiller les journalistes et les inciter à aller chercher l'information au lieu de s'en tenir au dépêches AFP et aux conférences de presse. Si les journalistes de RTL suivent, les auditeurs entendront sur cette radio autre chose que ce qu'ils lisent, entendent ou voient partout ailleurs. Cela n'a rien à voir avec le fait d'hypertrophier un événement et signifie encore moins qu'on leur demande d'inventer. Il s'agit de se démarquer et de ne pas raconter exclusivement la même chose que les autres. Si toutes les rédactions imposaient de telles consignes, je vous assure que la presse française se porterait bien mieux. J'en veux pour preuve l'affaire que traite ici Eolas. Vous allez voir pourquoi.

@Eolas : Ah! Mon Cher Maître, comme je regrette d'intervenir si tard. Je vous présente mes excuses pour cette défection qui a pu vous laisser croire que je refusais la bataille, ce qui n'est pas dans mon caractère.....

Voyons donc ce que vous reprochez au Monde :
1) D'avoir utilisé l'expression honnie de "vide juridique"
2) de l'avoir fait dans un domaine où elle était particulièrement mal venue
3) d'avoir présenté comme une nouveauté ce qui ne l'était pas.

Sur le "vide juridique", j'observe que Cimon dans son commentaire 13 reproduit deux définitions de cette vilaine expression tirées du vocabulaire juridique de Capitant. C'est donc qu'elle existe et qu'elle est reconnue par la communauté juridique. Ce que confirme une de vos lectrices étudiante qui relève que ses professeurs l'utilisent. Je vous accorde qu'elle est contestable, de là néanmoins à reprocher aux journalistes de l'utiliser alors qu'elle est d'usage chez les professeurs de droit et chez les parlementaires (vu dans un de vos précédents billets), il me semble que vous êtes bien exigeant.
Il n'y avait de toutes façons pas de vide juridique en l'espèce, dites-vous. En effet, sur ce point, je n'ai rien à dire.

Mais voyons alors les raisons pour lesquelles ces décrets ont été présentés comme une nouveauté. L'article incriminé provient du site du journal. Il précise qu'il a été rédigé avec l'AFP. J'ai donc recherché la dépêche et découvert que le papier du monde n'est qu'un petit résumé du travail de l'agence de presse qui peut être consultée ici : afp.google.com/article/AL...
Cette dépêche annonce les décrets comme des nouveautés, ce qui est corroboré par deux sources. D'une part, le communiqué de presse conjoint du ministère de la santé et de celui de la justice dont voici la reproduction : "Il existait, jusqu’à aujourd’hui, des situations administratives complexes et traumatisantes pour les familles d’enfant mort-né, auxquelles ne peut être délivré ni acte de naissance ni acte de décès.
Le gouvernement a décidé d’apporter, par deux décrets et deux arrêtés publiés aujourd’hui au Journal Officiel, une réponse pragmatique et humaine à ces situations de deuil.
Désormais, la délivrance d’un acte d’enfant sans vie, dressé à la demande des familles, permettra aux femmes ayant accouché d’un enfant mort-né, de disposer d’une mention symbolique de cet enfant, par exemple celle d’un prénom, tant sur le registre de l’état civil que sur le livret de famille, et d’un traitement funéraire décent.
Pour autant, aucune filiation n’est établie et le fœtus n’acquiert pas de personnalité juridique.
Précisément, le premier décret prévoit que l’acte d’enfant sans vie peut être obtenu auprès de l’officier de l’état civil, sur production d’un certificat médical constatant l’existence d’un accouchement. Ce décret est complété par un arrêté, à l’usage des médecins et des sages-femmes, précisant les conditions d’établissement de ce certificat.
Dans le même esprit, le second décret permet aux parents non-mariés, dont l’enfant sans vie est leur premier enfant, de demander un livret de famille. Un arrêté modifie en conséquence l’information qui figure en annexe du livret de famille afin de prévoir notamment ce nouveau cas de délivrance de livret".

D'autre part, par une citation de la responsable de l'association à l'origine de la demande de réforme : "Cela fait sept ans que je me bats pour que cela soit possible. C'est une grosse satisfaction", déclare à l'AFP Florence Basset, présidente de l'association Clara "à l'initiative" du combat pour cette mesure qui concerne "des centaines de mamans".

En réalité, que manque-t-il pour que la dépêche AFP soit complète et que l'article du Monde le soit donc aussi pour votre plus grand bonheur, exigeant lecteur ? Un petit paragraphe supplémentaire qui aurait précisé que cette possibilité existait déjà depuis une loi du 8 février 1993 mais se trouvait limitée au foetus de plus de 22 semaines par le fait d'une circulaire. Le gouvernement tire les conclusions de trois arrêts récents de la cour de cassation qui ont jugé que cette limitation n'était pas prévue dans la loi et précise par décret le régime de l'acte d'enfant sans vie reconnu désormais applicable quelque soit l'âge du foetus.

Eh oui, c'est vrai, cela manquait. Est-ce pour autant que l'information est erronée, je ne le crois pas. Il y a bien une nouveauté puisque deux textes viennent de paraître au JO. Et les modifications qu'ils introduisent sont bien celles évoquées.

Ce qui m'interpelle personnellement dans cette petite affaire n'est pas la question de la compétence des journalistes. La question que je me pose est celle-ci : un site de journal, a fortiori celui du Monde qui conserve en France une aura de référence, présente-t-il un intérêt quelconque lorsqu'il se borne à proposer à ses lecteurs des versions expurgées de dépêches AFP que ceux-ci peuvent trouver en intégralité sur Google ? Je ne le pense pas. Mais c'est un problème de stratégie du groupe plus que de compétence des journalistes. Internet nous oblige à repenser notre métier, cela ne se fera pas sans quelques ratés. Pour en revenir au commentaire de Gary sur RTL, il me semble que la bonne démarche consiste à aller chercher l'information au lieu de recopier des dépêches, à accroître la dimension d'investigation et d'analyse critique. Cela peut paraître évident, mais faute de moyens, les organes de presse sont tentés d'adopter la démarche inverse et d'opter pour le remplissage de colonnes à peu de frais. Cette affaire en est une nouvelle illustration.

73. Le lundi 25 août 2008 à 09:44 par Guile

"Voilà une pratique nuisible récente que nulle loi ne réprimait. Forcément, par défaut, la pratique était autorisée, mais ce n'était pas ce qui était souhaité : il y avait bien un vide juridique."

Vous le faites exprès ou quoi????

Dès l'instant où vous écrivez que "la pratique était autorisée", vous démontrez qu'il n'y a pas de vide juridique au sujet du spamming.... En effet, si cela est autorisé, car nullement interdit, le droit règle donc cette question du spamming. Mal sans doute, mais elle le règle.

Eolas:
Faites comme moi, laissez tomber. Il y a là un vide intellectuel que je redoute insondable.

74. Le lundi 25 août 2008 à 09:57 par aliocha

@véronique : "C'est de cette façon qu'on finit par enfermer le lecteur, l'auditeur et le spectateur dans des vérités théoriques plombées. Alors que ceux-ci ne demandent qu'à être informés".

J'aime bien les expressions comme "vérités théoriques plombées" parce qu'on peut bouger les mots et trouver des résultats rigolos, par exemple "théories de la vérité plombée" ou encore "vérités plombées par la théorie", ou bien "théories plombées par la vérité", en revanche, j'avoue avoir du mal à en saisir le sens.....

75. Le lundi 25 août 2008 à 10:29 par Augustissime

... ce qui était souhaité, par exemple, par la Commission et par le Conseil européens ainsi que par le gouvernement et par le parlement français, qui ont pris des dispositions pour combler ce vide juridique.

Eolas:
Pour interdire ce qui auparavant était autorisé. Autorisé ? Mais alors ? Il n'y avait pas de vide juridique ?

76. Le lundi 25 août 2008 à 10:30 par Hub

Dans le genre mal-journalisme, je trouve le titre de l'Express sur le sujet particulièrement gratiné : "Le droit des fœtus reconnu"

www.lexpress.fr/actualite...

77. Le lundi 25 août 2008 à 11:37 par tschok

Bonjour Aliocha,

Ma foi, c'est une défense qui tient très bien la route.

