Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Plus belle l'assises (4)

N'étant pas un adepte de la défense de rupture, je n'ai pu claquer la porte de mes audiences et remercie Gascogne de me suppléer. Néanmoins, allons-y pour notre feuilleton quotidien, visible ici, début à 17:24 (temps en minutes et secondes affiché au compteur).

(17:24) : Ça tombe bien, première image, premier commentaire. QUEU-WAH ? Qu'est ce que c'est que ces jurés qui, alors même que les débats ne sont pas clos, consultent des pièces du dossier et d'autres remises par une partie hors du prétoire et hors la présence des avocats ? Et l'oralité des débats ? Surtout que l'album des photos d'enfance n'apporte RIEN au débat sur les faits. Il montre que la victime a été un enfant, et laisse suggérer que c'est cet enfant qu'on a assassiné. J'espère qu'il me manque un élément pour tout comprendre. M. le greffier d'assises ? Vos lumières ?

(18:03) : Grosse erreur du commentateur. Si les familles vont être entendues, c'est que les débats ne sont pas clos. C'est la partie sur les faits qui est terminée, on est passé à la personnalité de la victime, qui fait partie des débats. C'est un moment qui relève plus du sacré que du processus judiciaire. Tuer un salaud est aussi illégal que tuer un saint. Mais en effet, c'est toujours un très mauvais moment pour la défense : outre que toutes les victimes ont tendance à devenir des saints à cette occasion, les jurés réalisent toute la douleur qu'entraîne cette perte. Une vie détruite, une vie qui avait un sens, une histoire, et encore un avenir ; mais aussi la douleur inconsolable de la famille, réveillée au cœur de la nuit par un coup de fil qu'elles n'oublieront jamais. Cela crée forcément une empathie avec les jurés, qui n'est jamais un gage de clémence.

(18:35) : En principe, les témoins et parties ne doivent pas s'adresser directement la parole (le risque de dérapage est trop grand). Tout le monde est censé s'adresser au président. Même en répondant à une question d'un avocat ou de l'avocat général, on doit répondre au président. C'est un mécanisme qui désamorce les réactions agressives (on ne va pas injurier ce pauvre président qui n'a pas posé la question, après tout).

(18:40) : Voilà une autre forme de dérapage. Le sacrifice. L'accusé est accablé par sa culpabilité. Il est sonné, il est à terre, il est K.O. Il est impuissant. Il a reconnu les faits. Il est incapable d'expliquer son geste, il n'a pas les capacités d'analyse, tout simplement les mots pour ça, et ce n'est pas en prison qu'il aura pu bénéficier de l'aide que cela nécessite. Alors, il baisse la tête, terrassé par la honte et l'embarras, par l'incapacité à pouvoir trouver les mots pour répondre. Il est livré en sacrifice à la famille, qui peut lui cracher son mépris à la figure. Cela n'apporte rien à la recherche de la vérité. Cela apporte juste un substrat de vengeance à la famille. Au prix de la dignité des débats et de la justice qui laisse faire. C'est typique du phénomène actuel du tout victimaire. On leur passe tout espérant en vain les satisfaire, car la seule chose qui pourrait le faire, c'est rendre la vie à un mort, et ça, la justice ne sait pas faire. Croyez-vous que cette jeune fille va sortir apaisée du prétoire ? J'en doute. Et alors ce navrant spectacle aura été vain.

Finalement, je pense que l'erreur du commentateur est très révélatrice : le journaliste lui-même ne peut associer cet étrange spectacle aux débats qu'il a suivis jusqu'à présent. Il interprète ce qu'il ne connaît pas et y voit un passage obligé du procès : avant les plaidoiries, on laisse les victimes se défouler.

À la question qu'aurais-je fait, je répondrai que j'aurais demandé au président de prier les parties civiles de ne pas s'adresser à l'accusé mais à la cour, comme il est d'usage.

(19:30) : La justice reprend ses droits. Voici les plaidoiries. Elles ont lieu dans l'ordre suivant : partie civile (victime ou famille de la victime si elle est décédée), ministère public, défense. Un droit de réplique existe, mais est rarement utilisé. La défense doit dans tous les cas avoir la parole en dernier. En avant dernier, puisque c'est l'accusé qui se voit offrir la possibilité de s'exprimer juste avant la clôture des débats. Moment redouté par la défense, j'y reviendrai le moment venu.

(19:37) : Mon excellent[1] confrère Yves Sauvayre à l'œuvre.

(20:00) : Ouch. Excellente et terrible image que celle de l'abattoir. C'est le genre d'image qui fait mouche — Si j'ose dire.

(20:12) : Ou les avocats se sont entendus pour qu'un seul plaide (douteux, surtout si la télé est là), ou on nous a zappé le reste de la défense. C'est dommage. Je cite donc le reste du casting de la partie civile : mon excellent (quoique etc.) confrère François Saint-Pierre, et mon tout aussi excellent (et tout aussi etc.) confrère Gaël Candela. EDIT : le quatrième larron est mon cher (car parisien) confrère Patrick Klugman, avocat entre autres de SOS Racisme.

(20:24) : Effectivement, le procureur général Jean-Olivier Viout est un habitué des assises. Un vrai orateur, comme il y en a peu du côté du parquet. Cela lui permet de faire passer avec conviction des messages absurdes. Un meurtre simple serait pire qu'un meurtre aggravé par mobile raciste ? Donc, si le mobile raciste avait été reconnu par l'acusé, vos réquisitions eussent été plus modérées ? Allons, monsieur le procureur général… Pourrais-je me permettre d'ajouter que le mépris de la vie de l'autre est un élément relativement fréquent dans les affaires d'homicide volontaire ?

(21:08) : Présenter des réquisitions très sévères (25 années sur 30 maximum) comme un minimum à la sagesse, c'est habile. Et redoutable avec un tel parquetier. Je salue le talent.

(21:35) : Intéressantes considérations sur la fixation de la peine par un parquetier. C'est un des aspects les plus difficiles de la fonction, que la plupart des avocats esquivent lâchement en se contentant d'en appeler “à la clémence” de la juridiction, ce qui ne veut pas dire grand'chose et n'aide guère le juge. C'est l'expression de la liberté du parquetier à l'audience, qui doit être totale. Ce qui pour moi exclut que je reproche à un parquetier le contenu de ses réquisitions, sur ce point du moins (qu'il présente une interprétation erronée des faits ou de la loi, et c'est autre chose).

