Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Défense de rupture

Par Gascogne


Ainsi donc, Yvan Colonna a décidé, en accord avec ses avocats, je n'en doute pas une seule seconde, de ne plus comparaître à son procès et de "renvoyer" ses défenseurs, sans doute à mieux se pourvoir. Le président d'audience, en application de l'article 317 du CPP, a commis d'office ces mêmes avocats, comme l'y autorise la jurisprudence de la Cour de Cassation[1], et ceux-ci ont bien entendu refusé de faire droit à cette réquisition, les rendant théoriquement passibles de poursuites disciplinaires, le constat d'huissier établi semblant d'ailleurs avoir cette utilité...

Le motif en est que la Cour a eu l'outrecuidance de refuser à l'accusé une mesure d'instruction complémentaire, à savoir la reconstitution des faits qui lui sont reprochés (si tant est que l'on puisse reconstituer des faits avec quelqu'un qui ne les reconnaît pas...).

Ce caprice était d'autant plus prévisible que c'est une défense de rupture qui a été choisie par Yvan Colonna dés le premier jour du procès, mélangeant aggressions et insultes, notamment envers le président d'audience, qui ne peut réagir sous peine de s'entendre encore plus accusé de partialité. Et ce dans le plus grand silence de la place Vendôme, qui ne souhaite pas intervenir avant la fin du procès "pour ne pas que cette intervention se retourne contre le corps judiciaire" (je vous assure que je n'invente rien).

Il est d'autant moins excusable que dans une société démocratique, et je n'ai aucun doute sur le fait que la notre en soit encore une, le refus d'une décision judiciaire se conteste par les voies de recours, et par elles seules.

En l'occurrence, il est tout de même étonnant de jouer les vierges effarouchées alors que, outre le fait que sa fuite n'a pas facilité l'instruction préparatoire du dossier, au sein de laquelle les mesures de reconstitution prennent généralement toute leur place, l'accusé avait lui même refusé de participer à cette mesure d'instruction prononcée lors de son premier procès, ce qui avait contraint la Cour d'Assises de l'époque à se transporter en Corse, à grands frais sans bénéficier de la participation du client des demandeurs...

Autres temps, autres moeurs, me direz vous, et vous aurez bien raison. A ceci près que les éléments nouveaux manquent quelque peu pour expliquer le changement d'avis de l'accusé. Les molles dénégations des condamnés définitifs, qui ne risquent dés lors plus rien à changer leurs versions, ne peuvent être mises en avant, puisque ces revirements ont déjà eu lieu en première instance. De plus, la demande de reconstitution avait déjà été présentée une semaine auparavant, et rejetée par la Cour. Il ne s'agit donc que d'un prétexte de plus pour se faire passer pour le martyr qu'il me semble très loin d'être.

La défense répliquera sans doute qu'elle n'a pas le choix face à la partialité du président d'audience. Ce serait un pieux mensonge. Les procédures de récusation existent. Les donner actes aussi. Et s'il s'avérait que la partialité d'un juge n'est pas le fruit de la seule imagination de l'accusé, la Cour de Cassation en tirerait toutes les conséquences.

Lorsque l'on n'a que peu à dire sur le fond, on attaque la forme. Lorsque la forme est difficile à combattre, on donne dans la rupture et le procès médiatique. Lorsque l'on fait en sorte, en toute connaissance de cause, qu'un procès ne puisse se dérouler dans la sérénité, c'est que l'on rejette les règles de fonctionnement d'une justice démocratique. Peut-être est-ce finalement cela le but ultime des quelques nationalistes exacerbés qui applaudissent dans la salle, voire qui hurlent sur les bancs de la défense, peu important le sort final de l'accusé qui ne sera qu'un pion dans un débat politique.

Et quand je pense que cela donne à nouveau des idées de réformes au plus haut lieu, vous comprendrez le regard désabusé que je porte sur ce procès qui n'a pourtant rien d'extraordinaire, si ce n'était qu'il s'agit tout de même de la mort d'un homme dont on parle finalement bien peu...

Notes

[1] Crim. 19/02/86, 23/11/94

Commentaires

1. Le jeudi 12 mars 2009 à 16:41 par benver

vous dites qu'il n'y a que peu d'éléments nouveaux mais les révélations de Monsieur VINOLAS ont été prise à la légère par l'accusation.

Vous parlez de la forme mais dans ce procès le président de la cour d'assise spécial ne les a pas toutes respectées.

Les torts sont partagés sur la forme.

Sur le fond..... il ne reste qu'à attendre le verdict


Gascogne :
Par l'accusation peut être, mais le déroulement du procès ne dépend pas d'elle, mais de la Cour, qui a, me semble-t-il, répondu aux questions qui se posaient face à cette déposition.


2. Le jeudi 12 mars 2009 à 16:44 par L Harting

"ce procès qui n'a pourtant rien d'extraordinaire".

Excusez-moi, mais il a au moins ceci d'extraordinaire : il s'agit d'un tribunal d'exception, composé uniquement de magistrats professionnels.

Il est quand même atterrant que ce "détail" passe aujourd'hui pour "ordinaire".


Gascogne :
Ce qui est à mon sens "ordinaire", si tant est que l'on puisse parler de cette manière, est que ce genre de faits (assassinat) est jugé très régulièrement par des Cours d'Assises "ordinaires". Et si vous souhaitez être atterré, grand bien vous fasse, mais il ne s'agit tout de même pas d'un tribunal militaire. La présence des seuls magistrats doit éviter les risques de pression sur un jury populaire : on ne peut que s'en féliciter lorsque l'on constate la manière dont se déroulent les débats, avec comité de soutien à l'appui dans la salle. Je n'aimerais pas être partie civile dans ces circonstances, et salue le courage de Mme Erignac.


3. Le jeudi 12 mars 2009 à 16:53 par gil blas

OK pour le refus de procéder à la "reconstitution" ,déjà proposée( si j'ai bien compris) et refusée (entre nous quel calvaire supplémentaire cela serait pour Madame ERIGNAC et sa famille). Mais on peut rester perplexe devant ce que la presse présente comme des cachotteries de M. WACOGNE (les courriers communiqués avec retard, notamment le certificat médical); comment expliquer ces maladresses qui affaiblissent sa position ? Manque d'expérience, de professionnalisme, d'envergure ? (je ne peux pas croire qu'il s'agisse d'actes délibérés).


Gascogne :
Vous avez raison de préciser qu'il s'agit de ce que la presse, et la défense, présentent comme des "cachotteries". Et même si je ne le connais pas, je suppose que pour présider des Assises spéciales, le président Wacogne doit tout de même avoir pas mal de qualités professionnelles. Même si personnes n'est à l'abri de maladresses, voire de sa propre personnalité.


4. Le jeudi 12 mars 2009 à 16:59 par Alex d'Epidose

Une petite question : pourquoi faut-il des éléments nouveaux par rapport au précédent procès ? Je veux dire, il s'agit bien d'un nouveau procès, en appel, donc l'on est censé occulté ce qui s'est passé au cours du premier procès, non ?

Or, si justement la cour avait estimé lors de ce précédent procès que la reconstitution était nécessaire, et a fortiori si elle avait déploré que l'accusé n'y participât point, comment expliquer aujourd'hui que cette reconstitution ne l'est plus (nécessaire), alors même que, désormais, l'accusé souhaite y participer ?


Gascogne :
Les éléments nouveaux doivent surtout apparaître par rapport à la même demande formulée...une semaine auparavant. Cela dit, même par rapport au procès précédent, c'est tout de même un plus que d'avancer de nouveaux arguments, faute de quoi les mêmes causes risquent de produire le mêmes effets.


Cela dit, j'entends bien que, niant les faits, l'accusé entend certainement ne participer à la reconstitution qu'en... n'y prenant aucune part (je me comprends...). :-)

5. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:11 par benver

Ce procès de toute les façons transpire l'Affaire d'Etat... Sarkozy avait déclaré Colonna coupable avant même le verdict. l'accusé l'avait rappelé au début du procès.

Dire que l'on est dans une défense de rupture, je ne le crois pas. Colonna reconnait la légitimité de la Cour mais refuse que celle-ci envoie des messages contradictoires quand à la possibilité de son innocence.


Gascogne :
Et le Président Sarkozy tire les ficelles au bout desquelles on trouve les juges ? Une sorte de complot d'Etat, en quelque sorte, un peu comme le 11 septembre ?


6. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:17 par machin

Nouveau procès , Colonna ne devrait il pas bénéficier de la présomption d'innocence?

VOUS le déclarez coupable d'avance, tout comme Madame Erignac .... on dirait bien que personne ne veut entendre qu'il y a des éléments troublants dans la façon dont l'enquète a été menée ...


Gascogne :
C'est amusant, mais je n'ai pas le souvenir d'avoir écrit quoi que ce soit dans mon billet sur la culpabilité d'Yvan Colonna...Mais je ne tenterai pas de vous convaincre, vous êtes convaincu d'avance. Tout ce que je dis, c'est qu'il ne peut y avoir de justice que par la discussion, dans la plus grande sérénité possible, des éléments, tant à charge (que vous oubliez, en ce qui vous concerne) qu'à décharge, que je n'oublie pas. Et je ne serai pas choqué par un acquittement, s'il intervient après un vrai débat, qui ne serait pas tronqué par une défense de rupture violente. Ce que je dis également, c'est que la critique des décisions des juges, quand elles vous donnent tort, se fait par les voies de recours légalement prévues. Pas par la violence, qu'elle soit verbale ou pyrotechnique.


7. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:34 par Zaf

Intéressant, un peu de sérénité juridique dans le traitement de cette affaire, c'est appréciable.

ps: à quand un billet sur l'arrêt (d'ailleuts juridiquement très contestable pour ceux qui connaissent un peu la théorie de la domanialité publique) de la cour de cassation relatif à l'affaire des paillotes et la condamnation du préfet bonnet)

8. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:36 par Guillaume

"A ceci près que les éléments nouveaux manquent quelque peu pour expliquer le changement d'avis de l'accusé."

Le fait qu'il ait été jugé coupable au premier procès auquel il avait refusé la reconstitution ne peuvent-ils pas à eux seuls expliquer ce changement d'avis ?

9. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:37 par Camille

Bonjour. Pour une grande partie des arguments que vous avancez,je n'ai pas suivi le procès en détail...Jetez-moi la pierre si vos voulez mais j'ai l'impression d'assister à une tragi-comédie... Juste une petite rectification:si je ne m'abuse, PEU important le sort final de l'accusé,et non "peuT important le sort final de l'accusé". Merci d'assurer la relève!


Gascogne :
Un jour, je compterai le nombre de relectures avant d'éditer un billet, histoire de me décourager un peu plus quant aux capacités de mon cerveau à bien voir toutes les fautes...


10. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:56 par Alex

FInalement, la défense de rutpure n'a abouti ici qu'à la rupture de la défense...

11. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:59 par Camille

Désolée,je peux pas m'en empêcher...Je me rectifie par la même: si voUs voulez. L'arroseur arrosé!

12. Le jeudi 12 mars 2009 à 17:59 par Ryuu

Ne vous jetez pas la pierre pour les fautes, les meilleurs en laissent.

Quand a la demande de reconstitution, le fait qu'une autre personne ai dit avoir tué le prefet n'est-elle pas suffisante?


Gascogne :
Ca ne l'a visiblement pas été pour qu'Yvan Colonna accepte de participer à la première...


13. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:11 par Petruk

Votre point de vue est très intéressant. Pour ma part je regrette l'absence de reconstitution qui permet à Colonna de tenter de se faire passer pour un martyr.

Je note que la presse n'est pas très en forme sur ce coup, car je n'ai pas vu d'articles mentionnant que Colonna avait refusé d'assister à une reconstitution en première instance.


Gascogne :
Effectivement, cela aurait peut-être permis d'éviter au moins en partie, je ne me fais pas d'illusion, tout ce pseudo psychodrame.


14. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:31 par LEF

Merci, Gascogne, pour ce beau billet. Il fallait que cela soit dit. Mais vous appelez ça "défense de rupture", terme utilisé par la presse également, moi j'appelle ça faire le cirque au mépris de la Justice. C'est bien du rejet des règles de fonctionnement d'une justice démocratique, dont il s'agit. Et il n'y a pas que les quelques nationalistes applaudisseurs qui y prêtent la main. Les avocats de la défense aussi. On a vu le même cirque au procès Ferrara ; ce n'est qu'un remake de bas de gamme.

Imaginons que l'accusé ait reconnu les faits ; qu'il les ait revendiqués au nom d'un idéal politique ; qu'il ait argumenté sur la motivation politique pour refuser d'être jugé par une cour d'assises, fut-elle spéciale, en disant "je suis un militant, un résistant, mais je ne suis pas un criminel". Que l'on soit d'accord ou pas avec son éventuel idéal, j'aurais appelé ça "une défense de rupture" ; c'est ainsi que je comprends le terme.

Ce qui se passe à ce procès, et ce qui s'est passé de semblable au procès Ferrara, ce n'est que du cirque inadmissible dans une démocratie. Ce qui est affligeant, c'est que ce cirque est mené par des professionnels du droit.

Bon courage au président de la cour d'assises !

15. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:32 par Neville

"l s'agit tout de même de la mort d'un homme dont on parle finalement bien peu..."

Plus qu'un homme, un Préfet de la République. Le représentant de l'Etat dans le Département, et même la Région, où les faits se sont déroulés.

On peut reconnaitre à Yvan Colonna une certaine logique dans son comportement, pour autant qu'il ait effectivement commis ce dont il est accusé : s'en prendre à l'Etat, sous toutes ses formes, par tous les moyens même légaux. Encore une fois, sous réserve qu'il soit bien coupable.


Gascogne :
Même si j'entends bien ce que vous voulez dire, je disconviens respectueusement : pour moi, il n'existe pas "plus" qu'un homme. Une vie a autant de prix qu'une autre (en fait, elle n'en a pas...). Même si la loi vous donne raison en créant des circonstances aggravantes en fonction des qualités de victimes.


16. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:33 par Neville

J'oubliais, à l'appui de ma démonstration : au moyen d'une arme volée dans une Gendarmerie. Comment humilier davantage l'Etat ?

17. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:35 par Passant

J'avais pour ma part la naïveté de croire vivre dans un pays dans lequel le doute bénéficiait à l'accusé. Fût-il la conséquence de l'incurie des enquêteurs.

Tout ceci se finira sans doute devant la CEDH. Il se disait dès les premiers jours du procès que la matière y était.

18. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:36 par Barth

Je suis très heureux qu'un professionnel du droit prenne ENFIN la parole et nous délivre de cette cacophonie de propos journalistiques dont nous sommes bombardés. Comme vous l'avez très justement rappelé, l'accusé et ses avocats font tout leur possible pour orienter l'audience sur le terrain politique en s'adressant d'ailleurs directement à ses partisans depuis le prétoire (en parlant en corse, en prononçant les noms de famille en corse, en parlant d'état français colonial...)... Qu'on termine ce procès dans meilleures conditions possible sans se faire condamner sur la base de 6§1 et que, de grâce, on puisse voir comme le demandait la courageuse Dominique Erignac un peu de cet honneur corse qui tarde à montrer le bout de son nez...

19. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:38 par bifondan

@ gascogne mais il ne s'agit tout de même pas d'un tribunal militaire. Votre tout de même contient bien du venin, on est loin entre la justice rendue par le peuple et la justice de sinon de dictature au moins de complaisance. le curseur ici est plus proche du 2eme.

La cours d'assise spéciale est une justice d'exception, l'argument concernant les pauvres jurés menacés ne tient pas. Il y a une grande différence entre des magistrats professionnels qui pour rester dans le tableau d'avancement ou ne pas se voir ejecter des promotions eau froide et eau chaude complairont au prince et un juré qui une fois la session terminée retournera à son quotidien.


Gascogne :
Sachant qu'aucune décision d'Assises n'est prise à l'unanimité, mais toujours "à la majorité prévue par la loi", expliquez moi comment notre bon prince saura quel magistrat a voté pour la culpabilité, afin de le remercier, et quel bien mauvais juge a voté contre, histoire de le sanctionner ? Avant de fantasmer sur les possibles pressions sur les magistrats professionnels auxquelles ne seraient pas soumis les jurés populaires, renseignez vous sur les mécanismes mis en place par la loi afin de les éviter. Vous verrez, c'est assez intéressant.


20. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:38 par benver

Cher Gascogne,

vous avez oublié pour me décrédibiliser de m'opposer le complot judéo-maçonique ;-)


Gascogne :
Je garde cet argument massue pour la fin, après le complot anarcho-syndicaliste.


Je vous l'accorde, c'est un peu tiré par les cheveux mais mon sentiment reste le même. La cour savait à priori que le procès serait tendu et il aurait été souhaitable que le président se montre irréprochable sur les règles de procédure pour la sérénité nécessaire à une bonne justice puisse être présente. Le décalage de la défense n'en ressortirait que plus.

J'assiste à un certain nombre de procès en Assise. Plus l'affaire se montre complexe et plus les avocats de la défense sont teigneux plus j'ai l'impression que le Président se montre irréprochable.

Je profite de ce billet pour vous souhaiter beaucoup de courage pour vos dossiers et vous remercier pour tous ces éclairages que vous nous donnez dans ces pages.


