Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Est-ce abusif de demander la liberté ?

Je veux croire qu'il y a une erreur. Un malentendu. Un élément que j'ignore. J'espère de tout cœur que Rue 89 se trompe. Car sinon, le scandale est à hurler de rage.

Rue 89 rapporte que le premier président[1] de la cour d'appel de Toulouse a condamné un étranger qui faisait appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prolongé son placement en rétention administrative.

Rappelons ici le processus de la reconduite à la frontière d'un étranger en situation irrégulière.

L'étranger est interpellé par la police, soit lors d'un contrôle d'identité, soit à l'occasion d'une enquête sur une infraction. La police constate sa situation irrégulière (il ne peut présenter de titre de séjour), et après une vérification sur le FPR (Fichier des Personnes Recherchées) pour s'assurer qu'il ne fait pas déjà l'objet d'une décision exécutoire d'éloignement, est placé en garde à vue pour séjour irrégulier. Le procureur valide la mesure, sachant qu'il ne verra jamais l'étranger. Il s'agit juste de laisser le temps à la préfecture soit de prendre un arrêté de reconduite à la frontière, soit de retrouver l'acte d'éloignement en vigueur. Quand tout est prêt, la préfecture (qu'on appelle pour la circonstance "le pôle de compétence", pour ne pas dire qu'il y a collaboration entre les autorités administratives et judiciaires, en France, c'est sale) notifie l'acte si besoin et prend un arrêté de placement en centre de rétention administrative pour 48 heures[2]. Le parquet met fin à la garde à vue et classe sans suite la procédure pour séjour irrégulier.

Au bout de 48 heures, la prolongation du placement, qui ne pourra avoir lieu qu'en Centre de Rétention Administrative (CRA), ne peut être ordonné que par un juge judiciaire, gardien des libertés individuelles. C'est la Constitution. Ce rôle est dévolu depuis 2001 au juge des libertés et de la détention. Ce sont les audiences dites « 35bis » du numéro de l'article de l'ordonnance du 2 novembre 1945 qui prévoyait cette procédure. Aujourd'hui, c'est devenu l'article L.551-1 du CESEDA mais le nom 35bis est resté (les panneaux des tribunaux n'ont pas été changés d'ailleurs). Cette prolongation est d'une durée maximale de 15 jours et peut être renouvelée une fois, pour un total de 32 jours de privation de liberté.

Le rôle du JLD est de vérifier la légalité de la procédure, car il y a privation de liberté par l'administration d'une personne qui n'est pas condamnée ni même poursuivie, puis d'envisager le cas échéant si l'étranger ne peut pas faire, “ exceptionnellement ” dit la loi, l'objet d'une assignation à résidence plutôt qu'être enfermée dans un CRA. Oui, quand on est étranger, la liberté est l'exception, même si on n'est ni condamné ni même poursuivi. Le Conseil constitutionnel, pour valider ce dispositif, a exigé que l'étranger puisse même à tout moment saisir le JLD (considérant 66) pour demander qu'il soit mis fin à sa rétention, précisant que le juge exerce sur cette mesure un contrôle d'opportunité en droit et en fait. C'est peu dire que ce contrôle d'opportunité n'est pas mené avec un grand enthousiasme par les JLD. À leur décharge, ils sont rarement saisis de la question par les avocats. Mais tout comme une personne en détention provisoire peut demander à tout moment sa remise en liberté, l'étranger en rétention doit pouvoir contester la mesure dont il fait l'objet.

Dans notre affaire, l'étranger a semble-t-il contesté devant le JLD la légalité de la procédure au stade de la garde à vue : son droit à l'assistance d'un avocat ne lui aurait pas été correctement notifié. S'il est fondé, c'est un moyen de nature à annuler toute la procédure, et à conduire à sa remise en liberté immédiate. Le JLD l'a estimé non fondé et a ordonné la prolongation de la détention.

L'étranger peut faire appel de cette décision dans les 24 heures (même le dimanche, même le jour de noël, c'est 24 heures et pas une minute de plus) par une requête, écrite, en français, et qui doit être motivée, c'est à dire expliquer les raisons de cet appel. L'appel est alors jugé par le premier président de la cour d'appel (PPCA) dans les 48 heures (art. L. 552-9 du CESEDA). Pour les mêmes raisons qu'expliquées plus haut, cette audience est encore appelée « 22ter » par les avocats et magistrats.

Mais l'étrangeté de cette procédure est que, même si l'intéressé est privé de liberté, arrivé menotté et escorté à l'audience, et que tous les débats portent sur des articles du code de procédure pénale, cette procédure est de nature civile. C'est ce qu'a jugé la cour de cassation. On peut la comprendre : l'étranger n'est pas accusé d'un quelconque délit. La conséquence est que, hors des règles établies par le CESEDA, c'est le Code de procédure civile qui s'applique, et la première chambre civile de la Cour de cassation qui est compétente pour les pourvois.

Or dans le code de procédure civile, il y a un article 32-1, qui dispose ce qui suit :

Celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 3 000 euros, sans préjudice des dommages-intérêts qui seraient réclamés.

Notre tunisien toulousain a donc fait appel, estimant que le JLD s'est trompé en rejetant la nullité qu'il avait soulevée. Le PPCA de Toulouse va rejeter son appel ,comme ça arrive presque à chaque fois, à Toulouse comme à Paris. Mais emporté par la fougue, le premier président va en outre estimé que son appel était « mal fondé, particulièrement dilatoire, abusif et processif (oui, c'est français)». Et de prononcer une amende civile de 300 euros à la charge de notre tunisien indésirable.

Si c'est vrai, c'est purement et simplement scandaleux.

Cet homme est privé de liberté. Il estime que la procédure qui a conduit à cette privation de liberté est illégale. Admettons, pour la discussion, qu'il se trompe, voire qu'il mente : il sait que la police lui a correctement notifié son droit à voir un avocat, d'ailleurs, il a eu cette entrevue. Peu importe pour son droit à agir. Il a le droit de soumettre cette prétention à un juge, qui la rejettera, et de faire appel de cette décision, pour qu'un juge plus élevé en expérience lui confirme que sa prétention ne tient pas. Ce n'est pas une lubie de ma part. C'est l'article 5§4 de la Convention européenne des droits de l'homme :

4. Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale.

Qui se combine à merveille avec l'article 13 de la même convention :

Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles.

Or l'appel fait partie de ce droit à un recours effectif.

Comment peut-on oser dire qu'un homme qui conteste la privation de liberté dont il fait l'objet et demande à recouvrer celle-ci, qui est l'état naturel de l'homme, faut-il le rappeler, pourrait-il être abusif à le faire ?