(21:36) : ALLEZ LA DÉFENSE ! ALLEZ LA DÉFENSE ! Quoi, je suis de parti pris ? (À la manœuvre et dans l'ordre d'apparition à l'écran : mes excellents (oui, quoique vous savez quoi) confrères Hervé Banbanaste et Frédéric Lalliard).

(21:59) : Les jurés votent d'abord sur la culpabilité sous forme de questions. Quand il y a des circonstances aggravantes, elle font l'objet de questions spéciales. Il peut aussi y avoir des questions subsidiaires, qui deviennent sans objet si on a répondu oui à une question précédente. Par exemple, si l'intention homicide était contestée (ce qui n'est pas le cas ici) :

1° Monsieur Jean-Marie Garcia est-il coupable d'avoir volontairement ôté la vie à Chaïb Zehaf ?

2° Subsidiairement, monsieur Garcia est-il coupable d'avoir exercé sur Chaïb Zehaf des violences volontaires ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner ?

3° Ces faits ont-ils été commis en raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ?

Si la cour et le jury répondent oui (par huit voix au moins) à la première question, la seconde est sans objet. Si la cour et le jury répondent (par cinq voix au moins) non aux questions 1 et 2, la 3 est sans objet et c'est l'acquittement.

Ici, la défense se bat sur le terrain de la circonstance aggravante de racisme. Mais il me semble que le parquet ne la soutient pas, et que BHL a beaucoup fait pour l'écarter. Mais le parquet a fait comprendre à la cour et au jury qu'ils peuvent aller très haut dans la sévérité sans s'embarrasser de la question douteuse du racisme…

(22:08) : Invoquer l'alcoolisme n'est pas un super argument de défense, même pour écarter une circonstance aggravante. Cela révèle une dangerosité tenant à un état où la volonté de l'accusé joue un rôle : il sait qu'il est dangereux quand il a bu, et boit quand même, en étant armé. Ça ne va pas plaire aux jurés qui fréquentent des débits de boisson…

(22:16) : Là encore, il manque un bout. Le président a lu la liste des questions auxquelles la cour et le jury vont répondre (qui à l'époque où il n'y avait pas d'appel a donné lieu à un très abondant contentieux). Puis il a lu l'adresse aux jurés, un magnifique texte, superbement écrit à l'époque napoléonienne. Ce texte est également affiché dans la salle des délibérations.

La loi ne demande pas compte aux juges des moyens par lesquels ils se sont convaincus, elle ne leur prescrit pas de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d'une preuve ; elle leur prescrit de s'interroger eux-mêmes dans le silence et le recueillement et de chercher, dans la sincérité de leur conscience, quelle impression ont faite, sur leur raison, les preuves rapportées contre l'accusé, et les moyens de sa défense. La loi ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs :“ Avez-vous une intime conviction ?”.

Ensuite, le président fait retirer l'accusé (qui, même libre, ne peut plus quitter les lieux) et invite le chef du service d'ordre à faire garder les issues de la chambre des délibérations, dans laquelle nul ne pourra pénétrer, pour quelque cause que ce soit, sans autorisation du président.

Il conclut par ces mots : « L'audience est suspendue ».

Commence alors une longue et terrible attente.

Et ici commence aussi la vôtre, jusqu'à demain pour la suite et la fin.

Notes

[1] Quoique provincial.

Commentaires

1. Le jeudi 12 mars 2009 à 20:56 par Thor

Merci pour vos commentaires, Maître. C'est très intéressant d'assister de l'intérieur au fonctionnement de la justice.

p.s. je sens que vous allez avoir plein de commentaires sur votre note de bas de page concernant "le provincial". Le fait que cet humour soit mal interprété m'échappe.

Eolas:
À moi aussi ; mais ça m'encourage à persévérer. On tient un truc, là.

2. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:12 par yves

C'est pas Lacenaire qui ne voulut pas prendre le risque d'être guillotiné par un bourreau de province? Vous semblez d'un parisianisme assez proche quoique plus ironique.

Eolas:
Pourtant, sa très parisienne guillotine, dirigée par Sanson, s'enraya. Comme quoi…

3. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:15 par consultant_itinerant

Que ce sera long jusqu'à demain...

Deux questions d'inégal sérieux :

Question 1 :

Maître Eolas étant à l'origine de deux de mes addictions :
- la lecture de son blog ;
- le Long Jing ;
pourrais-je un jour utiliser ce moyen de défense lors d'une procédure visant à contester un licenciement toujours possible lorsqu'on utilise le temps le matériel professionnel pour obtenir sa dose s'informer ?

Eolas:
Dites que vous me connaissez.

Question 2 :
Simple spectateur et citoyen j'ai moi aussi été doublement choqué par les séquences de l'album photo et de l'invective des parties civiles contre l'accusé qui leur est jeté en pâture. Vous semblez indiquer (du moins pour la seconde) qu'il s'agit là d'une évolution récente du "comportement" de la justice à l'égard des victimes. Qu'en était-il auparavant ? Y-a-t-il des présidents qui laissent faire et d'autres qui mettent des gardes-fous ? En tant que défenseur, quelle attitude conseillez-vous à vos clients d'adopter (si tant est qu'il puissent suivre un conseil en pareil circonstances) ?

Eolas:
Il n'y a pas de comportement type. Il faut s'adapter à la personnalité de l'accusé. Et le préparer à l'audience.

Enfin, d'autre l'ayant fait abondamment et mieux que je ne saurais l'écrire, il est inutile que je m'étende sur le plaisir qu'il y a non seulement à vous lire mais aussi à voire exprimer, avec une ironie mordante parfois, une clarté cristalline toujours, les opinions et les réactions que bien souvent nous partageons. Et je ne dis rien des bénéfices monstrueux que tireraient les professionnels de la pédagogie d'une seule leçon de Maître Eolas. Y compris ceux qui m'ont rendu le droit indigeste à l'époque révolue où j'envisageait d'y faire carrière.

Merci donc, tout simplement. Et à demain...

Eolas:
Serviteur.

4. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:21 par Schum

Si je peux me permettre, le maximum "requérable" par le parquet était la perpétuité il me semble non ? (art 221-4 CP : Le meurtre est puni de la réclusion criminelle à perpétuité lorsqu'il est commis (...) 6° A raison de l'appartenance ou de la non-appartnance, vraie ou supposée, de la victime à une ethnie, une nation, une race, ou unereligion déterminée)

Eolas:
Dès lors que le parquet avait renoncé à demander la circonstance aggravante, il ne pouvait pas requérir plus de trente.

5. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:27 par LEF

Vous n'êtes pas un adepte de la défense de rupture et c'est tant mieux ! Ne changez surtout pas, Maître, vous êtes parfait. C'est dans les arènes que les batailles se gagnent par les hommes d'honneur.

Pour revenir à Plus belle l'assises, merci encore de tous vos efforts pédagogiques pour décortiquer tout ça et nous le commenter si bien. J'apprécie énormément la précision de vos propos, comme d'habitude.

6. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:31 par Aeterna

@Schum

Il me semble que le maximum n'était pas la perpétuité car le Parquet n'a pas retenu le crime raciste, donc ça reste un simple homicide volontaire (ou meurtre? je connais pas la terminologie adéquate).

Enfin c'est ce que j'ai crus comprendre.

7. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:45 par pilier

@4: non, justement parce que le procureur a écarté le mobile raciste.

8. Le jeudi 12 mars 2009 à 21:50 par Luc Montesquieu

En ayant regardé le documentaire, j'ai été aussi surpris que vous de voir que l'avocat de la défense avait utilisé un argument tel que l'alcool... Personnellement, j'aurais préféré contré l'argument du mépris de l'autre soulevé par le procureur en me servant opportunément de l'état de KO dans lequel se trouvait l'accusé.

En regardant le lynchage que les parties civiles ont infligé à l'accusé, je me suis posé une question : faut-il donner la parole aux parties civiles lors d'un procès aux assises ? En effet, la peine prononcée contre l'accusé n'est en aucun cas une réparation du préjudice qu'elles ont subie mais une "réparation" du préjudice qui a été infligé à la société.

Maitre, vous qui êtes un pénaliste, que pensez-vous de cela ?

Eolas:
Oui, il faut leur donner la parole : elles sont partie au procès. Ou alors il faut opter pour le modèle anglo saxon qui exclut les victimes du procès pénal. Leur parole doit être libre, au risque qu'elles en fassent n'importe quoi. Auquel cas une intervention du président pour ramener un peu de dignité dans les débats n'est pas incongrue. Cet homme va être frappé dans sa liberté. On va le priver d'un morceau de sa vie qu'il va passer entre quatre murs. On peut lui épargner cette humiliation.

9. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:03 par Bruno Kant

>avant les plaidoiries, on laisse les victimes se défouler. > ne pas s'adresser à l'accusé mais à la cour, comme il est d'usage.

@6 faut-il donner la parole aux parties civiles

Je crois que cette question ne se pose plus puisqu'on vient de voir à l'(e)télé comment se déroule un tel procès, à Lyon. Avant, on pouvait supposer que les français s'inspiraient de feuilletons télé américains. Maintenant, des victimes pourraient s'estimer lésées si elles étaient privées de cette période du procès.

10. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:04 par Greffier d'Assises

(17:24) : Ça tombe bien, première image, premier commentaire. QUEU-WAH ? Qu'est ce que c'est que ces jurés qui, alors même que les débats ne sont pas clos, consultent des pièces du dossier et d'autres remises par une partie hors du prétoire et hors la présence des avocats ? Et l'oralité des débats ? Surtout que l'album des photos d'enfance n'apporte RIEN au débat sur les faits. Il montre que la victime a été un enfant, et laisse suggérer que c'est cet enfant qu'on a assassiné. J'espère qu'il me manque un élément pour tout comprendre. M. le greffier d'assises ? Vos lumières ?

Je suis également très perplexe. Ce n'est pas le fait que les débats ne soient pas clos qui soit problématique mais le fait que les jurés consultent des pièces en dehors de l'audience, visiblement dans la salle des délibérés.

Il arrive fréquemment que l'on montre des plans et des albums photographiques aux jurés et aux parties (vue des lieux du crime, photos de la reconstitution) mais cela doit OBLIGATOIREMENT avoir lieu pendant l'audience, en vertu du principe de l'oralité des débats. Chaque partie doit pouvoir présenter des observations suite à cette présentation.

Les familles des victimes demandent souvent que l'on montre une ou deux photographies de la victime (mais pas tout un album) afin que les parties puissent visualiser la victime.

22:16) : Là encore, il manque un bout. Le président a lu la liste des questions auxquelles la cour et le jury vont répondre (qui à l'époque où il n'y avait pas d'appel a donné lieu à un très abondant contentieux).

Le président peut se dispenser de lire les questions quand celles ci sont conformes à l'acte d'accusation ; dans ce cas elles sont tenues pour lues.

Eolas:
Art. 348 du CPP. Qui s'explique par le fait que les questions résultant de la qualification, elles ont pu être débattues devant la cour d'appel (et l'étaient obligatoirement avant l'institution de l'appel criminel). Merci de vos précieuses lumières.

11. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:30 par Gascogne

J'ai également été très très surpris par les jurés regardant l'album photo en salle de délibéré, sous l'œil bienveillant du président. Je suppose que les photos avaient déjà été montrées lors des débats, et que les jurés ont souhaité les revoir. Mais tout de même, c'est très surprenant...

Eolas:
Dans ce cas, les avocats auraient dû être présents. Même au cours des délibérations : art. 347 du CPP. Je crains que nous ne soyons en présence d'une illégalité que la défense ignorait et réalisée avec une bonne conscience confondante du président.

12. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:37 par mussipont

L'examen de ces albums en dehors des débats peut il aboutir à une cassation du procès?

Eolas:
Non, nous étions en première instance. L'appel était ouvert. Le problème est que la défense ignorait vraisemblablement ce point. Le pourvoi en révision, n'est pas possible pour une telle hypothèse. Une action directe devant la CEDH, le délai de 6 mois n'étant pas expiré.

13. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:41 par Patrick KLUGMAN

Et si le quatrième larron était un avocat parisien? J'ai eu en effet le bonheur d'assister la famille ZEHAF aux côtés de l'excellentissime François SAINT-PIERRE. ET pire, je suis venu de Paris, pour ça. J'ai bravé le froid, pris le TGV et tout et tout.