Gascogne :
Je reconnais avec vous que plus le président reste zen et patient, et moins les critiques portent. Encore faudrait-il que nous n'ayons pas comme compte rendu d'audience que ce que les avocats de la défense veulent bien en dire à la sortie du procès. Et soit dit en passant, je suis d'autant plus agacé que je me sais incapable de résister dans le calme à ce genre d'agressions.


21. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:46 par Joel

A Gascogne, qui ecrit en 6 a l'un de ses contradicteurs "Mais je ne tenterai pas de vous convaincre, vous êtes convaincu d'avance."

D'abord 6 ne me semble pas convaincu de l'innocence de Colonna, en tout cas beaucoup moins que vous ne l'êtes de sa culpabilité.


Gascogne :
Mais à part le fait que je ne parle jamais dans le billet d'une éventuelle culpabilité de l'accusé, vous échappez bien entendu en ce qui vous concerne à toute forme de préjugé...


Ensuite, je ne devrais pas avoir à vous rappeler qu'il devrait y avoir une dissymetrie entre le culpabilité et l'innocence. Pour condamner quelqu'un, il faut être convaincu qu'il est coupable. Pour l'acquitter, il ne faut pas être convaincu qu'il est innocent, mais simplement ne pas être totalement sûr qu'il soit coupable.


Gascogne :
Vous ne devriez pas, en effet.


Je n'ai pas accès au dossier, je n'ai pas assisté au procès. Mais j'ai lu attentivement les compte-rendus dans la presse et les blogs. Que vois-je ? On accuse Colonna d'un meurtre. Il n'y a aucun indice matériel de sa présence sur les lieux (contrairement aux autres accusés, confondus par leurs teléphones mobiles). Ceux qui ont participé au meurtre nient tous ("mollement", dîtes-vous ? Et alors ? Et puis, je n'ai pas entendu le ton de la voix des témoins, mais j'ai lu leurs dépositions, et elles sont convaicantes : par exemple celui qui explique avoir accusé Colonna durant sa garde à vue par choix militant : Colonna n'a pas voulu participer à un meurte, mais il aurait du, et c'est sauver son honneur de dire qu'il l'a fait. Pour avoir fréquenté des milieux d'extrême-gauche dans ma prime jeunesse, je sais que ces gens pensent vraiment comme ça). Les témoins visuels soit affirment qu'il n'était pas le tireur, soit ne sont pas sûr de le reconnaître. Les experts en balistique jettent le doute sur la possibilité matérielle que ce soit lui le tireur. Et puis, contrairement aux autres accusés, il nie et a toujours nié avoir participé au meurtre.


Gascogne :
Les explications sont convaincantes parce que vous le dites ? Dont acte, mais laissez quand même la Cour d'Assises qui, faut-il le rappeler, n'est pas composée que de son président, se faire une idée grâce aux débats. Débats qui, une fois de plus, ne peuvent être fertiles que s'il se déroulent dans une certaine sérénité. Au fait, pour être clair, c'était là la seule conclusion de mon billet...


Si tout ça ne justifie pas un acquittement au bénéfice du doute, je ne sais pas ce qu'il faut. Et on a d'autauns moins envie de faire confiance à ce tribunal qu'il s'agit d'un tribunal d'exception, dont le justification politique à l'époque où il a été crée était de protéger les jurés populaires de fou furieux genre Al-Qaida (en l'occurrence c'était une filière iranienne, mais peu importe, qui jurait de tuer plein de gens pour obtenir la libération de ceux d'entre eux qui s'étaient fait prendre, et qui *l'avaient déjà fait*). Il n'y a aucune justification à juger ces gens autrement que par une cours d'assise normale.


Gascogne :
Si, si, je vous assure, tout un tas. Par exemple que des délits particulièrement graves sont jugés par les seules juges professionnels sans jury, et que pas grand monde ne trouve pour le moment à y redire.


Et puis vous mélangez tout. "Dans une société démocratique, et je n'ai aucun doute sur le fait que la notre en soit encore une, le refus d'une décision judiciaire se conteste par les voies de recours, et par elles seules." C'est le genre de phrases grandiloquentes qui sont complètement fausses. La même, en shorter : "Dans un état de droit, les gens respectent la loi (et la procédure pénale)". Vous voyez bien que c'est absurde. Ce qui doivent respecter la loi, ce sont ses garants, les pouvirs executifs, legislatifs et judicaires. Sinon, l'état de droit est entamé. Mais que des citoyens violent la loi, c'est dans la nature des choses, sinon vous seriez au chômage.


Gascogne :
Pour pouvoir de persuasion doit être un tout petit peu plus faible que ce vous semblez croire : votre raisonnement est pour le moins étonnant, pour ne pas devenir désagréable. Violer la loi n'est dans la nature des choses que dans une société totalement anarchique. Et encore, dire qu'il convient de violer la loi revient à instaurer une loi. Les lois sont faites pour être respectées, même si cela semble vous déplaire.


En l'occurrence, essayons de voir si Colonna a tort de ne pas montrer plus de respect aux formes de la justice républicaine. De deux choses l'une. Soit il est coupable. Il a tué de sans froid et avec prémeditation un homme, parce que cet homme représentait l'Etat. Dans ce cas, ça n'ajoute pas grand chose à son crime de bouder dans sa cellule au lieu de respetcer bien sagement la justice de ce même État. Soit il est innocent. Dans ce cas, je vais peut-être vous déplaire, mais je ferais exactement comme lui, et je pense que tous les hommes libres ici feraient de même. Accusé par une demi-douzaine d'anciens copains d'un crime dont il ne sait rien, quoi de plus naturel que de s'enfuir ? Condamné une première fois, malgré les revirements de *tous* ces dit témoins, par un tribual d'exception, quoi de plus normal de ne pas "jouer le jeu" la seconde fois ?


Gascogne :
Que je sache, au moment de sa fuite, il ne savait pas qu'il serait ultérieurement mis en cause par tout ses "copains", dont je ne m'explique d'ailleurs toujours pas les déclarations initiales. Si vous pensez que ce mode de défense est de loin le meilleur, alors suivait le si un jour vous comparaissez devant une juridiction pénale. Mais soit dit en passant, éviter de le faire, je ne sais pas, par exemple devant un tribunal d'Amérique du Nord. Vous risqueriez de ne plus voir du même œil notre "justice d'exception".<


22. Le jeudi 12 mars 2009 à 18:48 par xavier

Je trouve votre billet salutaire. Mais j'ai un doute : êtes-vous sûr qu'Yvan Colonna ait refusé de participer à une reconstitution ? Il me semble en effet qu'il y a eu en 98 une reconstitution avec seulement les témoins (personne n'avait été arrêté à l'époque) ; une autre a été organisée en 99 avec les membres du commando arrêtés (mais pas Yvan Colonna) qui, emmenés sur les lieux, ont refusé d'y participer. Après l'arrestation d'Yvan Colonna, les juges n'ont je crois pas jugé bon de prévoir une autre reconstitution compte tenu que les uns refusaient d'y participer et qu'Yvan Colonna prétendait n'être pas concerné puisqu'innocent. Quant au premier procès, c'est à la demande de la défense que le transport fut organisé.


Gascogne :
C'est le souvenir que j'en garde. Mais à mon âge, la mémoire...


23. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:12 par Justed

Je me range aux arguments de Joël (22).


Gascogne :
Rangez-vous, rangez-vous, je vous en prie...


Et j'ajoute que je n'ai pas du tout apprécié la première partie de la chute de votre billet "Et quand je pense que cela donne à nouveau des idées de réformes au plus haut lieu..."

En d'autres termes, c'est demander à Colonna, tout de même condamné à la réclusion criminelle à perpétuité, de s'"écraser", d'accepter à tout prix cette peine alors que jusqu'à preuve du contraire il n'a a pas été apporté de preuves matérielles concrètes de sa culpabilité.


Gascogne :
...et puisque vous n'appréciez pas du tout, n'hésitez surtout pas à aller vous ranger ailleurs. Et amenez vos autres termes avec vous, ils sont particulièrement mal choisis.


24. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:18 par DMonodBroca

M. Colonna a fait appel et aujourd'hui, avec la complicité de ses avocats, il sabote délibérément son procès en appel. La République est bonne fille mais tout de même. N'y a-t-il pas dans l'arsenal judiciaire un moyen de mettre le condamné en face de son incohérence : "si tu veux un procès en appel, ne l'empêche pas de se dérouler, ou bien alors restons-en à la condamnation prononcée en 1ère instance" ?

S'il est innocent et injustement condamné on comprend qu'il se batte, mais ce n'est manifestement pas ce combat-la qu'il mène.

25. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:28 par ancien

Bonsoir Monsieur, Je n'ai pas le moindre commencement de sympathie pour le personnage qui comparait. Je pense que dans un pays civilisé toute condamnation, a fortiori s'il s'agit de la plus grave, doit être prononcée sur des preuves irréfutables, et que l'on ne peut se contenter par exemple de la "certitude" d'un commissaire, d'approximations sur la position géographique des uns et des autres. Si des témoignages tiennent lieu de preuve ceux de personnes non liées aux éventuels complices comme la croupière de casino qui ne reconnait pas l'accusé doivent être prépondérants. Que je sache c'est à l'accusation, qui a eu plus de dix ans pour le faire, de rapporter la preuve de culpabilité et non à un accusé, quel qu'il soit, de faire la preuve de son innocence. J'ai le sentiment d'un gâchis effroyable commis par ceux qui, de fait, ont saboté cette enquête, tant les polices qui ont montré leurs petites rivalités que les magistrats qui à ce que l'on dit ont autorité sur la police judiciaire.

26. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:30 par Etudiant

@Gascogne

Le lien vers l'article 317 CPP conduit à... l'article 371 :p


Gascogne :
Je vois qu'il y en a au moins un qui suit...Corrigé, merci.


27. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:30 par Chép

Ce qui est étonnant dans cette histoire c'est qu'à la base, la notion d"omerta" est un cliché attaché à la Corse, ici, il caractérise la façon dont est traité cette affaire par ses responsables. D'aucuns diront : l'Etat?!


Gascogne :
Vous trouvez sérieusement que personne n'en parle ?


28. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:44 par Vincent

Est-ce que ca peut rellement lui porter prejudice de quitter l'audience (lui et ses avocats) ?

29. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:50 par zadvocate

En tant qu'avocat, je porte un regard plutôt critique sur la défense de colonna (ou plutôt sur ce qu'en font ses avocats car je ne suis pas persuadé qu'il soit consulté sur tout et tout le temps) avec cette reserve que n'ayant pas accès au dossier et aux audiences, mon opinion a ses limites.

Je pense en premier lieu que si les avocats de colonna avaient voulu pourrir le procès, ils ne s'y seraient pas pris autrement. Et j'avoue que j'ai du mal à l'accepter. En tant qu'avocat, on se décrédibilise car à mon sens ça n'est même plus de la défense de rupture on est au delà.

Or un avocat est auxiliaire de justice, pas un obstacle à la justice.

En second lieu, je crains que le fait que 5 avocats interviennent ne facilite pas les choses car je suis convaincu qu'ils n'arrivent pas à tenir une ligne commune compte tenu des personnalités en présence.

J'ai cru d'ailleurs lire ici et la que Patrick Maisonneuve est intervenu à plusieurs reprises pour tenter d'arrondir les angles après que ses confrères corses ne se soient enflammés.

Je crains d'ailleurs que ces confrères ne soient dans une optique politique qui leur fait oublier leur rôle et la robe qu'ils portent.

N'ayant pas lu la presse ce jour, j'ai une question: Colonna a t'il récusé ses avocats avant de quitter le procès ?

30. Le jeudi 12 mars 2009 à 19:53 par sissi

J'avoue être assez choquée de la virulence de ce billet.

D'abord, je n'ai aucun souvenir de ce qu'une reconstitution aurait été refusée par M. Colonna. Par ailleurs, qu'il refuse d'y participer, c'est à dire de mimer un geste qu'il dit ne pas avoir fait me semblerait normal, ce qui n'empêcherait nullement d'opérer une reconstitution selon les explications des autres.

Ensuite, vous semblez dire que ce qui "sort" de la Cour d'Assises et des impressions d'audience est forcément partial car cela vient de la Défense. Or d'excellents chroniqueurs judiciaires suivent cette audience et semblent considérer, pour certains, que le traitement de cette affaire est loin d'être exempt de reproche.


Gascogne :
Tout à fait : ce qui vient de la défense est forcément partial, c'est dans la nature des choses. C'est bien pourquoi j'apprécierais d'entendre le Parquet s'expliquer également devant les caméras.


Par ailleurs, je comprends mal que l'on refuse à quelqu'un, qui encourt la réclusion criminelle à perpétuité, qui est présumé innocent, et dont c'est, normalement, le dernier "procès au fond" dans ce dossier, d'opérer la reconstitution des faits qu'il sollicite.


Gascogne :
L'argument selon lequel il convient de tout accepter parce qu'il s'agit du dernier procès au fond me semble un peu léger : il arrive que des demandes soient dilatoires ou abusives. Ou qu'au vu des éléments du dossier, elles n'apportent rien à la manifestation de la vérité. C'est bien pour cela que la loi prévoit que la décision finale face à ces demandes appartient aux juges. Ça ne plait pas, j'en conviens, mais il ne me tarde pas de voir des compétitions de sport sans arbitre, ça risque fort de tourner à la foire d'empoigne.


Concernant l'huissier, il s'agit seulement de satisfaire aux exigences de l'article 319 du code de procédure pénale.

Enfin, pardonnez-moi, mais les propos suivants "Lorsque l'on n'a que peu à dire sur le fond, on attaque la forme. Lorsque la forme est difficile à combattre, on donne dans la rupture " me semblent des plus étonnants de la part d'un professionnel de la Justice, tant ils sont erronés et font peu de cas de la réalité judiciaire qui nous apprend, notamment, que la forme est tellement essentielle...


Gascogne :
Etre essentielle ne veut en rien dire qu'il faut que les débats ne portent que sur elle. Lorsque le fond devient secondaire, s'agissant qui plus est de la mort d'un homme, vous ne m'ôterez pas de l'idée qu'il y a quelque chose qui ne tourne pas rond.


31. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:00 par xavier

J'ajoute à ce que dit 28 zadvocate que : - Gilles Simeoni, l'un des avocats de la défense, est une étoile montante de la politique insulaire (catégorie nationalisme modéré dit "de construction et de progrès) - Son frère Marc est mis en examen dans un dossier connexe : pour avoir aidé Yvan Colonna dans sa cavale.

32. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:01 par Sissi

Ahhh...les petites attaques personnelles, que c'est joli... Qu'est censée nous apporter cette information, relative à une mise en examen du frère de Monsieur SIMEONI?


Gascogne :
Je suis choqué par la virulence de votre remarque.


33. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:06 par Sissi

Si cela vous choque plus que le fait de faire état d'une mise en examen du frère d'un avocat, dans un débat sur la stratégie de ce dernier, libre à vous...


Gascogne :
Si vous préférez rester premier degré, libre à vous également...


34. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:10 par Barth

Moi je trouve que cela m'apprend quelque chose de savoir que Me Simeoni est une étoile montante de la politique insulaire! Son cinéma au procès m'étonne moins! Je comprend mieux pourquoi il se préoccupe plus de parler aux corses que de défendre son client au mieux de ses intérets.

35. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:16 par Sissi

Gascogne, on utilise la forme? Serait-on démuni sur le fond? :)

Je brûle de vous poser une question, mais, n'étant pas très familière des commentaires de ce blog, je ne sais si la réponse est confidentielle ou, au contraire, connue de tous ici : Etes-vous magistrat du Parquet?

36. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:18 par Sissi

Gascogne, à mon sens, lorsque l'on s'assoit sur la forme (si tant est que ce soit le cas ici, je ne sais pas, mais je répondais, initialement, à votre remarque d'ordre général), s'agissant de la mort d'un homme, et de la vie d'un autre, on ne m'enlèvera pas de l'idée que quelque chose ne tourne pas rond non plus...

37. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:21 par Sissi

Concernant les "échos" de l'audience, comme je vous l'indiquais, sans que vous n'en teniez compte, d'excellents chroniqueurs judiciaires sont présents, et la lecture de leurs récits me semble parfois plus intéressante et pertinente que d'opposer deux commentaires par définition partiaux.

38. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:35 par Marcel

@zadvocate : "auxiliaire de justice", certes, mais jusqu'à quel point ? N'était-ce point Badinter qui dans un procès mémorable insista pour parler d'une expertise dont il n'était pas censé parler, "dut-il être radié" ? Il me semble que cet avocat-là fit plus pour la justice qu'un auxiliaire sage et résigné, qui se considère comme rien de plus que l'ange de cartoon sur l'épaule gauche du magistrat.

@Gascogne : Quand-même, Gascogne, vous restez professionnel-du-droito-centré. Vous êtes professionnel du droit, pour vous, c'est le droit qui est le coeur du sujet. Mais pour un homme qui risque toute sa vie ou presque, le respect du droit et des institutions est un sujet d'une importance toute relative par rapport à la gravité de sa situation.

Bien-sûr, dans l'absolu, vous avez raison de pester contre cette "défense de rupture" qui ne respecte pas toutes les règles du jeu.