Que son recours soit mal fondé, c'est au juge de le dire et d'en tirer la seule conséquence légale : le rejet de la prétention. L'article 32-1 du code de procédure civile ne prévoit pas d'amende pour une demande mal fondée : elle doit être dilatoire ou abusive. Et en l'espèce, elle ne peut être abusive, on l'a vu, sa nature s'y oppose. Quant à être dilatoire, c'est oublier que le recours devant le PPCA n'est pas suspensif : art. L. 552-10 du CESEDA. Comment un recours non suspensif pourrait-il être dilatoire, puisqu'il n'empêche pas la préfecture de procéder à l'éloignement ?

On voit qu'en droit, cette décision ne tient pas. Mais en plus, elle est révoltante : sanctionner celui qui dit « Libérez-moi ! » à celui qui en a le pouvoir, c'est une trahison de l'office du juge.

J'espère que j'ignore un point crucial de cette affaire, et que je me trompe. Sinon, je suis outré au-delà des mots.

Notes

[1] Je ne sais pas qui est l'auteur de cette décision. Je ne vise donc pas expressément le premier président Carrié Nunez : le premier président de la cour d'appel (PPCA) est une juridiction, généralement tenue par un conseiller délégué à cette fin. Il est compétent pour les appels des affaires de rétention des étrangers, et de référé détention, notamment. C'est cette juridiction que je désigne en parlant du premier président.

[2] Ce premier placement peut être fait en Local de Rétention (LRA), mais l'étranger ne peut y passer plus de 48 heures, ce local n'étant pas équipé de douches, par exemple, uniquement des couchettes et une salle commune.

Commentaires

1. Le jeudi 2 avril 2009 à 17:17 par lapocompris

Il a déjà été expulsé, sera-t-il obligé de revenir en France pour payer les 300 euros ?

2. Le jeudi 2 avril 2009 à 17:20 par Vinc

Que lis-je ? Notre Eolas qui se fend d'un message indigné avant même d'avoir eu sous les yeux la décision qui suscite son indignation ? Mais c'est du mauvais journalisme !

Eolas:
Les avocats s'indignent toujours SOUS TOUTES RÉSERVES (ET CE SERA JUSTICE !).

3. Le jeudi 2 avril 2009 à 17:21 par sLeAbO

Mais Eolas ne se réclame pas d'être journaliste...

4. Le jeudi 2 avril 2009 à 17:37 par Thinklessridemore

Pour le moins, c'est effectivement révoltant !

Mais maintenant, que peut-il être fait pour reconnaître cet "abus" (terme juridiquement peu approprié, je vous l’accorde, mais qui me semble être, en pratique, le plus approprié)? Il faut espérer que ce genre de décisions ne devienne pas une nouvelle mode.

5. Le jeudi 2 avril 2009 à 17:37 par troun de l'air

herr Eolas

Haben zie la décision querellée, ses tenures et ses aboutissures?

Si non, comment la commenter?

Eolas:
Comme je viens de le faire. En soulignant les réserves que l'on a. Pour le reste, une audience 22ter porte sur un débat très restreint et encadré. Je doute que l'ordonnance puisse démontrer qu'en effet, ce monsieur, privé de liberté contre son gré, abuse à demander sa libération, même à quelques jours du départ.

6. Le jeudi 2 avril 2009 à 17:53 par rodrigo31

Si je ne m'abuse, le 1er président de la CA de Toulouse est M. Jacques Nunez... et son procureur général M. Patrice Davost

7. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:24 par Sursis à statuer

La liberté est l'état naturel de l'homme ? Audacieuse affirmation. En tous cas, on dirait pas à les (nous) regarder par exemple dans le métro ou dans des boîtes en fer à roulettes bloquées dans des embouteillages même pas judiciaires...

8. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:27 par ceriselibertaire

Le délire de la chasse au clandestin est partout (Justice, police, éducation nationale, ANPE, employeurs, hopitaux). Partout on rencontre des agents publics qui veulent jouer leur rôle dans ce grand barnum.

9. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:32 par WTF

Aujourd'hui, grâce à Danièle Lochak, à la fac on a eu droit à l'exposer de la politique européenne sur l'immigration et le droit d'asile, déjà c'était révoltant ... Et puis cet article !! çà craint ...

10. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:34 par orochimaru

Ah bon ? Moi, je croyais que le Droit d'appel n'était pas garantit par la CEDH.

11. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:38 par Minerva

Sauf erreur de ma part, le PP de Toulouse c'est Monsieur NUNEZ... simple erreur matérielle sans doute!

12. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:38 par orochimaru

Article n° 2 du Protocole n° 7 à la Convention européenne des droits de l'homme : « 1. Toute personne déclarée coupable d'une infraction pénale par un tribunal a le droit de faire examiner par une juridiction supérieure la déclaration de culpabilité ou la condamnation. L'exercice de ce droit, y compris les motifs pour lesquels il peut être exercé, sont régis par la loi. 2. Ce droit peut faire l'objet d'exceptions pour des infractions mineures telles qu'elles sont définies par la loi ou lorsque l'intéressé a été jugé en première instance par la plus haute juridiction ou a été déclaré coupable et condamné à la suite d'un recours contre son acquittement. »

13. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:38 par twf

danièle lochak, la militante gisti ou la professeur de droit ?

14. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:40 par ARA

en reconduite à la frontière, je ne connais pas de précédent où un juge de la reconduite aurait infliger une amende pour recours abusif. C'est effectivement très sévère.

15. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:41 par Elisa

C'est beau de voir que maitre Eolas reste capable d'être surpris et de s'indigner.

Alors qu'il est pourtant évident que la stratégie mise en place depuis des années, mais avec une très forte accentuation depuis 2007, vise à intilmider/expulser tout étranger, ou ce qui y ressemble, de préférence au facies. Et tous les moyens sont permis (pas juridiquement, mais dans les faits c'est le cas). Ce qui est clairement couronné de succès, puisque même Amnesty international se retrouve encore à faire un rapport sur nous.

Ah, la France lumière du monde ... il va devenir de plus en plus difficile de voyager à l'étranger sans prendre de quolibets.

16. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:42 par WTF

militante GISTI, c'était une conférence !

17. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:45 par charlie blogo

@elisa: oui, en afghanistan et au soudan, je suis sûr que vous ne recevrez que des quolibets...

18. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:52 par twf

@wtf: d'aucun dirait qu'il n'y a guère de différence, d'aucun seulement

19. Le jeudi 2 avril 2009 à 18:57 par benver

Et là encore, il n'est qu'en centre de rétention mais pour ceux qui sont incarcérés, c'est encore pire...

On peut la comprendre : l'étranger n'est pas accusé d'un quelconque délit.

Et qu'en est-il s'il est pris alors qu'il est sous le coup d'un arrêté d'expulsions ? L'audience devient-elle pénale ou demeure-t-elle une audience civile ?

Eolas:
Civile. Un AE est une mesure administrative et en aucun cas une peine (elle est décidée par le préfet, autrefois le ministre de l'intérieur).

20. Le jeudi 2 avril 2009 à 19:01 par WTF

@twf : Il est vrai que les professeurs d'université jouissent (encore) de leur indépendance donc d'aucun a en partie raison ... pour l'instant !

21. Le jeudi 2 avril 2009 à 19:01 par Bambi

Mais si je vais au bout de votre raisonnement l'article 32-1 du CPC ne pourrait jamais s'appliquer ? Si le fait d'user de son droit agir en justice de façon abusive, c'est à dire lorsque ce droit a été utilisé avec mauvaise foi ou malice voire avec une légéreté blâmable équipollente au dol, ne peut s'appliquer lorsqu'il s'agit d'une demande tenant à s'opposer à une mesure privative de liberté pourquoi en serait il autrement lorsque d'autres libertés fondamentales sont en jeu ? Par exemple : j'abuse de mon droit d'agir en justice pour revendiquer la propriété d'une chose (droit de propriété) que je sais pertinemment ne pas m'appartenir. N'y aurait il pas là un nivellement entre les différentes libertés fondamentales ?

22. Le jeudi 2 avril 2009 à 19:01 par Zaf

le juge judiciaire gardien des libertés publiques (art 66) , on nous aurait menti ? heureusement que c'est le juge administratif qui juge la légalité des mesures d'éloignement...

23. Le jeudi 2 avril 2009 à 19:30 par modeste concours

"Va estimer", ou "a estimé", dans la phrase s'achevant par "(oui, c'est français)". Cordialement...'

24. Le jeudi 2 avril 2009 à 19:50 par bernadic

la procédure d'amende civile serait-elle inapplicable aux étrangers?

La loi pèserait-elle avec sévérité sur les seuls Français?

Quelle discrimination, à l'envers!!!

25. Le jeudi 2 avril 2009 à 19:51 par eudes

charlie blogo :

> @elisa: oui, en afghanistan et au soudan, je suis sûr que vous ne recevrez que des quolibets...

Il existe certainement des régimes pires que le régime actuel en France, mais en j'aurais préféré qu'on compare la France aux pays scandinaves par exemple.

Oui, la France, "pays des droits de l'homme", mérite des quolibets.

26. Le jeudi 2 avril 2009 à 20:06 par jj@www.maitre-eolas.fr

voilà qui laisse songeur. En vous lisant on se dit qu'en matière de justice la France a des réserves de croissances.

Enlevez moi cette paille, qu'on puisse utiliser le dentier.

27. Le jeudi 2 avril 2009 à 20:20 par Zoucti

Comme le souligne le message 10 et 12, le droit au recours effectif de la CEDH s'entend d'un droit au recours au juge, pas d'un droit à un recours. C'est ainsi que le système anglo-saxon, avec la cautio judicatum solvi, frais parfois exorbitant pour faire appel, est conforme à la CEDH. Car, si l'on considère comme fondamental le droit au recours contre un jugement, ne fraudrait-il pas de nouveau rendre fondamental le recours contre l'arrêt de recours... On s'en sort plus.

Plus généralement, le problème est que la première instance ne sert à rien si l'on peut faire appel sans préjudice. Tout au plus est-ce une mesure provisoire. Un appel inutile est une perte financière et un encombrement supplémentaire dont les cours d'appel se passeraient bien... L'amende est une technique efficace et respecteuse des liberté pour limiter ces appel.

28. Le jeudi 2 avril 2009 à 20:23 par henriparisien

@Bambi, votre remarque est intéressante, je la recopie :

Par exemple : j'abuse de mon droit d'agir en justice pour revendiquer la propriété d'une chose (droit de propriété) que je sais pertinemment ne pas m'appartenir. N'y aurait il pas là un nivellement entre les différentes libertés fondamentales ?

Il me semble qu’il y a une différence de nature. Si vous agissez en justice sur un truc de propriété (au civil) c’est contre un individu qui a les mêmes droits que vous. Dans le cas cité, on a un individu contre la société. Qui dans ce cas de figure – en jugeant la procédure abusive – est à la fois juge et partie.

Mais bon, je ne suis pas juriste, je dis surement n’importe quoi.

29. Le jeudi 2 avril 2009 à 20:44 par Tapioca

Le commentaire 24 est curieux puisque ce sont bien les termes "dilatoire" et "abusif" qui sont contestés et non le fait que cette amende civile frappe un étranger.

Quant au n°12, je ne suis pas versé dans les arcanes de l'exégèse des textes de loi mais il me semble bien que le point 1 est inopportun puisque la personne qui a fait appel n'a pas été déclaré coupable d'une infraction pénale par un tribunal et que le point 2, dont le début a été obligeamment mit en gras, ne s'applique pas non plus puisqu'il introduit une exception fondée sur l'aspect mineur de l'infraction dans le cadre, là aussi, d'une condamnation qui rappelons le n'existe pas dans le cas qui nous préoccupe.

Je suis d'ailleurs tellement peu habitué au sujet que mes cheveux se dressent sur ma tête à l'idée que l'administration peut priver de liberté qui que ce soit par simple décision et que le juge n'intervient, sur demande, que pour une éventuelle libération et non pour juger la pertinence de l'enfermement. Je commence à comprendre certains parallèles effectués par des esprits chagrins avec certaines périodes nauséabondes de notre histoire au vue de la collaboration entre les instances juridiques et administratives. Mais je me rassure car il est possible de faire appel ... même si ce n'est pas donné visiblement.

30. Le jeudi 2 avril 2009 à 21:15 par Guerandal

- " L'étranger peut faire appel de cette décision dans les 24 heures (même le dimanche, même le jour de noël, c'est 24 heures et pas une minute de plus) par une requête, écrite, en français, et qui doit être motivée, c'est à dire expliquer les raisons de cet appel. "

Comment fait-on pratiquement pour saisir une juridiction dont les bureaux sont, par principe, fermés le soir, la nuit, le dimanche etc ?