Gael CANDELLA assistait Nabyl DJERBOUA, cousin de Chaib ZEHAF, et vicitime de GARCIA qui avait également fait feu sur lui et l'avait blessé. Yves SAUVEYRE quant à lui plaidait pour une des soeurs de Chaib ZEHAF.

Evidemment, nous avons tous plaidé et nos plaidoiries étaient parfaitement accordées. Gaelle CANDELLA a exploré l'inanité des différents alibis et prétextes avancés par l'accusé. Yves SAUVEYRE a repris le dossier dans son ensemble, rejouant surtout la scène du crime.

Avec FSP, nous avons développé la thèse du racisme. C'était à notre initiative que Bernard Henri LEVY est venu témoigner ainsi que Dominique SOPO, Président de SOS RACISME, ce que les spectateurs de France 2 ignorent.

Ces témoignages ont été murement réfléchis. Ils nous ont permis d'ouvrir un débat complet sur la dimension raciste du crime et plus largement sur la notion même de crime raciste.

Le soupçon pesait en effet sur cette affaire depuis l'origine, empêchait la famille de faire son deuil et empoisonnait la ville d'Oulins. Il nous appartenait de faire parfaitement la lumière sur cet aspect alors que l'ordonnance de mise en accusation avait été muette et l'instruction pour le moins bâclée.

A l'issu de ces deux témoignages, nous avons donc fait poser la question spéciale au jury pour qu'il se prononce sur la circonstance aggravante du crime à raison de l'origine de la victime.

Il doit être noté que personne, y compris parmi la défense de l'accusé ne s'est opposé à cette question tant il apparaissait essentielle qu'elle fut "purgée".

Les jurés, comme nous le verrons demain, ont finalement répondu par la négative.

Le fait d'avoir organisé ce débat et fait poser la question spéciale a été essentiel pour que la ville d'Oulins et la famille de Chaib ZEHAF, qui ont parfaitement accepté le verdict, aient le sentiment d'avoir été entendu et que justice soit rendu.

De ce point de vue, ce fut je crois une heureuse initiative.

PK, Quatrième larron, toque A 596.

Eolas:
Poser la question spéciale, sans s'imposer nécessairement vu que le dossier était vide sur ce point (et l'est resté), ne me pose pas de problème en soi. Mais à défendre une thèse sans preuve, et en y substituant des autorités morales, n'y a-t-il pas un risque de ridicule ? Car faire venir à la barre un témoin qui dit, narquois, que pour lui, dès lors que la famille pleure, la présomption d'innocence n'importe plus guère, ce n'est pas forcément très glorieux.

14. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:48 par lily

Je ne connais de la justice que ce qu'on en voit à la télé (et ce que j'en lis ici !) Mais, en entendant Garcia dire qu'il a trouvé les avocats de la défense trop sévères et injustes avec lui, je me dis qu'outre d'être scandaleux dans le principe, le délai au bout duquel intervient le procès (3 ans je crois ici) est vraiment contreproductif. Cela n'a t il pas donné aux deux parties le temps de se recroqueviller sur elles -mêmes, ou de changer et ne se reconnaissent plus comme ils étaient au moment des faits? Pour l'accusé, peut il encore se rappeller quel était vraiment son état d'esprit quand il a tué ? Aujourd'hui il est persuadé d'un enchaînement dans lequel il était quasiment passif ou abruti par l'alcool, mais peu de temps après les faits, trouverait il plus de vérité dans le mépris et la volonté de tuer que lui prêtent les avocats de la défense et le parquet ? Où au contraire croyez vous que les procès gagnent à intervenir plus tard (juste du point de vue de la capacité des parties à avoir un regard lucide sur ce qui s'est passé et sur leur capacité à écouter ce que l'autre aura à dire). Je me pose d'autant plus la question qu'une des impressions majeures que j'avais retiré d'un reportage sur un procès précédemment diffsué (et dont vous aviez parlé, l'histoire d'un homme ayant brulé dans sa voiture celui qu'il croyait être l'amant de sa femme) était ce sentiment que l'accusé était resté au fond imperméable à ce qu'avait à dire la famille et vice versa. Cela m'a beaucoup frappé car au fond je pensais que le bénéfice principal d'un procès où les faits sont entièrement reconnus était justement que chacune des deux parties avait un minimum eu accès à la vérité de l'autre à l'issue du procès. Qu'une certaine compréhension réciproque apportait une forme d'apaisement. Il faut que j'arrête de voir la vie en rose ou ça arrive parfois ?

15. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:54 par Fenotte

Je crois que la consultation des albums photo en salle de délibéré pendant la pause est une pratique destinée à éviter que les jurés et les assesseurs soient distraits par leur examen pendant les débats.

Eolas:
Ben voyons. On pourrait aussi leur faire entendre les témoins en salle des délibération, pour ne pas être distraits par les avocats de la défense ? Comment la défense peut-elle émettre des réserves ou répliquer sur des preuves présentées hors de sa présence ? L'argument du confort ne tient pas. On parle des droits de la défense.

Il m'est arrivé d'avoir à regarder les photos, et notamment celles de l'autopsie, alors que les débats avaient repris. On est alors moins concentré sur ce qui se dit dans la salle d'audience...

Ici, un album de photos de famille a manifestement été constitué pour l'occasion par les parties civiles.

Avant de le montrer aux jurés, le président a dû recueillir l'assentiment du ministère public et des conseils des parties.
Difficile de s'y opposer pour les avocats de la défense !

Eolas:
Oh que si !

16. Le jeudi 12 mars 2009 à 23:05 par Laterring

Quand il y a des circonstances aggravantes, elle font l'objet de questions spéciales

Comme l'indique l'article 350 CPP, la question n'est spéciale que si ladite circonstance aggravante n'a pas été retenue par l'acte d'accusation (sinon, ca n'est qu'une question ordinaire), mais qu'elle résulte des débats.

17. Le jeudi 12 mars 2009 à 23:41 par Lalau

@yves Notre cher confrère Eolas prend un malin plaisir à se foutre de notre gueule, pauvres gueux de province que nous sommes...ces petites provocations me font plutôt rire, nous aussi, on ne se gêne pas pour se moquer des parigots sans poils de lapin....c'est un jeu...

18. Le vendredi 13 mars 2009 à 00:17 par Hub

Je suis surpris par le commentaire du procureur à propos de la peine réclamée : "ce que j'attendrais si j'étais en soif de justice, si je venais devant la cour ... et que j'attendais que justice soit rendue".