Mais puisque vous semblez dire que vous pouvez admettre l'hypothèse que Colonna soit réellement innocent, poussez l'effort encore un peu plus loin, et mettez-vous à sa place :

Mettez-vous à la place d'un homme innocent, qui se sait innocent, qui clame son innocence, et qu'on n'écoute pas. Qui risque la réclusion criminelle à perpétuité, qui sait qu'il la risque réellement, pas juste en théorie, pour en avoir fait l'expérience. Qu'on présente comme coupable depuis bien avant son premier procès. Que Sarkozy lui-même a présenté comme coupable. Qui a clamé son innocence au premier procès, qui n'a pas été entendu, qui a été condamné. Pas condamné à une peine symbolique, non, condamné à perpétuité. Qui clame aujourd'hui son innocence, et qui a le sentiment de n'être toujours pas entendu. Qu'on ne veut même pas aborder toutes les pièces qu'il entend mettre sur le tapis pour démontrer son innocence. Qui a définitivement le sentiment que les dés sont pipés, que son sort est plié depuis le départ, et que le procès n'est finalement qu'une scène de théâtre dont le scénario, y compris sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité, est déjà écrite depuis le premier jour. Et qu'il ne pourra rien y changer. Mais qu'on fait semblant du contraire. - attention, je ne dis pas que c'est la vérité, je dis que c'est peut-être ce qu'il ressent.

Mettez-vous à la place d'un tel homme.

Vous ne seriez pas tenté de dire "zut" (pour rester très poli) à toutes ces institutions, de vous "rebeller" comme vous pouvez, de refuser de cautionner ce que vous vivez intérieurement comme une mascarade, et finalement d'utiliser le peu de liberté qu'il vous reste pour refuser, pour protester, pour faire preuve une toute dernière fois d'irrévérance avant d'être écrasé comme une mouche par un pouvoir que vous ressentez comme injuste - donc illégitime - mais inébranlable ?

Moi, dans une telle situation, je le serais également. Et tant pis pour le respect des institutions, sujet qui me paraîtrait ô combien secondaire dans une telle hypothèse.

Je n'ai pas la moindre idée sur la culpabilité ou l'innocence de Colonna. Mais s'il est vraiment innocent, songez au drame qui se joue sous ses yeux.

39. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:40 par because

Je lis votre billet, je vérifie les liens que vous insérez, pas un vers les texte du chroniqueur du Fig', qui, pour le coup, a l'air moins aimable que vous pour le président. Serait-ce un affabulateur connu que ce journaliste? Inventerait-il le peu d'empressement du président à creuser certains aspects avec les témoins? Si vous parlez de la partialité du président, c'est comme argument de la défense.

Or, si Colonna a choisi la rupture comme stratégie, le président, dès le départ, n'a-t-il pas été partial? maladroit?

"Lorsque l'on fait en sorte, en toute connaissance de cause, qu'un procès ne puisse se dérouler dans la sérénité, c'est que l'on rejette les règles de fonctionnement d'une justice démocratique." Pourquoi donc ne pas commencer par dire que ces travers, c'est d'abord à l'institution de les éviter?

Je n'ai aucune idée de la culpabilité ou non de Colonna. Mais ce que je lis depuis le début de ce procès dans les comptes-rendus de Stéphane Durand-Souffland ne me plaît pas. De la part de l'institution. http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2009/03/12/01016-20090312ARTFIG00121-pourquoi-yvan-colonna-a-quitte-son-proces-.php

40. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:52 par PlaceV**

Gascogne, en robe de magistrat avec un chapeau et des bottes de mousquetaire poursuit une rapière à la main un Troll qui s'enfuit effrayé ; Un texte 'Commentaire modéré par troll détector(tm)' surplombe l'image.

41. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:05 par Ziad

J'apprécie beaucoup l'ironie de cette histoire, où l'on voit Colonna user de la stratégie de son ennemi Sarkozy : LA RUPTURE :)

42. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:34 par zadvocate

@Sissi,

Pour ma part j'ignorais cette info sur le frère de l'un des avocats de colonna. Mais ca rejoint ce que je disais, on dépasse les limites que tout avocat doit s'imposer et notamment l'indépendance vis à vis du client et du dossier qu'il défend.

Peut-on raisonnablement croire que cet avocat dispose d'un recul suffisant pour faire correctement son travail lorsque son frère, présumé innocent, est mis en examen pour avoir assister colonna dans sa fuite ?

Vous ne voyez pas le problème ?

43. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:37 par zadvocate

@marcel (37) Votre comparaison n'a pas de sens. Vous confondez combativité et obstruction.

44. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:47 par Christophe

après le billet de Gascogne sur le procès Colonna on lira l'appréciation de Jean Michel Aphatie sur le même sujet ( à la fin du post) http://blogs.rtl.fr/aphatie/index.php/post/2009/03/12/OTAN-Total-Colonna-12/03

Et dire qu'à une époque on n'était informé que par les journalistes.

45. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:49 par Sissi

Zadvocate : je l'ignorais aussi mais je m'en fiche toujours autant. Je le laisse seul juge de savoir s'il est en mesure de faire "correctement son travail", et ne doute pas qu'il le fasse. Par ailleurs, M. Colonna a cinq avocats.

46. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:52 par bifondan

@ Gascogne Gascogne : Sachant qu'aucune décision d'Assises n'est prise à l'unanimité, mais toujours "à la majorité prévue par la loi", expliquez moi comment notre bon prince saura quel magistrat a voté pour la culpabilité, afin de le remercier, et quel bien mauvais juge a voté contre, histoire de le sanctionner ?

simple : regardez bien la ligne bleue des Vosges et vous allez être tous remerciés et décorés à défaut vous supporterez ! pour ce qui est d'être juré, j'ai déjà donné il y a déjà plus de 20 ans et j'y ai appris et donné. simplement discuter du délibéré est interdit et proscrit et c'est bien dommage !

47. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:54 par jalmad

Je ne sais pas trop si je suis d'accord avec vos propos, cher collègue, ou alors je le suis, mais pas pour les mêmes raisons ; j'ai tendance à considérer qu'après tout, le jeu démocratique veut aussi que chacun adopte la forme de défense de son choix, même si je ne dis pas que je ne suis pas parfois moi-même agacée, heurtée, par l'agressivité ou la mauvaise foi de certaines lignes de défense et si on peut alors le déplorer du point de vue des parties civiles. Je considère qu'après tout, du point de vue d'un prévenu ou d'un accusé, toute défense est légitime si elle est efficace. Parfois, la défense de rupture l'est (enfin, j'imagine). Et c'est au Président de veiller, en utilisant les armes procédurales qui sont à sa disposition, à la loyauté des débats (et je ne dis pas que c'est toujours facile). Mais à ce point et dans ce cas précis : quelle est l'efficacité réelle de ce type de défense, surtout face à une cour composée uniquement de professionnels (ceci n'est absolument pas du mépris pour les jurés ; c'est juste qu'il est sûrement plus facile pour un professionnel de savoir qu'en effet, lorsqu'on critique la partialité d'un Président, on peut déposer une requête en récusation et qu'a priori, si on ne le fait pas, c'est que quelque part on sait bien que c'est du flan, ou alors que si en effet on redemande une reconstitution refusée une semaine avant sans élément nouveau, c'est probablement juste pour du flan mediatique...). Je me demande alors quel est le but recherché par les avocats de la défense : se faire de la pub ? Je suis assez d'accord avec Marcel en 37 : si en effet il est innocent (et il est présumé l'être, n'en déplaise à N. Sarkozy), oui, je peux comprendre qu'il ait envie d'adopter cette ligne de défense. Mais ne gagnerait-il pas à accepter de porter ses arguments dans le cadre de débats menés sereinement ? Et si tel est le cas, ses avocats ne devraient-ils pas lui conseiller de le faire ? A l'instruction, je trouve réellement que les défenses les plus efficaces sont celles menées par les avocats discrets, mais "besogneux" : ceux qui maitrisent la procédure, épluchent le dossier, et vont vous balancer juste la petite demande d'acte pertinente que vous avez loupée, ou poser la question utile au bon moment, sans effet de manche, etc...Dans les prétoires, c'est également celles qui ont le plus d'effet sur moi. Alors je me demande : que cherchent ses avocats : en faire une "vache à lait" qu'ils mèneront jusque devant la CEDH ou que sais-je encore, se faire un nom et avoir d'autres clients ? des visées électoralistes pour certains ? laisser à tout jamais dans l'esprit de l'opinion publique un "doute" quant à la culpabilité de l'accusé en cas de condamnation pour en faire un "martyr" ? ont-ils réellement adopté cette stratégie dans l'intérêt de leur client ? Voilà ce qui me gêne. @Joel 21 "Colonna n'a pas voulu participer à un meurtre, mais il aurait du, et c'est sauver son honneur de dire qu'il l'a fait. Pour avoir fréquenté des milieux d'extrême-gauche dans ma prime jeunesse, je sais que ces gens pensent vraiment comme ça". Il se trouve que je suis (chut, c'est un secret, il paraît que certains m'ont identifié ici) d'extrême-gauche, et je vous assure que je ne pense pas comme ça ! "Et on a d'autant moins envie de faire confiance à ce tribunal qu'il s'agit d'un tribunal d'exception, dont le justification politique à l'époque où il a été crée était de protéger les jurés populaires de fou furieux genre Al-Qaida (en l'occurrence c'était une filière iranienne, mais peu importe, qui jurait de tuer plein de gens pour obtenir la libération de ceux d'entre eux qui s'étaient fait prendre, et qui *l'avaient déjà fait*). Il n'y a aucune justification à juger ces gens autrement que par une cours d'assise normale." Alors ça c'est une vision assez intéressante : en fait, pour les terroristes, c'est comme pour les chasseurs, il y a les bons (ceux qui sont mis en accusation "juste" pour avoir assassiné un préfet de la République pour quelque revendication autonomiste ou séparatiste) et les mauvais (les "fou furieux" d'Al Qaïda, ou leur "filiale" iranienne, enfin, vous voyez, les barbus, quoi...). PAS POSSIBLE : on est pour, ou on est contre, mais si on est pour, on assume.... @gascogne : d'une manière générale, dans vos commentaires, je vous trouve un brin chatouilleux aujourd'hui !


Gascogne :
C'est que vous ne me connaissez pas encore très bien : bien qu'en plein milieu d'un défèrement, ce qui aurait éventuellement pu jouer sur mes nerfs, être chatouilleux est mon état naturel.


48. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:57 par Christophe

désolé, le lien dans le message précédent n'est pas passé.

je cite un passage du post de JMA :

Procès Colonna. L’accusé a quitté son procès. A tort, je crois. Il a dit sa conviction que quoi qu’il se passe à l’audience, la cour l’a déjà condamné. Je crois, hélas, qu’il a raison. La fameuse cour d’assises spéciale a refusé à Yvan Colonna une reconstitution de la scène du meurtre. Déjà, il est inouï d epenser qu’aucune reconstitution sérieuse du crime n’a eu lieu. Drôle, drôle, de justice.

49. Le jeudi 12 mars 2009 à 23:18 par Sissi

Jalmad, je partage certaines de vos interrogations. Deux points, cependant : Sauf erreur de ma part, la défense avait déposé une requête en récusation, qui a été rejetée. Ses griefs, à défaut peut-être d'être reconnus comme légitimes, sont en tout cas cohérents.

Je pense que l'on ne peut imputer aux conseils de M. Colonna une volonté de "se faire un nom" : ils ont déjà un nom et ne me semblent plus avoir besoin de cela.

50. Le jeudi 12 mars 2009 à 23:24 par Avocat

Votre propos est corporatiste car vous n'arrivez pas à comprendre qu'un homme puisse refuser de participer à une comédie judiciaire dont il a sentiment que les dés sont pipés.

Pour vous, c'est un crime de lèse majesté que de refuser de cautionner un procès dans lequel il n'y a pas de débat équitable et serein sur la culpabilité.

J'aimerais tellement vous croire quand vous dites que la partialité de la Cour n'est que dans la tête de l'accusé. Vous n'avez pas dû lire beaucoup la presse.

Je crois à la nécessité d'une réforme.

L'instruction à l'audience par le président est une catastrophe pour les droits de la défense quand celui-ci a déjà son idée sur la culpabilité du prévenu ou de l'accusé.

Vous osez écrire que Lorsque l'on n'a que peu à dire sur le fond, on attaque la forme.

Vous semblez ignorer que la défense a dit beaucoup de choses sur le fond.

Les charges qui pèsent sur Yvan Colonna sont certes accablantes : quatre membres du commando ayant assassiné le préfet Erignac ainsi que deux de leur compagne l'ont accusé, durant leur garde à vue, d'être le tireur des coups de feus.

Ceux-ci se sont rétractés depuis, en des termes parfois ambigus.

Aujourd'hui, au moins dix éléments permettent toutefois de nourrir un doute sur la culpabilité d'Yvan Colonna.

1) Absence d'élément matériel contre Yvan Colonna

Alors que les membres du commando ont été trahis par leur téléphone portable, aucun élément matériel ou scientifique n'a pu être retenu contre Yvan Colonna.

2) Des témoins occulaires qui disculpent Colonna

Lors de l'audience du 26 février, une jeune femme qui a croisé le regard du tireur à mois d'un mètre a affirmé être sûre et certaine que ce n'était pas Yvan Colonna.

La veille, Joseph Colombani, qui attendait le préfet Erignac devant l'entrée du Théâtre auquel il se rendait, a redit qu'il n'avait pas le "déclic", qu'il ne reconnaissait pas en Yvan Colonna l'auteur des coups de feu. Pour lui, le tireur était plus grand que le préfet Erignac ce qui disculpe Yvan Colonna. Joseph Colombani était un ami du préfet Erignac.

3) Un expert balisticien qui affirme que le tireur était plus grand que le préfet Erignac

Certes l'expert balisticien en question a été cité par la défense. Mais l'accusation n'a pas été capable de contredire ses conclusions par l'audition d'un expert soutenant une thèse inverse. La Cour a par ailleurs refusé d'ordonner une contre expertise...

4) Une téléphonie mal exploitée

L'analyse de la téléphonie par les avocats de la défense tend à démontrer que le scénario du crime établi par l'accusation est erroné. Le rôle et la localisation des différents membres du commando sont faux.

A ce jour, le ministère public n'a rien objecté à cet argument.

5) Un scénario du crime erroné

Par ailleurs, les témoins occulaires ont vu, pour la plupart, deux hommes s'enfuir après l'assassinat du préfet alors que pour l'accusation ils étaient trois à être présents au moment du crime (Alessandri, Ferrandi et Colonna).

Les membres du commando ont toujours refusé de participer à une reconstitution. Or, si le scénario du crime était fiable, ils n'avaient aucune raison de ne pas le confronter à la réalité.

6) Des écoutes téléphoniques non versées au dossier

Lors de l'audience du 4 mars, Philippe Frizon, ancien membre des services anti terroristes confirme à la barre que des écoutes téléphoniques concernant des conversations entre Yvan Colonna et un autre membre du commando ont été effectuées par les enquêteurs dès le mois de décembre 1998.

Pour la défense, ces écoutes seraient susceptibles d'innocenter Colonna.

Dès lors, deux questions se posent.

Pourquoi la retranscription de ces écoutes téléphoniques n'a-t-elle toujours pas été versée au dossier ?

Comment les enquêteurs peuvent-ils prétendre qu'ils auraient découvert par hasard l'implication d'Yvan Colonna lors des gardes à vue des membres du commando ?

7) le non respect de la déontologie policière par certains enquêteurs

Un policier a détourné l'enquête à des fins personnelles (écoutes téléphoniques concernant son ex femme).

Des procès verbaux antidatés ont en outre permis l'acquittement de Messieurs Castella et Andriuzzi, un temps soupçonné d'être les commandiataires de l'assassinat du préfet Erignac.

Si l'enquête a été truquée pour ces deux personnes, pourquoi ne l'aurait-elle pas été pour Colonna.

8) Des gardes à vue poreuses

L'accusation a prétendu que les membres du commando et leurs compagnes avaient mis en cause Yvan Colonna de façon séparée lors de leurs gardes à vue. Au procès, un des enquêteurs a toutefois reconnu que la compagne d'Allessandri a mis en cause Yvan Colonna après avoir lu le PV d'audition d'un autre membre du commando, Maranelli.

9) Un procès en appel qui a manqué d'impartialité

Courriers dissimulés à la défense, refus d'organiser une reconstitution, partialité dans la conduite des débats, le procès en appel n'a pas connu l'exemplarité qu'on aurait été en droit d'en attendre. 10) une vérité taillée sur mesure

Le scénario de l'accusation arrange tout le monde. Il présente l'énorme avantage de clore définitivement l'enquête sur l'assassinat du préfet Erignac.

Si les membres du commando voulaient protéger certaines personnes, ils avaient tout intérêt à le valider.

Des doutes subsistent cependant sur la participation à l'assassinat du préfet Erignac de personnes non identifiées à ce jour (révélations de Didier Vinolas et des membres du commando lors du second procès).

Vous pensez toujours que les avocats de la défense n'ont rien dit sur le fond ??