Et qui en plus ouvre sur une question intéressante, puisqu'il n'y a aucune raison pour qu'internet ne soit pas un support extrêmement bien adapté à la presse écrite.

78. Le lundi 25 août 2008 à 11:54 par aliocha

@Tschok : Bonjour Tschok ! En effet, Internet est sans doute en partie l'avenir de la presse écrite, mais cela pose mille questions pour les groupes de presse. Comment coordonner le papier et le web, faut-il abandonner le papier au bénéfice exclusif du web ou conserver deux supports, si oui comment on les articule , faut-il être gratuit ou payant, si on opte pour le payant, comment le justifier dans un univers qui prône la gratuité ? Si on opte pour le gratuit, comment se financer sans dépendre de la pub au point de perdre son indépendance ? Quel traitement de l'information, selon quel timing, quel format ? On dit l'utilisateur d'Internet impatient, ce qui impose des formats courts, mais si l'on fait court alors comment apporter de la valeur ajoutée ? L'écriture sur le web n'est pas la même que sur le papier, mais au juste quel est le bon style à adopter ? Si vous ajoutez à cela les préoccupations sur la chute des ventes du papier, les difficultés économiques de nombreux titres, les questions d'indépendance que soulèvent la pub et l'appartenance des journaux à des groupes industriels, la concurrence des gratuits qui pose la question de savoir pourquoi il faudrait continuer de payer ce que d'autres offrent dans le métro etc. Vous obtenez un joli casse-tête, non ?

79. Le lundi 25 août 2008 à 13:13 par Véronique

@ aliocha

" j'avoue avoir du mal à en saisir le sens..... "

Et pourtant "vide juridique" en est une bonne illustration. Dès qu'une question ne trouve pas sa solution immédiate dans les sources habituelles du droit, employer l’expression "vide juridique" signifie d'entrée que le législateur n'a pas d'autre choix que d'y apporter une solution par la création d'une loi nouvelle.

Cela entraîne une parcellisation et une sorte de privatisation de la loi au détriment de sa fonction qui est celle de poser des principes généraux.

" D'autre part, par une citation de la responsable de l'association à l'origine de la demande de réforme : "Cela fait sept ans que je me bats pour que cela soit possible. C'est une grosse satisfaction", déclare à l'AFP Florence Basset, présidente de l'association Clara "à l'initiative" du combat pour cette mesure qui concerne "des centaines de mamans " écrivez-vous

Pardon d'être brutale sur la question de fond abordée dans le billet. Mais je ne pense pas que la loi ait pour objet d'apporter des réponses et des satisfactions à des groupes particuliers.

Pour bien des questions complexes ou délicates qui touchent à des notions et des ressorts essentiels de la vie en société, il y a dans la propension à employer le terme "vide juridique " une façon facile d’enfermer le débat et de plomber les alternatives.

Il y a quelques mois, la manière dont a été présentée la demande de Mme Sébire par les médias traditionnels - le vide juridique -, confisquait d’entrée le débat juridique et sociétal au profit seul d'une association.

ps: je tiens à vous dire que j'ai lu le discours préliminaire de J. E. Portalis grâce à une citation que vous aviez faite de son texte dans ce blog.

80. Le lundi 25 août 2008 à 13:42 par Humstel

@augustissime :
Ah la la. J'aurais du faire attention aux mots.
Bien sur vous parlez (29) de ceux qui remettent en cause la REALITE de la superposition des etats. Et pour les instrumentalistes, une theorie qui fonctionne n'est pas la realite, c'est juste une theorie qui fonctionne.
Tout ceux qui vous auront lu auront compris que vous avez bien evidemment voulu rappeler que si la theorie de la superposition des etats n'est pas remise en cause dans sa capacite a decrire et predire ce que les scientifiques observent, mais que personne ne sait si ces etats superposes sont vraiment reels, au meme titre que la pomme qui tombe n'est qu'une image renvoyee par nos sens et n'est peut etre pas reelle non plus.

Il reste Heisenberg et Hawking. Ont-ils publie, comme je l'ai cru de prime abord en vous lisant, une nouvelle theorie qui depasse la superposition des etats et revolutionne la physique quantique ? Je vais voir ca, j'espere qu'ils ne me decevront pas.

81. Le lundi 25 août 2008 à 14:18 par Fantômette

@ Augustissime

Votre soif de droit fait plutôt plaisir à voir, je dois dire.

Vous faites visiblement partie de ces personnes grâce auxquelles mon métier se complexifie chaque jour, mais devient également chaque jour plus nécessaire.

Ce que vous définissez par l'expression "vide juridique", ce n'est pas une situation de vide. C'est ce que l'on pourrait appeler, et que l'on appelle en sociologie comme en théorie générale du droit, une "demande de droit", ou le "besoin de loi".

Il faudrait évidemment s'entendre sur la définition du spamming, mais disons que nous ne parlons bien que du spamming au sens strict, exclusivement publicitaire.

Cette activité n'était pas à proprement parler hors du droit. Je soupçonne que peu de sites commerciaux s'y adonnant au début des années 2000 s'étaient préalablement mis en conformité avec la loi "informatique et liberté", mais passons.

Contentons-nous de dire que cette activité était licite. Elle n'était ni interdite, ni encadrée de manière spécifique. Mais cette activité a rapidement été perçue comme perturbante et envahissante. La solution aurait pu n'être que technique, cantonnée au développement de logiciels adaptés permettant d'en bloquer l'importation.

Mais, fichtre, non, légiférons plutôt, de peur que le "vide juridique" qui s'ouvre sous nos pas ne nous précipite dans d'insondables abimes dont nul avocat ne saura nous extirper.

Mais qui nous en parle, au fait, de ce manque ? Qui le définit ? Qui le détermine ? A t-on fait des sondages ? Y a t-il eu des pétitions ? Des citoyens se sont-ils massivement ouverts du problème que représentait le fait de recevoir ces spams non sollicités auprès de leurs députés ?

Aucune importance, voyons.

Il y a du vide, il faut bien colmater. Probablement que ça fait des courants d'air, sinon.

@ Humstel

# 64 : je tente heu... Woody Allen ?
#67 : je ne pensais pas vous avoir convaincu au sujet du droit qui est une science, dites donc. Pour le reste, votre question est fort intéressante, mais là, "le Droit, ses axiomes, et ses rapports avec la Liberté" pendant ma pause déjeuner, comment vous dire... Peut-être plus tard, d'accord ?

(Allez lire l'article 5 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, par contre.)

82. Le lundi 25 août 2008 à 14:31 par Yves D

@Augustissime (75 et 71)
@Véronique (79)

Comme le souligne Guile (#73), ce n'est pas parce qu'une situation n'est pas explicitement couverte par un texte juridique qu'il s'agit d'un "vide juridique".
En tout cas selon l'éditeur de ce blog et une majorité de commentateurs (auxquels je veux bien me ralier, avec une nuance que je détaille plus loin).

En effet, on nous explique ici que le droit n'a pas été écrit avec l'objectif de couvrir toutes les situations possibles, mais en fixant des règles relativement générales, mais pouvant bien sûr être plus détaillées sur certains points.

Ainsi, le droit interdit des actes ou limite (le plus souvent) certaines situations, voire en rend obligatoire certaines.
Lorsqu'une situation inédite se présente, tout l'art du juge est de la replacer dans le cadre juridique existant lorsque l'affaire lui est présentée.

Pour reprendre l'exemple du spam, comme vous le disiez : aucun texte ne le visait explicitement au début du siècle.
Cependant, ça ne veut pas dire que cette situation "tombe dans un vide juridique", puisqu'elle est couverte par le droit existant alors (liberté d'expression, droit sur l'utilisation des données personnelles, etc).
Le résultat de ce "droit de l'époque" au SPAM était, comme vous l'indiquez, que le SPAM n'était pas interdit (sauf messages racistes, etc).

Maintenant, si on souhaite l'interdire, alors il ne faut pas "combler un vide juridique", mais modifier le corpus du droit en créant une nouvelle règle, plus spécifique, et se rapportant au SPAM.