31. Le jeudi 2 avril 2009 à 21:17 par André Lavigne

Merci pour ce papier, monsieur Eloas. Je suis heureux de lire ces éclaircissements sous votre plume. Bien entendu, ces hommes et ces femmes doivent être traités avec dignité, et je serai le premier à m'outrer si tel n'était pas le cas. Bien entendu ils ont droit à un procès équitable, c'est la base de notre société. Mais s'il est reconnu qu'ils n'ont pas vocation à rester sur le sol national (qu'ils ont pour la plupart pénétré illégalement) comment ne pas en effet se scandaliser si l'une de ces personnes abuse des procédures pour retarder son départ ? La justice coûte cher au contribuable qui est aussi un électeur, il est bon de rappeler qu'elle ne peut être saisie à tout bout de champ. Une telle situation serait en effet intolérable et scandaleuse, et je vous remercie encore une fois sincèrement pour votre science (je ne savais pas que la loi punissait ceux qui saisissent exagérément la justice).

32. Le jeudi 2 avril 2009 à 21:34 par Tapioca

Bonjour M.Lavigne,

Qu'entendez-vous par abuser des procédures pour retarder son départ ? L'abus, a ce que j'ai compris, n'est pas caractérisé par les arguments fournis à l'appui de la demande mais par la demande elle même. De ce point de vue, comment abuser d'un droit à demander la liberté dès lors que l'on a pas été condamné ? Comment trier le bon grain de l'ivraie si c'est la demande elle même qui est la faute ?

Pour le reste, je pense que vous pouvez dors et déjà vous outrer, et vous ne serez pas le premier, car il ne me semble pas que les conditions de rétention soient particulièrement dignes. Par exemple, les contribuables que nous sommes peuvent sûrement offrir mieux que 48h sans douche, non ?

33. Le jeudi 2 avril 2009 à 21:41 par Ti

Cher Maître,

Il y a eu des précédents. Mais la Cour (de Cassation) veille.... Cour de cassation chambre civile 1 Audience publique du mardi 31 mai 2005 N° de pourvoi: 04-50032 Non publié au bulletin Cassation partielle sans renvoi

Président : M. PLUYETTE conseiller, président

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu que M. X..., de nationalité camerounaise, a été maintenu dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire le 5 février 2004, par décision du préfet de la Haute-Vienne ;

que, par ordonnance en date du 6 février 2004, le juge des libertés et de la détention a ordonné la prolongation du maintien en rétention de l'intéressé ;

Sur le deuxième moyen, qui est préalable :

Attendu, selon l'ordonnance attaquée que M. X..., dont le maintien en rétention avait été ordonné par décision du président d'un tribunal de grande instance le 6 février 2004, en a fait appel le 9 février suivant ;

Attendu qu'il est fait grief à cette ordonnance d'avoir, en violation des articles 640 et 642 du Code de procédure civile, déclaré l'appel irrecevable au motif qu'il avait été formé plus de 24 heures après la notification de la décision déférée ;

Mais attendu, d'abord, que conformément à l'article 9 du décret du 12 novembre 1991, alors applicable, pris en application de l'article 35 bis de l'ordonnance du 2 novembre 1945, l'appel doit être formé par déclaration au greffe du tribunal de grande instance ou de la cour d'appel ;

Et attendu, ensuite, qu'en application des dispositions de l'article 18 du même décret seuls les délais prévus aux articles 11, 12 et 16 sont calculés et prorogés conformément aux dispositions des articles 640 et 642 du nouveau Code de procédure civile ; qu'ainsi est exclue toute prorogation du délai d'appel prévu par l' article 8 du décret précité ;

Sur le sixième moyen :

Attendu qu'il est encore fait grief à l'ordonnance attaquée d'avoir, en violation des articles 640 et 642 du Code de procédure civile, dit que copie de cette décision serait transmise au bureau d'aide juridictionnelle aux fins d'application éventuelle des dispositions des articles 7, alinéa 1, et 50, 3 , de la loi du 10 juillet 1991 en violation des articles 14,16 et 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la décision de transmission d'une copie de l'ordonnance au bureau d'aide juridictionnelle est une simple mesure d'administration judiciaire, qui n'a pas à être motivée et est insusceptible d'être contestée par voie de recours ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le cinquième moyen :

Vu les articles 455 et 559 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu qu'en condamnant M. X... à une amende civile de 300 euros sans motiver sa décision et alors que l'exercice du droit d'appel sur le maintien en rétention ne révélait, en l'espèce, pas de caractère abusif, la cour d'appel a violé les articles susvisés ;

Et attendu qu'il y a lieu de faire application des dispositions de l'article 627 du nouveau Code de procédure civile, la cassation n'impliquant pas qu'il soit à nouveau statué sur ce point ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu d'examiner les premier, troisième et quatrième moyens du pourvoi :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, en ses seules dispositions relatives à la condamnation à une amende civile, l'ordonnance rendue le 9 février 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un mai deux mille cinq.

-

Décision attaquée : premier président de la cour d'appel de Limoges du 9 février 2004 Cour de cassation chambre civile 2 Audience publique du jeudi 7 octobre 2004 N° de pourvoi: 03-50114 Publié au bulletin Cassation partielle sans renvoi.

M. Dintilhac, président M. Grignon Dumoulin., conseiller rapporteur Premier avocat général : M. Benmakhlouf., avocat général la SCP Parmentier et Didier., avocat(s)

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur le premier moyen qui ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Sur le second moyen :

Vu l'article 559 du nouveau Code de procédure civile ;

Attendu, selon l'ordonnance attaquée, rendue par le premier président d'une cour d'appel que Mme X... Y..., de nationalité nigérianne, a été l'objet, le 27 novembre 2003, d'une décision de refus d'entrée sur le territoire français et de maintien en zone d'attente ; que son maintien a été renouvelé le 29 novembre suivant ; que par ordonnance en date du 30 novembre 2003, le juge des libertés et de la détention a autorisé son maintien en zone d'attente pour une durée de huit jours ; que Mme Y... a relevé appel de cette décision ;

Attendu que pour condamner Mme X... Y... à payer une amende civile sur le fondement du texte susvisé, pour appel abusif, l'ordonnance retient que l'intéressée a poursuivi en cause d'appel une procédure sur le "mal fondé" de laquelle elle était suffisamment éclairée par les motifs de l'ordonnance attaquée ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'exercice du droit d'appel sur le maintien en zone d'attente ne revêtait, en l'espèce, aucun caractère abusif, le premier président a violé le texte susvisé ;

Et vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, seulement en ce qu'elle a condamné Mme X... Y... à payer une amende civile, l'ordonnance rendue le 3 décembre 2003, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Dit que sur les diligences du Procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'ordonnance partiellement cassée ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept octobre deux mille quatre.

