Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Justice à Vegas (5) :

Comme d’habitude, j’ouvre un fil de commentaire pour que nous puissions discuter du 5e épisode et dernier épisode de Justice à Vegas (ici en VOST), avec l’affaire Zeus Vega et Brian Baker. N’oubliez pas les scènes coupées.

Là encore, je n’ai pas pu voir l’épisode et prendrai le fil de discussion en route.

Enfin un épisode qui justifie les travelings sur les casinos, les boites de strip-tease et le décorum de Las Vegas. Dans les précédentes affaires, le monde des casinos n’était pas ou très indirectement concerné, les faits auraient pu se dérouler dans n’importe quel ville du sud des États-Unis. Cette affaire a plus une saveur de Vegas,

Première observation tout de même : il s’agit d’un meurtre et d’une tentative de meurtre au premier degré (avec préméditation et usage d’une arme mortelle), on est au sommet de l’échelle des peines encourues.

Et pourtant, tous deux ont été laissés en liberté sous caution (bail).

C’est ce genre de détails qui fait que je ne peux m’empêcher d’admirer certains aspects de la procédure pénale américaine (même si je suis loin d’être béat et que je ne souhaite pas sa transposition en droit français, juste qu’on se mette à niveau côté respect des droits de la défense : droit à la présence de l’avocat tout au long de la procédure dès l’arrestation, droit de se taire sans que ce silence ne soit retenu contre l’accusé, détention provisoire exceptionnelle.

Les peines sont très sévères, et souvent automatiques, dans ce système. Pourtant, Zeux et Brian ne se sont pas enfuis et se présentent 17 mois plus tard. Il y a matière à réflexion, tout de même.

Bon visionnage et merci à Arte d’avoir diffusé cette série de documentaires.

Commentaires

1. Le samedi 24 octobre 2009 à 15:44 par Philippe913

J’ai trouvé rigolo les chefs d’inculpation : homicide avec arme mortelle, Oo, peut on tuer quelqu’un avec une arme non mortelle??

Et ils aiment bien les cumuls : donc, homicide avec arme mortelle, et aussi tir avec arme, même si, oui, il a tiré des balles qui ont touché personne, enfin, meurtre + tentative me semblait déjà suffisant.

Quand au complot, marrant ça, aux USA? onpeut faire un complot en 45 secondes? et ça suffit pour la préméditation? mmm, rapide l’assasinat.
Même si ils ont des choses de biens dans leur procédure, il y a quand même d’autres choses risibles.

Eolas:
Vous a-t-il un instant caressé l’esprit que c’est la traduction de termes juridiques n’ayant pas d’équivalent en droit français qui pouvaient aboutir à des résultats risibles, plutôt que de conclure en une seconde que c’est le système américain qui est ridicule ? Très révélateur de vos préjugés.

En France aussi, on aime le cumul : ça s’appelle le concours réel d’infractions, il y a un chapitre sur la question dans le Code pénal (mais là bas, c’est risible, ici c’est du droit).

Le terme de complot vise l’entente préalable pour commettre une infraction, par opposition à l’infraction irréfléchie commise sur une impulsion ou en raison d’une circonstance imprévue. Oui, on peut se mettre d’accord en quelques secondes, il suffit que le passage à l’acte résulte d’un accord. Exemple : “Regarde, de l’autre côté de la rue ! C’est Bob, le gredin ! — Pourquoi dis-tu ça ? — Il couche avec ma femme. je lui avais dit de quitter la ville et de ne pas revenir. Je vais lui donner une leçon. — Attention, la grande Mado m’a dit qu’il portait souvent une arme. — Ah ouais ? Et bien, je ne le lui laisserai pas le temps de l’utiliser. Tu as ton pistolet ? — Oui. — Donne le moi, et reste dans la voiture, prêt à démarrer quand je lui aurai fait son affaire. — Ok.» Et voilà, vous avez un complot.


La préméditation, en  France est retenue pour la personne qui se poste en embuscade, même un laps de temps très bref (une minute suffit) ou qui va dans une autre pièce chercher une arme et revient en faire usage.

Enfin, arme mortelle (deadly weapon) n’est pas un pléonasme. Une bouteille vide utilisée comme matraque n’est pas une arme mortelle, même si on peut tuer avec. Une deadly weapon est une arme qui de par sa nature entraîne de grands risques de mort quand on en fait usage, au point que son usage révèle une volonté homicide ou la prise en connaissance de cause d’un risque probable de causer la mort. Ce sont les armes à feu, les couteaux, notamment. 

de plus, le pauvre Brian BAKER, alors moi aussi j’ai pris l’épisode en cours, mais je me demande bien ce qu’il fait devant le tribunal, il est quasi évident quil n’a rien fait, et vouloir lui coller un meurtre plus un complot, sans rien de vraiment concret, c’est, je trouve, vouloir faire du chiffre sans prendre cas de la personne qu’il y a derrière ce chiffre.

2. Le samedi 24 octobre 2009 à 15:57 par stellar

Les casinos sont encore plus présents que vous ne le dites.

En effet, si on va voir les scènes coupées on en a une où, après le verdict, l’équipe complète va se détendre dans une boite de strip-tease.

De plus, on découvre par ailleurs que cette boîte (pratiquant le nu intégral) est détenue par Dominic Gentile, l’avocat de Jesus Vega. C’est d’ailleurs ce client, qui travaille dans l’immobilier, qui va essayer de vendre cette boîte pour le compte de l’avocat.

3. Le samedi 24 octobre 2009 à 15:59 par iPidiblue le bon, la brute et le truand

Je l’ai trouvé très intéressant cet épisode et parfaitement évocateur d’une ambiance et d’un milieu américain particulier le Las Vegas des gagnants ! Car enfin on est à l’opposé du petit meurtre entre alcolos plus ou moins dégénérés et en fin de parcours comme dans l’avant-dernier épisode ! Là on a du grand western, la scène un parking à la sortie d’une boîte de nuit, les montures, un Land Rover et deux autres voitures de luxe. les acteurs une bande de minables de Los Angeles plus ou moins affiliés à des gangs qui viennent faire une virée à Vegas et qui se croient chez eux et font des doigts d’honneur, sauf qu’en face il y a du répondant et des gros calibres ! Un ancien marine à qui on a appris à tuer et qui a des réflexes, deux jeunes entrepreneurs en pleine ascension sociale (boîte de streap tease), la partie est jouée d’avance ! La loi va récompenser les plus forts, la présidente du tribunal est toute acquise aux deux gars de Las Vegas, elle n’a qu’une seule peur, l’annulation du procès par suite du désistement d’un témoin, le conducteur de la Range Rover ! En somme les jurés sont d’accord, le far-west n’est pas mort et les juges Dredd non plus ! L’Amérique dans toute sa splendeur, le gagnant remporte tout : le jack-pot de la considération sociale et le droit de faire justice chez lui !
Ah ! c’était beau … et les avocats des accusés comparés à des requins par la partie adverse admirative, et le client dont on loue l’allure et les muscles !
Et le champagne à la fin …
Putain ! quel pied … mais c’est pas fait pour les petits français.

4. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:00 par Cestbeaulafrance

Et sinon a Paris, le depot c’est toujours la meme chose.

Emission de France Inter.

Bonne emission.

Quand est ce que ce depot de nuit inutile sera ferme ??

5. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:16 par stellar

@ Eolas : Les boîtes de strip-tease sont encore plus présentes que ce que vous croyez puisque en regardant sur le site d’Arte les scènes coupées, on découvre que la boîte de strip-tease où l’équipe des avocats de la défense va se détendre après le verdict appartient à Domonic Gentile, l’un de ces avocats.
Il souhaite d’ailleurs revendre cette boîte (une des seules de Las Vegas présentant du nu intégral) et c’est Jesus Vega, son client agent immobilier de profession, qui joue les intermédiaires.
Cela surprend beaucoup pour des français, où je ne vois guère qu’un avocat capable de cela.

Eolas:
J’ai vu la scène. Je pense que Dominic Gentile représente le propriétaire, mais qu’il n’est pas propriétaire lui même de cette boîte.

6. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:28 par Véronique

la présidente du tribunal est toute acquise aux deux gars de Las Vegas, elle n’a qu’une seule peur, l’annulation du procès par suite du désistement d’un témoin (iPidiblue le bon, la brute et le truand)

En même temps je l’aime bien cette juge. Elle ne laisse pas monter sur les pieds par les procureur(e)s.

Bien contente quand même quand les deux procureur(e)s se prennent le coin de la porte.

Eolas:
C’est ce qui m’a le plus frappé : dans cet épisode, le rapport de force est totalement inversé. Alors que jusque là, les procs étaient maitres du jeu et arrogants, c’est ici la défense qui est à l’aise et domine l’accusation. Les avocats ne sont pas commis d’office cette fois-ci.

7. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:40 par stellar

@ ipidiblue (# 2)

Pas si sûr que le verdict était écrit d’avance.

L’enjeu pour la défense était clairement que les jurés s’identifient aux accusés et se disent “dans les mêmes circonstances, comment aurais-je pu réagir?”.

Cela a eu des conséquences dans la sélection du jury (cf scènes coupées) : la défense voulait connaître le point de vue de chaque juré sur les armes et sur les boîtes de strip-tease (pour que les jurés ne rejettent pas les clients de ces lieux) : pas de problèmes, y compris pour un pasteur pour qui ces clients ont simplement besoin de conseils spirituels.

L’accusation a joué l’empathie avec la victime avec le témoignage de la soeur de ce dernier, uniquement sur le registre émotionnel.

Des éléments déterminants me semblent avoir été le témoignage d’Amir Mogadam, le conducteur de la Range Rover, désastreux pour l’accusation, et celui du policier de Los Angeles.
On voit au fil du procès que les victimes n’étaient pas des enfants de coeur (ce qui n’autorise pas à les confondre avec des pigeons d’argile) mais aussi qu’ils étaient dangereux (retour sur les lieux de l’altercation pour se battre, présences d’armes : couteau, matraque).

Je ne prétends pas que ce verdic était le seul possible, mais à l’issue de ce procès, il me paraît plutôt logique.

8. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:43 par iPidiblue ou de l'assassinat considéré comme un des Beaux-Arts

J’ai oublié un truc essentiel, c’est que toute la scène style far-west du parking a été filmée par une caméra de surveillance, ce qui fait qu’on se croirait à Hollywood ! Cela donne un côté hyper-réaliste qui fait penser exagérément à du cinéma ou à ces peintres américains qui représentent une vie stylisée comme Edward Hopper.

9. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:50 par Remy

En effet les plans de coupe valent ici le coup et celui qui présente le panneau publicitaire vendant un avocat, de type “get the money you deserve, call now! 1-800-getyourmoney” est mis avec malice juste avant un plan de l’avocat - qu’on comprend alors cher et bon - du prévenu. Si Eolas admire - à juste titre selon moi - le fait qu’aux USA on peut comparaître libre pour assassinat, ce qui fascine l’avocat de l’accusé est le fait qu’il ait eu de quoi payer la caution qui lui offre cette liberté (je n’ai pas le minutage sous les yeux mais il le dit aussi clairement que ça à ses collègues jaloux de ne pas avoir un si “bon” client). Cette liberté, l’accusé l’a payée, au premier degré.

Le plus loin possible des clichés anti-USA que cette idée appelle pourtant, j’aimerais vraiment savoir le poids réel de la fortune personnelle dans le succès judiciaire des individus là-bas.

Question plus concrète : la dernière plaidoirie présentée est celle, enflammée, d’une des procureures. Est-ce possible de finir ainsi un procès par une plaidoierie de l’accusation ou est-ce un effet de montage ?

Eolas:
Plusieurs États donnent à l’accusation le droit de conclure. Je n’en connais pas la justification.

10. Le samedi 24 octobre 2009 à 16:54 par Philippe913

Des préjugés moi? non, enfin si, sûrement, mais je ne parlais pas du système américain dans sa totalité (je ne le connais pas assez), juste de ce cas là.

Je me suis mal exprimé, en fait, j’ai été “choqué” par ces libellés d’infraction et leurs règles de cumul, ok, eux sont peut être choqués par les nôtres, vous avez raison.

D’un autre côté je ne connais pas la procédure américaine, alors peut-être y a t-il homicide avec arme + tir avec arme pour pouvoir condamner sur le second chef si le premier n’était pas retenu?

Complot, c’est si facile? donc dès lors qu’il y a un complice , il y a complot?

Ok, il y a une subtilité dans la notion de l’arme mortelle. celle-ci révèle l’intention de tuer plus sûrement qu’avec une arme “non mortelle”, ça devrait juste permettre de révéler ladite intention et permettre d’aider à qualifier l’homicide ou la tentative, de là à être une infraction distincte, mais bon, encore leurs règles de cumul et leurs choix.
permettez moi, encore une fois, d’être “choqué”.

Eolas:
Les mêmes faits en France seraient ainsi qualifiés : Zeus Vega : assassinat (meurtre avec guet apens), + 2 tentatives de meurtre, détention d’arme de 4e catégorie, complicité pour Brian pour les trois premiers faits, ce qui nous fait 7 chefs de poursuite. Et peut être même une omission de porter secours.

11. Le samedi 24 octobre 2009 à 17:20 par Remy

@Philippe913 : dès lors qu’il y a un complice , il y a complot?
D’un point de vue étymologique rien n’est moins sûr.

Veillez par contre à bien mettre un espace entre le dernier mot de votre proposition et le point d’interrogation. Si vous ne le faites pas vous vous rendez-victime d’anglo-saxonisme.

12. Le samedi 24 octobre 2009 à 17:34 par Il Palazzo-sama

« Une bouteille vide utilisée comme matraque n’est pas une arme mortelle, même si on peut tuer avec. »

À ce propos…
Stephan Bolliger, Steffen Ross, Lars Oesterhelweg, Michael Thali et Beat Kneubuehl de l’Université de Berne ont obtenu le prix Ig Nobel de la Paix 2009 pour avoir démontré qu’il est préférable de recevoir sur la tête une bouteille pleine qu’une bouteille vide, mais que même la première est plus résistante que le crâne humain. ;-)

Personnellement, je vois mal la différence entre frapper de toutes ses forces sur la tête de quelqu’un avec une bouteille et tenter de lui porter un coup de couteau. ^^’

13. Le samedi 24 octobre 2009 à 17:37 par Arno

Bonjour,

Mon point de vue de personne ni connaissant rien et qui regardait son premier procès américain est celui-ci :
- J’ai trouvé les avocats de la défense mauvais. Le premier axe se lequel ils se sont engagés était de démontrer que le conducteur de la voiture avait un comportement dangeureux ce qui aurait justifié le self-defense. Première attaque qui n’a pas tenu longtemps face au premier témoin; que j’ai trouvé plutot bon dans ses réponses, il a contré toutes les tentatives des avocats (mis à part sa casquette du plus mauvais effet).
- Contrairement au suspect principal que j’ai senti plutot mauvais. UNe impression d’avoir été mal briéfé et de devoir tenir une position dicté par ses avocats qu’il ne comprennait meme pas : Un ancien marine expérimenté mais qui est tétanisé par la peur. Tétanisé mais il peut quand même courir à sa voiture et prendre son flingue et l’armer. Il ne voit rien car tout est “flou” mais par contre il voit très clairement une arme dans la main de son agresseur.
- Et très honnetement, après sa prestation, même ses avocats n’y croyait plus. Les procureurs sentent qu’elles vont gagner mais j’ai l’impression qu’elles laissent filer sur la dernière ligne droite, les plaidories. Plaidories, où là les avocats sont bien meilleures, dans le monde du foot on dirait qu’elles se sont vues trop belles … Après tout elles étaient pressés d’être en famille pour noel ?
- Enfin, j’ai vraiment une désagréable impression que les jurés ont épargnés un entreprenneur socialement bien intégrés face à une bande de jeunes voyous. Peut être à cause de l’existence de peine plancher sur les inculpations en question ?

En gros, j’ai l’impression que personne ne pleurera le verdict et tout est bien qui finit bien. Personne, sauf peut être deux parents d’origine asiatique a qui on a dit que la vie de leur fils ne valait pas grand chose à Las vegas

Arnaud

14. Le samedi 24 octobre 2009 à 18:06 par Fleur

Bonjour,

De même, je n’y connais pas grand chose, mais ce qui me frappe beaucoup, c’est qu’on peut avoir tué quelqu’un, que ce soit prouvé, et que malgré tout, on s’en tire non coupable sur toute la ligne. Car s’il est difficile à prouver qu’il y a complot, légitime défense ou préméditation, un homme s’est retrouvé par terre, mort et il n’avait pas d’arme à feu à la main ou à côté de lui. Le suspect principal ne nie pas lui avoir tiré dessus et l’avoir tué.

Je suis moi-même mère et j’étais touchée par la détresse des parents dont le fils est mort, tué, et dont le meurtrier, légitime défense ou non, histoires de gang ou non, s’en tire blanchi sans qu’aucun chef d’accusation ne soit retenu contre lui.

Est-ce possible en France ? Il me semble qu’avec les accusations d’homicide involontaire ayant entraîné la mort et homicide volontaire, on reconnaît au moins que l’acte a bien eu lieu, non ?

15. Le samedi 24 octobre 2009 à 18:26 par Charles

Épisode à nouveau très intéressant, d’autant plus que les données diffèrent des anciens épisodes, puisque l’on n’est plus en présence d’avocats commis d’office mais d’avocats sûrement très cher payés…

J’ai été particulièrement marqué par le fait que le procureur ait choisi de poursuivre également l’ami de Jesus Vega pour meurtre au 1er degré, alors que pourtant rien ne semblait permettre d’indiquer qu’il ait commis un homicide (toutefois, je ne connais par le droit du Nevada et il y avait peut-être des motifs légaux de le poursuivre… par exemple, j’ai déjà entendu dire que dans cet État, si lors d’un cambriolage commis par deux personnes l’un des deux malfaiteurs mourait, l’autre pouvait être poursuivi pour homicide).

Ce dernier épisode de cette série remarquable nous montre une fois de plus que l’on a beaucoup à apprendre du système judicaire américain au lieu de la vouer aux gémonies comme certains aiment à le faire. Il y a bien qu’aux États-Unis où l’on peut comparaître libre à un procès pour meurtre au 1er degré… N’oublions pas qu’en France la détention provisoire est encore, in facto, la règle (pourtant il parait qu’elle devrait rester exceptionnelle selon le code de procédure pénale…).

En outre, je suis en total désaccord avec ceux qui pensent que le procès était joué d’avance. Il est vrai que l’attitude de juge pouvait sembler favorable à la défense à certains moments (mais il ne faut pas oublier que la cross-examination est à la base du due process, et que le juge n’aurait pas eu d’autre choix que d’annuler le procès si le témoin de l’accusation n’avait pas été interrogé par la défense, sauf peut-être à interdire aux jurés de prendre en compte ledit témoignage). Preuve que l’issu du procès du procès était incertain, le témoignage de Vega, désastreux à mon sens pour la défense. Personnellement, j’étais incapable jusqu’à la fin d’envisager le moindre pronostic concernant la solution retenue par le jury. Mais les jurés n’ont fait qu’appliquer une règle essentielle du droit pénale, celle selon laquelle le doute doit toujours profiter à l’accusé. Par ailleurs, le crois que l’accusation a fait de nombreuses erreur : le témoigange du chauffeur bien sûr, mais également le fait d’avoir fait témoigner la sœur de la victime (l’accusation n’aurait pas dû prendre les jurés pour des imbéciles ; ce témoignage a seulement démontré que le ministère public avait très peu d’éléments à charge).

En tout cas il est certain que l’on a beaucoup à apprendre des États-Unis sur la notion de procès équitable.

Primo, le procès se résume à un match entre l’accusation et la défense, match duquel les parties civiles sont heureusement mises à l’écart (pensez qu’en France certains suggèrent d’introduire un droit d’appel pour les parties civiles, ce qui est totalement inadmissible).