Véronique écrit:
"Dès qu'une question ne trouve pas sa solution immédiate dans les sources habituelles du droit, employer l’expression "vide juridique" signifie d'entrée que le législateur n'a pas d'autre choix que d'y apporter une solution par la création d'une loi nouvelle. "
Non !

Si l'on prend l'exemple de l'ouverture de ses volets (donné par Fantomette plus haut), heureusement que le législateur n'est pas "obligé" de créer une loi nouvelle !!

C'est seulement si la solution issue de l'application du droit existant à un moment donné est insatisfaisante (par exemple par rapport à l'évolution de la société, de la technologie, etc ...) que le législateur doit "créer une loi nouvelle".

Aller, un dernier exemple (au risque de "Troller") : l'IVG était-il un vide juridique avant 1975 ?

Une nuance cependant :
Comme beaucoup de monde, il nous est plus facile de raisonner à partir d'exemple concrets, donc de cas particuliers. Ainsi, nous voudrions que le droit soit lui aussi un empilement de règles spécifiques, au contour bien déterminé.
Si cela peut être un peu vrai pour la jurisprudence, il semble que cela ne le soit pas pour le corpus général du droit.
C'est en cela que le "vulgus pecum" emploi l'expression "populaire" de "vide juridique" lorsqu'il parle de situations qui n'étaient pas explicitement couvertes par un texte juridique avant qu'un tel texte n'existe.

83. Le lundi 25 août 2008 à 14:42 par Miran

Je ne vois nulle part dans ces textes (décret et arrêté) de mention de 16 semaines. D'où Le Monde tient-il ces chiffres ?

84. Le lundi 25 août 2008 à 14:46 par tschok

Casse tête?

Peut être, mais en tous cas la presse quotidienne doit migrer vers l'internet, parce que c'est là que se font les choses maintenant.

Comme vous le savez, en presse papier quotidienne, 40% du coût est imputable à la seule distribution. Sur internet, le coût devient modique. Dès lors, la gratuité est envisageable, à la condition de trouver un financement par la pub.

On objecte que le marché de la pub sur internet est détenu à 90% par les très gros (genre google) et que la manne serait donc illusoire, car il n'y a pas que l'indépendance par rapport à l'annonceur qui est problématique.

En fait, il faut avoir une mentalité de pionnier: il y a 10 ans, google sur le marché de la pub, c'était rien. Aujourd'hui c'est un géant. Pourquoi ne pas tenter le coup?

Autre source de recettes, les abonnements. Des abonnements à prix très réduits sont rentables sur internet en raison de l'effet de large diffusion: Imaginez une petite structure, quelques copains journalistes qui aiment causer autour d'un verre décident de faire un journal internet organisé autour du nom célèbre de l'un d'entre eux.

Pour, mettons, 30 euros par ans, vous tablez sur 10.000 internautes abonnés, ce qui est somme toute assez peu, ça fait 300.000 euros de recettes brutes par an.

Admettons que vous avez 40.000 euros de charges fixes de structure, ce qui est une estimation large pour une petite boîte fondée sur le système D (achat des PC et des serveurs, maintenance informatique, achat des licences, frais de mise en ligne, loyer de la chambre de bonne où le bazar est tanqué le matos, frais de mise en ligne, fiscalité, etc), il vous reste 260.000 euros à mettre dans la rémunération, les charges sociales qui vont avec, et l'investissement.

Au début, c'est de la micro entreprise mais un excédent brut d'exploitation supérieur à 20% est assez rapidement atteignable, non?

Alors si c'est possible pour des tout petits, ça doit certainement être possible pour les mastodontes de la presse écrite, qui ont déjà ce qui est le plus précieux sur internet comme ailleurs: un titre.


85. Le lundi 25 août 2008 à 16:43 par aliocha

@Tschok : En voilà de jolis business plans ! Pour la version abonnement à prix modique, c'est l'expérience que tente Plenel avec Mediapart, nous verrons....Pour la version financée par la pub, c'est sans doute possible, mais il reste à convaincre des journalistes de se lancer dans l'aventure en pleine période de crise. Le vrai problème au fond, c'est que vous avez aujourd'hui deux catégories de gens dans la presse. D'un côté les journalistes qui rêvent de faire cela mais n'ont pas l'expérience de management nécessaire et, d'autre part, des patrons de presse qui eux vont vouloir réunir un tour de table de financiers sur la base d'un projet conçu comme un aspirateur à pub. Les grands hommes et femmes de presse capables d'avoir à la fois une vision ambitieuse de leur métier et de concevoir un modèle rentable ont provisoirement disparus. Il n'y a plus que des cyniques mercantiles ou des doux rêveurs.
S'agissant des groupes de presse et d'Internet, tous ont compris qu'ils devaient être présents sur le web mais aucun à ma connaissance n'a encore trouvé le bon équilibre entre papier et web, ils bricolent sur Internet et avancent à tâtons sans vision stratégique précise.

86. Le lundi 25 août 2008 à 17:00 par aliocha

@véronique : vous illustrez mais vous n'expliquez toujours pas ce que vous entendez par "vérités théoriques plombées"

87. Le lundi 25 août 2008 à 18:00 par tschok

Pas de stratégie précise?

Remarquez, c'est normal, les dirigeants actuels ont été formés sous le règne du modèle papier. Faire basculer un titre vers l'internet à 100% revient à mettre au chômage tout le personnel attaché à la production matérielle du titre en question, donc envoyer aux pilon toute la culture industrielle et le modèle social du journal papier. Pour un chef d'entreprise, c'est plutôt impliquant comme décision.

Quant à conserver une activité papier, ça devient risqué s'il faut rentabiliser l'activité "papier" avec des tirages à 50.000 exemplaires, en doublon d'une activité internet qui mettra nécessairement un certain temps à démarrer. Et ça fait cher pour que papy puisse recevoir son exemplaire du Monde ou du Figaro daté du jour jusque dans son village de l'Ardèche.

Alors qu'est ce qu'il leur reste, à part mettre leur titre en ligne pour faire "vitrine" avec quelques fonctionnalités primitives pour se donner un genre de forum? Or, internet n'est pas seulement une vitrine, c'est beaucoup plus que ça. C'est plein de potentialités extraordinaires d'un point de vue journalistiques.

Au total, je pense qu'on est dans une période de latence, que ce n'est pas une question d'argent, mais de culture d'entreprise et de modèle économique, que ceux qui feront les mauvais choix disparaitront en moins de 5 ans et que c'est maintenant qu'il faut prendre les décisions.

Un titre comme Le Monde pourrait, dès demain, décider de migrer vers la diffusion par internet à 100%, sans que cela coûte des sommes extravagantes.

En revanche, cela poserait des problèmes sociaux et pas des moindres. Sans compter le changement de culture journalistique que cela impose.

Bref, un virage plutôt difficile à négocier, mais je n'en ferais pas un problème d'argent ou d'antagonisme entre des capitalistes courtermistes d'un côté et des journalistes progressistes de l'autre.

A côté de cela, il y a la presse magazine qui conserve un bon niveau de rentabilité (il ne faut pas oublier que Lagardère, en son temps, avait deux métiers: vendre du papier glacé et fabriquer des missiles. Il gagnait plus d'argent avec le papier glacé qu'avec les missiles... comme quoi!).

Donc le papier n'est pas près de disparaitre, à mon humble avis de pronostiqueur ignorant à peu près tout du sujet.

Finalement j'établirais un distinguo entre:

- la presse quotidienne d'information: urgence de l'adaptation rapide, car très forte vulnérabilité, mais maxi potentialités. Pour cette presse je dirais que l'internet est une bénédiction.

- la presse magazine grand public: l'objet papier survivra très bien au voisinage de l'internet et même en synergie avec lui, de la même façon que cette presse a tiré profit de la TV et de la radio, jadis.

- la presse hebdo d'information: là, c'est plus coton. J'ai du mal à imaginer que ce type de titres puisse basculer en internet à 100% sans que cela casse le rythme de ce genre de publications. Et faire du mixte web/papier comporte un risque de phagocytage de la diffusion internet sur la publication papier: pourquoi acheter le Nouvel Obs, par exemple, si son site est presque aussi complet. Reste une complémentarité difficile à trouver: mettre dans l'un tout ce qu'on ne trouve pas dans l'autre tout en restant dans la ligne éditoriale. Problème, problème.