Pourquoi le conditionnel ? Il me donne l'impression de se mettre à la place des victimes !!!???

19. Le vendredi 13 mars 2009 à 00:21 par antoine

excusez-moi de cette intrusion pour une critique qui me semble tout de même nécessaire. Pas contre vous, dont je lis comme tout le monde ici depuis un an déjà le blog avec grand plaisir et profit, je l'espère.

Mais donc, une critique: cette série est un scandale absolu.

C'est vraiment le travail bâclé de journalistes dont les méthodes transforment même un sujet intéressant, et qui mériterait infiniment mieux en un pauvre sujet de presse à sensation. Je suis révolté. Déjà par la présentation: document exceptionnel. N'importe quoi, c'est exceptionnel pour le journaliste et pour france 2, mais ils oublient de signaler (et même si tout le monde le sait, ça vaudrait le coup de le rappeler pour les spectateurs qui s'intéresseraient à la justice à cette occasion) que les audiences d'assises sont publiques et que tout citoyen qui veut se faire une idée, au moins de l'atmosphère et de la temporalité d'un procès peut aller assister à une session.

Deuxièment le temps justement alloué au sujet: 4-5 minutes par jour. Mais puisque comme vous l'avez signalé, le commentaire est défaillant, la contextualisation est défaillante, enfin rien ne va si on ne vient pas lire votre blog, on ne comprendra rien, à peu près, de ce qui se passe, le moins que la télé aurait pu rendre, c'est faire un peu sentir la temporalité du procès, l'atmosphère. Mais pour cela il aurait fallu un reportage d'au moins deux heures, voire plus, et un autre montage: tout est saucissonné, hâché. N'importe quoi, c'est particulièrement saisissant pour les plaidoieries de la défense. Un moment poignant puisque de tous les éléments que les jurés viennent d'entendre tournés et retournés dans tous les sens pendant plusieurs jours vont être réunis dans un récit, dont l'enjeu est qu'après les jurés soient saisis à nouveau du doute quant à leur intime conviction, juste avant d'aller délibérer, alors que l'accusé vient d'être accablé, éventuellement, comme ici, par les preuves à charges et le réquisitoire. J'ai vu plaider Me Anne-Guillaume Serre (que vous connaissez peut-être), et bien je peux vous dire que ça dure une heure (ou plus), et ça secoue. Alors dix secondes prises au moment où l'avocat bafouille et qui s'arrêtent au milieu d'une période, excusez-moi, mais c'est quand même un peu minable.

Troisièment, le travail d'information et de commentaire: déjà signalé: nul et archi-nul, d'où l'importance de vos posts en accompagnement. Mais quelle pitié.

Finalement, l'arrivée dans le journal. Placé après une série de faits divers tragiques, mais anecdotiques, et complaisamment relayés au moment où l'actualité sociale est brûlante. Cette position transforme un sujet sur le fonctionnement de la justice en un fait divers de plus, surtout quand le montage et les erreurs de commentaires renforcent cette impression: plus de temps pour les invectives de la famille que pour le reste dans ce quatrième épisode. Comme je le disais, je suis scandalisé.

J'apprécie vos commentaires qui éclairent bien des aspects et enseignent utilement. Mais je ne peux pas sauver ce documentaire d'une qualité journalistique proche de zéro juste qu'il vous en livre le support. bien à vous et merci encore antoine

20. Le vendredi 13 mars 2009 à 00:36 par pollicarpe

@ mussipont

On est ici en première instance et le pourvoi ne peut être émis qu'à l'épuisement des autres voies de recours. Il aurait donc fallu que l'accusé ait voulu remettre le couvert et ait fait appel. La décision d'appel aurait été susceptible de pourvoi. Mais tout cela semble peu probable. Je ne crois pas que l'accusé ait fait appel. La Chambre criminelle ne se prononcera pas sur ce point...

Et de toute façon, même s'il s'agissait d'une cour d'assise d'appel, ce serait cuit. Cette opération litigieuse est découverte lors de la diffusion d'un reportage, un à deux mois après l'instance. Or, le délai du pourvoi est très court (art. 568 CPP : 5 jours francs à compter de la signification).

Il ne reste qu'une solution : le pourvoi dans l'intérêt de la loi (art. 620 et 621 CPP). Mais il faut pour cela "un ordre formel" donné au Procureur général près la Cour de cassation par le Garde des sceaux. On peut toujours attendre...

21. Le vendredi 13 mars 2009 à 00:43 par Esurnir

C'est moi ou je le sens tres mal. L'avocat était (mais c'est normal il faut être un surhomme pour ne pas bégayer lors d'une plaidoirie) assez peu à l'aise et cela impact la pouvoir de persuasion. L'argument de l'alcool m'a laissé froid. S'attaquer au mobile raciste... Sachant que l'accusation lui a fait un sort :-/...

J'aurai axé ma défense sur le repentir de l'accusé. Le fait qu'il est démolis qu'il regrette (retenir ces phrases de regrets quelqueparts sur un papier de note). La mercie du jury est quelque part la dernière chance.

Quoique pour le convaincre d'aller en dessous de vingt cinq ans. Peut etre s'attaquer au réquisitoire du procureur ? Bon après coups de ma part c'est plutot facile de faire l'avocat de comptoir mais c'est mes meilleurs idées.

22. Le vendredi 13 mars 2009 à 01:15 par Esurnir

@antoine : Honnetement le reportage est potable. C'est un journaliste crénom di diou pas un avocat ni un réalisateur, pour un journaliste sans aide d'un avocat pour l'aider a décrypter qui a réalisé son sujet tout seul c'est plutot pas mal, les moments intéressants sont presque tous là. Les suggestions d'Eolas sont excusable (les partie civil ou l'invocation du président ?), j'aurai fais les même chois au montage.

23. Le vendredi 13 mars 2009 à 01:19 par floppy

En théorie (en cours quoi ^^) , le procureur serait censé requérir qu'une peine qu'il estime juste soit prononcée, et non pas avoir comme but la peine la plus haute possible; alors pourquoi dites vous qu'il est "fort" de sa part d'arriver à requérir une peine très élevée ?

Pourquoi le parquet sous entend-il que pour fixer cette peine, il se met à la place de ceux qui viennent "réclamer justice", i.e les victimes? alors qu'il devrait etre .. à la sienne ...