Secundo, des délais de jugement rapides, ici un an et demi. À comparer avec la France qui est l’un des pays le plus condamné par la CEDH….

Last but not the least, l’existence de véritables droits pour l’accusé. Celui-ci est informé de ses droits, et notamment de celui de garder le silence (alors que le législateur français a cru bon de supprimer il ya quelques années l’obligation pour les OPJ le notifier ce droit au GAV. Oh bien sûr ce droit existe toujours, seulement il n’est plus nécessaire de la notifier) et d’être assister d’un avocat dès le début.

Je pourrais encore continuer longtemps tellement la liste est longue…. Allez, pour le plaisir, un dernier argument en faveur du système US : le ministère public ne peut pas faire appel d’une décision d’acquittement… Par comparaison, devinez comment fonctionne notre système (ex : affaire Maurice Agnelet et bien d’autres, acquittement en 1ère instance, et condamnation en appel).

Si avec ceci, vous n’êtes pas encore convaincu que le système US est indéniablement meilleur que le notre…

Bien sûr, on m’objectera que la justice américaine favorise les personnes riches… Je ne nierai pas le poids de l’argent dans le système pénal américain. Mais ce serait faire preuve de cécité que de croire que la justice française y est insensible. Dans notre pays également, une personne aisée ou riche aura dans la plupart des cas plus de chances de sortir acquittée ou relaxée d’un procès. D’ailleurs, n’est-ce pas le propre de l’argent que de favoriser ceux qui en ont, et dans tous les domaines ? La justice ne peut pas y échapper.

Par ailleurs, pour ceux qui ont vu les épisodes précédent, force est de constater que les avocats commis d’office sont loin d’être mauvais, bien au contraire. Même si dans les deux derniers procès que j’ai vus la défense a perdu, ce n’était sûrement pas en raison de la qualité des avocats mais bien plutôt en raison de la personnalité des accusés et des faits qu’ils leur étaient reprochés. Je ne crois pas qu’ils auraient obtenu l’acquittement avec des avocats payés très cher.

En définitive, j’ai toujours eu du mal à comprendre ceux qui vilipendaient le système pénal américain, alors qu’en matière de procédure pénale, on aurait beaucoup à gagner. En revanche, en matière de peine, j’admets que le système est tout à fait disctuable…

16. Le samedi 24 octobre 2009 à 18:32 par Remy

Fleur : si vous agissez pour sauver votre peau, Dieu merci on ne pourra pas vous le reprocher, ce qui n’enlèvera pas la peine des familles de la personne dont vous vous serez protégée ou dont vous avez protégé, pour poursuivre dans votre comparaison, votre enfant. En l’espèce on reconnait bien ici que Zeus a tué mais, son avocat le dit très clairement à l’ouverture du procès, il en avait le droit car c’est pour se protéger qu’il a commis ce geste et il n’avait pas d’autre alternative (la question de la possibilité de fuir est au centre des discussions tout au long du procès - ses avocats transforment habilement son choix de ne pas fuir immédiatement et les coups de feu que ce choix entraînera en devoir de ne pas abandonner un ami).

Arnaud, j’aimerais vraiment savoir en quoi vous trouvez le premier témoin “plutôt bon”.

17. Le samedi 24 octobre 2009 à 18:39 par franc

Ce commentaire n’a absolument aucun rapport avec le droit, mais la scène du restaurant autour de la 51ème minute est extraordinaire … Avec d’un côté M.Baker et l’avocat de la défense, qui se moquent de la soeur de la victime et de son émotion “feinte”, et de l’autre M.Vega, qui a l’air de se sentir profondément mal à l’aise dans cette situation. Le cadrage serré sur son regard est terrible.

18. Le samedi 24 octobre 2009 à 19:14 par bob

@fleur

“Je suis moi-même mère et j’étais touchée par la détresse des parents dont le fils est mort, tué, et dont le meurtrier, légitime défense ou non, histoires de gang ou non, s’en tire blanchi sans qu’aucun chef d’accusation ne soit retenu contre lui.”

si vous etes sur le coup de l émotion, vous ne pouvez pas raisonner correctement

Personnellement, il y a une chose qui me choque régulièrement, c est la non prise en compte de la “responsabilité” des actes de chacun, y compris des victimes

Dans cette affaire, la victime a semble t il provoqué, et était près à en découdre. Alors pourquoi le plaindre ? Que la famille soit triste, c est normal et logique, mais qu ils prennent conscience que tous cela ne serait pas arrivé si il n avait pas joué au cow-boy.
Ras le bol de ce genre de raisonnement

On avait eu la meme chose il y a une dizaine d année en France, où un mineur conduisait de nuit sans permis, les phares éteints, il avait forcé un barrage de police et etait mort car la police avait tiré (ce qui est pour moi etait normal car foncer sur des policiers avec un véhicule est comparable à une agression pouvant entrainer la mort, la voiture pouvant etre considérer comme une arme)

Le lendemain, la famille et les voisins défilaient en criant “police assassin”, j avais trouvé ca pitoyable.

Encore une fois, on est responsable de ses actes.
Si ce mineur etait resté chez lui (d ailleurs, un mineur qui conduit une voiture, est ce normal ?) et n avait pas fait le cake, il serait encore vivant.
il en va de meme pour la victime de ce documentaire

19. Le samedi 24 octobre 2009 à 19:15 par iPidiblue à Trifouillis-les-oies

Charles a dit :
En outre, je suis en total désaccord avec ceux qui pensent que le procès était joué d’avance. Il est vrai que l’attitude du président pouvait sembler favorable à la défense à certains moments.

Je suppose que cela vise ma position puisque j’affirme et je maintiens que jamais les deux co-accusés n’auraient pu être condamnés à Las Vegas ! Pourquoi ? Cela reviendrait à interdire aux propriétaires des casinos d’avoir leurs propres services de sécurité qui font règner l’ordre dans leurs temples du jeu. Les deux accusés sont des notables de la ville et en tant que tels ils sont protégés par l’institution judiciaire même si l’affaire ne s’est pas passée à l’intérieur de leur établissement. La prospérité de la ville de Las Vegas dépend du sentiment de sécurité que le touriste y ressent et de l’assurance que les malfrats seront châtiés comme il convient c’est à dire très sévèrement. C’est le système économique qui est en jeu et donc la respectabilité politique des juges qui sont élus ne l’oubliez pas ! Un jugement en défaveur de Vega et Baker se serait répandu comme une traînée de poudre dans la ville et aurait disqualifié les juges voire même la police.
Dans l’esprit de la présidente du tribunal il n’y avait aucun doute sur l’issue du jugement, quant aux jurés ce sont tous des employés des établissements de la ville donc ils connaissent la règle, les gens de l’extérieur doivent se tenir à carreau sinon on les sort de la ville manu militari (interdiction de pénétrer dans un casino si l’on est seulement soupçonné de triche).
Las Vegas n’est pas Malo-les-Bains …

20. Le samedi 24 octobre 2009 à 19:21 par Pat

‘J’ai l’impression qu’il y a une certaine confusion chez ceux qui pensent que ce procès est un exemple d’une justice qui protège les riches.

@Remy: l’accusé n’a pas “payé” sa liberté, dans le sens où il ne reverra plus jamais son argent. Aux US, contrairement à la France, il existe ce qu’on appelle le bail. Le bail est un moyen de s’assurer que le suspect comparaitra au procès. S’il respecte toutes ses obligations, alors il retrouvera son argent. De plus, il me semble que vous avez mal interprété les paroles de l’avocate. Elle n’est pas étonné du fait qu’il a pu payer le bail, mais du fait même qu’il a pu l’obtenir alors qu’il est accusé de first degree murder.

Certains , en particulier Fleur dans le commentaire 13, sont choqués par l’idée que quelqun puisse s’en sortir aussi facilement alors qu’il a tué quelqun avec une arme:

“Je suis moi-même mère et j’étais touchée par la détresse des parents dont le fils est mort, tué, et dont le meurtrier, légitime défense ou non, histoires de gang ou non, s’en tire blanchi sans qu’aucun chef d’accusation ne soit retenu contre lui.”

Il y a une contradiction dans cette phrase. Votre phrase implique que la la légitime féfense est indépendante de la rétention de chefs d’accusions. Or ce n’est pas le cas. On ne peut pas retenir des chefs d’accusations si la légitime défense est retenue.

Le fait que l’accusé ne nie pas avoir tué n’est pas important, ce n’était pas du tout l’enjeu du procès. Tout le monde reconnait que l’acte a eu lieu. Le centre du procès était de savoir si Zeus Vega agissait en légitime défense. Aux US, la légitime défense est caractérisée lorsque la personne ressent un danger immédiat de mort ou de blessures grave (death or grievous bodily harm”), que ce danger soit réel ou non, comme le précise l’un des avocats.

Le rôle du jury était donc de déterminer si Zeus ressentait ou non cette peur, c’est tout. Honnêtement je n’ai aucune opinion sur la question, mais le jury a estimé que oui.

Par ailleurs je ne vois pas en quoi le juge est acquise à la défense. Elle cherche à éviter un mistrial. En quoi éviter un mistrial serait bien pour la défense?

21. Le samedi 24 octobre 2009 à 19:35 par iPidiblue à Trifouillis-les-oies

J’ai répondu à Charles mais comme j’ai oublié de signer mon message il est allé directement dans la boîte de Maître Eolas !

22. Le samedi 24 octobre 2009 à 19:54 par Koudou

J’ai un peu de mal à comprendre la place de chacun dans ce procès. Mogadam est considéré comme témoin alors que c’est lui qui a fait demi-tour en voiture mais Baker est sur le banc des accusé alors qu’il n’a rien fait de particulier.

La seule explication que je vois est cette confusion sur le tireur (Vega ou Baker ?). La police scientifique est pourtant bien capable de savoir d’où venait le coup de feu, de quelle arme venait le projectile, etc. Pourquoi Baker est-il accusé d’avoir tiré ?

23. Le samedi 24 octobre 2009 à 19:55 par Jemedemande

Est-ce que c’est un complot avec une arme mortelle quand Villy des Pins tente d’assassiner un homme de petite taille avec un fichier Excel ?