Dernier point: comme disait Fantômette, small is beautyful, big is powerful. Coup de chance pour les small, les big ne sont pas si powerful que ça.

Ca ouvre des perspectives, non?

88. Le lundi 25 août 2008 à 18:06 par Augustissime

@Véronique
« Cela entraîne une parcellisation et une sorte de privatisation de la loi au détriment de sa fonction qui est celle de poser des principes généraux.
[…]
Pardon d'être brutale sur la question de fond abordée dans le billet. Mais je ne pense pas que la loi ait pour objet d'apporter des réponses et des satisfactions à des groupes particuliers. »

D’une part, tout le monde (en âge de procréer) est susceptible d’avoir un enfant handicapé ou né sans vie : il s’agit bien de problèmes généraux appelant des principes généraux.
D’autre part, cela fait belle lurette que la loi ne fait pas que poser des principes généraux mais vise à apporter des satisfactions à des groupes particuliers : les chômeurs, les agriculteurs, les épargnants, les avocats, … Vous n’êtes pas libertarienne, que je sache ?

@Fantômette
« Mais qui nous en parle, au fait, de ce manque ? Qui le définit ? Qui le détermine ? A t-on fait des sondages ? Y a t-il eu des pétitions ? Des citoyens se sont-ils massivement ouverts du problème que représentait le fait de recevoir ces spams non sollicités auprès de leurs députés ? »

Ben c’est simple, on est en démocratie, il y a un gouvernement, des assemblées et la constitution ne prévoit ni sondage ni pétition avant de faire une loi.

Ceci dit, votre réaction, qui va jusqu’à défendre le spamming (!), illustre combien les juristes montrent de ressentiment contre le législateur. Parfois de manière fondée, mais souvent avec un excès tout à fait étonnant. Il fait trop de loi, pas les bonnes, il est responsable d’Outreau et des détentions provisoires injustifiées, de l’épaississement des codes, de leurs lacunes, … pauvre législateur !

Eolas:
C'est amusant de voir comme vous, qui froncez le nez et faites la moue dès lors qu'on déforme vos propos fut-ce en manquant de respect à une virgule usez avec générosité de ce procédé avec les autres. À aucun moment Fantômette ne défend le spamming en constatant qu'avant qu'il ne fut interdit, il était autorisé. Constater l'existence revient pour vous à défendre. Et après, vous geignez qu'on ne vous prend pas au sérieux. On essaye, pourtant, mais c'est vous qui gâchez tout à chaque fois.

89. Le lundi 25 août 2008 à 18:17 par tschok

@ Augustissime,

Le législateur victime des juristes...?

Viiite! Un loi pour le protéger!

90. Le lundi 25 août 2008 à 18:48 par gwynplain

Presse papier, presse internet, épineux problème que tout cela. L'information sur internet n'a pas encore trouvé le format qui permette de tirer profit de toutes les possibilités qu'offre le support : elle s'en tient surtout aux commentaires qui sont généralement d'une affligeante indigence (d'ailleurs c'est quand même, à de rares execeptions prêt, ce qui domine dans le web 2.0. Voir à ce sujet le post de l'excellent Manu larcenet sur son site : www.manularcenet.com/blog... La presse papier essaie d'ailleurs elle-même de se donner un vernis 2.0, comme l'illustrent la page de Libé consacrée à l'avis des "Libénautes" qui n'apporte absolument rien au contenu.

@ aliocha : en ce qui concerne ceux qui ont fait le choix du papier, ça fait un bout de temps que j'aimerais avoir votre avis sur l'expérience qu'ont lancée les créateurs de XXI, ce journal fait de longs articles de fond, épais et d'édition soignée, vendu trimestriellement pour la modique somme de 15 euros. A votre avis, ce genre d'expérience peut tenir dans le contexte actuel ? (Je précise que je n'en ai jamais lu, juste feuilleté, mais le pari me semble intéressant et audacieux. Et je sais qu'avec seulement trois numéros, on ne peut encore rien dire sur le devenir du titre.)

91. Le lundi 25 août 2008 à 19:01 par Augustissime

@tschok
Je ne suis pas spécialiste du domaine de la presse, pour autant votre analyse économique ne me semble pas totalement convaincante.

Pour commencer, si beaucoup de journaux ont une édition internet, il y a en a peu qui sont payantes (ou bien elles le sont pour un niveau de service spécifique). Après quelques tentatives, aucun des grands quotidiens nationaux ne fait payer l'accès à son site. Il n'est donc pas évident du tout qu'un journal puisse vivre d'abonnements pour une édition internet.
Un article intéressant sur ce sujet :
www.strategies.fr/archive...

Vous allez répondre que les journaux peuvent vivre de la seule publicité, surtout si le passage à internet réduit leurs coûts, mais :
- il y a l'exemple des gratuits, qui bien que très peu coûteux, n'ont pas trouvé leur équilibre économique,
- la réduction des charges, si elle est de 40% (représentant la distribution selon vous) ne couvre pas la perte des abonnement (60% environ),
- il n'est pas du tout établi qu'un différentiel de coût de 40% suffise à pousser les lecteurs vers internet.

Ce dernier point est à mon avis le plus délicat : entre Le Monde à 1,2 euros en version papier et Le Monde à 70 centimes en version internet, il est possible que des lecteurs préfèrent une version qui puisse être lue dans le métro, sur la plage ou au café (et qui salisse les doigts).

Sans compter qu'il ne faut pas mésestimer les temps d'adaptation de la population. Parmi les gens qui utilisent internet, quelle est la proportion qui lit de longs textes deux heures d'affilée sur son écran ?

Pour un patron de presse, comme pour tout patron, rien n'est pire que d'avoir raison trop tôt.

92. Le lundi 25 août 2008 à 20:04 par tschok

@ Augustissime,

Une analyse économique convaincante? Tout au plus un simple pronostic.

Mais la situation que vous décrivez est celle d'aujourd'hui.

La question du paiement de la page internet est ouverte (soit à l'abonnement, soit à la page, soit une autre formule).

La question de la pub est ouverte aussi.

Mais une chose est claire: en presse quotidienne, vous ne pouvez pas vous payer le luxe de ne pas être sur internet. A partir du moment où vous y êtes, ce que vous y mettez vous coûte et par dessus le marché, concurrence votre support papier. Alors autant que cela vous rapporte.

Soit vous avez les reins suffisamment solides pour faire les deux choses à la fois, même mal, soit vous êtes obligé de choisir. La situation financière de la presse quotidienne ne lui permet pas de courir durablement deux lièvres en même temps, en France, actuellement.

Sur vos deux objections: oui, c'est vrai mais...

1) Le support papier est pratique mais pauvre

Dans un Monde à 1,20 € je lis tout ou je lis seulement ce qui m'intéresse? Internet ouvre la possibilité d'un journal à la carte: je lis ce qui m'intéresse, je pourrai cliquer sur des liens, avoir accès directement à des archives, voir des vidéos, écouter des fichiers audio, etc.

C'est non seulement du "à la carte" mais aussi du "tout ce qui s'y rapporte".

Je lis un article sur l'invasion de la Géorgie? En lien je vais trouver une fiche complète sur sa géographie, son économie, son histoire, la vidéo de la dernière déclaration de Condy Rice devant la presse US, etc... en quelques clics.

2) La fraction du lectorat la plus traditionnelle ne va pas suivre, les utilisateurs d'internet sont frivoles

Oui, il y a un risque de perdre des anciens clients, mais il y a aussi la chance d'en conquérir de nouveaux.

C'est très simple: même dans les foyers où l'on a pas d'habitude de lecture, on trouve un PC et on trouve un PC dans un nombre de plus en plus élevé de foyers.

Le Monde tire à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires. Il y a plusieurs dizaines de millions de PC ou assimilés en France. Un rapport de 1 à 100.

Sur la frivolité, c'est possible, mais qui parle de passer deux heures en continue sur le site d'un journal. C'est du "quand je veux, où je veux" Mon article par mon journaliste préféré ou non peut même m'être mailé si je pose une alerte sur un sujet qui m'intéresse.