--

Publication : Bulletin 2004 II N° 438 p. 372

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, du 3 décembre 2003

Titrages et résumés : APPEL CIVIL - Exercice abusif - Amende - Condamnation - Exclusion - Cas. Un étranger ayant relevé appel d'une ordonnance ayant autorisé son maintien en zone d'attente, viole l'article 559 du nouveau Code de procédure civile le premier président qui, pour le condamner au paiement d'une amende civile, retient que l'intéressé a poursuivi en cause d'appel une procédure sur " le mal fondé " de laquelle il était suffisamment éclairé par les motifs de l'ordonnance attaquée, alors que l'exercice du droit d'appel sur le maintien en zone d'attente ne revêtait, en l'espèce, aucun caractère abusif.

AMENDE - Amende civile - Procédure abusive - Caractérisation - Défaut - Cas ETRANGER - Entrée en France - Maintien en zone d'attente - Saisine du juge - Ordonnance statuant sur l'une des mesures énumérées à l'article 35 quater de l'ordonnance du 2 novembre 1945 - Appel - Droit d'appel - Exercice - Portée

Textes appliqués : Nouveau Code de procédure civile 559

34. Le jeudi 2 avril 2009 à 21:48 par Cimon

Heu... Le principe du double degré de juridiction, c'est au pénal seulement, non ?

35. Le jeudi 2 avril 2009 à 22:01 par Nepenthes

Malheureusement, ce que rue89 a mis en exergue semble avéré ; en tout cas, les collectifs d'associations, dont la Cimade, qui suivent ces questions de pres et en général avec compétence relaient également l'information, suivis par le syndicat des avocat et le syndicat de la magistrature http://www.gisti.org/spip.php?article1411

36. Le jeudi 2 avril 2009 à 22:26 par toots

M. Lavigne,

D'une part, il me semble que "ne pas avoir vocation à rester sur le sol français" ne soit pas exactement le genre de décision qui porte à jugement. Ce que je veux dire, c'est que, comme précisé dans l'article, il n'y a aucun délit qui soit reproché à la personne, mais simplement une situation administrativement irrégulière.

D'autre part, il me semble que le sens du raisonnement proposé est de dire qu'un recours, dans le cas d'un privation de liberté, ne constitue jamais un abus.

37. Le jeudi 2 avril 2009 à 22:30 par Triskael

@ eolas

Les jugements ne sont-ils pas normalement publiés et consultables par tout le monde ? Si oui, on peut donc avoir accès à ce jugement en appel et vérifier les dires de Rue89 ?...

38. Le jeudi 2 avril 2009 à 22:59 par marie

@32 à Ti Monsieur, Je suis une vraie mekeskidi, s'il vous plaît expliquez moi : elle a fait quoi la cour de Cassation dans les cas que vous citez ? Je n'arrive pas à comprendre. Merci d'avance

39. Le jeudi 2 avril 2009 à 23:09 par didier specq

@Tapioca

A ceux qui, mécaniquement, s'indignent que la France, pays des droits de l'homme, soit en réalité abominable pour les étrangers en situation irrégulière, je voudrais leur dire qu'ils font une petite erreur d'analyse qui peut entraîner de grandes conséquences.

Eolas explique très bien, au début de son billet, la procédure suivie en France. L'étranger est en situation irrégulière, c'est un fait, puisqu'il ne peut présenter un permis de séjour. On décide de NE PAS LE POURSUIVRE pour ce délit pourtant incontournable. On CLASSE SANS SUITE et on place l'étranger dans un centre de rétention.

Au bout de deux jours, si l'on n'a pas réussi à expulser l'étranger vers son pays d'origine (c'est rarement le cas puisque l'étranger n'a pas de papier et aucun pays ne reprend "son" étranger comme ça, directement, sans papier), c'est la préfecture (procédure dite "35 bis") qui doit demander la prolongation de la durée de rétention qui est de 32 jours maximum. On lui fournit d'ailleurs un avocat payé à l'aide légale pour tenter de "casser" son interpellation et le remettre en liberté.

Au bout de ces 32 jours, si l'étranger n'est toujours pas expulsé, on le remet dehors sans autre forme de procès.

Ceux qui mécaniquement crachent sur la procédure française ne savent généralement pas que la durée de rétention en France est la plus COURTE (à l'exception de Malte où c'est 32 jours aussi) en Europe. La plus COURTE généralement de très loin! A tel point que la droite européenne veut "harmoniser" la durée de rétention à 18 mois et que la gauche européenne (minoritaire) veut l'harmoniser à 6 mois.

C'est la réalité: la gauche européenne veut être SIX fois plus répressive sur la durée de rétention que l'abominable France présidée par Sarkozy!

C'est pour cette raison, à mon avis, qu'il faut défendre le droit des étrangers à faire appel des mesures de rétention et condamner, comme le fait Eolas, ceux qui voudraient leur coller des amendes pour procédures abusives.

Il faut défendre, dans la lettre comme dans l'esprit, l'exception française concernant la durée de rétention. Une exception française qui n'a rien à voir avec "les périodes nauséabondes de notre histoire"... Votre grand-mère ne vous a jamais raconté l'histoire de ceux qui crient sans cesse au loup et qui ne sont plus écoutés quand le loup arrive vraiment?

40. Le jeudi 2 avril 2009 à 23:19 par Yékri

Merci Maître, J'ai lu cet article ce midi (heure Martinique) sur Rue89 et j'ai hurlé. Puis j'ai pensé que Maître Eolas allait hurler plus fort encore. J'attendais votre billet, alors simplement merci.

41. Le jeudi 2 avril 2009 à 23:23 par Marie-Christine BLIN

Jean(Claude Carrié n'est plus PP de la CA de TLS depuis le 1er juillet 2007 en application du statut de la magistrature. C'est Jacques Nunez qui est PP de la CA de TLS en ce moment. L'info est accessible : http://www.legifrance.gouv.fr/initRechExpMesuresNominatives.do

42. Le jeudi 2 avril 2009 à 23:39 par Bavard

Un petit billet sur le rapport d Amnesty international..?

ou sur comment obtenir justice suite a des delits ou des crimes commis par un ou plusieurs agents de police..?

Merci d avance.