24. Le samedi 24 octobre 2009 à 20:12 par Yfig

Je n’ai pas répondu à iPidibleue parce que je suis trop occupé !

25. Le samedi 24 octobre 2009 à 20:25 par eudes

@charles :

>Je pourrais encore continuer longtemps tellement la liste est longue…. Allez, pour le plaisir, un >dernier argument en faveur du système US : le ministère public ne peut pas faire appel d’une >décision d’acquittement… Par comparaison, devinez comment fonctionne notre système (ex : >affaire >Maurice Agnelet et bien d’autres, acquittement en 1ère instance, et condamnation en >appel).

Je ne connais pas grand chose au droit américain mais j’ai l’idée (peut-être fausse, éclairez-moi si je me trompe) que ce qui est appelé aux USA “appel” est plutôt comparable à la casssation chez nous et qu’il n’y a pas de véritable appel (en particulier pas avec un nouveau jury populaire).

Est-ce exact ?

26. Le samedi 24 octobre 2009 à 21:14 par Charles

@ Eudes

Vous avez tout fait raison. L’appel dans les procès pénaux aux États-Unis est très particulier. N’étant moi-même pas un expert en droit US, je ne pourrai pas vous en dire plus. Malheureusement les ouvrages français sur le droit pénal américain ne font pas légion.

L’introduction en droit français de l’appel circulaire pour les procès d’assise (Loi Guigou de 2001) a été une innovation majeure. Ce qui l’est moins est d’avoir donné au parquet le même droit. S’il est normal de donner à l’accusé une seconde chance de se défendre en appel, il est en revanche choquant de mon point de vue de permettre au parquet de faire appel d’un acquittement et ainsi de passer outre une décision souveraine d’un jury populaire. (bien que j’admette que celui puisse être discuté et que certains arguments en faveur de l’appel du ministère public peuvent être relevés).

Eolas:
La loi du 15 juin 2000 avait exclu l’appel du parquet. Il a été établi par une loi de 2002 à la suite de l’affaire Lubin, dans laquelle des parents étaient poursuivis pour le meurtre de leur enfant. le père avait été acquitté, la mère condamnée avait fait appel. En appel, le jury ne pouvait qu’acquitter ou condamner la mère, le père était à l’abri. La défense de la mère a joué la carte de la culpabilité du père à fond et affirme que la condamnation de la mère serait due au fait que le jury n’a pu se résoudre à ce que personne ne paye pour cette mort.

27. Le samedi 24 octobre 2009 à 21:24 par Esurnir

Je n’ai pas encore vu la fin, mais au début il y a un débat hors présence du Jury à propos de si oui on non revenir avec la voiture était plus provocant / menaçant. Pourquoi ce débat ? Cela aurait été bon devant le jury, non?

Eolas:
Ce sont les débats sur les points techniques. Il s’agit de savoir si le jury peut ou non entendre tel argument. Si le jury entendait un argument irrégulier, il y aurait mistrial. D’où ces débats de procédure, où le juge joue son rôle d’arbitre.

28. Le samedi 24 octobre 2009 à 21:27 par cojoc

Aprés la quasi-certitude de l’inculpation de Vega pour meurtre avec prémeditation, je comprend l’importance accordé par la justice américaine du concept de légitime défense; non seulement le sentiment de menace ne suppose nullement une objectivité de celle-ci, mettant, ce me semble, la charge de la preuve de son inexistance aux deux parties, mais en considérant que revenir sur les lieux de l’altércation constitue une preuve de danger.Dans cette optique je me demande si l’appartenance du décédé à un gang et son passé violent n’ont pas constitués les charges les plus accablantes?

Ensuite je me questionne sur la décision du jury qui semble ne pas justifier les raisons de la décision, en tout cas dans sa lecture par l’huissier. C’est comme si ce qui est implicite par tradition, common law oblige est plus à même de répondre à cette question, cependant qu’en droit continental une justification ecrite est primordiale!

L’ avocat de Vega semble être un new-yorkais, ce qui a donné un contrast intéressant avec le monde du sin city et du fonctionnement “pan-américain” de la justice.

29. Le samedi 24 octobre 2009 à 21:27 par Esurnir

En train de voir le témoignage de Jesus… Je me suis dis dès la fin du cas de l’État de Nevada que Jesus devrait rester au chaud et la fermer. La cross examination est un bon moyen de tout foutre en l’air… Avez vous une idée de pourquoi il a fait témoigner Jesus?

30. Le samedi 24 octobre 2009 à 21:31 par Esurnir

Ah bon je viens de comprendre. C’est pour sortir le “We don’t leave our brother behind”. Ça me parrait risquer comme paris quand même. J’espère pour cet avocat qu’il a roulé sa bosse…

31. Le samedi 24 octobre 2009 à 21:59 par Micha

Ce qui m’a frappée personnellement, c’est la difficulté à appliquer de la raison, du rationnel (les références répétées au “reasonable doubt”, à “reasonable fear”, à “a reasonable man”) dans une situation née de choses irrationnelles : d’un côté, vous avez l’émotion du conducteur de la Range Rover (je retiens de son témoignage qu’il a fait faire demi-tour à son véhicule pour une question d’honneur, de dignité : on ne peut lui faire impunément de doigt d’honneur ou le provoquer, il est prêt à frapper pour cela, donc à se faire justice lui-même). De l’autre, côté Jesus Vega, c’est la peur - qu’il qualifie de panique - qui selon lui l’aurait poussé à aller chercher son arme, peur doublée d’un sentiment de devoir de protection envers son ami, Brian Baxter. Ce deuxième argument, j’y crois moins quand il est exprimé comme une règle morale, un principe de fraternité, mais je le crois plausible comme une sorte de réflexe conditionné acquis au cours de son entraînement militaire, et là encore comme une question d’honneur : on ne s’enfuit pas, on ne lâche pas le terrain. Il y a donc de l’irrationnel, de l’inconscient : Amir Mogadam croit vraiment qu’on lui a fait un geste insultant, parce qu’il est sans doute “touchy”, il veut donc se venger. Vega croit vraiment qu’il y a une arme, parce qu’on le lui a dit et que son cerveau a pu enregistrer, ou susciter la vision d’une arme - l’éclat du métal par exemple, donc il se défend légitimement. Quand Vega dit que c’est confus, un “blur”, ça l’est vraiment, “blurry”, parce qu’il n’a pas eu le temps de mettre calmement de l’ordre dans tout ce que son corps enregistre et ce que son cerveau lui dit. On vient de rediffuser à la télévision “Twelve angry men” (version 1957 avec Henry Fonda) : c’est un bel exemple de la difficulté à réintroduire du rationnel et une appréciation posée au moment où il faut décider d’un verdict.

Il y a aussi ce moment où Jesus fait allusion à Dieu (et là son avocat fait moult signes d’approbation de la tête), il me semble qu’en France on trouverait cela grotesque, hypocrite ?

32. Le samedi 24 octobre 2009 à 22:41 par GroM

Je n’arrive décidément pas à me faire au fait que ce ne soient pas les avocats de la défense qui parlent en dernier, mais les procureurs. En fait de garantie pour la défense, c’est pas top.

Par ailleurs, il semble que la “self-defence” soit beaucoup moins exigeante que la légitime défense, notamment en ce qu’elle ne semble pas exiger que la réponse soit proportionnée à l’agression.

33. Le samedi 24 octobre 2009 à 22:42 par Kata

Hem hem, n’ayant pas eu la même lecture des événements que la majorité des commentateurs je ne peux m’empêcher des poster.

Tout d’abord, cet épisode est clairement pour moi le plus intéressant de la série (mais j’avoue avoir manqué les deux premiers). Il met en relief des aspects étranges du système pénal américain qui m’ont particulièrement frappés.

Toutefois contrairement à la majorité des glossateurs ci-dessus, j’y ai vu un système extraordinairement mauvais. Je précise (sans une once d’agressivité) que je ne suis pas un juriste de tradition française et que ceci explique peut-être cela.

D’abord l’institution du Jury.Une garantie d’indépendance et de neutralité au 18ème siècle, une HORREUR actuelle. L’épisode montre clairement que ce qui est important pour les avocats ce n’est pas tant de constater une légitime défense sur le plan juridique mais bien de mettre les jurés dans la position de Vega qui aurait eu peur pour sa vie. Au diable donc la volonté du législateur (au sens large) et l’égalité des personnes devant la loi. Seuls compte les sentiments et autres comédies pour influencer le Jury. On retiendra notamment les pathétiques larmes à la barre clairement feintes de Baker au vu des scènes hors salle d’audience où il se fiche de la soeur du mort et du mort lui même avec Gentile. Un système que n’auraient pas dénigré les sophistes grecs, Scævola ou Cicéron mais c’était il y a plus 2000 ans quand même. Pour un verdict juste il est clair que le/les juge(s) européens restent une bien meilleure solution. Particulièrement quand vous êtes noir, que vous avec un passé dérangeant ou que vous êtes pauvres. Il suffit de comparer les épisodes 4 et 5 pour voir le fossé entre des avocats du top américain (Gentile) et des avocats d’office, fussent-ils les mieux payés des USA et sérieux (ce qui est TRES loin d’être le cas de nombre d’avocats d’office états-uniens. Je ne dis pas que les juges ne sont pas influencés mais ils sont loin de se faire avoir aussi facilement que les jurés quand ceux-ci ne sont pas assistés de professionnels du monde judiciaire.

Ensuite la procédure accusatoire. Il m’est absolument impossible de trouver la moindre circonstance atténuante à cette monstruosité pénale. S’il y a bien un domaine où l’inquisitoire, donc la recherche de la vérité doit prévaloir c’est l’action publique. J’adore les procès où le juge est arbitre mais en pénal c’est totalement déplacé et foncièrement injuste. Au vu de la catastrophe qu’est le système des peines aux USA il arrive que les procs négocient les faits avec la défense pour tenter d’aboutir à un verdict raisonnable (on notera les 20 ans prononcés dans l’épisode quatre qui sont manifestement aussi idiots que les peines planchers dans nos contrées).