Par exemple:combien de morts parmi les talibans lors de l'embuscade qui a coûté la vie à 10 soldats français?

Dès qu'un journaliste a une info confirmée et qu'il écrit son papier, toc, l'info est dans ma boite à lettre.

J'y passe pas des heures.

Pourtant, pour obtenir cette info non confirmée à ce jour j'y ai mis du temps, pour des résultats variables: 13 tués chez CNN, 40 au Figaro, 27 en version officielle.

Il faut mesurer les potentialités qu'offre le net par rapport à ce qu'on connait aujourd'hui. Et dans quelques années on se dira qu'avant le net, c'était la pré histoire. On imaginera même pas avoir pû vivre ce temps là.

Vous vous souvenez du minitel? Du réseau transpac? Des cabines de téléphones publiques (il en reste quelques unes), de l'avant téléphone mobile, des cartes routières d'avant le GPS? De votre premier PC 486?

En commerce les choses sont simples: on paye pour avoir un service. Si le service m'est utile, j'accepte de payer.

A la condition bien sûr qu'il n'existe pas l'équivalent gratuitement.

Mais du "à la carte" avec "tout ce qui s'y rapporte", "quand je veux où je veux" ça n'existe pas en gratuit. L'internet payant est un service individualisé, de qualité. L'internet gratuit, c'est le service de masse, pour les fourmis.

Pour l'instant, on est que des fourmis.



93. Le lundi 25 août 2008 à 21:31 par Fantômette

@ Augustissime

Vous n'y êtes toujours pas.

Je me moque du spamming, et le fait qu'il soit interdit ne me fait ni chaud ni froid.

Je m'étonne par contre de ce besoin permanent de tout contrôler, et de cette conviction que ce qui n'est pas strictement encadré ou minutieusement réglementé se situe dans le vide, plutôt que dans un espace de liberté.

94. Le lundi 25 août 2008 à 22:52 par Yves D

@ Fantômette (et Augustissime)

J'avais repris votre exemple (en espérant l'avoir bien utilisé) pour répondre moi aussi à Augustissime lors de ma pause déjeuner ...

Mais mon commentaire a du se perdre en route sur le serveur d'Eolas pour n'apparaitre que ce soir, en place 82 là au dessus ...

Comme dans certains forums, je fait donc ici un "UP" ...

95. Le lundi 25 août 2008 à 23:25 par Yves D

S'il y a encore des personnes qui lisent jusqu'ici, et qui sont intéressées par la discussion sur "le vide juridique" (et non sur la digression "la presse et internet"), je leur conseille aussi la lecture des commentaires et réponses d'Eolas #43 et #44 sous le "billet du dimanche" www.maitre-eolas.fr/2008/...

Où l'on y ajoute la controverse sur la qualification "prétorienne" ou non du Droit administratif (Droit Public) ...

Ce qui permettrait de valider l'expression de "vide juridique" pour le Droit public ??

96. Le mardi 26 août 2008 à 00:20 par ramses

Bonjour à tous,

La tempête Fay n'a pas eu ma peau (au grand désespoir de Maître Eolas) et me revoici...

@ Tschok et aliocha

La montée en puissance de l'information sur internet, au détriment de la presse papier, ne fait que commencer.

Ce qui va la faire vraiment décoller, c'est le 3G sur e-phone et consorts... Internet à tout moment sur son mobile.

A terme, une partie de la redevance "mobile" ira aux "contenus". JM Messier l'avait pressenti, dix ans trop tôt.

Grave erreur marketing, il pensait qu'il fallait être propriétaire du "contenu", et s'est fait refiler Universal à prix d'or !

Demain, les "contenus" se battront pour proposer leurs services aux "tuyaux"...

Les meilleurs journalistes seront des "free lance"... Les grands groupes de Presse ont du souci à se faire.





97. Le mardi 26 août 2008 à 00:32 par ramses

@ Aliocha 86

Chère Aliocha,

La "vérité théorique plombée" n'est pas une vérité, car elle est seulement théorique. Le fait qu'elle soit plombée lui alourdit considérablement les ailes et l'empêche de décoller. Il s'agit en fait d'une contre-vérité pratique allégée, si vous voyez ce que je veux dire ?

98. Le mardi 26 août 2008 à 01:08 par Augustissime

Pfff, les querelles de définition c'est épuisant.

Tous les deux commentaires, Eolas reprend la même analyse, selon laquelle un juge doit trancher dans tous les cas et donc que, par principe, le vide juridique n'existe pas. Tous les cinq commentaires on lui répond que ce qu'on entend généralement par vide juridique c'est un cas que le législateur n'avait visiblement pas anticipé et qui pose problème.

Tenez, on va faire un effort : Eolas, vous avez raison, le vide juridique n'existe pas suivant votre définition.

Dommage qu'elle soit si minoritaire.

99. Le mardi 26 août 2008 à 01:22 par Augustissime

@Guile : la pratique du spamming était autorisée PAR DEFAUT, ne faites pas semblant de ne pas comprendre, c'est une attitude que le droit coutumier réserve à notre hôte.

@Eolas sur le spamming : Souhaiter qu'on n'interdise pas le spamming revient à en défendre la pratique, il n'y a là nulle déformation. De la même manière, s'opposer à une loi supprimant la profession d'avocat reviendrait à la défendre.

@Fantômette : Sur votre critique de la frénésie législative et réglementaire, je ne vous suis que partiellement. Bien sûr il y a des morceaux entiers de l'édifice législatif et réglementaire qui sont devenus des usines à gaz et mériteraient d'immenses coups de balai. Toutefois il ne me semble pas choquant que le législateur laisse de nos jours moins de place à la jurisprudence que par le passé. Le fonctionnement qui consiste à poser quelques principes et à laisser le juge agir m'a toujours semblé moins transparent et moins sain.

100. Le mardi 26 août 2008 à 08:39 par Véronique

@ aliocha

Pour moi une vérité théorique plombée, c'est quand une information - le vide juridique - est transmise et imposée à des lecteurs qui n'ont pas les ressources théoriques pour l‘analyser et la critiquer. Quand nous n'avons pas d'autre choix que de faire confiance à celui ou à celle qui donne l"information.

Je pense que ce qu'il y a de très intéressant dans l'emploi en permanence de cette expression,c'est que le recours habituel et mécanique à vide juridique traduit un déficit de culture de la loi , au sens l’esprit de la loi.

D'autre part, l'emploi systématique "vide juridique " masque pour les lecteurs ou pour les auditeurs qui reçoivent l'information une tension essentielle de la vie démocratique. Celle de l'équilibre des pouvoirs. La tension nécessaire entre la jurisprudence et le législatif étant un rouage parmi d'autres du mécanisme de l'équilibre des pouvoirs.

@ Augustissime

A titre personnel, les décrets qui précisent la loi existante me conviennent.

Je pense que les progrès de la médecine et de la technologie ont transformé le rapport au foetus. Par exemple: l’usage de l'échographie.

Maintenant, très souvent, le combat d'une association ou d'un groupe de pression n'est pas de faire préciser une loi existante, mais de la remplacer par une nouvelle loi.

"Lorsqu'une situation inédite se présente, tout l'art du juge est de la replacer dans le cadre juridique existant lorsque l'affaire lui est présentée." écrit Yves D (post 82)

Ce temps de réflexion et de maturation juridiques est à mon sens nécessaire. L'idée qu'une décision de justice se cale d'abord dans un existant me rassure. Au fond, je pense qu'une loi doit être précisée à l'épreuve du temps, de l'expérience et de l'expérimentation.