Gascogne :
"Corporatiste"...Le vilain mot est laché. Qu'un avocat se mette à faire du café du commerce, en ouverture de propos, nuit un peu aux propos qui suivent, mais vous échappez fort heureusement vous-même grâce à cela à ce qualificatif...
Ceci étant dit, vos explications sur le fond sont très intéressantes, malgré le fait que vous partiez du présupposé que je crois Yvan Colonna coupable. C'est que vous avez lu mon billet dans le sens qui vous arrangez. Encore une fois, puisque le message a énormément de mal à passer, même chez des professionnels du droit, je n'ai aucune idée particulière sur sa culpabilité ou sa non culpabilité. Et de ce que j'en entends, un acquittement ne me choquerait pas. Et pour ceux comme vous qui n'ont pas non plus voulu comprendre, ce n'est pas le comportement de l'accusé lui même qui me choque, mais celui ce certains de ses avocats. Qu'un homme hurle son innocence dans un prétoire me semble tout à fait normal. Qu'un avocat dise devant une caméra que la Cour vaut bien la junte birmane, entre autres gracieusetés, est inadmissible. Délicatesse, dites-vous ?


51. Le jeudi 12 mars 2009 à 23:46 par Clems

L'affaire Colonna...

Ou le traditionnel bourbier des procès corse. Il est en fait que Colonna est un indépendantiste, on pourrait cyniquement déclarer qu'après tout il mérite rien que pour cela et pour son passé de militant d'endosser la peau du tueur. Mais on aussi le droit et même un certain devoir de dépasser ce stade là.

Juste un mot sur l'accusation qui est faite à Gascogne de juger Colonna coupable dans son article. Je partage cette critique, cette phrase est accusatrice " Il ne s'agit donc que d'un prétexte de plus pour se faire passer pour le martyr qu'il me semble très loin d'être." Soyons clair, si il n'est pas coupable mais condamné à la prison à vie pour l'assassinat d'un haut représentant de l'état, il y a effectivement de quoi être un martyr, je ne rangerais donc pas cette "futilité" au rang de prétexte.



Gascogne :
Martyr du comportement de la Cour. C'est étrange cette manière de détourner tous les propos pour satisfaire son propre raisonnement...Ah, non, finalement, ça n'est pas si étrange que ça.



Il est également un fait que pour un nationaliste, c'est une sorte de devoir que de tourner en dérision la justice française, question de principe. Hélas, ce n'est toujours pas une preuve de sa culpabilité mais uniquement bien la preuve qu'il conserve ce type de réflexes.

Maintenant voici quelques points qui pour l'instant me font pencher pour une déclaration de non culpabilité en plus de certains points déjà évoqués :

- Si je comprends le bien fondé d'un tribunal d'exception, je suis intimement convaincu que hors pression, Colonna serait aujourd'hui relaxé par des jurés. Est ce à dire qu'il a gagné la bataille de l'opinion ? Probablement.



Gascogne :
Hors pression médiatique ? Qui bien évidemment, n'a aucune influence...



- Le grand absent du procès n'est pas seulement le préfet Erignac mais le mobile du meurtre.

- Quid des combats du préfet Erignac ?

Pourtant clefs de l'affaire ! Aujourd'hui et après avoir mené de bien nombreuses recherches, il est impossible d'avoir une certitude sur la réalité du mobile. D'un point de vue chronologique, on a orienté les recherches sur la filière agricole, puis porcine. Le préfet Erignac était connu pour être le seul préfet à avoir mené un vrai combat contre certains systèmes mafieux de l'île. Accessoirement pour être un homme de dialogue avec les nationalistes. De quoi gêner ceux qui pouvaient se servir d'eux pour quelques basses besognes.

Voila pourquoi je ressens un malaise à ne voir la question de l'assassinat du préfet Erignac ne tourner qu'autour de la composition du commando, pire encore sur la personnalité unique du tireur comme je l'indique en titre. Pour un crime que l'on présente comme politique, donc collectif, c'est grave.

Qui est, où sont les commanditaires, qui était Erignac ? Qui peut croire un seul instant à une action isolée d'un petit groupe pour un crime de cette importance ? On écrit ici et là, que les membres du commando n'ont plus rien à perdre et qu'après tout ils pourraient être plus diserts. Justement ! Notez que les accusés du 11 septembre ne manquent pas une seule seconde de détailler en long et en large leurs motivations. Et là, on assiste à un scénario où l'on voit des prétendus extrémistes qui passeraient presque pour des idiots, raconter la scène comme un simple cambriolage pour lequel ils se seraient fait pincer. " je ne m'explique pas l'état d'esprit dans lequel j'étais à l'époque" etc etc. La vraie question qu'il faut se poser est : Peuvent ils craindre quelqu'un et quelque chose pour leurs familles si aujourd'hui ils donnaient plus de détails comme le demande l'accusé ?

Si l'on est d'accord pour estimer que des jurés risqueraient des pressions alors on doit considérer que la loi "mafieuse" s'applique aussi aux déjà condamnés et que l'on ne peut décidément pas dans ces conditions qualifier de "molles" leurs différentes déclarations. Elles peuvent être lourdes de conséquences.

Il ne faudrait pas tomber dans le piège du troc. Nous ne devons pas marchander l'innocence de Colonna contre des éléments nouveaux de la part du commando mais bien considérer si les éléments actuels en y incluant leurs dénégations qui ne datent pas d'aujourd'hui sont suffisants ou non pour le déclarer coupable.

On peut douter de tout et de tout le monde dans cette affaire, j'espère que l'on saura en tirer la conclusion qui s'impose qu'importe l'aspect théâtrale du procès.

52. Le vendredi 13 mars 2009 à 01:20 par toutankh

Vous répondez en #6 "C'est amusant, mais je n'ai pas le souvenir d'avoir écrit quoi que ce soit dans mon billet sur la culpabilité d'Yvan Colonna..."

Pourtant vous écrivez dans le billet " (...) le martyr qu'il me semble très loin d'être." Pour le quidam inculte en matière de justice que je suis, cela ressemble foutrement à une appréciation de sa culpabilité. À moins qu'il puisse être innocent mais pas martyr pour autant ?

53. Le vendredi 13 mars 2009 à 04:09 par le sueur de burnous

Gascogne, en robe de magistrat avec un chapeau et des bottes de mousquetaire poursuit une rapière à la main un Troll qui s'enfuit effrayé ; Un texte 'Commentaire modéré par troll détector(tm)' surplombe l'image.

54. Le vendredi 13 mars 2009 à 05:11 par Joel

@Jalmad "Alors ça c'est une vision assez intéressante : en fait, pour les terroristes, c'est comme pour les chasseurs, il y a les bons (ceux qui sont mis en accusation "juste" pour avoir assassiné un préfet de la République pour quelque revendication autonomiste ou séparatiste) et les mauvais (les "fou furieux" d'Al Qaïda, ou leur "filiale" iranienne, enfin, vous voyez, les barbus, quoi...). PAS POSSIBLE : on est pour, ou on est contre, mais si on est pour, on assume...."

Mais je suis contre, et j'assume. Je l'ai déjà dit sur ce blog d'ailleurs.

Par ailleurs, oui, il y a des bons et des méchants terroristes. Les bons, c'est vous, moi, Colonna, et tous ceux qui sont ou pourraient être accusés de terrorisme, mais qui nient farouchement (y compris parmi eux ceux qui sont vraiment terroristes). Les mauvais, ce sont ceux qui disent "Oui, nous avons tué pleins de gens, nous ne sommes fiers, et nous en tuerons d'autres si vous ne nous liberez pas immédiatement". Désolé si ça gène votre idéologie, mais il se trouve qu'en France, c'était surtout des "barbus", comme vous dîtes. (différent en Grande-Bretagne par exemple).

Politiquement, la loi instaurant ce tribunal d'exception a été justifiée en montrant l'exemple des "mauvais terroristes". Mais la loi s'applique à tous, et donc aussi bien aux "bons terroristes" (au sens ou je viens de le definir). C'est ce problème, d'ailleurs parfaitement prévisible, qui fait que cette loi est mauvaise et n'aurait jamais du être adpotée.

PS : vous semblez confondre "filière" et "filiale". Le dictionnaire est votre ami.


Gascogne :
Donc, si je suis votre raisonnement (j'avoue, j'ai un peu de mal) : le terroriste qui tue mais qui nie est un "bon" terroriste ??? Désolé, mais quelqu'un qui tue de sang froid pour des idées est tout sauf l'image que je me fais de quelqu'un de "bon".


55. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:11 par La Biscotte

Si, au final, la Cour d'Assises décide d'acquitter Yvan Colonna, certains participants de ce post auront l'air fin....


Gascogne :
Des noms, des noms...(c'est le matin, Troll Détector a besoin de sortir).


56. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:26 par didier specq

Cher Gascogne,

Bien sûr, ce n'est pas un tribunal militaire. Personnellement, mais je ne suis pas au procès, je ne vois pas d'ailleurs très bien où, réellement, la défense a marqué des points dans l'argumentation, notamment par rapport aux premiers aveux largement circonstancés des complices et de leurs épouses. Mais, une fois de plus, se pose le problème de la légitimité d'une cour d'assises où les jurés populaires ont été écartés. On admet bien, sous contrôle d'un juge, les témoignages anonymes. Il aurait fallu faire de même avec les jurés.

Mais, évidemment, les professionnels de la profession ont préféré, comme d'hab, rester entre eux. C'est ce qui les zigouille petit à petit. Quand les magistrats s'apercevront-ils qu'ils ne peuvent rien -à même pas 10.000!-s'ils ne s'appuient pas sur une légitimité populaire!

Pendant ce temps, les avocats de Colonna peuvent se répandre sur toutes les télés en disant que cette cour d'assises a été spécialement constituée... Ben ouais, puisque c'est vrai.


Gascogne :
Cher didier (vous permettez que je vous appelle didier ?)
Il y a tout de même dans votre raisonnement une faille qui démontre ce que vous pensez des "professionnels de la profession" (comme on s'autorise à dire dans les milieux autorisés). Non, ils n'ont pas préféré, comme d'hab, rester entre eux. Pour tout vous dire, ils n'ont rien demandé. Et oui, ils s'appuient sur la légitimité populaire. Figurez-vous que la composition des Cours d'Assises est prévue par la loi, qui est votée...par la représentation nationale. Le peuple, quoi. Qu'on reproche au conducteur la manière dont il conduit, je veux bien l'entendre, mais qu'on lui impute la conception de son automobile, là, ça dépasse l'entendement.


57. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:49 par Clems

"Gascogne : Hors pression médiatique ? Qui bien évidemment, n'a aucune influence..."

Selon vous, dés qu'un procès aux assises devient médiatique il faudrait récuser les jurés, le tribunal et passer directement par la case tribunal d'exception ?


Gascogne :
Un juste milieu, ça vous dit quelque chose ?


Allez on va arrêter d'être naïf, un procès se gagne aussi dans les médias y compris pour une simple annulation de mariage. Soit des jurés seraient en danger, soit ils ne le seraient pas, la morale sur la pression médiatique n'a rien à faire là.


Gascogne :
Elle a tout à y faire. Si vous trouvez normal qu'une simple annulation de mariage puisse se jouer, au grand désarroi des premiers intéressés, à la roulette de la pression médiatique, en ce qui me concerne, ce n'est pas la conception que je me fais d'une justice équilibrée.


58. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:53 par Justed

M. Gascogne, ne trouvez-vous pas que beaucoup de vos remarques fleurent bon le persiflage ?


Gascogne :
Damned...Me voilà découvert. Une autre question ?


59. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:54 par Kouika

Ce qui m'étonne le plus, c'est que les avocats se fassent les complices de cette "défense de rupture" qui n'est jamais qu'une politique de la chaise vide. Et le conseil de l'ordre également puisque les sanctions disciplinaires ne sont jamais appliquées. J'ai d'ailleurs cru comprendre que tout cela était très réfléchi puisque leur absence servira d'angle d'attaque pour un éventuel futur recours devant la CEDH.

60. Le vendredi 13 mars 2009 à 10:14 par Clems

Justement non je trouve que l'on n'a pas dépassé pour ces affaires la ligne du juste milieu. Si le peuple exprime, que ce soit par le biais des médias ou non, sur une loi ou sur une décision de justice, son désaccord car la solution proposée est inacceptable et qu'une réforme ou qu'une autre interprétation de la loi est possible, j'estime cela sain.

En revanche, là ou je serais d'accord avec vous, c'est pour la défense de certains avocats qui désertent complètement le droit pour s'en remettre uniquement aux médias. Je pense que le peuple (du moins une partie) ne soutient efficacement une thèse que si elle a été préalablement correctement défendue.

Et je trouve que c'est le cas pour Colonna. Ensuite à tribunal d'exception, comportement d'exception. Des sanctions disciplinaires, renforceraient la thèse de la défense.

61. Le vendredi 13 mars 2009 à 10:18 par Machin

'' 59. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:54, par Kouika

Ce qui m'étonne le plus, c'est que les avocats se fassent les complices de cette "défense de rupture" qui n'est jamais qu'une politique de la chaise vide.''

Il ne sont pas complices, ils sont les instigateurs

Puisque ni l'accusé, ni les avocats n'estiment pouvoir être impartialement jugés par cette cour, ils se déportent ailleurs et placent le débat en place publique, prenant à témoin l'opinion et d'accusés deviennent accusateurs

La chaise n'est pas vide, elle est dans la salle des pas perdus, à la télé, dans les journaux , dans les blogs

C'est une méthode de défense ancienne que n'ont pas inventée les avocats de Colonna

62. Le vendredi 13 mars 2009 à 10:28 par Petruk

@Joël 54. "Par ailleurs, oui, il y a des bons et des méchants terroristes. Les bons, c'est vous, moi, Colonna, et tous ceux qui sont ou pourraient être accusés de terrorisme, mais qui nient farouchement (y compris parmi eux ceux qui sont vraiment terroristes). Les mauvais, ce sont ceux qui disent "Oui, nous avons tué pleins de gens, nous ne sommes fiers, et nous en tuerons d'autres si vous ne nous liberez pas immédiatement"."

Alors là on tient un collector! Je pense que votre post est promis à la postérité. Ne serait-il pas possible d'envisager un prix Busiris? Une telle perle doit absolument être honorée à sa juste valeur!

Bon je crois que je vais rester assis un moment moi. Ou plutôt je vais aller prendre un café... triple... et sans sucre.

63. Le vendredi 13 mars 2009 à 10:44 par jc1

Bonjour,

@Gascogne : ... je n'ai aucune idée particulière sur sa culpabilité ou sa non culpabilité. Et de ce que j'en entends, un acquittement ne me choquerait pas...

Pour info, il semblerait que l'inconscient zappe les voie négative, ceci expliquerait pourquoi votre message soit incompris !!!

Donc, si on applique : ...je ai une idée particulière sur sa culpabilité ou sa non culpabilité. Et de ce que j'en entends, un acquittement me choquerait...

;-)

64. Le vendredi 13 mars 2009 à 11:53 par Vox Populi

Je voulais vous poser la question depuis longtemps Gascogne. Et même Eolas, ou tout autre personne compétente.

Dans mon entourage, les gauchos crient déjà à la manipulation sarkozienne de la justice, s'alignant sur la scandaleuse décision de Danon

Mais ils n'ont pas suivit les débats de près et ne sont pas très objectifs.

Quel est votre point de vue sur cette affaire ?

Pensez-vous réellement que le président de séance / le juge est pourri ? Ou est-ce que Colonna semble vraiment être un coupable qui utilise ce subterfuge de la corruption pour essayer de s'en sortir ?

Pensez-vous que l'on ne sait pas tout ? Qu'il y a d'autres responsables ? Est-ce vrai que les témoignages en sa faveur son ignorés ?

65. Le vendredi 13 mars 2009 à 12:00 par Anto

on pourrait faire un film de ce débat stérile : "le bon, la brute, et le truand" ; je vous laisse seul juge de définir qui des trois personnages est interprété par Gascogne, Colonna et le président...

Plus sérieusement, je comprends parfaitement le propos de Gascogne qui n'a strictement rien à voir avec la culpabilité ou non de Colonna, mais qui porte essentiellement sur la stratégie de défense. Le billet est pourtant clair !

Évidemment la presse raffole de ce genre d'artefact et s'en donne à coeur joie. Et puis un Colonna innocent cela fait quand même vendre beaucoup plus de papier qu'un Colonna coupable. Attention à l'aveuglement ! Attention à ne pas se faire lobotomiser par la presse... Ce qui m'amène naturellement à une reflection de taille et qui n'est pas nouvelle. Doit-on ( curieusement c'est d'ailleurs presque le thème des 4 derniers billets de Eolas ) autoriser pour les dossiers "chauds" et "politisés" l'entrée des caméras dans le tribunal. Cette vision unilatérale promulgué par la presse me dérange énormément, et s'il y avait une diffusion intégrale des débats, chacun pourrait se faire une opinion véritable sur ce type de procès. N'en déplaise à certains, et au vu des commentaires, la majorité des commentaires sont orientés, partant du principe que Colonna est innocent, et ce, grâce à quelques coupures de presse. Je pense sincèrement que les choses sont loin d'être si simple, sinon il n'aurait pas été condamné une première fois (et je ne parle que de simplicité, il est peut-être réellement innocent, ce n'est pas mon propos). Je serais donc pour plus de transparence sur ce type de procès ; ce qui éviterait bien des débats, et surtout, éviterait de voir des propos forcement sujet à caution de la presse, emmener l'opinion dans un avis aucunement circonstancié.

66. Le vendredi 13 mars 2009 à 13:09 par Trollfighter

Gascogne : Des noms, des noms...(c'est le matin, Troll Détector a besoin de sortir).