Enfin la légitime défense. Je n’en veux pas aux commentateurs qui ont trouvé le verdict juste même s’il est vrai que cela sentait bon l’acquittement dès le témoignage désastreux d’Amir (même si j’ai tremblé jusqu’où bout avec les accusés je l’avoue). Moi-même j’ai rejoins mes pénates avec le sentiment d’un bon verdict. Suite à quoi j’ai réfléchi et je me suis rendus compte que je m’était aussi fait avoir par mes sentiments.

Des hommes s’invectivent. Suite à quoi l’un d’entre eux cours chercher son gun. Manque de bol les autres lascars reviennent descendent du véhicule couteau en main et on se retrouve avec un mort. Réfléchissons; un un mec descend avec un couteau (j’aimerais qu’on m’explique comment un Marine peut confondre un couteau avec un pistolet) cela vous donne le droit de l’abattre ? Non, non et non ! Vega et son glock n’avaient pas à réagir si soudainement. De plus il ne faut pas me faire croire qu’il était obligé de viser la poitrine. Son acte est clairement disproportionné, il n’y a pas de légitime défense au sens strict (en tout cas il n’y en aurait pas dans mon petit pays ^.^). Mais il peut y avoir une légitime défense putative qu’on pardonne vu les sentiments qui traversaient à ce moment M. Vega.
Dans cet optique il convient de rappeler le passé militaire de ce dernier. Il convient aussi de définir quel comportement aurait eu un homme raisonnable alors qu’une possible bagarre se préparait. J’estime qu’ un homme raisonnable aurait fichu le camp. Il ne serait pas resté avec une arme chargée à attendre qu’une bande d’ahuris éméchés (sauf le conducteur) reviennent pour bastonner. L’attitude de Vega et Baker n’a très probablement pas été motivée par la peur mais par une fierté-instinct animale grégaire (encouragée par l’armée ? ) que l’on peut souvent observer à la sortie des boîtes de nuits et à fortiori des boîtes de strip-tease où l’on vend de l’alcool. Et je pense qu’au contraire du Jury un juge l’aurait senti. Si ces faits peuvent être pris en compte dans la fixation de la peine il s’agit bien d’un homicide sans motif justificatif. Dans le cas contraire presque toutes les rixes de sortie de boîtes communes sous nos latitudes seraient légales même si on y utilise pas d’armes à feu.

Pour le surplus j’aimerais rappeler que les innovations américaines en matière de garantie de la défense sont certes à applaudir mais que depuis l’Allemagne, les pays nordiques et la Suisse sont allés tout aussi loin (et même plus loin) en conservant les avantages incomparables de l’inquisitoire et du juge professionnel. Le droit de réponse, de consulter le dossier, de participer à l’instruction, d’avoir un défenseur, d’avoir un juge impartial et indépendant établi par la loi, d’avoir accès à une deuxième instance pénale, le procès équitable, l’avocat de la 1ère heure, la liberté sous caution etc… etc… ne sont pas des vains mots aussi sous nos latitudes et même pour la majorité de la population européenne. Nous n’avons pas à rougir de ce côté là.

@Charles Je vois pas en quoi le fait que le ministère public ne puisse pas faire appel est une qualité. Le but de la procédure c’est de faire en sorte que la volonté du législateur dans le droit de fond soit le mieux respecté possible, enfin à mon avis.

Enfin pour reprendre sur le parquet je l’ai trouvé absolument inhumain dans l’épisode 4 comme dans le 5. Le but c’est de gagner des matchs, de torcher la défense et d’avoir les louanges du bon peuple… Ces gugus devraient aller jouer au foot. Là on parle de la vie d’être humains. Le moment où la famille Lui est abattue après le verdict et où les procs passent avec un regard de dédain et des commentaires en gros : “zut ça va faire baisser mon ranking; vivement que j’aie des avocats moins compétents en face”, m’a particulièrement choqué. L’instruction à décharge aux USA … ?

Alors si l’on me demande (cf Charles en n°15) si les principes du système pénal européen dont meilleurs que ceux des USA, je n’hésite pas une seule seconde même s’il faut bien reconnaître que nous avons aussi de grosses casseroles.

PS: Le maître des lieux avait autrefois commenté dans un billet qu’il fallait mieux une justice à l’américaine où l’argent est décisif qu’une justice de pauvre pour tous. Je disconviens respectueusement.

PS 2: La scène où l’avocat reçoit ses clients avec un t-shirt m’a bien fait rigoler :D De même que celle où Amir vient en gangster au tribunal. Autre pays autres moeurs.

PS 3: A voir également la scène où Vega dit que c’est Dieu qui lui a mis une arme entre les mains ce soir là. Dommage pour la famille Lui… Espérons que ce type de doctrine nauséabonde soit tenue à l’égard de notre Europe où elle a déjà produit trop de tristesse et de malheur.

34. Le samedi 24 octobre 2009 à 23:03 par Charles

@ cojoc :

« Ensuite je me questionne sur la décision du jury qui semble ne pas justifier les raisons de la décision, en tout cas dans sa lecture par l’huissier. C’est comme si ce qui est implicite par tradition, common law oblige est plus à même de répondre à cette question, cependant qu’en droit continental une justification ecrite est primordiale! »

Vous faites erreur. Notre droit ne connaît pas non plus de motivation écrite concernant les procès d’assise. Toutefois il vrai aujourd’hui que cette question fait grandement débat et qu’il est possible que la législation change rapidement avec la jurisprudence de la CEDH, même si la Cour de cassation fait de la résistance (Dans un arrêt rendu le 14 octobre 2009, la chambre criminelle de la Cour de cassation réunie en formation plénière a jugé conforme aux exigences du procès équitable la condamnation prononcée par un arrêt de cour d’assises qui ne contient pas d’autre motivation que la réponse aux questions posées à la cour et au jury).

@ Esurnir :

« En train de voir le témoignage de Jesus… Je me suis dis dès la fin du cas de l’État de Nevada que Jesus devrait rester au chaud et la fermer. La cross examination est un bon moyen de tout foutre en l’air… Avez vous une idée de pourquoi il a fait témoigner Jesus? »

Tout est une question de stratégie. Certes, nul ne peut être obligé de témoigner contre soi-même (5ème amendement) et le fait pour l’accusé de ne pas témoigner ne doit pas être retenu par le jury contre lui.

Mais voyons la vérité en face. Il est clair que cela fait toujours mauvaise impression sur un jury lorsque l’accusé ne témoigne pas, surtout quand il ne prétend ne rien avoir à se reprocher. Les risques pour la défense pouvaient paraître minimes en faisant témoigner Vega. Il présente bien, semble bien s’exprimer, il a réussi sa vie, est un ancien marine… Bref, le type qui semble respectable sous tous les rapports…. Pourtant, sa prestation a été plus que mauvaise, au point qu’on peut se demander si son avocat a bien fait son boulot en le préparant au contre-témoignage… Ce qui montre en effet tous les dangers de la cross-examination…. En revanche, si vous avez regardez l’épisode de la semaine dernière, il était clairement préférable comme l’a fait la défense de ne pas faire témoigner l’accusé.

35. Le samedi 24 octobre 2009 à 23:34 par cojoc

(Dans un arrêt rendu le 14 octobre 2009, la chambre criminelle de la Cour de cassation réunie en formation plénière a jugé conforme aux exigences du procès équitable la condamnation prononcée par un arrêt de cour d’assises qui ne contient pas d’autre motivation que la réponse aux questions posées à la cour et au jury).

Lequel?
Il est peut-être inévitable que, dans des cas où le doute étant impossible et la preuve inexistante, c’est le principe et la tradition renforcés par la conviction intime qui peuvent donner le droit.

36. Le dimanche 25 octobre 2009 à 00:32 par Gwynplaine

Et donc là, la défense n’a pas à prouver la légitime défense ? On est reste à : le doute profite à l’accusé ?

Parce que honnêtement, vu les informations qui nous sont données (forcément partielles, certes), je pense que l’homicide est plus probable que la légitime défense. Cela dit, il y a un doute quand même.

37. Le dimanche 25 octobre 2009 à 01:27 par Narayan

Une petite question aux juristes: dans le système français, les jurés d’assise délibèrent en présence d’un (plusieurs?) magistrat. Qu’en est-il des jurés étasuniens ?

38. Le dimanche 25 octobre 2009 à 02:20 par Fredgrigri

M. Wei Liu a été condamné et incarcéré pour tentative de meurtre, qu’est ce qu’il faisait dans la voiture et pas en prison ? Surtout quand on a l’impression que lorsqu’on utilise une arme sur quelqu’un, et que l’on est reconnue coupable, on prend cher (cf les précédent épisode de justice a Vegas), je suppose que le fait qu’il n’est pas tué a du jouer gros dans la diminution de sa peine, même s’il en avait l’intention (de tuer).

Pour ma part, c’est cet évènement (pas tellement le fait qu’il ne soit plus en prison mais surtout qu’il ai eu un précédent à vrai dire) qui m’a le plus marqué dans tout le procès et m’a fait pencher du coté de Jesus

En tout cas j’ai trouvé ces 4 documentaires vraiment intéressants (je n’ai pas vu le 1er), ils m’ont permis de mettre des images, d’éprouver des sentiments, d’humaniser la justice de façon beaucoup plus forte que vos mots, Eolas, ou que ce qu’on peut voir à la TV comme fiction principalement.
Ça serait vraiment intéressant de voir la même chose en France.

39. Le dimanche 25 octobre 2009 à 02:22 par Esurnir

@Micha Je pense que l’effort de mettre du rationel là ou il n’y en a pas existe afin de se débarrasser de l’arbitraire, de la condamnation au faciès. Cela permet de mettre des critères “ça c’est de la légitime défense, ça c’est inacceptable”.

40. Le dimanche 25 octobre 2009 à 02:23 par Esurnir

@Narayan: Ils délibèrent tout seul comme des grands :’).