101. Le mardi 26 août 2008 à 08:55 par aliocha

@Tschok : votre enthousiasme est rafraîchissant (ce n'est pas une insolence), il me montre au passage à quel point la presse est neurasthénique en ce moment car les gens très expérimentés qui réfléchissent sur le sujet sont convaincus que l'avenir est sur Internet mais bien en peine de déterminer un modèle économique viable. Entre nous, je crois plus à la belle histoire d'une équipe de journalistes partie de rien et rencontrant un succès inespéré qu'à la bascule heureuse du papier vers le web, pour les raisons avancées par Augustissime dont, une fois n'est pas coutume, je partage l'analyse. Vous n'imaginez pas à quel point refaire une maquette de journal par exemple nécessite de prudence pour que les lecteurs, globalement très conservateurs, n'aient pas l'impression qu'on a abîmé leur journal favori. Alors leur supprimer le papier du jour au lendemain ! L'Agefi l'a fait. Ce quotidien économique fondé il y a un siècle et réservé à la fine fleur de la finance est passé sur le web il y a deux ans je crois, vous recevez le journal tous les matins en PDF, plus un hebdo papier en fin de semaine et un accès au site. Cela étant, ce journal est en crise financière depuis des années et tirait à 4000 exemplaires, il ne risquait pas grand chose.....La direction prétend que c'est un succès mais en avançant des chiffres qui confondent connexions et abonnements, j'attend de voir. Cela étant il ne faut pas oublier que l'attachement au papier reste très fort et que les livres électroniques n'ont pas rencontré le succès escompté.
@ramses : merci de la traduction, c'est plus clair ;)
@gwynplain : pour tout vous dire, je n'ai pas d'avis. Je l'ai vu, touché, feuilleté et.....pas acheté. Comme vous me posiez la question, j'ai regardé d'un peu plus près hier un exemplaire qui traînait au bureau, il me semble que c'est un mélange du Monde 2 et de revues savantes type Esprit, pourquoi pas, ça fait partie des produits qui se situent à la lisière de la presse et de l'édition, personnellement cela ne me passionne pas.

102. Le mardi 26 août 2008 à 09:06 par aliocha

@véronique : "Maintenant, très souvent, le combat d'une association ou d'un groupe de pression n'est pas de faire préciser une loi existante, mais de la remplacer par une nouvelle loi". Eh oui, le processus législatif s'est modifié en l'espace de 200 ans. Une bonne part des réformes actuelles sont issues des demandes de la société, cela n'a rien de choquant. La plupart du temps d'ailleurs, ceux qui réclament une réforme sont ensuite consultés et associés à sa préparation. C'est particulièrement vrai dans le domaine financier où le gouvernement entend une demande de réforme, rédige un projet de texte s'il la juge légitime, puis le soumet à consultation auprès de ceux qui seront concernés avant d'effectuer les ultimes ajustements en fonction des commentaires reçus et de soumettre le texte au Parlement. Que le processus soit parfois dévoyé par un pouvoir politique plus soucieux de flatter l'opinion que d'améliorer réellement le système juridique, c'est un fait, mais alors il ne joue plus son rôle et c'est lui qu'il faut critiquer, pas les journalistes ou les associations.

103. Le mardi 26 août 2008 à 11:46 par Le Chevalier Bayard

@ Augustissime

"Le fonctionnement qui consiste à poser quelques principes et à laisser le juge agir m'a toujours semblé moins transparent et moins sain."

Contrairement à votre point de vue, respectable, Portalis dans son discours au projet de Code civil de l'an VIII prononcé en 1802 lui rappelle simplement ceci :

"Nous n'avons pas cru devoir simplifier les lois au point de laisser les citoyens sans règle et sans garantie sur leurs grands intérêts. Nous nous sommes également préservés de la dangereuse ambition de vouloir tout régler et tout prévoir.

Un code, quelque complet qu'il puisse paraître, n'est pas plutôt achevé que mille questions inattendues viennent s'offrir au juge. Une foule de choses sont donc nécessairement abandonnées à l'empire de l'usage, à la discussion des hommes instruits, à l'abitrage des juges.

L'office de la loi est de fixer, par de grandes vues, les maximes générales du droit; d'établir des principes féconds en conséquences, et non de descendre dans le détail des questions qui peuvent naître sur chaque matière.

C'est au magistrat et au jurisconsulte, pénétrés de l'esprit général des lois, à diriger l'application.

De là, chez toutes les nations policées, on voit toujours se former, à côté du sanctuaire des lois et sous la surveillance du législateur, un dépôt de maximes, de décisions et de doctrines, qui s'épure journellement par la pratique et par le choc des débats judiciaires, qui s'accroît sans cesse de toutes les connaissances acquises, et qui a constamment été regardé comme le vrai supplément de la législation."

Et à propos du rôle de la loi, il ajoutait même que : "Si l'on part de l'idée qu'il faut parer à tout le mal et a tous les abus , on accordera qu'une protection ruineuse et le remède sera pire que le mal".

104. Le mardi 26 août 2008 à 13:09 par Véronique

@ aliocha

" Que le processus soit parfois dévoyé par un pouvoir politique plus soucieux de flatter l'opinion que d'améliorer réellement le système juridique, c'est un fait, mais alors il ne joue plus son rôle et c'est lui qu'il faut critiquer, pas les journalistes ou les associations."

Je ne suis pas d'accord.

Le législatif, le médiatique et l'associatif ont pris l'habitude depuis des décennies de se confondre les uns avec les autres. Il y a comme des effets de miroir.

Une des formes les plus achevées de cet agglomérat a été la campagne médiatique à propos de la demande de Mme Sébire. Avec une « dramatisation scénique » qui avait comme argument central... le vide juridique.

Quand à la veille du procès d'Outreau, D. Perben a pour projet de faire voter une loi sur la présomption de crédibilité de la parole de l'enfant, comment s'exprime à ce moment-là une supposée volonté générale ? En quoi une législation était-elle nécessaire et pertinente d'un point de l'intérêt général ?

N'est-ce pas plutôt là, la pression conjointe de groupes associatifs qui sacralisent la parole de l'enfant et celle du médiatique, qui ont convergé pour fortement inciter le politique et se substituer au législatif ?

Le ministre public représentant la société - le général -, qu'est-ce qui a justifié, par exemple, que des associations de victimes pouvaient être parties civiles dans des procédures ?

105. Le mardi 26 août 2008 à 13:33 par Fantômette

@ Augustissime

Sans rire, vous pensez que plus il y a de lois, moins il y a de jurisprudence ?

J'en doute.

Plus il y a de lois et de règlements, plus la porte est ouverte aux difficultés d'interprétations, et plus le recours au juge se fait nécessaire et inévitable.

106. Le mardi 26 août 2008 à 15:59 par Fantômette

@ tschok et aliocha

Je serai évidemment bien en peine de déterminer un quelconque modèle économique pour la presse à venir, mais j'ai envie de croire qu'un travail de qualité ne peut pas ne pas trouver son public.

Le tout est de savoir ce que l'on entend par "un travail de qualité", pour parler du travail d'un journaliste.

Je ne fais pas non plus d'insolence, aliocha, c'est une vraie question, qui rejoint - je crois - celle que vous souleviez dans votre commentaire initial, sur la valeur ajoutée du travail effectué par un journaliste.

Je me souviens avoir entendu dire, en substance, par une journaliste (je crois qu'il s'agissait d'une journaliste américaine, interrogée sur le rôle de la presse au moment de l'histoire des armes de destruction massive, à un moment où la presse américaine faisait un bon retour en arrière sur son travail d'alors) : "Je ne faisais que mon travail, je rapportais ce que nous disaient les porte-parole de la Maison Blanche. Mon travail, ce n'est pas de remettre en question ce que dit le Président."

Cela m'avait frappée, parce que je me suis demandée si elle avait tort ou raison.

Si le travail de journaliste, au sens le plus strict qui soit, consiste dans le fait de transmettre une information, alors elle a n'a pas tort.

Le gouvernement me dit : X. Je vous informe que le gouvernement m'a dit : X. J'ai fait mon travail. Ce travail est de bonne qualité dès lors que j'ai fidèlement transmis les propos qui m'ont été tenus. Ce travail est de mauvaise qualité si j'ai fait une erreur dans la reprise des propos, si les interprétant, je les interprète mal, ou si les reprenant partiellement ou hors contexte, j'en déforme la signification.

Dans ce contexte, les journalistes sont à la lutte avec les conseillers en communication, dont j'ai cru comprendre qu'ils encombraient désormais le moindre entretien, aux côtés des hommes politiques, des artistes, des hommes d'affaires, etc...