Attention apparemment le troll detector du procureur Gascogne sort directement des que vous evoquez la Convention de sauvegarde des droits de l'homme ou la Cour europeene des droits de l'homme.

En tout cas quand la France sera condamnee a la CEDH pour violation des articles 6, elle sera aussi condamnee a payer les frais de justice des 5 avocats devant les 2 cour d'assises, la cour de cassation et la CEDH et oblige d'organiser un 3eme proces.

Cela risque au moins de nous couter presque 50 000 euros pour les seuls frais d'avocat (cf. S. Marper c. Royaume Uni 42 000 euros de frais d'avocat ont ete payes).

N'oubliez pas de payer vos impots, ils sont bien utilises.


Gascogne :
Tiens...C'est amusant...Malgré vos sollicitations grossières, Troll Détector n'est pas sorti. Comme quoi...


67. Le vendredi 13 mars 2009 à 13:15 par Petruk

@65 Trollfighter C'est effectivement ma crainte. Je pense qu'après une série de maladresses, refuser la reconstitution a été vraiment une erreur. Nous devons peut être nous préparer pour la fessée européenne...

68. Le vendredi 13 mars 2009 à 13:21 par Laszlo

Chers Gascogne, Me Eolas et autres colocataires, je me permets cette incursion pour vous faire par de mon enthousiasme pour la prose et l'esprit que je découvre chez vous. N'ayant que peu d'opinion sur le fond de l'affaire, je me complète par les vôtres et de celles de vos commentateurs. Je me régale surtout de la qualité rédactionnelle de vos billets, ainsi que de l'esprit de vos échanges. Que n'ai-je préféré le droit à l'industrie ! Merci pour tout ça...

69. Le vendredi 13 mars 2009 à 13:22 par Laszlo

oups, pour vous faire parT. Allez, je remets mon bleu.

70. Le vendredi 13 mars 2009 à 14:06 par VEO

Monsieur Gascogne,

Avez-vous consulté le dossier et assisté à toutes les audiences?

71. Le vendredi 13 mars 2009 à 15:00 par Anton

Monsieur Gascogne,

Tout comme vous, je suis attaché aux principes fondateurs de notre République :

1) c'est à l'accusation de démontrer la culpabilité et non à l'accusé de démontrer qu'il est innocent

2) le doute doit profiter à l'accuser

Existe t il un doute dans cette affaire ? Il me semble que oui :

-les témoins directs du crime (dont un ami du préfet) ne reconnaissent pas Yvan Colonna comme l'assassin.

-l'étude balistique et médical semble établir que l'assassin devait etre plus grand que colonna

-aucune preuve matériel de type emprunte, téléphone, ect ect

-les dépositions faites en garde à vue ne peuvent etre prise pour argent comptant pour différentes raisons crédibles (protection d'autres personnes par exemples)

La cour se donne t'elle les moyens d'éclaircir se doute ? Non

-des témoins clefs comme l'agent de la DNAT aux méthodes controversés et qui a mené l'enquete refusent de comparaitre.

-refus de relancer une procédure d'instruction suite aux déclarations de Vinolas et du Commando sur la présence d'autres hommes.

-enfin, refus de faire une reconstitution qui aurait permis de confronter les thèses de la défense et de l'accusation

J'en conclue donc qu'en l'état actuel des éléments, le doute doit bénéficier à l'accusé. Nos principes fondamentaux doivent s'appliquer sans exception.

Bien à vous

72. Le vendredi 13 mars 2009 à 15:06 par Jack

Mon cher Gascogne (si vous le permettez),

Je vous trouve d’un angélisme qui m’effraie ! Pourquoi ?

J’ai moi-même subi un sort, peu enviable, dans le droit fil que pourrait supposer « Monsieur Colonna » car on oublie trop, dans notre pays des Droits de l’Homme, la présomption d’innocence.

J’ai eu à faire à une procédure, ou mon intégrité était en cause par un associé qui voulait me « chiper » l’entreprise que nous avions créé avec la complicité d’un tiers, bien public, que je ne nommerais pas ici. Par des mensonges et trucages de preuve que malheureusement l’OPJ n’a pas su déjoué, berné par les ruses des compères.

J’avais beau clamer mon innocence, rien à faire et rien n’y faisait !

Un premier avocat, un peu comme vous, qui voulais respecter « les règles » comme vous dites, je lui ai fait confiance … Résultat condamné !!!! Fort de chapeau. Avec à la clé une lourde peine.

Donc seconde instance, l’appel, le même voulais continuer dans le même sens. Non merci, j’ai déjà donné. Là en consultant à droite et à gauche, j’en trouve un plus « hargneux ». Humm !!! Pas assez saignant. Un troisième, d’une association de justiciable, qui sortais des clous et qui ne vous plairais certainement pas, a pris de gros risques. Il en « avait » comme disait certains. Comme les avocats du sujet qui nous intéresse.

RESULTAT : j’ai été blanchi et même avec des excuses de la justice.

Alors se pose la question : si vous êtes innocent et que l’on vous accuse à tort et que rien ne se fait. La sortie des clous n’était-elle pas la solution. Pour mon cas, je pourrirais toujours en prison.

Merci Monsieur Gascogne pour vos argumentaires angéliques.

Mais je suis très bien comme je suis EN LIBERTE !!!


Gascogne :
Vous êtes bien le premier à me trouver angélique. Devez pas avoir tout compris...


73. Le vendredi 13 mars 2009 à 16:22 par Mazarinet

@ Jack : le grand

74. Le vendredi 13 mars 2009 à 16:47 par Mécékilui

@machin61: C'est une méthode de défense ancienne que n'ont pas inventée les avocats de Colonna

D'autant plus que ces derniers nous ont déjà fait le coup lors du procès Ferrara...

75. Le vendredi 13 mars 2009 à 17:40 par marsan

zadvocate a écrit "Or un avocat est auxiliaire de justice" et du justiciable.

L'attitude outrancière de cette défense est à mille lieues de ce qu'est le role d'un avocat pénaliste : assister, conseiller son client jusqu'au bout, choisir avec lui la meilleure stratégie pour s'en sortir au mieux si le client reconnait sa culpabilité - mettre en lumière tout ce qui prouve son innocence dans le cas contraire - déposer éventuellement des conclusions d'incident afin d'argumenter un éventuel pourvoi en cassation (après l'appel) ... Mais les avocats d'Yvan COLONNA ont fait un choix différent(avec leur client) dès avant le procès. Ils savaient qu'ils iraient jusqu'à abandonner le banc de la défense. Ils voulaient un procès politique devant la Cour spéciale et ils ont créé artificiellement les conditions de "la rupture". Ce qui me choque chez ces auxiliaires de justice ce n'est pas ce choix. Après tout pourquoi pas, si l'on pense que les convictions doivent passer avant l'intérêt du justiciable. Tant pis pour lui.

Non ce qui est choquant c'est que dans un silence sinistre tant du ministère que de la classe politique, ces auxiliaires de justice insultent des hommes qui font le difficile métier de juger au nom du peule français. Ce n'est pas un acte banal que de juger et contrairement à ce que nos concitoyens pensent il ne peut jamais, dans notre système sophistiqué de la Cour d'Assises, y avoir de "complot". Oui bien sur on ne choisit pas le Président et les assesseurs au hasard, surtout dans un dossier comme celui là car en principe on y met les plus compétents et souvent les plus repressifs. Mais ce n'est pas parceque l'on a cette qualité ou ce défaut que l'on n'est pas clairvoyant et que l'on n'applique pas la règle de droit.

Tous les présidents d'audiences pénales ont connu un jour ou l'autre des moments difficiles avec la défense. Jamais le respect ne doit manquer entre les acteurs car sinon c'est la République que l'on insulte.

Merci à Gascogne de mettre en lumière ce que personne ne dit ailleurs sur ce style de défense.

76. Le vendredi 13 mars 2009 à 19:59 par Joel

@Jack

Ce n'est peut-être pas le lieu ici, mais j'aimerais beaucoup en savoir plus sur votre histoire. En tout cas j'aime beaucoup votre commentaire, et félicitations pour vous en être finalement bien sorti.

77. Le vendredi 13 mars 2009 à 22:16 par didier specq

Cher Gascogne,

Vous avez évidemment raison, une cour d'assises de ce type est composé conformément à la loi. Qui, elle-même, est votée par la représentation populaire. D'accord.

Mais les jurés désignés par tirage au sort sur les listes électorales ont une autre légitimité car, contrairement aux élections, ce ne sont pas des professionnels. Car, il ne vous a pas échappé que les élections tendent à pousser aux premières places du pouvoir des professionnels de la politique, compétents, qui savent, qui ont une expérience (c'est ce qu'ils disent) et plus capables que le commun des mortels de rester jusqu'au bout dans des réunions soporifiques.

Le tirage au sort c'est une logique différente de représentation populaire. Et je pense que les magistrats laissent faire trop souvent sans protester le contournement des jurés alors que ce principe -hélas, selon moi- est réduit uniquement aux assises. Même remarque pour les magistrats qui correctionnalisent à tour de bras les affaires criminelles (pour tout un tas de raisons éventuellement recevables).

Voilà ce que je voulais signaler. Et, au final, une cour d'assises spéciale, comme celle qui juge les présumés innocents corses, prête le flanc à la critique. C'est ce que je regrette. Alors que les douze jurés sont difficilement contestables sur le plan de la légitimité.


Gascogne :
Je ne suis pas persuadé que les jurés qui ont siégé au procès "Ferrara" aient la même analyse que vous.


78. Le samedi 14 mars 2009 à 11:29 par noel

Monsieur Je ne vous comprends pas et sans doute comme bien souvent dans vos réponses ci dessus vous allez sous entendre que je ne suis pas au niveau.. Mais je risque cependant mon commentaire.

Comment pouvez vous refuser à quelqu'un qui se dit innocent de ne pouvoirdécider des moyens de sa défense et y compris de ne pas assister à son procés qu'il déclare inique.

Je ne sais si Y C est coupable ou innocent.

Vous lui reprocher de ne pas participer à une partition qu'il refuse;cette partition c'est la votre (les hommes de justice) pas la sienne, et vous vous inusrgez . Je reprends un propos cité plus haut, votre post sent, hélas , le corporatisme;

79. Le samedi 14 mars 2009 à 11:48 par jalmad

@didier specq 77

je suis également réservée quant à la légitimité des tribunaux spéciaux en général, même si, dans le cas du terrorisme, ce n'est pas le point de procédure qui me choque le plus ... en revanche, qu'entendez vous par "je pense que les magistrats laissent faire trop souvent sans protester le contournement des jurés" : comment voulez vous qu'on fasse : qu'on refuse d'appliquer la loi ? c'est une question de citoyen en général, et de pression populaire autour des débats parlementaires. Et je n'ai pas souvenir d'une pression populaire "monstrueuse" contre les différentes lois instituant des procédures d'exception en matière de terrorisme. En revanche, je connais une paire de professionnels du droit, avocats et magistrats (pas seulement eux, évidemment), qui étaient sur le pont....

une remarque sur la suite : "alors que ce principe -hélas, selon moi- est réduit uniquement aux assises" : vous oubliez les assesseurs du Tribunal pour enfants, même si certes, ce n'est pas un tirage au sort. Et je peux vous dire que beaucoup de collègues JE ont du mal à trouver des candidats pour occuper de telles fonctions. Par ailleurs, je peux vous dire que pour avoir siégé en correctionnel avec des juges de proximité en début de fonction, même de bonne volonté pour la plupart, les textes relatifs aux peines possibles à appliquer sont extrêmement complexes (en réalité, c'est finalement, de ce strict point de vue, plus simple en matière criminelle), et bien souvent, le juge de proximité non expérimenté n'est jamais une force de proposition de la peine : il suit les professionnels, avec un éventuel avis quant au seul quantum (tant de mois de prison, ou tant de délai de mise à l'épreuve, etc...). Imaginez deux secondes des assesseurs complètement néophytes à chaque "session" de correctionnelle....Alors des assesseurs non professionnels généralisés, sur le principe, ça peut sembler satisfaisant, mais cela mérite à mon sens une réflexion très approfondie, car une simple "façade" de jury populaire, personnellement, je trouve ça peut-être encore plus dangereux .

je continue : "Même remarque pour les magistrats qui correctionnalisent à tour de bras les affaires criminelles (pour tout un tas de raisons éventuellement recevables)". Je tiens tout de même à préciser que la correctionnalisation (même si le principe en est, en soi, j'en conviens, choquant) se fait TOUJOURS, à l'issue d'une information judiciaire, avec l'accord de toutes les parties : ministère public, mis en examen, parties civiles. Et, c'est sans doute très cynique de dire cela, mais on en revient toujours au nerf de la guerre : les moyens ! Sans correctionnalisation "à tour de bras" comme vous dites, nombre de dossiers seraient, en l'état actuel des moyens accordés aux cour d'assises, jugés à 4 ans ou 5 ans. C'est selon moi la chancellerie qui tient le plus à cette pratique de correctionnalisation, pas les magistrats. Vous me direz : à vous, magistrat, de ne pas céder...certes, mais quand l'avocat de la partie civile ou d'un mis en examen vous fait savoir que, pour avoir une audience à brève échéance (on peut aisément imaginer pourquoi dans les deux cas), son client accepterait une telle correctionnalisation, et ben, c'est difficile de leur rétorquer sèchement "mais comment, contourner le jury populaire ?", surtout lorsque le mis en examen reconnaît les faits, et qu'on sait que l'enjeu tient uniquement à la peine (vous me direz, c'est déjà pas mal...)....

80. Le samedi 14 mars 2009 à 12:08 par jalmad

@ Jack 72 en réalité, il serait intéressant de savoir quels ont été les arguments soulevés par votre avocat qui ont abouti à votre relaxe. Car vous avez pu avoir un avocat qui "respecte les règles" en première instance, mais mauvais (en tout cas, qui n'a pas su pointer les faiblesses du dossier), et un "qui en a" et qui, tout en étant hargneux voire saignant sur la forme, était doublé d'un redoutable pénaliste qui a montré les faiblesses du dossier, arguments juridiques à l'appui...en réalité, toutes les possibilités existent en matière de défense, il ne faut pas seulement se fier à l'attitude d'un avocat à l'audience. Pour donner un exemple caricatural, se contenter, pour seule défense, de dire à Tribunal qu'il s'apparente à la junte Birmane, et s'en aller comme un prince, vraiment, je pense que ça n'aide pas le client et n'invite pas le Tribunal à se pencher sur les faiblesses d'un dossier. Voire, ça peut donner l'impression qu'on cherche à dresser un écran de fumée parce que, sur le fond, on n'a pas grand chose à dire (et il y a, il me semble, des commentaires en ce sens sous le billet de Gascogne). Bref, c'est très dangereux, pour un intérêt que, personnellement, je ne vois pas du strict point de vue de la personne qui joue une déclaration de culpabilité. En revanche dire "votre Tribunal s'apparente à la junte Birmane, et j'observe que tel élément démontre que.... tel autre contredit celui-là..... etc...", ça n'est pas la même chose : c'est en réalité le "style" qui "en a" comme vous dites, mais sur le fond, on est dans le débat judiciaire. C'est un pb de dosage...et je pense que dans le procès Colonna, la défense (et encore, sur les 5 avocats, tous n'ont pas le même dosage) est bien plus dans le cas 1 que dans le 2, d'où mon interrogation sur l'efficacité de cette défense pour Colonna (cf mon post 47).

81. Le samedi 14 mars 2009 à 12:44 par Bastia

Il n'est pas exact de dire qu'il n'y a pas eu de faits nouveaux. Alessandri a donné une précision qui ne figure pas dans l'enquête ni, semble-t-il, dans le dossier d'instruction. Il a indiqué que le préfet avait déposé son épouse devant le théâtre ( cela était connu) et que les deux ou trois membres du commando ont été surpris que le préfet aille stationner son véhicule cours Napoleon à plusieurs centaines de mètres en contrebas, l'ont perdu de vue et hélas l'ont croisé à nouveau par hasard (ils étaient devant le théâtre initialement et rebroussaient chemin pensant abandonner l'opération) quand il remontait la rue colonel Colonna d'Ornano( menant au théâtre Kallisté). Ces précisions figuraient à m a connaissance seulement dans le livre du successeur du préfet Erignac évoquant les confidences de son informateur A vous de juger Flammarion 2001 p.228 Cela méritait une vérification surtout avec des témoins oculaires aussi précis dans leurs dénégations, mais moins précis dans leurs affirmations.

82. Le samedi 14 mars 2009 à 14:41 par Jack

A joel

D’abord me remémorez ceci me fais remonter des souvenirs douloureux mais nécessaire, je dirais.

Je ne voudrais pas citez de noms ici mais sachez qu’une personnalité était impliqué et de ce fait, j’étais le vilain petit canard. C’est moi qui mentait mais eux était les parangons de vertu. Premier problème.

Mon premier avocat me disait de faire confiance en la justice face au dossier. Eh bien non ! Je constate que la justice a été bernée par ce petit jeu. Je pensais que nous étions égaux devant celle-ci. Une personnalité face à la justice reste une personnalité et un faire valoir d’exemple. C’était extraordinaire et fort de café.

Venait aussi le point de vue du bâclage du dossier opéré par l’OPJ. Mais là, mon premier avocat ne voulait pas en entendre parler. Soi-disant, il suffisait de démontrer les magouilles et compagnie et c’était dans la poche. Mal m’en a pris.