43. Le jeudi 2 avril 2009 à 23:57 par Tapioca

Bonsoir M.Specq,

Vous me traitez d'esprit chagrin par la bande mais je n'en suis pas. Il n'en demeure pas moins qu'il est possible de maintenir en captivité quelqu'un 32 jours sur simple décision administrative, avec appel certes, mais la norme n'est pas à une étude de la mise en rétention elle est à une étude éventuelle de la libération. Il n'y avait pas indignation, mais surprise et inquiétude à cette découverte. A moins que vos cheveux ne se dressent en brosse sous une indignation brutale, les miens ne procèdent pas ainsi.

Sinon, je perçois bien les ressorts humanistes qui font classer sans suite ce délit incontournable, ou plutôt je ne vois pas les autres parce qu'il y en a probablement et vous me prêtez trop de réactions "mécaniques" pour qu'il me reste de quoi raisonner. Votre colère à l'interprétation de mon message doit au contraire tout à l'esprit d'analyse, et d'autres esprits chagrins ( pas les mêmes que la dernière fois ) auraient tord d'y voir une réaction mécanique à ce qui est perçu comme une attaque contre les institutions françaises en la personne du président de la république mis en opposition dans votre billet à "la gauche européenne". Si d'aventure des lecteurs, après avoir parcouru votre message, se rendaient jusqu'au n°28 qui a provoqué votre ire ils auraient l'occasion d'entendre sourdre sous vos mots la musique de Prokofiev couverte par vos hurlements lupins car monsieur, en matière de politique, vous y trouvez ce que vous y avez mis.

44. Le vendredi 3 avril 2009 à 01:20 par Vox Populi

Ah... Eolas et l'immigration... Le sujet sensible...

(Nom de Dieu j'ai une de ces envies de troller moi...)

45. Le vendredi 3 avril 2009 à 01:36 par Marcel

Moi j'ose troller. Et tant pis si pour la première fois depuis que je poste ici, je dois me faire Troll Detecter. J'aurais une question pour Lulu, qui doit passer régulièrement dans le coin puisqu'elle fait désormais partie de la colloc' du Maître : Lulu, si cette décision devait finir devant la CEDH et que la France était condamnée, ce serait à cause du juge ou du législateur ? Vous m'aviez assuré, il n'y a pas si longtemps, que la CEDH condamnait pour des lois allant à l'encontre de la Convention. Je ne suis pas sûr que dans le cas que nous présente Eolas, ce soit franchement la loi qui soit en cause...

46. Le vendredi 3 avril 2009 à 01:53 par zadvocate

Si l'info est exacte, j'espère que le confrère qui l'aura assisté en appel formera un pourvoi parce qu'on tombe dans le grand n'importe quoi.

L'amende civile est déjà rare mais au cas d'espèce ca semble non seulement juridiquement infondé mais complètement idiot.

Au passage, il faudrait dire à l'auteur de l'article (est ce un journaliste ? j'ai parfois des doutes en lisant rue89) qu'on ne fait pas appel d'un procès-verbal

47. Le vendredi 3 avril 2009 à 02:50 par Morm

Je m'écarte un peu du thème du billet ( encore que... ) pour signaler une brève d'@si ( reprenant un reportage France info ) qui devrait concerner du monde ici : [ http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=3897|http://www.arretsurimages.net/vite.php?id=3897|fr]

48. Le vendredi 3 avril 2009 à 05:01 par X.

@44

La responsabilité de la France peut résulter du fait judiciaire. C'est très fréquent, c'est le cas chaque fois que les juridictions dépassent le sacro-saint "délai-raisonnable" de jugement.

Mais les "graves" violations de la CEDH sont quantitativement plus fréquemment issues des lois.

49. Le vendredi 3 avril 2009 à 08:19 par fresca

Maître

Excusez moi de ma balourdise, je suis un peu ignorante des lois (beaucoup même), mais j'ai ouï dire (c'est sot) que les tribunaux avaient la possibilité d'infliger des amendes à ceux qui abusaient du droit. Cette possibilité n'est pas nouvelle, de mon souvenir, rarement appliquée, mais si elle a existé, et existe toujours, visiblement.

Après, toute la question est de savoir juger des nuances entre le contribuable procédurier par plaisir et celui qui lutte en quelque sorte pour sa présence sur le territoire en usant de toutes les ficelles du droit au risque de le devenir à son tour, procédurier. C'est ce que vous voulez dire je suppose ?

Humainement je trouve l'amende dégueu, le juge l'aurait débouté c'était pareil. Peut-être qu'il a jugé aussi que l'amende découragerait ceux qui seraient tentés d'instrumentaliser leur propre affaire.

Chépo. 300 euros c'est dégueu pour un homme qui ne doit pas avoir beaucoup de moyens, alors que des financiers véreux abusent des recours et des appels pour se défausser de leurs responsabilités. Voilà ce que j'en pense.

Bien le bonjour.

50. Le vendredi 3 avril 2009 à 08:34 par Gabriel

@ Eolas: votre lien vers la définition de processif est cassé. Plus généralement, le site atilf est obsolète et il est conseillé d'utiliser à la place : http://www.cnrtl.fr/definition/processif

Liens plus courts, lisibles et pérennes. Et le contenu est le même (TILF).

51. Le vendredi 3 avril 2009 à 08:53 par bartabas

@ Ti

La Cour de cassation veille... mais prend bien soin de préciser dans chaque arrêt que le droit d'appel n'était pas en l'espèce abusif, ce qui valide a contrario le principe de l'amende civile en la matière.

52. Le vendredi 3 avril 2009 à 09:18 par pat ibulaire

de toute façon, le temps que la cour de cass rende sa décision de cassation (partielle), l'expulsé (c'est comme ça qu'on dit?) sera ravi d'apprendre qu'il ne doit pas 300 euros, alors qu'il a été "reconduit" dans le pays qu'il a justement voulu fuire.et de toute façon, comment mettre à exécution cette amende vis à vis de quelqu'un qui n'a plus rien, meme pas de paiers et de pays. quelle victoire du droit! applaudissons.

53. Le vendredi 3 avril 2009 à 09:48 par Koudou

Maître, j'ai une question toute bête mais dont je ne trouve pas la réponse : quand un étranger est arrêté pour être renvoyé si rapidement dans son pays. Lui laisse-t-on le temps de ramasser ses affaires, vider son logement ou dire au-revoir à sa famille.

Cela me paraît un strict minimum humain mais j'ai un doute.

54. Le vendredi 3 avril 2009 à 10:41 par CSDH

Pour le droit de faire appel, 2 textes au moins le fondent: a. 2 protocole VII CSDH et a. préliminaire dernier alinéa du CPP.