J'ai également des questions pratiques sur le meme sujet : 1. Est ce qu'il est habituel pour le parquet de requérir une peine un peu plus élevée afin que celle prononcée soit plus forte? Comme en négociation... 2. Les peines sont elles souvent proches de celles requises si les accusés sont reconnus coupables ?

24. Le vendredi 13 mars 2009 à 01:44 par antoine

@ floppy les juges sont libres dans leur décision et ne sont pas tenus aux réquisitions. Les réquisitions ne disent a priori rien (en droit, en fait, ça doit dépendre du cas) sur la peine finale. me trompé-je ?

25. Le vendredi 13 mars 2009 à 01:45 par antoine

@ esurnir vous n'êtes pas difficile, mais bon c'est votre opinion. nous divergeons, voilà tout...

26. Le vendredi 13 mars 2009 à 01:56 par Bruno Kant

@Eolas, en 15 "Comment la défense peut-elle émettre des réserves ou répliquer sur des preuves présentées hors de sa présence ?"

On lit les délibérés et les arrêts de la cour d'appel, puis on réplique, si DIEU le veut bien.

27. Le vendredi 13 mars 2009 à 02:10 par Laurentm

"Tuer un salaud est aussi illégal que tuer un saint."

Je suis assez d'accord avec vous mais les choses ne sont peut être pas aussi évidentes pour tout le monde.

On m'avait raconté que des psychologues américains avaient mené une expérience qui consistait, à partir d'une mise en scène d'un procès avec un violeur et sa victime, à demander à des sujets de jouer le rôle de juge.

Différents scénarios avaient été proposés et résultats : plus le violeur était laid, plus la condamnation était sévère, mais encore, plus la victime était laide, moins lourde était la condamnation.

28. Le vendredi 13 mars 2009 à 03:12 par Bruno Kant

@Laurentm en 27... "plus la victime était laide, moins lourde était la condamnation."

Je vous suggère de faire des recherches sur le thème du laid, de l'idole et de l'abject, de l'aversion et de l 'empathie, du repoussoir absolu et du don, vous pourriez peut être être surpris.

Il y a peu en France, un type a été condamné, il violait des femmes très âgées, ça pourrait donner une idée...

''Il tente de violer une dame de 92 ans L'Aisne Nouvelle - ‎9 mars 2009‎ Un garçon d'une vingtaine d'années était toujours recherché, vendredi, pour avoir tenté de violer une femme âgée de 92 ans à Château-Thierry. ...''

29. Le vendredi 13 mars 2009 à 03:46 par Ludovic

La défense doit dans tous les cas avoir la parole en dernier. En avant dernier, puisque c'est l'accusé qui se voit offrir la possibilité de s'exprimer juste avant la clôture des débats.

Il me semble que dans l'affaire dite du "pull-over rouge" un des éléments troublants mis en lumière par Gilles Perrault était que l'accusation avait pris la parole après la défense. Était-ce dans le cadre du droit de réplique que vous avez évoqué? Que pouvaient faire les avocats à ce moment-là?

30. Le vendredi 13 mars 2009 à 04:51 par eleonora

Quand je viens vous lire..on a l'impression d'être dans un roman et on attend le nouveau billet pour connaitre la suite....

31. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:09 par villiv

waouh ?!

Euh, Eolas, comment faites-vous ??

Même en Code Rouge je ne parviens pas à suivre le rythme des billets?.?.

Heureusement que vous ne commentez pas une audience en direct, minute par minute, voire seconde par seconde comme à la radio, cet endroit magnifique où le silence est interdit ?! sinon j'en aurai loupé plus que 3, des billets

32. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:12 par DM

@LaurentM: Il y a aussi le phénomène que les gens condamnent beaucoup plus facilement qu'ils peuvent s'identifier à la victime et s'imaginer à sa place, tandis qu'ils condamnent d'autant plus facilement que l'accusé est considéré comme "différent".

Je vous laisse imaginer la réactions des jurés d'une banlieue américaine riche et à dominante "ingénieur" (blancs/asiatiques/indiens) quand un de leurs concitoyens se fait tuer dans la rue par un voyou d'une cité voisine (noir ou chicano).

33. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:18 par Bidule

1{{3. Le jeudi 12 mars 2009 à 22:41, par Patrick KLUGMAN

Le soupçon pesait en effet sur cette affaire depuis l'origine, empêchait la famille de faire son deuil et empoisonnait la ville d'Oulins. Il nous appartenait de faire parfaitement la lumière sur cet aspect alors que l'ordonnance de mise en accusation avait été muette et l'instruction pour le moins bâclée.

PK, Quatrième larron, toque A 596}}

Très étonnant qu'un professionnel du droit entame ce couplet inepte de ce que le juridique aide à "faire son deuil"

Il s'agit par ailleurs de la ville d'OULLINS

Enfin il faut convenir qu'il était important de calmer le jeu sur cette accusation instrumentalisée par SOS Racisme en dépit de la réalité des faits

Et surtout, merci d'avoir encore une fois ridiculisé utilisé à bon escient BHL qui n'en avait pas besoin

34. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:27 par Véronique

Un vrai orateur, comme il y en a peu du côté du parquet.

euh... mais alors les autres... quelle désastre oratoire ça doit être ! Non ?

Parce que franchement, comme vous le soulignez, l'argumentation de l'avocat général -du moins, ce que le montage en laisse voir et entendre - est absurde et reste peu intelligible.

Est-ce trop demander à un avocat général d'expliquer en quoi les 25 ans minimum de prison qu'il requiert est la réponse qu'il pense la plus adaptée ?

Dans un épisode précédent l'avocat général avait calmement dit à un témoin pourquoi sa déposition dans le tribunal ne lui apparaissait pas convaincante.

Pourquoi ne pas savoir rester sobre dans un réquisitoire et pourquoi partir dans des considérations alambiquées qui, selon moi, alourdissent et affectent le sens que l'avocat général voudrait donner à ses réquisitions.

Bref, à l'issue de ce reportage exceptionnel - selon les dires de la journaliste - je ne sais pas pourquoi M. Viout demande 25 ans de prison.

Eolas:
Vous avez vu une minute du réquisitoire qui a du durer environ une heure. Il est possible que ces 59 minutes manquantes fassent corps avec la minute qu'on vous a donné et donnent un sens global à la démonstration.

35. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:27 par Bidule

(22:08) : Invoquer l'alcoolisme n'est pas un super argument de défense, même pour écarter une circonstance aggravante.