Il est certain que transmettre l'information fait partie du travail du journaliste. Quand un ministre, un parlementaire, un homme d'affaire, que sais-je... dit: X, c'est en soi un élément d'information, digne d'être transmis tel quel.

Le travail du journaliste, compris comme cela, c'est de faire savoir.

Et là, logiquement, aliocha, vous me voyez venir, mais je marche avec prudence dans les termes de notre accord, et je vous confirme que je parle toujours aussi sérieusement, sans le moindre début de commencement d'ironie de ma part.

Pour être tout à fait franche, j'ai pensé que la conception que cette journaliste se faisait de son travail était peut-être légitime, mais peu ambitieuse.

Tant que l'enjeu du journalisme reste un enjeu de transmission de l'information au sens strict, tant que le journaliste se conçoit (se conçoit lui-même, entends-je) comme l'intermédiaire par lequel transite l'information, alors il va peiner à trouver sa juste place sur internet. Car internet va le mettre en concurence avec trop de personnes susceptibles de fournir le même service.

Donc, si "faire savoir" fait naturellement partie du travail de journalisme, il faut y rajouter une dimension supplémentaire.

Pas seulement "faire savoir". "Faire comprendre" aussi.

Ce qui reviendra nécessairement à définir différemment ce qui fait la qualité d'un travail de journalisme.

Dans le fond, c'est ce qui s'est passé dans l'article de lemonde.fr visé par ce billet.

En ce qui concerne la question de "faire savoir", le journaliste a fait son job. Les informations délivrées étaient correctes. C'est ce que vous expliquez à juste titre (je laisse de côté l'aspect "vide juridique").

Pour ce qui est de "faire comprendre", il manque au moins le paragraphe que vous rajoutez.

Il manque pour que le lecteur comprenne, par exemple que le vide juridique détecté autour de cette question devrait être relativisé, puisqu'on avait une loi rédigée en des termes généraux, et une jurisprudence de la cour de cassation permettant déjà de faire ce que le décret autorise - mais ok, là j'avoue sourire en écrivant ce paragraphe.

107. Le mardi 26 août 2008 à 16:27 par ramses

@ Fantômette et Aliocha

A mon sens, un journaliste qui se contenterait de rapporter telle quelle une dépêche d'Agence de Presse, sans la commenter, ne remplirait pas son rôle d'information.

Le commentaire est un éclairage de la dépêche ou de l'interview, qui me paraît indispensable.

Nous avons eu la preuve de cette nécessité dans l'interview du Président à la Télévision... Les journalistes présents servaient de faire-valoir, ils ne remplissaient pas leur rôle de "décodeurs".

C'est pourquoi je crois beaucoup en l'avenir de journalistes "freelance", ne dépendant d'aucun organe de presse, pour "décoder" les dépêches.

Ca existe aux USA, où certains "poids lourds" sont très recherchés par les media pour commenter l'actualité.

C'est aussi un gage d'indépendance de l'information, qui raingardise l'idée d'une Presse entièrement dévouée au Pouvoir... Les "groupes de presse" ont implosé avec l'arrivée d'Internet.



108. Le mardi 26 août 2008 à 16:55 par Apokrif

Cherchez l'erreur:
www.liberation.fr/actuali... :
"La [Cour de cassation] avait annulé la circulaire de 2001"

109. Le mardi 26 août 2008 à 17:01 par Apokrif

"Depuis le temps que je m'échine à expliquer que le vide juridique n'existe pas."

Il faut donc dire "silence législatif et/ou réglementaire et/ou conventionnel".

Encore que... tant qu'une juridiction suprême n'a pas, en fixant la jurisprudence sur un point, créé rétroactivement la règle de droit concernant ce point, il y a bien un vide juridique puisque la règle, si elle existe (le juge étant censé la découvrir et non la créer), n'est présente que dans les cieux jurislatifs où elle est invisible des justiciables mortels, ce qui pour ces derniers revient à une absence tant qu'elle n'est pas descendue sur Terre par un arrêt..

110. Le mardi 26 août 2008 à 17:45 par Mauvaisours

@Alliocha:
Je rejoins Fantomette : Quelle est la valeur ajoutée des journaux dont le seul contenu est un contenu d'agence de presse ?

@Eolas:
Je suis un fervent lecteur du blog, mais dans cette affaire, considérer que "LeMonde.fr" a utilisé "vide juridique" dans son sens commun plûtot que dans le sens technique ne serait-il pas raisonnable ? (Je suis informaticien, et les approximations de ce genre dans mon domain me font bondir aussi, mais pas au point d'en faire un billet)

Eolas:
Dans ce cas, vous aurez relevé que dans cette affaire, il n'y avait pas de vide juridique au sens commun, puisque la loi règle la question depuis février 1993.

111. Le mardi 26 août 2008 à 21:17 par Augustissime

Ah ben là on est d'accord : ces décrets particuliers ne comblent pas un vide juridique qui était déjà comblé.

Mais c'est diablement agréable de vous voir admettre que les termes techniques ont un sens commun qui peut différer de celui que leur donnent les spécialistes. Vous progressez.

112. Le mardi 26 août 2008 à 22:01 par aliocha

@Fantomette : Ah mais je suis entièrement d'accord avec vous ! Cela fait des années que j'explique à qui veut bien m'entendre qu'avec l'arrivée d'Internet nous ne sommes plus l'interface obligé entre les décideurs et les citoyens, ce qui nous oblige à repenser une partie de notre métier. Jusque là, lorsque par exemple un politique voulait annoncer quelque chose, il convoquait une conférence de presse, les journalistes étaient les seuls à y assister à charge pour eux d'en faire le récit et d'informer. Aujourd'hui les dossiers de presse sont accessibles à tous via le net et même la retransmission des conférences de presse en vidéo. Question évidente et passionnante : à quoi servons nous ?D'abord à continuer de relater ces conférences car c'est notre métier et que nos lecteurs n'ont pas que cela à faire de surfer sur les sites des ministères pour savoir ce qui s'est passé pendant qu'ils travaillaient. Mais il est évident que nous ne sommes plus des interfaces obligés, juste des facilitateurs, des synthétiseurs. Et puis il y a tout le reste, les interviews, les reportages, les enquêtes. Bref, il nous reste plein de choses à faire que le web ne nous retirera pas. En revanche, ce que nous impose le web à mon sens c'est d'abord un saut qualitatif énorme. Puisque vous pouvez vous-mêmes assister à la conférence de presse, il faut qu'on soit en mesure de vous apporter un regard critique, une analyse et une mise en perspective. Au nom de quoi me direz-vous ? Au nom du fait que nous passons nos journées à observer, que nous sommes payés pour cela et que c'est là que se situe à mon sens notre "réservoir" de valeur ajoutée. Mais en l'état actuel de la presse, cela pose deux problèmes. Le premier est économique, quand on n'a pas d'argent, on travaille mal, on bâcle, on va trop vite, on fait du remplissage, bref on bricole en espérant ne pas couler. Donc on fait le minimum syndical. Le deuxième est d'ordre psychologique. L'analyse, c'est du travail et c'est aussi une prise de risque. Or la prise de risque n'est pas au goût du jour. Les consignes dans les rédactions sont plutôt inverses, pas de vague, il ne faut surtout pas déplaire à qui que ce soit d'influent parce que c'est la porte assurée. Enfin, croit-on. J'ai souvent expérimenté le fait que lorsqu'on montre les dents, à condition bien sûr de le faire de manière légitime et d'être techniquement et déontologiquement irréprochable, on ne s'attire rien d'autre que le respect des gens bien et la crainte des voyous. Mais bon, il faut essayer pour le savoir. Certains objecteront que le journaliste doit s'en tenir aux faits et ne pas les polluer par des éléments subjectifs. J'ai beaucoup entendu cela dans les rédactions. Personnellement, j'ai toujours donné à mes papiers une dimension d'analyse. Mais cette analyse n'est jamais un avis personnel, je m'efforce toujours d'être neutre. Simplement je m'emploie à mettre un événements en perspective, à faire parler les uns et les autres, à confronter les points de vue, à rechercher le sens. Ce qui nous ramène à votre journaliste américaine, relater les déclarations de la Maison Blanche, c'est la base du travail. Il faut bien que les citoyens américains sachent ce que le pouvoir politique a décidé de faire. Analyser et mettre en perspective, c'est ce qu'à mon avis elle aurait dû faire.