41. Le dimanche 25 octobre 2009 à 02:27 par Esurnir

@stellar: C’est légal, pourquoi il devrait se gêner. Si un avocat français gérait un cabaret tout ce qu’il y a plus de légal sans se mêler à la pègre, viendrait on lui chercher des noises à Paris ? Je ne suis pas sur. (en tout cas je trouverai cela bien pudibond de considéré la gestion d’un cabaret comme un mauvais trait de caractere

42. Le dimanche 25 octobre 2009 à 02:58 par geka

J’ai l’impression que la traduction (je regarde sans) a parfois laisse de fausses idees chez les lecteurs/spectateurs.

Alors pour clarifier un peu tout cela:

1- Dans la scene ou l’on voit les deux avocats de la defense discuter avec les “commis d’office” (on revoit Ivette Maningo). Les commis d’office plaisantent sur le fait que c’est un “client modele” qu’ont les avocats. Ils ne disent pas ne pas comprendre qu’il ai pu payer la rancon… ils plaisantent juste sur le fait que leurs propres clients, souvent defavorises, n’ont pas ces moyens. (voir les 4 episodes precedents)

2- Au restaurant, les avocats ne se moquent pas de la soeur de la victime, mais du fait que les procureurs l’aient fait monter a la barre en fin de vendredi apres-midi, pour faire pleurer la foule “bouhou c’etait mon frere il etait gentil”. D’ailleurs ca n’a pas l’air d’avoir marche des masses… et les avocats precisent “bah on a toujours droit a ca, c’est juste un mauvais moment a passer”. Ils se moquent de la strategie, pas de la soeur. D’autant plus que la temoin est tres tres mal “utilisee”. Deux questions “vous connaissez?” “oui c’est mon frere” “la photo la?” “Noel 1998”. Plus de questions. Euh ok, donc la victime a une famille.

3- Concernant le fait que l’avocat possede ce qui est apparemment un des plus gros bars a StripTease de Vegas (la ou ils fetent la victoire): La page wikipedia du-dit bar precise qu’il est entre en possession de la famille Gentile parceque le proprietaire precedent l’a utilise pour payer ses frais d’avocats… Voir ici: http://en.wikipedia.org/wiki/Palomi…

Mon avis personnel sur ce que j’ai vu.

- Deana (la procureur qui commence) est mauvaise. Que ce soit son discours d’ouverture ou son discours de fermeture, elle n’a pas l’air convaincue. Elle a des sautes de voix tres etonnantes. Certes on ne peut pas lui demander d’etre soprano, mais dans son entree, j’ai remarque “alors hum, ben euh, donc, ah oui” on a envie de lui dire d’aller se chercher un cafe au starbucks du coin… Idem dans son requisitoire, elle est agressive, mais ne semble pas convaincue elle-meme.

- Le conducteur est un tres mauvais temoin pour l’accusation. Notamment par son agressivite puis ses absences et retards repetes. Il a l’air franchement idiot… casquette ou pas… Et puis quand il avoue qu’il a balance le couteau… on sent qu’il y a quelque chose qui cloche. Il fait tres ecervele…

- Zeus a ete tres mediocre a la barre, notamment dans son agressivite “je ne comprends pas la question”, et le fait qu’il s’embrouille dans ses explications. Notamment sur le deroulement des operations… apres avoir vu son temoignage, on ne sait vraiment pas quand il a commence a courir, quand son ami lui a indique avoir vu une arme, etc. Toutefois, en regardant les scenes coupees, on comprend qu’il est deconcentre par sa propre peur, a la fois de la justice, et a la fois des gros bras qui se sont glisses dans le palais, et pour certains dans la salle d’audiences.

- Certes, les parents qui ont l’air bien honnetes sont en pleurs du fait que l’homme qui a pris la vie de leur fils n’est pas mort. Mais la defense a montre (j’ai ete convaincu par cela) qu’il avait un couteau a la main lorsqu’il est sorti de la voiture. Si le suspect n’avait pas tire, qui nous dit que ce n’est pas lui qui serait mort? (je suis convaincu de la legitime defense…).

- La base du passage en justice de Brian est le suppose doigt d’honneur qu’il aurait fait. Quand on voit les videos, je suis convaincu qu’il ne fait rien. A un moment on voit au niveau de son epaule une marque blanche, comme s’il avait leve la main. Mais en regardant a nouveau, je pense que c’est un coup de vent qui donne cet effet, cela a cause d’une manche ample. D’ailleurs l’accusation ne s’attarde pas sur ca.

- La selection du jury est interessante, les deux parties demandant ce que les jures ressentent vis a vis des armes a feu, afin d’eviter une diabolisation de ce cote-la.

Je comprends que certains ici imaginent tout de suite “justice de riches”, mais je ne vois pas en quoi cet homme aurait du etre condamne parcequ’il est riche… Les procureurs quand elles parlent semblent presque regretter d’avoir a faire face a des avocats de la defense non commis d’office… et une de leurs dernieres phrases m’a fait penser a ce que l’on voyait dans l’episode precedent… le cote “jeu”: “on ne peut pas toujours gagner”

43. Le dimanche 25 octobre 2009 à 06:00 par Véronique

J’approuve le commentaire de geka.

Dans l’épisode précédent il s’agissait d’une défense fragilisée par la stratégie adoptée: la légitime défense.

Dans cet épisode il semble que l’accusation soit fragilisée pour la même raison: un manque d’enthousiasme des procureurs pour leur propre stratégie et de conviction pour leur thèse, avec un témoin clé ( le conducteur de la voiture) très peu fiable.

Question à Eolas

je ne souhaite pas sa transposition en droit français, juste qu’on se mette à niveau côté respect des droits de la défense : droit à la présence de l’avocat tout au long de la procédure dès l’arrestation, droit de se taire sans que ce silence ne soit retenu contre l’accusé, détention provisoire exceptionnelle.

En droit français, est-ce possible de concilier une procédure inquisitoire avec des droits de la défense équivalents à ceux que vous listez ?

Autrement dit, des droits de la défense très améliorés et plus conséquents n’ont-ils pas pour corollaire incontournable la mise en place d’une procédure accusatoire nette : confrontation entre deux thèses antagonistes ?

44. Le dimanche 25 octobre 2009 à 06:47 par Eclipse

Ce qui pour moi constitue l’argument qui me fait penser que justice a été rendu est : si Vega n’avait pas eut d’arme, qui aurait été mort ou gravement blessé ?
Je suis un farouche opposant à la vente libre d’armes et à la philosophie “cow-boy” mais force est d’admettre que légalement Jesus Vega avait le droit d’avoir une arme et de s’en servir en état de légitime défense et il me semble (comme visiblement il a semblé au jury) que si Jesus Vega n’avait pas tiré la baston qui allait arrivé aurait fait d’autres victimes. Certes les deux accusés auraient mieux fait de s’enfuir avec leur voiture, mais dans le feu de l’action, je ne suis pas sur que leur réaction soit aberrante ou condamnable.

En outre, je trouve la procureur Linda Lewis complètement conne, surtout à deux reprise : lors du contre interrogatoire de l’expert en armes à feu à monter sur ses grands chevaux car le témoin ne va pas dans son sens (en tant que juré j’aurais pas particulièrement apprécié ça) et aussi lors de l’examen du parking où a eut lieu la fusillade, ne comprenant pas que Brian Baker puisse rester solidaire de Jesus Vega, pour moi ça me semble évident que si Baker pense que Vega a correctement agi il appuie sa défense à la sienne. SUr que si ils se tiraient dans les pattes ça arrangerait l’accusation… Ca semble vraiment être une sombre conne.

45. Le dimanche 25 octobre 2009 à 09:24 par Tendance

Je vous invite à rapprocher ce cas de l’affaire Hanley. Dans l’affaire Hanley, l’acharnement sur la victime excluait la légitime défense. Ici, l’accusé a vidé tout un chargeur (voir les traces de balles sur le véhicule au début du film). Comme le système en vigueur au Nevada (et ailleurs aux US) conduit soit à un acquittement, soit à la prison à vie (ou à une très longue peine), il n’est pas possible au jury de prononcer un jugement proportionné aux circonstances et de sanctionner le fait que la riposte (au départ par hypothèse en légitime défense) n’était pas proportionnée au danger.

46. Le dimanche 25 octobre 2009 à 09:37 par geka

Dans l’affaire Hanley, la victime n’avait pas de couteau a la main. De plus De Rac parlait de s’etre fait droguer, etc… si c’avait ete le cas, les enqueteurs auraient trouve quelque chose sur le corps.

Apres il y a le boulot de la defense… dans le cas de Hanley, ils ne sortent pas de temoignages disant que la victime pouvait etre violente… dans le cas de Vega, ils insistent la-dessus.

Certes, il y a quand meme un semblant de “tout ou rien” dans ces jugements…

Ce que je remarque egalement vis a vis des “objections”: c’est quand meme tres hypocrite: l’avocat de la defense commence a interroger le conducteur sur ses problemes de drogues, le montrant sous le jour d’un delinquant. Meme si l’objection est ensuite acceptee, l’idee est quand meme passee dans le cerveau des jures…

47. Le dimanche 25 octobre 2009 à 09:53 par Tendance

@geka

La riposte est au départ en légitime défense. mais, il n’y avait pas de raison de vider tout un chargeur. La victime a, soit dit en passant, pris deux (et pas seulement une ) balle dans le dos. Pas mal pour de la légitime défense.

@Eolas

Je propose de renommer cet épisode: ‘QI de pétoncles’

48. Le dimanche 25 octobre 2009 à 10:12 par Véronique

@ Tendance

Si j’ai bien saisi l’épisode, l’élément clé pour parler de légitime défense est la peur. Les avocats insistent beaucoup sur cet élément. De ce point de vue je pense que la défense de Vega a réussi à démontrer au jury que Vega pouvait se sentir menacé .

Dans l’épisode précédent, rien ne vient étayer un sentiment de peur chez Hanley.

49. Le dimanche 25 octobre 2009 à 10:12 par GroM

@Tendance: je crois qu’on apprend systématiquement à doubler les tirs, dans les forces de l’ordre, pour être sûr de mettre hors de combat le méchant. Après, tout un chargeur, ça ressemble à de la panique. Pour le coup, dans les mêmes forces de l’ordre, la discipline de feu est quelque chose de sacré.