L'alcoolisation au moment des faits est ce un élément aggravant ou atténuant ?

Eolas:
Aggravant, sauf pour la conduite en état d'ivresse, ou c'est un élément constitutif.

36. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:32 par Véronique

Naturellement, merci de lire:

...mais alors les autres... quel désastre oratoire ça doit être !

37. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:41 par LEF

à PK en commentaire 13

Jolie pirouette pour enjoliver a posteriori un choix qui s'est avéré lamentable. A mon avis, vous n'avez pas assez travaillé votre "témoin" avant l'audition ; et le peu que vous avez certainement dû lui dire, il l'a probablement balayé, imbu qu'il est de sa personne.

Manipuler des armes inconnues c'est prendre le risque qu'elles vous sautent à la figure.

Avec tout ça, vous continuez à faire bonne figure. Chapeau ! Braver le froid et le TGV ce n'est rien quand on a de telles qualités.

38. Le vendredi 13 mars 2009 à 08:42 par Ysabeau

Bidule, à mon avis l'argument de l'alcool est surtout une bonne raison pour ne pas s'attarder sur le problème du racisme et probablement la raison (si je puis dire justement) fondamentale de l'acte.

Ce qui m'ennuie à la lecture des compte-rendus de presse (pas que dans cette affaire d'ailleurs), c'est que j'ai l'impression que de plus en plus on s'attend à ce que la justice venge les victimes et leur famille. Ce qui n'est évidemment pas son rôle. Et il ne faut pas trop compter sur le tribunal (dont ce n'est pas le rôle) pour guérir du traumatisme causé par l'affaire traitée.

39. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:06 par benver

@ P. KLUGMAN,

je voudrai revenir sur vos propos. Oullinois au moment des faits, oullinois au moment du procès, je me sens instrumentalisé par vos propos, je dirai même plus pris en otage.

Alors voilà, je ne sais pas ou vous êtes allez chercher le malaise qui s'est emparé de la ville d'OULLINS, je ne sais pas ou vous avez vu la quelconque trace de ce prétendu poison qui nous empoisonnait...

Les oullinois vont très bien et ne se sont jamais posé la question du crime raciste. Pour nous, cela relevait davantage d'une rixe qui a mal tournée lors d'une soirée bien arrosée. Nous étions bien sur peinés pour la famille, pour les enfants mais en aucun cas il était question de racisme. Oullins a des problèmes mais pas encore celui là donc merci de ne pas nous l'apporter. Cette stratégie pour éteindre l'incendie qui consiste à en allumer un autre..........

Vous vouliez ouvrir un débat complet sur le crime raciste mais vous avez heureusement échoué. Que ce débat ait lieu lorsqu'un militant du FN pousse un arabe dans la Seine, oui je suis d'accord. Qu'il ait lieu dans une enceinte judiciaire, oui je suis d'accord à condition que les témoins puissent aider à une qualification juridique.

Je refuse que l'oullinois que je suis soit la caution d'un combat qu'il n'avait pas réclamé.

A ce que je sache, la ville d'OULLINS ne s'était pas constituée partie civile et vous ne pouvez donc pas vous arroger le droit de parler en son nom. Sans doute ce défaut fait-il partie des excès auxquels vous consentez pour exister.

A l'avenir, contentez-vous de défendre vos clients du mieux que vous le pouvez, la justice rendu n'en sera que meilleure et la société s'en trouvera ainsi grandi. La fécondité de votre engagement militant s'en sera qu'augmentée. Que chacun reste à sa place non mais !

40. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:37 par pare queutier

le parquetier, quand même, est beaucoup plus proche de la victime (s'il la croit victime) que de l'accusé!

Cela n'empêche pas de respecter les droits de chacun et d'agir en conscience conformément à la loi.

Mais cessons cette hypocrisie qui consiste à faire croire que dans ce type de procès tout le monde est impartial jusqu'au bout des ongles.

Quant au pauvre accusé "effondré", "choqué" que la famille de la victime (à qui il a mis 5 ou 6 balles dans l'abdomen ou ailleurs, je ne parle pas forcément de l'accusé de ce procès-ci) s'adresse vertement à lui, ça me fait un peu rigoler, pardonnez-moi!

La justice est précisément instituée pour que ça sorte.

Les proches de la victime ne peuvent voir l'accusé que le jour du procès (impossible de le rencontrer lors de la garde à vue ni lors de l'instruction).

Alors, un petit coup de gueule des victimes au milieu de ces torrents verbaux compassionnels et de ces explications psychologiques rebattues, ne fait pas de mal.

Non?

41. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:43 par Bidule

''39. Le vendredi 13 mars 2009 à 09:37, par pare queutier

La justice est précisément instituée pour que ça sorte''

C'est le "théatre" des Assises, la catharsis , pas étonnant qu'on en vienne à confondre procès et thérapie ;-)

42. Le vendredi 13 mars 2009 à 10:44 par Jerome

Eolas: (qui, même libre, ne peut plus quitter les lieux)

Euh... il est libre ou pas? Car quand je suis libre, je peux généralement quitter un lieu, et il me semble vous avoir lu indiquant qu'on ne peut retenir une personne libre même quand on est juge sous peine d'être accusé de séquestration. Par quel miracle législatif une personne "libre" peut-elle être retenue comme cela, donc non libre?

43. Le vendredi 13 mars 2009 à 10:51 par Bruno Kant

@bidule, en 33 "ce couplet inepte de ce que le juridique aide à "faire son deuil"

C'est valorisant pour ces sphères, c'est vendeur.

Certains assimilent en effet le procès et tout ce qui l'entoure à une thérapie, passage obligé. Dans la pratique, on s'aperçoit que des victimes en ressortent souvent totalement déçues. Il arrive que parfois, certains puissent vider leur sac devant un accusé prostré, comme c'est le cas dans cette vidéo. Mais dans d'autres procès, par exemple lorsque l'accusé ne reconnait pas les faits (...), n'exprime aucun regret ou s'amuse avec la Cour (le procès Fourniret), des victimes s'en ressortent encore plus frustrées par les épreuves et passages imposées par le judiciaire. Il y a aussi eu d'autres procès, moins emblématiques, ou les proches de la victime sont ressorties déçues car aucun procès ne rend jamais la vie à un disparu... comme le précisait déjà Me Eolas, plus haut.