En appel, je voulais démontrer les « faiblesses » de l’OPJ car là était le problème. Mais c’est marrant que certains avocats sont rétifs pour cela. Pourquoi ? Je voudrais poser la question à des avocats ici présents.

Après coup, j’ai constaté que les OPJ étaient « sacralisé » et qu’il ne fallait pas les toucher alors que tout vient de là. Quand serons grand pour enfin dire qu’ils se trompent et le reconnaître. Il n’y a que ceux qui ne font rien qui ne se trompent pas. Ce serait la grande force de la Justice. Toujours remettre en question les OPJ et l’investigation. Non en faire une vérité première.

Nous le voyons dans le procès Colonna de ce que je sais. C’est pour cela que je trouve que Gascogne est angélique. J’ai beau chercher mais je ne vous trouve pas trop saignant en ce qui concerne l’enquête policière. Pourquoi ?

L’essentiel des problèmes d’un procès c’est que l’on se base sur l’enquête policière, et nous le voyons, pour beaucoup d’erreur judiciaire. Le juge ne peut diriger l’enquête que sur les éléments que lui ont été fournit. S’ils sont erronés, l’enquête dévie et dérive !

L’avocat en appel a appuyé sur ce point. Là j’ai vu qu’il ne s’agit pas forcément de faire une réforme sur la Justice mais plutôt une réforme sur l’INVESTIGATION. De pouvoir avoir les éléments du dossier sur l’instant. Les erreurs seraient vite rattrapées. Si les questions sont dirigées comment les contrées convenablement. Vous avez beau dire que ce sont des mensonges. Mais les mêmes questions demandées inlassablement fait tâche. C’est vous qui vous posez des questions et comment réagir.

J’ai passé 36 H en garde à vue et je m’en souviendrais. Je me mets à la place des autres GAV. Je comprends qu’ils craquent et disent n’importe quoi. Surtout si on leur souffle les réponses. A bout, vous vous confesser de tous les crimes. C’est bien pour cela que je ne reconnais pas l’AVEU EXTORQUE DE LA SORTE au bout de 24 ou 36 H. L'aveu spontané et encore ...

Surtout quand on vous tombe dessus à 6 plombes devant votre famille et vos enfants. Je ne vous parles pas des amis et voisins. Vous vous demandez ce qu’il se passe. Là les OPJ ont un impact psychologique qu’ils usent et en abusent. Les grands criminels savent ce qu’ils doivent faire mais le citoyen lambda, c’est autre chose. Là, ils se prennent pour des seigneurs. J’ai même vu dans le local des affichettes très tendancieuses pour faire parler les prévenus. Tout un climat psychologique. C’est là qu’il faut réformer.

Ce qui est désolant dans mon histoire, c’est d’avoir tout un aréopage de juges qui ne veulent pas reconnaître les erreurs des investigations. DUR DUR !!!!

Vous avez signé, donc c’est bon pour eux ! Vous n’aviez qu’a pas signé. De qui se moque-ton ?

LA EST LE PROBLEME. Je ne vous dis pas la confrontation entre l’OPJ, mon avocat et les juges. Je me pose la question d’en faire un livre sur l’investigation. « Il fallait qu’il en ait. » J’ai vu les avocats présents baissé la tête et être ailleurs. Enfin bref !

Je ne voudrais pas trop m’étendre sur le sujet. Je ne voudrais pas d’autres ennuis …

83. Le samedi 14 mars 2009 à 14:53 par Lathan

faute de preuve solide, et même avec quelques éléments à décharge, ca va encore se jouer sur "l'intime conviction", donc sur la harge des avocats ou de la partie civile à faire valoir leur argument. Sauf que nous n'avons pas un jury de jurés lambda mais un assortiment de magistrats. Cette tactique n'est peut être pas fair-play, mais qui le demande? Le cirque médiatique?

84. Le samedi 14 mars 2009 à 15:49 par didier specq

@jalmad

Laissez moi rire. La correctionnalisation des affaires criminelles ne se fait pas avec l'accord des parties civiles. C'est faux concrètement. En matière de viols, par exemple, de très nombreux viols correctionnalisés (grosso modo un ou deux par semaine à Lille) concernent des enfants. Vous ne pouvez parler de leur accord sérieusement; ils sont mineurs!

Les magistrats ont l'accord de l'institution, généralement le conseil général, qui souvent est en charge des enfants.

Je trouve toujours "sublime" , par exemple, des agressions sexuelles sur des enfants (où les services sociaux du conseil général sont plus ou moins sur la sellette car, alors que leur cas était signalé, on n'a pas réagi à temps) correctionnalisées et jugées à huis clos (affaires de moeurs avec les jeunes victimes présentes) et avec le conseil général comme partie civile représentant les jeunes filles! Heureusement que ça ne se passe pas en Russie, qu'est-ce qu'on dirait!

En ce qui concerne les majeur(e)s victimes de viols, leur consentement a été obtenu (n'oublions pas qu'il s'agit de victimes traumatisées) parce qu'on leur explique (magistrats et avocats) que ça va être long aux assises, qu'il va falloir témoigner en personne, qu'on a en pour quatre ou cinq ans, qu'il ya plus grave, etc. Bref, le viol est un crime mais (quand c'est un viol "pas trop grave") c'est à la victime d'insister pour qu'on applique la loi (toute pénétration sexuelle est un crime). J'ai vu des pénétrations digitales de voyageuses du métro de Lille jugées en comparution immédiate alors même que le prévenu expliquait qu'il en avait fait d'autres dans le même métro!

En ce qui concerne par exemple les "petits" braquages de bistrot (de plus en plus nombreux avec la crise), ne me dîtes pas non plus qu'on explique à la victime qu'il s'agit d'un vol à main armée qui devrait passer aux assises! Là non plus, on n'explique pas que, d'un coup de baguette magique, on transforme le vol à main armé (crime) en simple vol avec violences (délit) et qu'on le fera passer en comparution immédiate. Accord de la victime, mon oeil!

Expliquez moi pourquoi une pharmacienne avec un cutter sur le cou manié par un toxicomane qui la braque, c'est un délit et qu'un employé de banque avec un revolver sous le nez, c'est un crime? Pour les petites postes, on s'interroge: ça dépend si les syndicats de postiers sont très remontés par qu'un de leurs collègues a été tué dans les deux ou trois années précédentes. Je caricature à peine.

Attention, je ne dis pas qu'il ne faut pas correctionnaliser. Je dis qu'il faut faire très attention quand on "joue" avec la loi, qu'on la contourne, qu'on explique, par exemple, que c'est avec l'accord des victimes. Je le répète: quand on tripote la loi, il y a un problème de légitimité. On ne peut pas se contenter de répondre: <J'ai fait l'E.N.M.; j'ai un permis de juger". Vous allez me dire: <C'est la faute du pouvoir politique qui ne me donne pas les moyens>. Certes. Mais, justement, le pouvoir politique -de droite ou de gauche- adore vous mettre en porte à faux et vous faire ensuite le procès de la légitimité: "Vous êtes trop jeune pour juger"; "vous avez encore fait une boulette"; "ce mineur s'est suicidé en prison, c'est votre faute"; "Vous avez remis ce mineur en liberté, il a récidivé, c'est votre faute"; etc, etc.

D'où cette idée (ça n'est pas nouveau comme idée, ça date de la révolution française) des jurés partout. "Il va falloir leur expliquer, c'est très compliqué". Ben oui mais pas tant que ça. Imaginons, pendant quelques années, un juré de correctionnelle qui est assesseur tous les lundis par exemple. Après quelques semaines de formation, vous croyez que ça sera si compliqué...

D'autant que le président (dans une chambre à trois juges) fait généralement tout (ou presque) et que ses assesseurs n'ont pas toujours l'air très actifs.

Quant aux "tribunaux d'exception", bien sûr qu'il n'y a pas eu de pression populaire contre. Mais ça n'empêche qu'il existe là-aussi un problème de légitimité. D'ailleurs, écoutez les avocats d'Y.C., ils ne font que taper sur ce clou.

Au final, je trouve que les magistrats devraient être très gentils avec moi. Je suis en train de leur donner un moyen séduisant de pouvoir clouer le bec aux politiques en leur disant: <Vous nous critiquez! N'oubliez pas que vous critiquez les représentants du peuple majoritaires dans toutes les juridictions (deux assesseurs jurés et un président professionnel)!> Elle est pas belle la vie?

85. Le samedi 14 mars 2009 à 16:13 par PVarini

@Gascogne,

Sur le principe, vous avez entièrement raison. La justice doit être respectée et s'exercer dans un climat serein. Or ce procès démontre à l'évidence que la sérénité est absente, les magistrats (principalement le Président) ne sont pas respectés. Mais comment pourrait-il en être autrement ?

Le rejet de la demande de reconstitution n'est-elle pas simplement la goute qui fait déborder le vase ? Contrairement à ce que vous semblez indiquer, Yvan Colonna n'a jamais refusé de participer à une reconstitution. Ses avocats ont d'ailleurs, de manière constante, réclamé une reconstitution, que ce soit lors de l'instruction et lors des deux procès. Elle leur a toujours été refusée. Lors de l'appel, Alessandri (qui s'accuse depuis 2004 d'être le tireur) était près à participer à une reconstitution. La Justice avait tout à gagner pour lever les doutes persistants sur cette affaire.

Le président n'est pas exempts de tous reproches. Que ce soit avec l'affaire Vinolas et courrier dissimulé à la défense, avec l'affaire du certificat médical de Mr Lebbos.. ou il ne fait pas preuve du même respect du secret médical à l'égard de tous les témoins.. Le président est également mis en cause dans ses choix de questionnement des témoins, ou il semble s'appesantir sur des témoins qui n'ont pas vu grand chose et n'avoir aucune curiosité à l'égard de témoins qui pouvait dire des choses intéressantes. Il s'autorise de couper à plusieurs reprises le témoignage d'Alessandri, sans le questionner..alors même que ce dernier fait des révélations..

Je vous suivrais sans condition sur la nécessité de sérénité et de respect si vous aviez le même regard critique sur l'attitude de la partie civile et des procureurs au sujet de Mr Vinolas. Mais de cela vous n'en parlez point.

De mon point de vue, l'image de ce procès, après l'affaire Outreau, affecte la nécessaire confiance des justiciables dans la Justice. Les avocats d'Yvan Colonna n'en sont pas les reponsables, ils ont choisi, sans en être les inventeurs, une ligne de défense "de rupture" qui me semble personnellement appropriée au contexte, même si certains, c'et vrai, ont eu le verbe parfois un peu haut en couleur.

86. Le samedi 14 mars 2009 à 18:29 par jalmad

@didier specq pourquoi me faites vous dire ce que je n'ai pas dit ? relisez mon post, c'est assez désagréable d'avoir l'impression de se prendre une avoinée alors que je crois que, globalement, nous disons la même chose :

1. j'ai parlé des correctionnalisations après information judiciaire uniquement lorsque je visais l'accord des parties. Votre exemple de l'absence d'accord des enfants victimes, excusez moi, mais c'est un peu n'importe quoi : on leur demande leur avis aux enfants de 5 ans, pour savoir si ils voulaient se constituer parties civiles contre Papa ? Non ? mais c'est un scandale ! En revanche, oui, l'accord est en général "extorqué" par les affres des délais d'audiencement de la cour d'assises ; il me semblait avoir également déploré cette difficulté...

2. Pour les correctionnalisations "ab initio" comme on dit dans le jargon, pour passer en compa notamment, j'en suis aussi choquée que vous ; un avocat de la défense peut soulever l'incompétence et solliciter qu'on restitue l'exacte qualification ; le tribunal peut le faire d'office, mais considère (à tort ou à raison) que si personne ne le soulève, c'est que ça va bien à tout le monde. Cette possibilité est trop peu utilisée ? oui, certainement. Les droits des parties sont laminés en matière de comparution immédiate de sorte que même un avocat qui voudrait aborder ce point délicat avec son client avant la compa n'en aurait pas le temps ? oui, je le pense, et je serai la première à applaudir à 2 mains la fin de ce type de procédure, ou, à tout le moins, un encadrement drastique de la possibilité d'y recourir. Concernant les correctionnalisations ab initio avant ouverture d'information, je me tue à répéter à mes collègues parquetiers qui continuent à le faire, qu'il y a à mon sens, outre le côté choquant, désormais un pb fondamental de nullité qui se pose en cas d'ouverture d'info ; je leur ai expliqué que je refuserai désormais ce type d'orientation par les moyens procéduraux qui me sont offerts. 3. relisez mon post : j'ai dit également que je n'aime pas, moi non plus, les tribunaux d'exception. La légitimité du jury populaire, j'y crois. J'ai donné l'exemple des assesseurs du tribunal pour enfants : ils sont en général motivés, intéressés, et acquièrent les connaissances nécessaires. Je suis persuadée que leur présence renforce la légitimité des décision du TPE. Lorsque j'ai parlé des juges de proximité, j'ai bien précisé que je parlais de ceux qui n'étaient pas encore suffisamment formés pour véritablement peser lors d'un délibéré. Pourquoi diable avez vous l'air de penser que je rejetais d'un bloc cette idée car "j'ai fait l'ENM, j'ai un permis de juger" ? ou avez vous vu que je disais cela ? je trouve assez insupportable de voir son discours caricaturé avant de se faire jeter au visage l'argument à peine déguisé du corporatisme ou du mépris pour le "simple" citoyen. Je disais simplement que généraliser le recours au jury populaire méritait une réflexion très approfondie car, outre des pbs pratiques, oui, cela nécessite des connaissances juridiques. On a tous vu, en délibéré, des Présidents de Cour d'assises faire oeuvre de la pédagogie nécessaire pour donner au jurés les moyens de jouer à plein leur rôle, comme des Présidents laisser peu de place aux débats ....Vous savez, un délibéré, ce n'est pas vraiment comme dans 12 hommes en colère. Les jurés sont souvent peu rassurés sur leur capacité à trancher, désarmés, perdus dans les différents types de peines. Et c'est bien normal, ils débarquent dans un monde qu'ils ne connaissent pas, à devoir assumer une responsabilité très lourde sans avoir rien demandé. L'attitude du Président est souvent déterminante...C'est en cela que je dis : méfions nous : mettre des jurés partout peut conduire à une simple légitimité de façade si l'on ne donne pas les moyens à ces jurés de jouer à plein leur rôle. Vous lancez l'idée d'un juré tiré au sort qui siègerait tous les lundis pendant quelques années après quelques semaines de formation. Vu comme ça, en effet, pourquoi pas. Mais franchement, selon vous, qui s'y opposera le plus: plutôt les magistrats jaloux de leur petit pré-carré ? ou bien les entreprises qui vont se voir débaucher leurs salariés à raison d'un jour par semaine pendant 2 ans ? ou bien ces salariés, chômeurs, ou profession libérale, ou que sais-je...) eux-mêmes ? ou la chancellerie qui devra, non seulement prendre en charge les salaires de ces personnes ainsi "requises" (vous me direz, c'est autant de salaire de magistrat en moins, et ça gagne bien, oui) MAIS également : ses frais de déplacement, ses frais de repas du soir voire d'hébergement si le dernier train est manqué (ba voui, une audience, ça fini pas toujours à 19 h); ou alors renoncer à bourrer les audiences ? et pour les compa, on met des jurés d'astreinte ? ou alors on renonce aux compa ? et les affaires du pôle financier, on forme des jurés pendant 2 ans (je dis ça en termes de coût pour l'état pas de "c'est trop compliqué pour les jurés" ; moi-même, je sais qu'en l'état je n'aurais pas la compétence nécessaire pour juger des affaires financières complexes, et j'ai plusieurs années de droit derrière moi) ?

Sur le papier, votre idée me séduit. J'adorerais rendre cette justice aux côtés du peuple français, et plus seulement "au nom du". Mais je suis prête à prendre les paris.....vos "ennemis" ne sont pas nécessairement là où vous les pensez.

87. Le samedi 14 mars 2009 à 19:29 par didier specq

@jalmad

Non, ce n'est pas une avoinée. Je discute, je discute. Avant d'écrire un ouvrage sur ce thème, j'ai besoin de tester les objections (je rigole).

Pour les enfants victimes, je maintiens car, souvent, d'une façon ou d'une autre, ils ont protesté contre ce qui leur arrivait.

J'ai souvenir, par exemple, d'une jeune fille de 13 ans régulièrement abusée par un oncle libidineux. On découvre les faits dans la famille. Réunion de tous les protagonistes. La jeune fille maintient ses accusations et son père "finit" par la croire. Un autre oncle lui explique alors que, si l'affaire est révélée, ça va nuire à sa carrière ( qui est publique et très honorable). La jeune fille hésite puis se tait. C'est le petit frère, âgé de 9 ans, qui va aller tout seul, dénoncer les faits au commissariat! Affaire correctionnalisée par la suite.

Pour le reste, je suis d'accord grosso modo avec vous. L'histoire du permis de juger, c'est une façon de dire que l'acte de juger, à mon avis, ne peut simplement s'appuyer sur une simple compétence made in E.N.M. Quant à l'institution judiciaire, si elle veut devenir un pouvoir respecté, il lui faut s'appuyer directement sur le peuple. Voilà pour le "permis de juger" qui, effectivement, est un peu un effet de manche.