50. Le dimanche 25 octobre 2009 à 10:34 par Mark Havel

En même temps, Tendance, si l’on panique vraiment, je ne suis pas certain qu’il soit possible de se dire “hum bon il a son compte, ça suffit j’ai faire preuve d’une riposte proportionnée au danger…”ou que l’on puisse réellement prendre le temps de peser le pour et le contre avant de commencer à tirer dans ce genre de situation. Enfin, moi, je ne sais déjà pas comment je réagirais dans des circonstances similaires, vous semblez déjà le savoir pour vous et c’est très bien…
C’est pour moi le point sur lequel les avocats de la défense ont parfaitement réussi : réussir à ce que les jurés (et aux spectateurs du documentaire du coup) finissent par se dire qu’ils n’auraient probablement pas fait beaucoup mieux dans des circonstances similaires.

En plus deux choses différencient grandement cette affaire de celle de De Rac Hanley. D’abord, il y a eu des témoins directs et un enregistrement de ce qu’il s’est passé qui ont permis d’étayer les versions des accusés, d’avoir une espace de base de fait sur laquelle on pouvait difficilement ergoter. Et les avocats croyaient en leur client. Gentile le dit clairement à un moment, il pense que la victime a plus ou moins eu ce qu’il méritait et il croit dur comme fer que son client a agi réellement en état de légitime défense, quelqu’est pu être la “proportionnalité” de sa réaction. Comparé aux avocats commis d’office de l’épisode précédent qui faisaient ce qu’ils pouvaient mais sans plus, c’est déjà autre chose, il y a plus de motivation. En plus ils se connaissent un peu, mangent ensemble au restaurant…

51. Le dimanche 25 octobre 2009 à 10:47 par cojoc

Finalement le fait que Wei a un passé très violent ne fait que souligner le fait qu’il y a des individus disposés à cela, comment les empêcher de nuire, certainement pas en les assimilant à des victimes!

Je reviens à mon questionnement initial: l’appartennance à un gang reputé violent valide la méfiance dès le début , la peur ensuite et en cas d’ incident, comme dans ce cas, la panique et le geste naturel de défense.

Aussi banal que cela puisse paraître, dans cette histoire il y a un agresseur et un agressé et l’on ne saurait dire combien de secondes l’on pourrait attendre afin de conclure qu’un type armé d’un couteau ou autre arme, a des intentions hostiles!
A cela le jury a repondu unanimement!

52. Le dimanche 25 octobre 2009 à 11:55 par lapocompris

Après avoir visionné toutes les épisodes, j’arrive à cette déduction: avec les meilleurs avocats de l’aide juridictionnelle on est condamné, avec les meilleurs avocats privés on est acquitté.

53. Le dimanche 25 octobre 2009 à 12:12 par lapocompris

Ce qui m’amène à poser la question suivante: en France, y-a-t-il eu des procès en cour d’assise où l’accusé était défendu par un avocat commis d’office ?

54. Le dimanche 25 octobre 2009 à 12:23 par iPidiblue et les gangs

Condamner Vega cela voulait dire en clair : messieurs des gangs de Los Angeles venez donc en bande à Las Vegas mettre la ville à feu et à sang et en coupe réglée et repartez quand cela vous chantera les poches pleines … on ne vous fera rien, nous les gens de Las Vegas qui sommes des moutons bons à tondre.
Les membres du jury ont été très clairs, le message : ne venez pas nous faire chier !

55. Le dimanche 25 octobre 2009 à 12:36 par fredo

c’est une question que m’inspire les deux derniers paragraphes de votre post

les Etats Unis c’est aussi 51 états.

Comment justement se répartit la notion de droits de la défense que vous évoquez? Il y a une sorte de corpus commun ou bien les états font ce qu’ils veulent et les éléments que vous évoquez sont propres à l’état du Nevada?

56. Le dimanche 25 octobre 2009 à 12:42 par Altaïr

Voilà, j’ai vu les 5 épisodes (merci à vous maître de m’avoir fait découvrir ces documentaires)

Il y a quelque chose qui m’interpelle au regard de ce 5e opus comparé aux quatre autres.

D’abord je constate le côté cinématographique qui consiste à glisser une victoire des avocats en dernière position (“Ah ! Tout de même !” Soupire le public soulagé)

Là où l’implication d’un des accusés dans la mort de Wei ne fait aucun doute -légitime défense ou non-, je suis bouleversée de constater qu’ils en sortent absolument indemnes alors que dans le 2e ou 3e épisode, le soi-disant tireur fini en prison à vie, bien que le doute plane quand même fortement sur son rôle dans la fusillade, et que la démonstration des avocats de la défense me semble très pertinente. (vous me direz, pour lui aussi ça aurait pu être pire, il aurait pu passer sur une chaise électrique. Mais je ne vois pas de justice dans cette complaisance malgré tout)

J’ai l’impression d’un décalage terrible entre les quatre affaires précédentes et cette dernière…

Chance des prévenus qui ont une juge bien campée dans ses baskets et des adjointes au procureur en petite forme ?
Ou c’est plus profond que cela ?

57. Le dimanche 25 octobre 2009 à 12:49 par Tendance

Je suis quand même interloqué par la facilité avec laquelle certains commentateurs justifient l’auto-défense. GroM, l’accusé ne fait pas partie des forces de l’ordre.

Il faut déjà se poser le problème de la légitimité du port d’arme.

Heureusement que nous ne vivons pas dans une société où la possession d’une arme est un droit constitutionnel, lequel mène (merci Charlston Heston) à ce genre de massacre stupide. Ici, on a un mort pour un incident banal. Ce n’est pas cette décision qui mettra du plomb dans la cervelle (au sens figuré pour une fois) aux uns et aux autres.

Je maintiens que dans cette affaire, la riposte allait au delà de la légitime défense et que le système pénal US, en raison de ses critères par tout ou rien (acquittement ou perpète) ne permettait pas de sanctionner raisonnablement ce dépassement, et ce seul dépassement.

Comme quoi, c’est paradoxalement l’existence d’un système hyperrépressif qui a conduit à un acquittement: encore un effet pervers des peines plancher.

58. Le dimanche 25 octobre 2009 à 14:12 par Junius

Quelques questions à Maitre Eolas

(la famille de Junius a vu l’affaire Zeus/ Barker et discute, depuis, intensément)
1 On ne comprend pas comment la légitime défense peut être invoquée par Zeus : l’évaluation subjective du danger semble primer sur l’effectivité réelle du danger. Le tir au pistolet ne nous semble pas un dernier recours. Junius, elle, se serait enfermée dans sa voiture.
2 Il nous a semblé que les ” deux filles” n’étaient pas très bonnes : elles n’ont pas réussi, contrairement à Gentile, à faire de Zeus un repoussoir social : était-ce impossible ?
3Wei Liu semble s’identifier au voleur de chevaux dans le far west d’antan : “Qu’il meure !”
4 Auriez vous la gentillesse de faire un parallèle avec le dernier homicide en légitime défense dont parlent les journaux français ? ( le père de famille qui réussit à étrangler le cambrioleur violent entré dans sa maison en pleine nuit )
Je vous remercie.
Junius’s voice

59. Le dimanche 25 octobre 2009 à 15:16 par eric

Sur le systeme des cautions (“bail”). On peut imaginer le meme systeme pour la “garde a vue” ce qui eviterait pour les mis en cause de rester dormir la nuit par terre dans les commissariats comme des sans abris.

En Angleterre, cela s’appelle “police bail” et vous vous engagez a revenir pour d’autre interrogatoires avec votre avocat present bien entendu (On n’est pas en Turquie avant 2005 en France en 2009).

De meme ce systeme permettrait de supprimer l’utilisation des “depots de nuit” dans la region parisienne.

Il suffit d’une caution suffisamment importante et un mandat de recherche rapide pour que cela dissuade la fuite des mises en cause vers d’autre cieux.

A moins que la privation de liberte n’est pas la preocupation no1 de ces 600,000 gardes a vue et 30,000 detention au depot, mais une punition avant l’heure ;)

Quand vous dites la “procedure americaine”, je dirais plutot “d’origine europeene ou anglaise”, l’habeas corpus et magna carta viennent pas de las vegas pas plus que l’esprit de lois ou les philosophes europeens des Lumieres… Allez revons en 2050 en France, on sera peut etre capable d’appliquer les idees de 1750.

60. Le dimanche 25 octobre 2009 à 15:22 par einsenman

L’acquittement ne s’imposé pas du tout dans ce procès , les avocats de la défense ont fait un travail remarquable en réussissant a faire s’identifier le jury a Zeus , ce qui n’était pas du tout gagné .

Et en effet , bien que l’acquittement ne soit pas la peine la plus en adéquation au vu des faits , chaque membre du jury a du se dire que si cette situation lui arrivait il pourrait ( peut être aimerait ) réagir comme Zeus l’a fait , rajoutez que le bénéfice du doute doit bénéficier au prévenu et le tour est joué .

D’ailleurs j’ai trouvé les avocats de la défense , plus particulièrement celui de Baker excellents , ils ont dès le début très bien cerné le problème .
Et j’avoue que le style d’avocat agressif et sur de lui , est de loin celui qui a fait le plus ses preuves , les plaidoiries ont été un vrai régal .
L’avantage dans les procès contradictoire est manifeste , le fait de faire face a un jury me semble plus humain , sachant qu’il doit voter a l’unanimité pour sanctionner , si l’on est innocent on est sur de s’en sortir pour le peu qu’on ait un bon avocat (notez ici que les prévenus sont tous les deux issues des minorités ethniques ) .

Et oui , l’on se trouve au pays du far-west , le pays ou le ratio d’arme par habitant est de presque 1 depuis que Obama a été élu ce qui a renforcé l’acharnement des américains a acheté des armes de peur de se les voir interdire prochainement , le pays ou l’on autorise constitutionnellement le peuple a se défendre lui même avec ses propres moyens en cas d’agression .