113. Le mardi 26 août 2008 à 23:07 par Le Chevalier Bayard

Heureusement que l'orthodoxie juridico-linguistique n'interdit pas aux non spécialistes d'utiliser le sens commun.

Comme le rappelaient souvent mes professeurs de droit: le "vide juridique" laissez-le aux journalistes et parlez plutôt de vide législatif !

114. Le mercredi 27 août 2008 à 08:34 par Fantômette

@ Aliocha : Ceci dit, tout cela ne nous donne pas vraiment de clé pour définir ce qui fait la qualité du travail d'un journaliste. Cela lui donne un objectif, c'est un début, mais ce n'est pas suffisant. D'autant plus que l'objectif est en quelque sorte fictif, il ne sera jamais parfaitement atteint.

115. Le mercredi 27 août 2008 à 09:25 par aliocha

@Fantômette : La qualité ? C'est l'exactitude, la précision, l'objectivité dans la relation des faits, la mise en perspective, une rédaction agréable. Ce qui suppose compétence et indépendance. Ce n'est pas un objectif au sens où beaucoup de mes confrères s'emploient à faire leur travail en respectant ces exigences. Cela redevient un objectif si on considère que les rédactions sont plus préoccupées à l'heure actuelle par la rentabilité que par la qualité.

116. Le mercredi 27 août 2008 à 16:36 par IceCream

Pour mémoire voici des articles qui rendent difficilement acceptable l'expression de "vide juridique" :

"Article 4 code civil : Le juge qui refusera de juger, sous prétexte du silence, de l'obscurité ou de l'insuffisance de la loi, pourra être poursuivi comme coupable de déni de justice".

"Article 434-7-1 du code pénal : Le fait, par un magistrat, toute autre personne siégeant dans une formation juridictionnelle ou toute autorité administrative, de dénier de rendre la justice après en avoir été requis et de persévérer dans son déni après avertissement ou injonction de ses supérieurs est puni de 7500 euros d'amende et de l'interdiction de l'exercice des fonctions publiques pour une durée de cinq à vingt ans."


En outre, si un tel vide existait cela voudrait dire que votre cause ne saurait être entendue devant un magistrat faute de fondement juridique. D'où une privation du droit fondamental d'accès à la justice dont les corrolaires sont l'absence d'Etat de droit, la disparition des droits individuels reconnus à chacun etc. ...

Pour faire encore plus simple, si un vide juridique existe c'est la loi de la jungle et à ce jeu là c'est toujours le plus fort qui gagne... autrement dit soit le plus riche, soit le costaud, soit l'Etat.

Pour être précis, il ne s'agit jamais de "vide juridique" mais seulement de "flou juridique"...

Un exemple pour illustrer mon propos, un caillou tombe du ciel et fait un petit cratère dans votre jardin vous ne pouvez pas tout de suite dire qu'il s'agit soit de cobalt, de marbre, d'un mélange de métaux... Après analyse on vous dit que tous les composants de votre petit caillou sont inconnus. Et bien jusqu'à ce qu'un scientifique donne un nom à cette "chose" vous l'appellerez météorite... Ce n'est peut être une définition substantielle brillante, mais c'est une définition...
Devant un flou juridique le juge agit sensiblement de la même manière.

117. Le vendredi 29 août 2008 à 07:46 par Duralex Sex Led

C'est rigolo de discuter de quelque chose qui n'existe pas.
Comme le chat de Schrödinger qui, si ça se trouve, n'est plus dans la boite depuis longtemps.
Et si le vide juridique n'était juste qu'une zone du droit qui gagnerait en clarté par une loi spécifique ?

Eolas:
L'expérience du chat de Schrödinger date de 1935, le chat est mort depuis longtemps.
Le vide c'est pas le noir, c'est votre cerveau qui manque de clarté.

118. Le vendredi 29 août 2008 à 09:08 par Duralex Sex Led

PS:
Y a t'il un avocat spécialiste en crime de lèse-majesté.
Je crois que je vais en avoir besoin.

Ou bien un informaticien génial spécialiste de la lutte anti-troll-detector

119. Le mercredi 3 septembre 2008 à 10:09 par DM

@Eolas: Dans la bouche des journalistes, le "vide juridique" veut dire "il n'y a pas de loi spécifiquement prévue pour ce cas d'espèce, et qui imposerait l'issue qu'une partie de l'opinion publique considère comme morale".

120. Le mercredi 3 septembre 2008 à 17:38 par GALLUS

Cher Maître,

En feuilletant le catalogue Litec reçu ce jour, j’ai découvert à la page 68 deux ouvrages qui m’ont immédiatement fait penser à votre blog :

- l’introduction au droit martien (« premier roman juridique »), dont la lecture est à conseiller à l’auteur du commentaire : "6. Le vendredi 22 août 2008 à 13:20, par X" sous votre article "Le Monde annonce les lois qui existent déjà du vendredi 22 août 2008 à 11:48",

- Vérités croisées (« Cross examination, une petite révolution ») de votre confrère Christophe Ayela, (Jacques Mestre et Valérie Péronnet) sur le contre interrogatoire croisé apparemment permis par l’article 442-1 du Code de procédure pénale(créé par la loi n°2000-516 du 15 juin 2000), ce que j’ignorais jusqu’à présent ; lecteur fidèle mais récent de votre blog, je ne serais étonné que vous n’en ayez pas déjà traité et sinon, bien aise que vous le fassiez compte tenu de votre expérience.

Dans l’espoir de vous lire, je vous remercie d’avance.

121. Le mercredi 3 septembre 2008 à 18:11 par claude

N'est pas non plus un vide juridique le fait que la victime allemande d'un viol ou d'un meurtre en Allemagne ne puisse obtenir une indemnisation ni de la CIVI allemande parce que l'auteur français de l'infraction a été jugé en France, ni de la CIVI française parce que l'infraction a été commise en Allemagne sur une victime allemande. Il y a là plutôt un trop-plein de cas d'exclusion du déclenchement d'une indemnisation . Le Droit français et le Droit allemand ont prévu en fait des dispositions aux conséquences désastreuses quand le condamné est insolvable . Le vide est en réalité dans la tête du journaliste qui voit là un cas de vide juridique; il est dommage qu'il n'en profite pas pour y placer (dans cette même tête) quelques connaissances juridiques : il y a de la place.
En fait le Droit a horreur du vide et il trouve à s'appliquer en tout domaine, soit qu'il indique dans un texte ou par l'intermédiaire d'un juge qu'un droit est violé dans la circonstance qui préoccupe, soit qu'il indique qu'un droit n'est pas violé .

122. Le jeudi 4 septembre 2008 à 22:45 par Humstel

En reference a mon precedent post (#64), c'est Calvin (de Calvin & Hobbes) qui dit ca.
La replique suivante est de Hobbes: - Mais t'est pas nul en maths ?

123. Le jeudi 4 septembre 2008 à 23:35 par Fantômette

@ Humstel

J'adore Calvin et Hobbes. Etrange que je ne m'en sois pas souvenu.

Et la théorie de la relativité expliquée par le papa de Calvin ?

Plus on va vite, et plus le temps passe lentement. C'est à cause des fuseaux horaires. Si tu vas en Californie, tu gagnes trois heures sur un voyage de cinq heures, n'est-ce pas ? Donc, si tu y vas à la vitesse de la lumière, tu gagnes ENCORE PLUS de temps, parce que tu ne mets pas autant de temps pour y arriver. Bien entendu, la théorie de la relativité ne marche que lorsqu'on va vers l'ouest.

124. Le vendredi 5 septembre 2008 à 00:13 par RG

Il ne peut y avoir vide mais obligatoirement incomplétude inhérente à tout système fini, on pourrait dire par analogie avec le théorème de Gödel:

Théorème: il est impossible de créer un système de lois permettant de prévoir toutes les cas futurs.

Réciproque: pour tout cas inconnu il est possible de créer une jurisprudence.

ou:

Réciproque: tout vide juridique peut être comblé.

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