Pour le reste, je vois avec un plaisir non dissimulé que vous étudiez mine de rien ma proposition. Les entreprises vont-elles apprécier, etc. Donc, étudions.

D'abord, évidemment, les jurés pourraient refuser puisque c'est un investissement moral personnel important. Ensuite, le tiers du salariat en France est constitué de fonctionnaires (fonction publique nationale, territoriale et hospitalière) à qui ça ne devrait pas trop poser de problèmes. Ensuite, vous savez qu'il existe un bon nombre de chômeurs (mon petit doigt me dit qu'on ne va pas en manquer dans les années qui viennent) et de retraités. Là aussi, pas trop de problèmes. Reste le salarié genre la caissière d'Auchan, le propriétaire de kebab, le garagiste et même, il en reste encore, le prolo en bleu de travail. Je fais le pari que le monde économique sera assez mûr pour penser que c'est une excellente formation pouvant ouvrir de nouveaux horizons.

Il existe aussi le désir de juger ses semblables (hé, hé) qui sommeille chez beaucoup de gens (sauf chez les magistrats qui font ça pour l'amour du bien public).

Au final, on est assez d'accord, non? Je suis même assez content que vous évoquiez l'aspect économique de la chose en pensant que, finalement, ça pourrait économiser quelques sous. Economies? Cela pourrait plaire à la droite. Des jurés partout, ça pourrait ressembler à la démocratie participative et plaire aussi à Ségolène.

Dernier détail: jamais, jamais, je n'accuse les magistrats de "corporatisme". Il y a quelques mots comme ça que j'ai exclu définitivement de mon vocabulaire: corporatisme, populisme, poujadisme, travail de deuil...


Gascogne :
Voilà un commentaire que j'apprécie, et pas seulement pour son dernier paragraphe. J'étais en rentrant dans la magistrature très réservé, pour diverses raisons, dont certaines encore valables, sur la participation de citoyens lambda (avant toute critique, cela n'a sous mon clavier rien de méprisant) aux formations de jugement. Et depuis, j'ai été assesseur aux Assises, président de tribunal pour enfants, et j'ai même (si, si, je vous jure) assisté en tant qu'auditeur à une audience de tribunal paritaire aux baux ruraux, ainsi qu'à des audiences de départition prudhomale. Et j'ai pu constater toute la richesse d'un apport extérieur à la magistrature, si tant est que l'apport en question s'investisse vraiment dans ses fonctions. Depuis, j'ai vu des policiers et des gendarmes faire œuvre de délégué du procureur, et je suis totalement convaincu de la richesse d'apports extérieurs. Comme quoi le corporatisme des magistrats a ses limites.


88. Le samedi 14 mars 2009 à 20:49 par Girondin

Des éléments surprenants apparaissent dans ce second procés, la dissimulation des écrits d'un témoin au Président suffirait à justifier la saisine de la CEDH. La presse est globalement favorable à l'accusé ce qui est rare... Pourquoi dés lors ce coup de panique et quitter l'audience ??? Agresser le Président n'est pas forcément la meilleure façon de se faire entendre. Durant le procés de Maurice Papon à Bordeaux M°Klarsfeld (junior) a cru bon de mettre en cause le Président de la Cour, uniquement et objectivement parce qu'il demeurait courtois avec tous et notamment la défense. M°Vergez "inventeur" de la défense de rupture aurait soit quitté l'audience dès le début d'un procés de l'Etat colonialiste contre un patriote innocent soit attendu l'issue de l'audience et fait son boulot d'avocat, rappelant au juge partant délibérer tout ce qui est favorable à son client. On est effectivement géné par la "corsitude" prise par cette affaire...

89. Le dimanche 15 mars 2009 à 01:12 par Boule75

Une affaire corsée s'il en est, par ses implications politiques (mobile, qualité de la victime, et également implication verbale de l'actuel président et ministre de l'intérieur au moment des faits) et également par la fuite d'un prévenu, qui a conduit à deux procès là où il n'y avait qu'un drame : Colona est jugé après les autres, ce qui est passablement absurde.

On est quand même formidable en France (Corse incluse) : on réussit à transformer en marécage une affaire grave alors même que assassins ont été arrêtés, grâce à quelques prouesses policières !

Mais un point m'étonne : on ne parle pas du juge d'instruction, il est comme effacé des tablettes. Le nom de Colona, cité par des prévenus lors de leur garde à vue, l'a-t-il été en l'absence du juge, sous le seul contrôle des policiers ou du parquet menant enquête "à charge" ? Y a-t-il eu effectivement pression sur les membres condamnés du commando ? Si l'instruction avait eu effectivement le contrôle sur les enquêteurs, en toute indépendance, et avait instruit pour trouver la vérité, et non des coupables, isolée des pressions politiques, le dossier de l'accusation ne serait-il pas aujourd'hui moins attaquable ?

Quant à la "défense de rupture" : elle est en ligne avec la fuite d'Ivan Colona, et pas nécessairement plus efficace.
Je plains Madame Erignac et, dans une moindre mesure, les jurés honnêtes qui doivent arbitrer dans ce contexte.

90. Le dimanche 15 mars 2009 à 01:13 par Lathan

@ 88 On est effectivement géné par la "corsitude" prise par cette affaire...

C'est quoi la corsitude?
Si c'est tuer des représentants de la République, les varois savent faire aussi (remember Mme PIAT).
Si c'est se plaindre des autorités, nous avons quand même eu un préfet incendiaire et des services de police a l'envie (DNAT, RG,...).
Si c'est parler avec un accent, nous aussi avons un patois (comme les bretons, les provençaux, les basques...).
Il ne s'agit pas là du procès de l'état et de sa conduite en Corse (sur laquelle il y a beaucoup à redire, à commencer par les élus locaux de tous bords) mais celui d'un gars qui risque perpèt' alors qu'aucune preuve n'existe, que les témoignages restent bizarement flous et que l'ex-ministre de l'intérieur avait cru bon de le présenter comme un assassin. Alors, de grâce, laissez les corses et la Corse en dehors de ces considérations. Nous ne sommes ni meilleurs, ni pires que vous.

91. Le dimanche 15 mars 2009 à 01:18 par Boule75

Eh zut : Colonna prend deux N. Désolé.

92. Le dimanche 15 mars 2009 à 01:47 par malpa

Une question sans grande importance : je croyais que "Maître" s'abréviait en "Me". Or plusieurs personnes ici l'abrévient en "Mº". Est-ce une pratique admise dans la profession ? Pour moi, "Mo" (et pas "Mº"), c'est l'abréviation de "station de métro", mais c'est peut-être aussi "Maestro", qui ne s'utilise pas beaucoup en dehors de quelques chefs d'orchestre, et d'ailleurs je ne suis pas sûr que ça s'abrévie. Bref, si quelqu'un a une réponse circonstanciée...

Une question un peu plus importante : puisque un citoyen est obligé de répondre à une convocation de jury d'assises, je suppose que les employeurs ont l'obligation de donner congé à leurs employés qui justifient d'une telle convocation. Qui leur paie leurs journées de travail ? Les employeurs sont-ils dédommagés des journées non travaillées de leurs employés ? Quid des commerçants, professions libérales, agriculteurs, artistes, chômeurs, etc. ? Y a-t-il un système de jetons de présence payables sur le trésor public ? Si oui, le montant est-il égal pour tous les jurés, ou proportionnel à leurs revenus dans la "vie civile" ? Si non, une telle convocation peut devenir une catastrophe pour certaines professions, non ? Je ne crois pas avoir lu quelque chose sur ce sujet dans un billet de ce blog, mais ça m'a peut-être échappé. Si quelqu'un peut m'éclairer ou me renvoyer vers un lien pertinent...

93. Le dimanche 15 mars 2009 à 11:15 par proc hure

A propos des droits de la défense prétendûment laminés en comparution immédiate.

Il n'est jamais inutile de rappeler (en particulier aux avocats qui critiquent le choix du parquet et prétendent que cette procédure les prive de droits) qu'ils peuvent fort bien conseiller à leur client de refuser d'être jugé le jour choisi par le parquet, le renvoi étant alors de droit.

Et qu'on ne prétende pas que dans ce cas le prévenu est automatiquement mis en détention, c'est faux. Et s'il ne l'est pas c'est souvent extrêmement bénéfique car au moment du renvoi les juges renacleront à incarcérer.

Je rappelle aussi que pour les délits punis d'au moins 7 ans d'emprisonnement le prévenu bénéficie de droit d'un renvoi de l'affaire à au moins deux mois, sauf s'il y renonce.

C'est suffisant tout de même car les affaires en comparution immédiate sont souvent simples.

Mais il est vrai qu'étant rétribués à l'aide juridictionnelle beaucoup d'avocats ne sont pas forcément désireux que l'affaire soit jugée un autre jour. C'est une réalité.

Et les efforts pour réunir des pièces (sur la personnalité en particulier) pour l'audience de renvoi sont souvent squelettiques.

Eolas:
C'est très intéressant, ça. Est-ce un point de vue personnel ou est-il représentatif de ce que pensent vos collègues ?

Parce que sachez que l'avocat est rémunéré exactement la même somme que le débat ait lieu au fond ou qu'il y ait demande de délai pour préparer la défense (demandez à votre greffier une attestation de fin de mission, vous verrez, il n'y a qu'une ligne assistance devant le tribunal correctionnel (8 UV, ± 200 euros) ; c'est devant le JLD qu'on est royalement payé 2 UV (± 50 euros). Donc si votre théorie de “l'avocat du moindre effort” était exacte, il n'y aurait que des demandes de délai en CI, pour toucher l'AJ sans avoir à préparer le fond du dossier. Vous constaterez que ce n'est pas le cas ni dans votre tribunal ni dans aucun autre. Donc il faut croire que les avocats ont de la conscience professionnelle, et font tout pour assurer une défense de qualité sans engorger la machine judiciaire. Le choix d'accepter d'être jugé tout de suite est fait en commun avec le client. Les critères pris en compte sont grosso modo les mêmes que ceux qui ont décidé le parquet à avoir recours à la CI. Faits apparemment établis avec certitude, pas de domicile ou étranger en situation irrégulière, donc risque de non représentation, antécédents, faits simples. S'agissant des garanties de représentation, nous ne faisons pas des miracles. Un SDF reste SDF et un sans papier reste sans papier au bout des vingt à trente minutes consacrées à préparer sa défense. Dès lors que le mandat de dépôt apparaît comme certain, il est préférable d'être jugé immédiatement. On a parfois plus de chances d'obtenir une peine sans maintien en détention qu'un renvoi sous contrôle judiciaire, car le débat au fond a eu lieu, et psychologiquement, il est moins pénible d'être détenu pour une durée déterminée que mariner en maison d'arrêt sans être fixé sur son sort. En outre, si une peine légère (inférieure ou égale à 6 mois) est prévisible, il vaut mieux se la prendre tout de suite, pour bénéficier du CRP et demander une libération ou un aménagement au bout de deux mois et demi plutôt que de poireauter jusqu'à l'audience de renvoi, qui peut avoir lieu 6 semaines plus tard, voire en cas de délit puni de 7 ans +(comme le trafic de stup'), au minimum deux mois plus tard voire quatre. C'est à dire concrètement que deux gus arrêtés en train de vendre du cannabis, porteur de 10g chacun, cités pour cession de stupéfiants (10 ans encourus), l'un demande un délai, l'autre non, celui-ci sortira peine purgée ou aménagée quand celui-là n'aura pas encore été jugé. Pour l'avocat, le calcul est vite fait. Même si en demandant un délai, la copine du prévenu, qui travaille aujourd'hui et ne peut se déplacer, aurait le temps de nous amener des garanties de représentation qui feraient ployer Torquemada lui-même.

94. Le dimanche 15 mars 2009 à 17:50 par jalmad

@ 93 "A propos des droits de la défense prétendûment laminés en comparution immédiate." Ah ! ça c'était pour ma pomme, je crois ! alors :

si vous relisez mon post 86, vous verrez deux choses : en premier lieu, je parlais en particulier de la correctionnalisation sauvage d'affaires criminelles passant en compa...en second lieu, lorsque je parle des droits "laminés", je parlais de ceux DES parties : défense et partie civile....

mais si vous souhaitez parler de la procédure de comparution immédiate en général, pas de pb, et je pense qu'il n'y pas besoin d'être un gauchiste invétéré pour simplement constater qu'il s'agit d'une procédure moins protectrice des droits des parties : combien de fois voyez vous les parties civiles présentes ou représentées à l'audience chez vous ? parce que chez moi, bien souvent, pour exemple typique le cas de violences suffisamment graves pour avoir envoyé la victime à l'hôpital, il n'y a personne....l'association d'aide aux victimes a fait ce qu'elle a pu, mais personne n'est là quand même ! vous me direz : la victime peut aller au civil. C'est vrai, le procès pénal ne l'intéresse pas, de quoi se plaint-elle.... quant à la défense : Eolas a très bien expliqué le calcul d'apothicaire quant à savoir si oui ou non la personne accepte d'être jugée immédiatement. C'est un peu comme pour la réforme de la carte judiciaire : on a été consulté....

En outre, sauf erreur, le droit commun prévoit : pas de mandat de dépôt (sauf texte spécial, récidive...) possible si peine prononcée inférieure à 1 an. Ceci, en soi, qui n'est pas sans conséquence en terme d'aménagement de peine, que vous le vouliez ou non, "lamine" les droits de la défense par rapport à la situation dite normale (COPJ, citation directe). Je suis dans un Tribunal de taille petite/moyenne, et je peux vous dire que les affaires que nous jugeons en comparution immédiate sont rarement (sauf peines planchers, et encore !) sanctionnées par des peines d'un an ferme ou plus. Ce n'est pas anecdotique.

vous dites "Et qu'on ne prétende pas que dans ce cas le prévenu est automatiquement mis en détention, c'est faux. Et s'il ne l'est pas c'est souvent extrêmement bénéfique car au moment du renvoi les juges renacleront à incarcérer.". Outre l'expression "renâcler à incarcérer" qui me fait tiquer, je vous rappelle quand même que ce qui, pour vous, serait "extrêmement bénéfique", est JUSTE la situation normale dans laquelle devrait comparaître tout justiciable. Vous savez, le caractère exceptionnel de la détention provisoire....c'est un peu comme lorsque Rachida Dati explique que les peines planchers améliorent les droits de la défense car l'avocat doit se retrousser encore plus sérieusement les manches.

enfin, vous dites, parlant du délai de renvoi souvent non mis à profit par les avocats : "Et les efforts pour réunir des pièces (sur la personnalité en particulier) pour l'audience de renvoi sont souvent squelettiques.". J'ai la faiblesse de penser qu'un dossier "en état" pour être jugé devrait contenir des éléments de personnalité, cette charge ne devant pas naturellement incomber aux seuls avocats de la défense ; surtout désormais lorsqu'à la clef se trouve une peine plancher. Or, je lis régulièrement dans les enquêtes rapides de personnalité : "tel élément avancé par le prévenu (emploi, formation, ami ou famille prêt à l'accueillir... n'a pu être vérifié)....A ce sujet, je serais intéressée d'ailleurs par les avis des avocats : avez vous changé vos pratiques depuis les peines plancher ? je m'attendais à voir solliciter systématiquement ou quasi un délai, quand la peine plancher est encourue en compa, mais apparemment tel n'est pas le cas....

bref, ceci n'est pas une critique des choix opérés par le Parquet. L'orientation des poursuites, c'est son affaire, avec les impératifs qui sont les siens. Et il est bien normal que le Parquet recourt à toutes les possibilités légales qui lui sont offertes. Et oui, souvent, les affaires ainsi orientées sont simples, les prévenus sont tellement connus du Tribunal que les éléments de personnalité sont à rechercher dans les précédents dossiers...mais c'est loin d'être toujours le cas. On se pose la question de la "plus-value" de l'instruction. Et la "plus-value" de la comparution immédiate ? je pense quant à moi (vu, en tout cas, de mon TGI de Province où, globalement, les affaires de compa sont les mêmes que celles qui passent en COPJ ou sur citation directe) qu'elle ne tombe pas sous le sens.

95. Le dimanche 15 mars 2009 à 20:55 par Dom

Et ce dans le plus grand silence de la place Vendôme, qui ne souhaite pas intervenir avant la fin du procès "pour ne pas que cette intervention se retourne contre le corps judiciaire" (je vous assure que je n'invente rien).

Eh ben voilà, elle s'est exprimée, la place Vendôme :

http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5hZzq_vehfDqHx-tnbB0SQN6hos8A

96. Le lundi 16 mars 2009 à 10:44 par marsan

bien vu Dom - j'observe néanmoins que Mme DATI aura attendu une conference de presse bien longtemps apres les premières insultes et que sa réaction intervient après qu'elle est reçue des syndicats de magistrat des courriers sur ce sujet

97. Le lundi 16 mars 2009 à 10:47 par marsan

(suite et fin) J'attends de voir si les dernières déclarations (comme les précédentes) font l'objet de poursuites disciplinaires - ce que n'annonce pas Mme DATI - Je n'ose pas imaginer le sort qui serait fait à un magistrat qui parlerait ainsi d'un auxiliaire de justice !!

98. Le lundi 16 mars 2009 à 13:32 par marsan

au 96 tout le monde aura mis l'auxiliaire "avoir" là où j'ai rapidement mis l'auxiliaire "être".