Par ailleurs, le procès serait aussi une sorte de thérapie ou de traitement des coupables. Dans l'idéal, ceux-ci reconnaissent les faits à l'audience et expient déjà leur peine lorsqu'ils arrivent au tribunal.

44. Le vendredi 13 mars 2009 à 11:57 par Etudiant en Droit

Très instructif ce procès. Moi qui n'avais personnellement assisté qu'à des procès en correctionnelle, je me rends bien compte de la différence.

Ce qui est vraiment très difficile c'est le passage où la famille vide son sac sur l'accusé. Etant personnellement un pur positiviste et légaliste ce genre d'épanchements me gène terriblement. Mais que faire? Il est impossible de dire à la famille: "Calmez vous nous ne faisons que juger des faits, nous ne considérons que la violation de la loi, votre souffrance psychologique n'est pas le problème de la justice pénale, d'ailleurs votre présence même est un problème etc...".

Je suis peut être un peu trop radical mais la partie civile ne devrait pas pouvoir prendre la parole.

45. Le vendredi 13 mars 2009 à 12:42 par thomas

Merci pour cette série d'articles, vous êtes tout bonnement passionnant ; je regrette presque de ne pas avoir étudié le droit !

Et puis sans vos articles, je n'aurais jamais vu cette émission et (pour une fois), j'aurais raté quelque chose à la télévision !

46. Le vendredi 13 mars 2009 à 12:59 par procurette

Ai-je bien lu ? Vous n'avez jamais reproché à un parquetier le contenu de ses réquisitions s'agissant du quantum réclamé Même pas l'application de la peine plancher ? Eolas, si je n'étais pas déjà mariée je demanderais votre main !

Eolas:
Notre histoire est impossible, je suis moi-même marié. Ce ne fut qu'une folie, restons-en là.

Comme ça doit être agréable pour les parquetiers que vous affrontez ! Ils n'ont pas à entendre ce type de phrase : "Mme Le Procureur a requis une peine de 3 mois d'emprisonnement avec sursis, c'est totalement disproportionné, une telle sévérité est véritablement incompréhensible; une peine de 1 à 2 mois serait plus conforme à la jurisprudence de votre tribunal et aux intérêts de mon client. Ou mieux encore, un TIG que mon client est prêt à accepter" .

Eolas:
Je ne le complimente pas non plus. Je ne rebondis JAMAIS sur les réquisitions du parquet, sauf si elles sont de relaxe ou proposent une peine qui me convient, bien sûr, auquel cas, c'est embrassons-nous Folleville, ou s'il y a un débat juridique (applicabilité d'une peine, élément constitutif de l'infraction…) aquel cas je ne commente pas, je réplique. Mon maître m'a appris que commenter les réquisitions, c'est leur donner trop d'importance et attirer sur elles l'attention du tribunal, qui si ça se trouve ne les a pas écoutées. Je propose une argumentation indépendante.

47. Le vendredi 13 mars 2009 à 13:53 par lapocompris

J'ai causé un accident de la circulation en état d'ivresse. Pour ma défense, pourrais-je l'invoquer comme circonstance atténuante : "étant soûl comme une grive, je n'avait plus de discernement pour savoir qu'il était dangereux de prendre le volant" ?

Eolas:
Absolument. Et si vous assassinez vos parents, n'oubliez pas de plaider le fait que vous êtes orphelin comme circonstance atténuante.

48. Le vendredi 13 mars 2009 à 13:54 par Holmes

Sur la liste des 54... Patrick KLUGMAN (58) : "Il n'avait à l'évidence rien à gagner. Surtout que, la veille...il a dû repartir précipitamment vers Paris car il venait d'avoir un petit fils..." Ce genre de sophisme (appel aux sentiments) est-il de bon aloi ?

49. Le vendredi 13 mars 2009 à 16:10 par bump

En tout cas le recours à BHL c'est assez pitoyable et sans doute n'a pas abusé grand monde. Je ne sais si tous les avocats des parties civiles ont approuvé la démarche...

Mais est-ce vraiment P. KLUGMAN qui écorche comme ça le nom de son confrère SAUVAYRE ?

50. Le vendredi 13 mars 2009 à 16:15 par Alexandre-M BRAUN

Les débats sur une émission de télévision comme la mini-série de France 2 sont passionnants à condition de rester dans leurs limites : les questions sur l’objet audiovisuel et non sur le procès en lui-même.

En effet, rendre compte d’un procès d’assises en 5 X 5 Minutes, au-delà de simples impressions d’audiences, me semble impossible.

Pendant la préparation du diptyque Avocats d’urgence – Défendre à tout prix (les documentaires de France 3 qui avaient fait l’objet de débats ici-même), le réalisateur avait envisagé de suivre une session d’assises, avant d’y renoncer notamment par ce qu’il estimait que le format de 2 X 90 Minutes ne lui permettait pas de rendre compte de telles audiences dans de bonnes conditions.

C’est pourquoi je trouve la condamnation unanime de l’intervention de BHL très sévère.

Il me semble que la Partie Civile, qui a fait poser la question du mobile raciste, était parfaitement dans son rôle en citant en qualité d’amicus curiae un philosophe certes très impopulaire – ce qui est plutôt bon signe sur le fond – mais dont personne ne conteste le talent, et qui était l’auteur d’une tribune portant précisément sur cette affaire.

La Cour n’a pas été convaincue. Dont acte. La citation de témoin est toujours risquée et la disqualifier a posteriori est aisé.

51. Le vendredi 13 mars 2009 à 17:03 par Shahine

@Jerome, en 42 Euh... il est libre ou pas? Car quand je suis libre, je peux généralement quitter un lieu, et il me semble vous avoir lu indiquant qu'on ne peut retenir une personne libre même quand on est juge sous peine d'être accusé de séquestration. Par quel miracle législatif une personne "libre" peut-elle être retenue comme cela, donc non libre? Article 354 du CPP

52. Le vendredi 13 mars 2009 à 18:25 par Greffier d'Assises

L'article 354 du Code de procédure pénale indique que :

"Le président fait retirer l'accusé de la salle d'audience. Si l'accusé est libre, il lui enjoint de ne pas quitter le palais de justice pendant la durée du délibéré, en indiquant, le cas échéant, le ou les locaux dans lesquels il doit demeurer, et invite le chef du service d'ordre à veiller au respect de cette injonction."

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