"Au bout de 48 heures, la prolongation du placement, qui ne pourra avoir lieu qu'en Centre de Rétention Administrative (CRA), ne peut être ordonné que par un juge judiciaire, gardien des libertés individuelles" ->> le droit me semble bien moins clair sur ce point. Effectivement le prolongement de la GAV requiet une juge du siège par opposition au prononcé de la GAV qui peut être fait par le procureur. Donc dans les deux cas il s'agit de magistrats de l'ordre judiciaire. Ainsi Maitre quand vous dites juge judiciaire gardien des libertés individuelles c'est un peu déformer le texte de l'article 66 de la Constitution qui dit que "l'autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle". Or en droit interne le parquet a toujours été admis comme autorité judiciaire (ce qui est absurde vu qu'on ne lui fait plus confiance à partir d'un certain seuil dans la privation de liberté). Cette situation n'est pas satisfaisante mais il ne faut pas désespérer ->>> "In Medvedyev we trust!!".

55. Le vendredi 3 avril 2009 à 10:44 par hydro

Tout à fait d'accord pour voir considérer l'aspect choquant d'une telle décision surtout si son auteur n'est pas en mesure de caractériser l'abus justifiant l'amende civile, lequel abus ne peut bien évidemment résulter du seul exercice de cette voie de recours.... ce qui va sans dire va mieux en le disant!!!! et comme cela a déjà été précisé la cour de cassation y veille.

En revanche, pas d'accord sur votre interprétation de l' art. 13 Cedh qui ne consacre pas un droit au recours mais conjointement avec l'article 6.1 de cette même convention un droit au recours ou à l'accès à un tribunal ce qui n'est pas tout à fait la même chose. Il ne me semble pas avoir vu de jurisprudence soit de nos hautes juridictions nationales ( c.cass. CE) soit de la cour de Strasbourg permettant d'asseoir cette interprétation.

et puis pas besoin de convoquer ces instruments européens pour justifier votre solution, les dispositions du titre XVI du nouveau ( enfin plus maintenant) code de procédure civile y pourvoyant déja amplement et consacrent elles expressément un droit d'appel.

56. Le vendredi 3 avril 2009 à 11:09 par Olive

@eudes en 25:

"j'aurais préféré qu'on compare la France aux pays scandinaves par exemple."

Au Danemark par exemple, gouverné par une coalition qui inclut le Dansk Folkeparti, certes classé au centre mais dont les idées ouvertement xénophobes feraient presque passer notre Petit Timonier pour un dangereux gauchiste.

57. Le vendredi 3 avril 2009 à 11:21 par Erasmus

Juste des précisions techniques :1) Les Locaux de Rétention Administrative (LRA) doivent être équipés de douches (art. R. 553-6 du Ceseda) ; 2) Le délai de 24 heures pour interjeter appel est calculé et prorrogé suivant les articles 640 et 642 du NCPC depuis le décret du 17 novembre 204, devenu R. 552-12 du Ceseda.

58. Le vendredi 3 avril 2009 à 14:43 par Désarmé

Pour comprendre ce qu'est la justice des étrangers, il suffit d'assister aux audiences désespérantes la plupart du temps du JLD ou TA. Oui, très souvent le "retenu" terme pudique pour désigner le prisonnier en CRA, est renvoyé sans argent et avec ce qu'il portait sur lui au moment de l'arrestation, y compris les jeunes majeurs qui n'ont quelquefois plus de famille ou ne parlent que peu la langue du pays dit d'origine.

__

Témoignage: une audience banale à Marseille (la dernière à laquelle j'ai assisté ).

Comme souvent, on ne nous ouvre la salle d'audience (qu'une grille sépare symboliquement du CRA du Canet) que lorsque l'audience est commencée, ce qui empêche le "public" après les passages successifs à la sécurité d'arriver à temps pour le début de l'audience .

---

Passent successivement trois jeunes gens qui se disent Palestiniens, demandeurs d'asile politique, arrivés le 26 mars par Beyrouth, sans aucun document d'identité ou de transport, et qui ont tous les trois refusé d'embarquer dans un vol pour Madagascar (? !) Une prolongation de 8 jours est demandée par la PAF pour les faire "raccompagner avec une escorte". La prolongation est accordée . La réponse de l'OFPRA est déjà arrivée pour l'un d'entre eux (négative) et les autres attendent les réponses aujourd'hui ou demain.

C'est un policier qui traduit les diverses interventions. Et comme dit Madame la Juge "Vous lui avez bien expliqué le déroulement de la demande" et "Dites lui qu'il sera décidé de son sort en fonction du résultat de la demande d'asile".

Ils disent qu'ils ne veulent pas repartir et sont en danger dans leur pays.

L'avocat n'a "Pas d'observation" à formuler.

L'avion avec escorte est prévu pour le 2 avril, si j'ai bien entendu, toujours pour Madagascar !

--

Puis c'est au tour de M. I d'origine comorienne, trente-six ans, très digne dans son costume et qui parle parfaitement le Français. (Il a 3 enfants français dont l'un malade, une femme française à l'hôpital, vit et travaille en France depuis 1993 et a une interdiction du territoire pour des papiers considérés comme faux lors d'un voyage aux Comores et qui ne l'étaient peut-être pas.)

La préfecture demande 5 jours supplémentaires de rétention car en l'absence de moyens de transport elle n'a pu faire reconduire M. I dans les temps. Un avion est prévu le 2 avril à 13 h. en passant par Roissy.

Seule intervention de l'avocat commis d'office: "Comme à son habitude , la préfecture sollicite un délai non justifié de 5 jours alors qu'un délai de 4 jours serait amplement suffisant".

Le délai de 5 jours est accordé.

M. I essaie d'intervenir.

"La décision est prise" "Les débats sont clos".

-

Dernier retenu ce jour-là (Il est rare qu'il y en ait si peu. Il y a plus de 100 retenus en permanence au CRA):

M. B.dit être né en 1981 à Casablanca et être de nationalité marocaine.

Il a une interdiction définitive du territoire à la suite d'une condamnation a un an de prison pour violences. Il a exécuté sa peine judiciaire d'un an et, comme le Maroc ne veut pas le reconnaître comme un de ses ressortissants, il a déjà effectué un an supplémentaire de prison, balloté entre le CRA et les Baumettes .

Il parle parfaitement Français où il a vécu la plus grande partiee de sa vie, dit qu'il veut partir au Maroc mais n'y a personne qui puisse aller faire les démarches pour obtenir les papiers qui prouveront sa nationalité .

Il dit qu'il n'en peut plus, "Je suis un être humain, pas une pierre"

L'avocat n'a rien à dire.