99. Le lundi 16 mars 2009 à 15:19 par proc hure

A M° EOLAS en particulier

les choses étant ce qu'elles sont il n'est pas interdit de considérer que la mission d'assistance des prévenus en comparution immédiate soit rarement une priorité des barreaux, qui la confient aux derniers arrivants.

Et les barreaux manifestent peu d'entrain collectif visible à faire usage du droit au renvoi de l'affaire institué par la Loi.

Il n'est pas non plus inutile d'exposer que ce choix de poursuite ne peut l'être qu'avec l'assentiment de tous, en premier lieu du prévenu lui-même, toujours assisté d'un avocat.

Puis-je également rappeler à mes estimés collègues juges qu'ils ont parfaitement le pouvoir de considérer que l'affaire n'est pas en état d'être jugée immédiatement pour telle ou telle raison (victime non avertie, dossier complexe, manque d'investigations sur la personnalité du prévenu et que sais-je) dont ils n'ont aucun compte à rendre.

Alors quand j'entends la pluie récurrente de de critiques contre l'usage de cette procédure, il m'arrive de relire les textes pour être sûr de ne pas divaguer.

J'ajoute que la plupart du temps les dossiers présentés par la défense (rarement communiqués par avance au Parquet comme si la contradiction n'allait que dans un seul sens) ne sont pas mieux constitués lors des audiences classiques que lors des audiences de comparution immédiate, s'agissant notamment des pièces sur la personnalité.

Alors on peut toujours critiquer le travail des OPJ, de l'enquêteur de personnalité ou du substitut, mais c'est un problème général de qualité de la justice pénale en FRANCE auquel il faudrait s'atteler sans tabou ni visière

100. Le lundi 16 mars 2009 à 19:47 par Me Emer

@ Proc Hure

Tiens, puisque vous parlez de contradiction, avez-vous une explication au fait que le parquet refuse toujours de préciser ce qu'il compte requérir contre mes clients, notamment quand je viens lui présenter mes pièces et éventuelles conclusions?

C'est bien d'insister sur une véritable contradiction, en effet.

Eolas:
Sur ce point je vole au secours du parquet, qui n'en a pas besoin. Pas plus qu'on ne peut lui révéler notre plaidoirie, il ne peut indiquer ses réquisitions, car elles dépendent en grande partie de l'audience : le dossier va-t-il tenir ? Comment le prévenu va-t-il se comporter, que va-t-il déclarer ? Ce n'est qu'à la clôture des débats que les réquisitions sont mures.

101. Le lundi 16 mars 2009 à 23:24 par didier specq

@proc hure

Je ne sais pas dans quel tribunal vous exercez et je suis bien conscient que des disparités dans le mode de défense existent. Je parle donc d'un gros tribunal, celui de Lille.

A mon sens, on est presque mieux défendu en comparution immédiate que dans les audiences plus "nobles" (anciennement "nobles" devrais-je dire) qui jugent les instructions. Je ne parle pas des audiences financières où c'est un peu différent (fraudes fiscales, grosses infractions dans la construction, abus de biens sociaux, etc).

La procédure devenue reine, c'est la comparution immédiate et, en face de cette situation, le barreau de Lille a répondu par une organisation à mon sens assez efficace: un coordinateur (avocat aguerri) qui encadre des plus jeunes en général très volontaires. Très vite, les meilleurs de ces jeunes avocats, au bout de quelques années de "barre", deviennent des vedettes de la comparution immédiate, réservoir, par ailleurs, des délinquants plus aguerris, en cas de récidive, que l'on revoit dans les gros dossiers, par exemple, de stups ou de réglements de comptes.

Je pense que nombreux sont les clients des avocats qui ont compris ce processus et qui observent de très près ce qui se passe en comparution immédiate. Comme me disait l'un d'entre eux: <pourquoi payer un mauvais avocat alors qu'on peut en avoir un bon gratuitement?>

Evidemment, cette réflexion un peu brutale n'est pas entièrement exacte. D'abord pour les dossiers financiers (voir plus haut). Ensuite parce que ces jeunes avocats devenus des experts de la comparution immédiate sont évidemment des avocats choisis et payants dans les dossiers d'instruction.

Mais, ces réserves mises à part, la comparution immédiate -très dure, très rapide et très sélective par ailleurs- est un repaire d'excellents avocats. Des défenseurs, à Lille, comme Antoine Berthe, Nicolas Brazy, Cécile Carrillon, Anne Nappez, Damien Legrand, Julein Bensoussan, etc, etc, sont en fait largement aussi connus -et d'une certaine façon plus actifs- que des avocats très connus -sur le plan des médias parisiens- comme Eric Dupond-Moretti ou Frank Berton.

Je constate presque tous les jours, par exemple, que la connaissance du terrain (que dire devant tel président qui n'a pas la même personnalité qu'un autre; comment réagit ce procureur; cet argument est-il complètement éculé; la dernière nullité à la mode et la réaction de la Cour d'Appel de Douai) échappe souvent aux avocats qui n'ont plus la pratique quotidienne d'un même gros tribunal.

Dans ces conditions, demander un délai est une affaire de tactique: le client avec une bonne chance de sortie lors de la première comparution risque donc d'échapper à la prison lors du "retour" de la C.I., est-ce que -en cas de renvoi- ça risque de tomber sur un président plus cool (étudier avec précision les périodes de vacation où les présidents sont souvent plus malléables), est-ce que vraiment mon client est capable de réunir des pièces en sa faveur ou faut-il passer tout de suite dans un certain flou, etc.

Le passage en C.I. devient donc un art un peu à part où les avocats à l'ancienne ressemblent parfois à des éléphants dans un magasin de porcelaine. Mais je n'ai plus du tout l'impression depuis une dizaine d'années qu'on y est mal défendu. Au contraire!

En tous cas, cher proc hure, la comparution immédiate est vraiment une priorité du barreau de Lille avec des avocats très brillants. En revanche (voir ce que dit Jalmad) les victimes souffrent parce que, très souvent, l'affaire est jugée avant qu'elles puissent être réellement présentes. Ajoutons que les peines de 3 à 5 années de prison sont courantes (contrairement à la pratique des petits tribunaux décrite par Jalmad) puisque tout, ou presque, passe en C.I.

102. Le mardi 17 mars 2009 à 10:36 par proc hure

A M. SPECQ

nous sommes bien d'accord.

Ce n'est pas tant la procédure qui importe, c'est la manière concrète dont les barreaux organisent la défense des prévenus.

Mais Lille et la force de sa défense pénaliste n'est pas forcément représentative de l'ensemble des barreaux.

A M° EMER: il m'arrive de donner la couleur de mes réquisitions aux avocats s'ils me la demandent gentiment ce qui est toujours le cas. Mon observation sur le contradictoire concernait les pièces au dossier de ceux-ci relatives au fond du dossier (style attestations de dernière minute, PV de constat).

C'est problématique quand elles n'ont pas été préalablement communiquées.

Certains s'en accommodent fort bien, mais ce n'est pas signe d'une bonne justice que de voir le parquetier hurler sur son estrade, l'avocat maugréer quelques protestations et le juge trancher comme si de rien n'était.

103. Le mardi 17 mars 2009 à 11:57 par Me Emer

@ Proc Hure

Alors, je ne peux que regretter de n'avoir jamais croisé le fer avec vous!

@ Eolas

Il est évident que je ne compte pas obtenir des réquisitoires précis et chiffrés.

Moi aussi, je suis susceptible de modifier ma défense en fonction des débats, mais j'indique régulièrement au Parquet ma position de départ : "Au vu des éléments du dossier, je compte attirer l'attention du Tribunal sur telle peine qui me paraît adaptée".

En retour, de simples indications sur la sévérité ou la clémence envisagée me satisferaient. Ce que je n'ai pas obtenu souvent.

104. Le mardi 17 mars 2009 à 17:45 par Chosaupoint

Le procès Colonna tourne à la parodie de justice, par Yves Bordenave LE MONDE | 17.03.09 | 13h35 • Mis à jour le 17.03.09 | 13h35

n box vide, des bancs de la défense désertés : la cour d'assises spécialement composée de Paris qui juge Yvan Colonna depuis le 9 février n'a plus que ses apparats. Elle s'apprête à décider de l'innocence ou de la culpabilité d'un homme qui risque la prison à perpétuité, en son absence et en celle de ses défenseurs. Depuis le 11 mars, date du départ de l'accusé et de ses avocats, les débats se poursuivent mais les dés sont pipés : que vaut une discussion judiciaire, lorsque le principal intéressé refuse d'y participer ?

Le président, Didier Wacogne, a beau continuer, feignant d'entendre les témoins selon une règle d'impartialité dont il serait désormais l'unique garant, rien n'y fait : le procès en appel d'Yvan Colonna, accusé d'avoir assassiné le préfet Claude Erignac le 6 février 1998 à Ajaccio, a sombré dans un simulacre de justice. Pourtant, il faut bien juger Yvan Colonna selon la loi, que celui-ci l'accepte ou non.

Reste à comprendre comment on a pu arriver à cette parodie qui entachera le verdict de manière indélébile. Le refus d'Yvan Colonna d'assister à son procès, au bout de cinq semaines d'audience, constitue l'aboutissement d'une chronique d'un départ annoncé. Le motif invoqué - le rejet d'une seconde demande de reconstitution - est un prétexte. La preuve, selon l'accusé et ses avocats, que cette cour formée de magistrats professionnels triés sur le volet par le premier président de la cour d'appel de Paris n'est pas là pour rechercher la vérité, mais pour condamner leur client "au nom de la raison d'Etat".

Dès le 17 février, Me Antoine Sollacaro, suivi de ses confrères Pascal Garbarini et Gilles Simeoni, avait quitté le prétoire "provisoirement" en signe de protestation. La cour avait différé sa décision concernant une demande de supplément d'information à la suite du témoignage de l'ancien secrétaire général adjoint de la préfecture de Corse, Didier Vinolas, selon lequel des suspects "couraient toujours dans la nature".

Les avocats avaient dénoncé une manoeuvre dilatoire et s'en étaient pris au président, Didier Wacogne, lui reprochant sa "déloyauté" et sa "partialité". N'avaient-ils pas surpris celui-ci en flagrant délit de mensonge, cinq jours auparavant ? En effet, le 17 février, lors de sa déposition, Didier Vinolas assurait en avoir préalablement informé le président Wacogne par lettre. Lequel ne l'avait pas communiquée aux parties, ni avant ni pendant l'audience. Il s'en est justifié de manière un peu piteuse : "Je n'ouvre pas mon courrier avant les débats."

Cette missive avait également été adressée au parquet général, qui l'avait transmise au président de la cour. Dès lors, il apparaît peu probable que, contrairement à ses assertions, celui-ci n'en ait pas pris connaissance. "J'ai le sentiment que lorsque M. Vinolas écrit, on veut ignorer ce qu'il écrit", s'était indigné Me Maisonneuve. En tentant de dissimuler cette lettre, Didier Wacogne n'a fait qu'accroître la défiance et la tension qui plombaient déjà cette audience.

Cet épisode a laissé des traces. La défense du berger de Cargèse a marqué des points, l'autorité du président s'en est trouvée durablement entamée et l'accusation affaiblie. A tel point que, spectatrice d'un procès qui partait à vau-l'eau, l'opinion, pourtant longtemps acquise à la culpabilité de l'accusé, a fini par basculer. Pour la première fois depuis sa cavale, le 24 mai 1999, Yvan Colonna bénéficie du doute qui a toujours assombri l'enquête liée à cette affaire. Aux yeux de l'opinion, l'ex-fugitif le plus recherché de France - "mort ou vif", avait lancé l'ancien chef de la DNAT, Roger Marion - pourrait ne pas être "l'assassin" que Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'intérieur, avait stigmatisé sous les applaudissements de la foule le 4 juillet 2003 à Carpentras (Vaucluse).

Du maquis où il s'est réfugié pendant quatre ans, comme du fond de sa cellule où il est incarcéré depuis six ans, Yvan Colonna a toujours clamé son innocence. Ses accusateurs, juges et policiers, n'ont jamais produit un élément matériel ou factuel qui le confonde sans contestation possible. Seuls les aveux des membres du commando et de leurs épouses obtenus en mai 1999, à l'issue de gardes à vue dont le déroulement a toujours été sujet à controverse, fondent sa mise en cause. Pas plus. Pas moins.

Près de deux années se sont écoulées avant que les premiers ne se rétractent. Les autres ont suivi, selon une discipline implacable et une spontanéité douteuse. Au fil de leurs rétractations, les conjurés n'ont jamais expliqué les raisons pour lesquelles ils auraient livré un innocent. Variables, imprécis et plusieurs fois modifiés, leurs récits sont si peu convaincants qu'ils en deviennent suspects. "Je ne comprends pas que vous ayez mis tant de temps à dire la vérité !", s'est étonné Yvan Colonna lors de leur venue à la barre.

Le 9 mars, devant la cour, Pierre Alessandri, qui s'est accusé d'avoir tiré sur le préfet, a suggéré que Colonna aurait appartenu à leur groupe mais qu'il se serait "déballonné". Personne n'a relevé. Ni l'accusation, ni la défense, ni Colonna, qui a changé de sujet. Dans quelques jours, la cour rendra son verdict. Celui-ci dira la vérité judiciaire. Approchera-t-elle la vérité simple ? A l'issue d'un tel procès, cette question hantera toujours les esprits.

Courriel : bordenave@lemonde.fr.

105. Le jeudi 19 mars 2009 à 12:00 par Mandet

Merci @ Gascogne pour cette voix dissonante au milieu d’un brouhaha médiatique concernant ce procès.(repris par la plupart des commentateurs de cet article)

Car en effet comme vous l’avez fort bien décrit, quand les arguments (fond et forme) viennent à manquer, choisir la rupture c’est être sûr de produire son petit effet.

Et c’est encore mieux quand les journalistes se comportent comme des veaux vont tous dans le même sens:le spectacle est assuré et l’institution judiciaire une fois de plus mise en cause ====>Mais dites moi, tout est réuni pour vendre du papier ... alors pourquoi aller chercher plus loin ?

106. Le jeudi 19 mars 2009 à 15:08 par CAPITOLE

Très sincèrement, à lecture de votre billet, dont les termes m'apparaissent quelque peu étonnants parfois, je me demande si l'exercice de votre profession vous a amené à rencontrer les mêmes expériences que les miennes.

Je n'aborderai pas le fond du dossier actuellement pendant devant la Cour d'Assises, mais me permettrai seulement d'attirer votre attention sur le fait que certains intervenants de ce dossier ont pu, qu'ils interviennent pour la défense, pour le parquet ou pour le siège, notamment à travers leurs relais dans la police ou dans certains services bien informés, avoir des lumières sur ce qui a pu s'être réellement passé sur place le jour dit, et considérer en conséquence de manière raisonnablement informée, en tout cas peut-être mieux informée que s'ils étaient extérieurs au procès ou auxdits milieux, que l'ensemble de l'enquête comme des audiences de jugement peut être considéré comme, pour le dire pudiquement, n'étant pas un exemple parfait d'impartialité. Maintenant, je dis ça, je ne dis rien.

Pour ce qui est de l'intervention de la Place Vendôme que vous paraissez trouver difficilement compréhensible, elle paraît assez manifestement habitée par la crainte de l'utilisation d'interventions publiques du Ministère ou de poursuites qui interviendraient contre la défense devant la Cour européenne qui pourrait y voir un indice supplémentaire de la non équité de ce procès. Elle peut paraître maladroite, elle n'en demeure pas moins explicable.

Par ailleurs, imaginer que dans une telle procédure toute atteinte à un procès équitable serait sanctionnée par la Cour de cassation par une récusation des magistrats auteurs de tels faits me semble relever d'une relative innocence. Pour information, j'ai obtenu récemment une décision de la Cour européenne constatant à l'unanimité une violation de l'article 6 § 1 alors que la Cour de cassation chambre criminelle avait rejeté notre pourvoi sans motivation comme ne présentant aucun moyen sérieux...Il semblerait donc que même la Cour de cassation ne soit pas investie de l'infaillibilité universelle, aussi extraordinaire que cela puisse paraître.

Mais je vous souhaite vivement de ne rencontrer au cours de votre vie professionnelle que des procès équitables, des décisions incontestables et des enquêtes menées en parfaite transparence et en toute bonne foi.


Gascogne :
Rajoutons des avocats respectueux et compétents, et ce sera le bonheur...


107. Le samedi 21 mars 2009 à 10:51 par Pvarini

@Gascogne,

Un avocat compétent serait-il, à vos yeux, un avocat soumis ? Sauf erreur de ma part, un de ces incompétents est le défenseur du juge Burgaud, personnage respecteux et compétent. A moins que ne ce soit son manque de clairvoyance qui ne l'ai aveuglé..

Le commentaire N° 50 de "Avocat" évoque le sentiment de corporatisme que vous réfutez. Il me semble, hélas, bien loin de la vérité.


Gascogne :
Vous avez tout compris. Je considère Me Eolas comme un avocat soumis...Votre argumentation, qui en revient insidieusement à Outreau, est à pleurer, digne d'un quasi point Goldwin. Et puisque beaucoup de commentaires vous semblent bien loin de la vérité, que vous détenez, bien entendu, vous permettrez que je ferme les commentaires sous ce billet. Non ? Ah, tant pis.


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