Prolongation de la rétention et probable retour aux Baumettes.

"Je suis au bout de ma patience, je suis capable de faire n'importe quoi".

La police le traine hors de la salle d'audience.

59. Le vendredi 3 avril 2009 à 19:25 par Ti

à Marie en 38 La Cour de Cassation a cassé les ordonnances du JLD ayant condamné les requérants à des amendes civiles. Ce qui veut dire que les requérants n'auront pas à payer cette amende.

à Bartabas en 51

Je crois qu'il faut en la matière se méfier du raisonnement a contrario. La motivation de la Cour de Cassation (en l'espèce, c'est pas abusif) est a minima car elle ne veut pas se pencher sur les grands principes (dans quels cas un appel serait abusif) ce n'est pas l'assemblée plénière.... Comme quand un malheureux juge d'instance doit motiver le rejet de dommages et intérêts pour procédure abusive (ou résistance abusive) : Le malheureux juge que je suis va à l'essentiel et dit : l'abus de droit n'est pas caractérisé ou X n'a pas rapporté la preuve de l'abus de droit. Je ne vais pas rajouter : l'abus de doit ne sera jamais caractérisé quand on se contente de demander le paiement d'une créance ou quand on conteste cette même créance.

Je ne sais pas si je me fais bien comprendre ou si vous me jugez pas présomptueux de me comparer à la Cour de Cass mais la motivation donnée par elle c'est dans ce goût là...

60. Le samedi 4 avril 2009 à 00:01 par PrometheeFeu

Je me permet un petit commentaire sur la responsabilité des juges: Autant une erreur est possible. Autant les juges ne sont pas omniscients et qu'il serait donc stupide de les attaquer pour avoir condamne des innocents. Autant, il semble qu'en prennant une telle decision, ce Premier President a quand meme viole les droits fondamentaux d'une personne. Des sanctions s'imposent peut etres quand un juge decide que la Justice peu se passer de la loi.

61. Le samedi 4 avril 2009 à 10:50 par drwatson33

la note 2 est entachée d'une erreur manifeste: "R. 553-6 Les locaux de rétention administrative doivent disposer des équipements suivants : 1° Des chambres collectives non mixtes, accueillant au maximum six personnes ; 2° Des équipements sanitaires en libre accès comprenant des lavabos, douches et w.-c. ; 3° Un téléphone en libre accès ; 4° Un local permettant de recevoir les visites : autorités consulaires, familles, médecins, membres d'associations ; 5° Le local mentionné à l'article R. 553-7, réservé aux avocats ; 6° Une pharmacie de secours."

62. Le samedi 4 avril 2009 à 19:38 par Babar

Hors sujet:

Dis papa a quoi cela ressemble des policiers provocateurs ?

http://www.youtube.com/watch?v=p5vZvVq1DzM

Regarder a droite les policiers armes habilles comme des manifestants..

63. Le samedi 4 avril 2009 à 22:19 par Desabuse

De quoi parle t'on ? D'un étranger qui n'a techniquement pas le droit d'être sur le sol français ? Je savais pas qu'il devait y avoir des lois pour encadrer cela, ça relève du bon sens non ? Pourquoi faire une procédure judiciaire ?

Eolas:
Non, on parle d'un être humain privé de sa liberté. Ça va contre le bon sens, et contre un droit fondamental. Oui, il faut des lois pour encadrer toute atteinte aux libertés et droits fondamentaux. Car le "bon sens" est parfois le pire ennemi de la liberté.

64. Le dimanche 5 avril 2009 à 10:33 par Etudiant

@Desabuse / #63

Vous proposez quoi? Un coup de pied au c*l qui les pousserait dans un charter dans la seconde où ils seraient "capturés"*?

  • pour rester dans l'esprit

65. Le lundi 6 avril 2009 à 11:57 par violette

Petite précision: c'est bien Monsieur NUNEZ qui est PP à Toulouse mais il n'a jamais depuis son entrée en fonction, eu d'activité juridictionnelle. Il laisse ça à deux magistrats délégués, à tour de rôle, se réservant pour la noble tâche de gestion de sa Cour et de visites régulières en Patagonie avec laquelle il entretient des liens privilégiés...Ceci étant, je ne sais pas qui a pu rendre cette décision, j'ai toutefois ma petite idée car l'un des deux magistrats délégués se doit, quelle que soit la nature de la décision rendue (demande de suspension d'exécution provisoire, autorisation d'appel ou sur le fond car il préside également une chambre commerciale), de faire des commentaires très personnels sur le dossier qui lui est soumis, sur la personnalité des parties, leurs véritables motivations etc etc..., commentaires bien entendus inclus dans ses décisions et accompagnés souvent de sanctions pécuniaires (dommages intérêts, article 700 démesurés...). Cette amende civile correspondrait donc assez bien à sa façon de jouer le "juge qui dit le droit mais qui donne aussi des leçons" Mais peut être n'est il plus le seul de cette Cour à juger de la sorte ???

66. Le mardi 7 avril 2009 à 15:41 par Alec

La liberté est l'état naturel de l'homme ? C'est ce que considérait en effet le législateur depuis la Révolution française. C'est notamment ce qui l'avait conduit à ne pas incriminer l'évasion lorsqu'elle n'avait pas été accompagnée de violence, effraction ou corruption, cas auxquels s'étaient ajoutés plus récemment les manquements aux "contrats" conclus dans le cadre de l'application des peines (semi-liberté ou permission de sortir). C'était même, il y a longtemps, le gardien qui était sanctionné quand il avait laissé s'échapper son prisonnier sans que celui-ci ne le brutalise ou ne porte atteinte à l'enceinte.
Et cette prise en compte de l'aspiration irrépressible (c'est le cas de le dire) de l'Homme à vouloir recouvrer sa liberté avait été respectée même par le régime de Vichy !!!
Mais en mars 2004, notre législateur (sous l'inspiration, me semble-t'il d'un Ministre de l'Intérieur... rappelez-moi son nom déjà ?) a décidé que "constitue une évasion punissable le fait, par un détenu, de se soustraire à la garde à laquelle il est soumis", même sans violence, destruction, corruption ou manquement à ses engagements plus ou moins implicites. Ainsi, l'Homme détenu est coupable du seul fait qu'il a voulu, et est parvenu en se montrant plus fin que son gardien, recouvrer sa liberté.
Je n'ai pas vu ou entendu à l'époque un commentaire sur ce point. (Mais je ne lisais pas encore Eolas !)
Alors, le PP de Toulouse n'est-il pas dans l'air du temps ?

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