61. Le dimanche 25 octobre 2009 à 15:33 par Willy

@Tendance : “Je maintiens que dans cette affaire, la riposte allait au delà de la légitime défense”

J’imagine le procureur ergoter sur ce point, et l’avocat de la défense de répondre : “Alors, imaginez, vous avez peur pour votre vie et pour celle d’un ami, vous êtes paniqué, vous avez une arme à la main. Vous tirez une balle, peut-être deux, et là vous vous arrêtez en vous disant “C’est bon je crois que ma réponse a été proportionnelle”, et vous rangez votre arme… Come on, you’re kidding aren’t you ?”

62. Le dimanche 25 octobre 2009 à 16:13 par Micha

@ Esurnir : oui, c’est cela, c’est pour cela que souvent cela paraît une mission impossible. Dans l’affaire présentée dans cet épisode (hélas je n’ai pas vu les séquences coupées), les défendeurs se réjouissent que le danger des préjugés raciaux/ethniques puisse être évacué (mais l’ont-ils été tout autant pour l’accusation, avec cette sous-trame des “gangs asiatiques” ?).

@ Geka: ce n’est pas seulement sur le passé délictuel de Mogadam que Gentile insiste, c’est également un moyen de mettre en avant son instabilité émotionnelle et sa tendance à fictionnaliser.

@ Tendance : comme indiqué par Havel et Willy il me semble que le vidage du chargeur est bien plus cohérent dans un contexte de peur panique. C’est au contraire s’il y avait eu une seule balle, en pleine tête (et tirée en position bien préparée, comme aurait voulu le lui faire dire la procureure) qu’on aurait pu douter que Vega ait perdu les pédales. Cela dit, je suis parfaitement d’accord avec vous sur le problème des armes aux Etats-Unis. Il y avait encore récemment un article dans la presse américaine se penchant sur les statistiques d’achats d’armes : ces achats avaient augmenté à la suite de l’élection d’Obama, de peur de l’adoption d’une nouvelle loi restreignant fortement la possibilité d’acquérir une arme, suscitant paradoxalement la bonne santé des sociétés spécialisées, puis après un reflux tel que certaines de ces sociétés étaient en difficulté financière, un rebond à la suite de campagnes présentant Obama comme un partisan de la collectivisation forcée, du muselage de la presse de droite etc. Nouveau rebond à mettre en parallèle avec celui de l’achat d’or (plutôt que du foncier ou des titres). Bref, les statistiques de ventes d’armes pourraient-elles être un outil de sondage des courants profonds de l’opinion aux USA ?

63. Le dimanche 25 octobre 2009 à 16:23 par verbeux

@Maître Eolas. Suis supris par votre commentaire concernant la procédure américaine. Les droits de la défense sont plus importants au cours de la procédure… mais cela se termine par des peines plus lourdes et souvent automatiques. On peut en conclure que l’accusé y perd ce que la défense y gagne, ce qui est une aberration, non point juridique, mais philosophique (j’ose le mot). Le système accusatoire, c’est le paradis des avocats. Pas celui des prévenus.

64. Le dimanche 25 octobre 2009 à 16:29 par Alisse

___

Je voudrais dire quelque chose sur le droit de garder le silence…hi…hi…

Le législateur a effectivement fait marche arrière sur l’obligation qui était faite aux O.P.J de faire connaître au mis en cause la possibilité qu’il a de garder le silence.

Eolas ajoute : “je ne souhaite pas sa transposition en droit français,juste qu’on se mette à niveau côté respect des droits de la défense : droit de se taire sans que ce silence ne soit retenu contre l’accusé.

Est-ce que les praticiens peuvent en dire plus ce point;

Peut-on réserver ses déclarations pour le magistrats du Parquet, voire pour les juges ?

Comment réagissent les policiers face à un individu qui voudrait faire respecter ce droit (claques ou pas claques) ?

En quoi ce silence se retourne contre le mis en cause par la suite?

Comment réagissent les magistrats?
_

65. Le dimanche 25 octobre 2009 à 21:55 par Macha

ce qui me frappe dans cet épisode, c’est que la scène du crime est intégralement filmée. Et pourtant, le procès ne paraît pas simplifié. Au contraire, le moindre geste est sujet à discussion et à hypothèses (j’adore d’ailleurs lorsque l’avocat explique à Véga ce que ce dernier a pensé à tel moment, pourquoi il a agit de telle façon… et que Véga aquiesce, soulagé de comprendre enfin son propre comportement ). En tout cas, à l’heure où la vidéosurveillance est présentée en France comme le moyen d’assurer la sécurité des gentils citoyens et de punir les vilains délinquants, voici la preuve qu’un enregistrement vidéo ne résout pas tout!

66. Le dimanche 25 octobre 2009 à 22:46 par Saint-Just

@ Alisse:
Un élément de réponse en provenance du droit anglais: Vous avez le droit de garder le silence, mais risquez de compromettre votre défense si vous ne mentionnez pas des faits sur lesquels vous axerez votre défense ultérieure (“(if the accused) fails to mention any fact which he later relies upon and which in the circumstances at the time the accused could reasonably be expected to mention”)

67. Le lundi 26 octobre 2009 à 07:44 par pim

Le “Ministère Public” s’est fait dé-mon-ter par les avocats de la défense ! Mais les questions qu’il soulevait étaient intéressantes dans le sens où sur de mêmes faits l’interprétation devient différente suivant que l’on tienne compte ou pas d’éléments à charge ou non et entraine d’agir suivant son intérêt.

68. Le lundi 26 octobre 2009 à 07:48 par nimapi

En fait, la stratégie de la défense consistait à faire admettre la peur de l’accusé au jury. La peur étant la raison/le déclencheur de la légitime défense. Et l’avocat le dit, et je pense que c’est à ce moment que la cause est gagnée : “Avoir peur n’est pas illégal !”

69. Le lundi 26 octobre 2009 à 10:54 par Switz

Le comportement initial de Vega pouvait éventuellement représenter un élément d’appui pour le ministère public: chercher le gun dans la boîte à gants devant le siège passager, ouvrir la boîte de rangement et engager le chargeur constituent une suite d’actes plutôt délibérés et réfléchis, contrastant avec l’allégation par la défense d’un état de panique. On voit d’ailleurs le temps mis par l’accusé lorsqu’il répète ces gestes à la barre.

Enfin, sa réponse, peut-être une rodomontade, qu’il est capable de faire la différence entre un couteau et un pistolet aurait pu être également un possible élément à charge; L’accusation ne semble pas faire grand cas de ces deux faits.

Néanmoins, cela fait peu pour contrebalancer le procès en faveur de l’accusation. Le retour arrière de la 4*4 noire après son éloignement initial atteste bien l’imminence d’une agression. La bonhommie de Baker observable sur la vidéo au départ de la séquence signe au contraire qu’il n’entendait chercher de crosse à personne.

70. Le lundi 26 octobre 2009 à 11:04 par Gemini

Maitre j’en profite pour vous demander si à l’occasion le coeur vous dirait de nous faire un billet sur la légitime défense, d’après les lois françaises. J’ai cherché sur votre blog, sans succès, et les articles de loi que j’ai lu sur le sujet ne m’ont pas aidé.

Je voudrais être mieux informé sur ce point, notamment en termes de jurisprudence existante, pour les cas d’agressions, de cambriolage etc… d’être un peu informé sur ce qu’il est possible de faire si ces évènements malheureux se présentent.

71. Le lundi 26 octobre 2009 à 12:21 par Remy

@ Pat
l’accusé n’a pas “payé” sa liberté, dans le sens où il ne reverra plus jamais son argent. Aux US, contrairement à la France, il existe ce qu’on appelle le bail. Le bail est un moyen de s’assurer que le suspect comparaitra au procès. S’il respecte toutes ses obligations, alors il retrouvera son argent. De plus, il me semble que vous avez mal interprété les paroles de l’avocate. Elle n’est pas étonné du fait qu’il a pu payer le bail, mais du fait même qu’il a pu l’obtenir alors qu’il est accusé de first degree murder.

Il reverra certes son argent mais encore faut-il pouvoir le sortir. Dans un cas de meurtre je ne serais pas surpris que la caution dépasse - peut être même largement - le million de dollars. Quant aux paroles des avocats et à leur interprétation voici ce qu’ils disent à 50”30 :

_ Is this your client Dominic?
- Over there
- Good looking client. How come my clients don’t look like that God damned ?
- When was the last time you got a client who was on the Marines and has no previous record?
- and who’s out on bail on a murder

Le sous-titre à cause duquel j’ai probablement été péremptoire traduit cette expression par “Et qui a pu payer la caution pour meurtre”. Si la traduction ne laissait pas de doute, les véritables paroles de Dominic sont plus nuancées. Toutefois je persiste un peu. Si l’avocat ne pensait qu’au fait que le bail n’a pas été rejeté il dirait bien plus probablement qq chose comme and whose bail has not been denied. Les deux interprétations sont possibles, les deux idées sont probablement présentes dans son esprit. Bravo en tout cas pour votre perspicacité et pour votre méfiance vis-à-vis des sous-titres.

72. Le lundi 26 octobre 2009 à 13:50 par Maheu

@ Tendance : le Glock 33 utilisé dans cet incident est pouvu d’un chargeur à 9 coups. 6 coups ayant été tirés, il n’a pas vidé son chargeur…
Les instructions au tir d’auto-défense (tant militaire, police ou civil) enseignent effectivement de doubler les coups à courte portée.
@Junius : les voitures ne protègent malheureusement pas des projectiles, donc se verrouiller à l’intérieur, lorsqu’on pense avoir affaire à un homme armé d’un pistolet est contreproductif.
De plus, il me semble qu’il n’y a qu’en Europe que les juges considèrent que se défendre avec une arme à feu contre un couteau est forcément un excès de légitime défense.
Il est en effet admis qu’une personne avec un couteau est en mesure de mettre hors combat un tireur situé à moins de 7m, avant même que celui-ci ait eu le temps de mettre en joue et tirer.
A ce propos, je trouve le témoignage de l’expert en armes à feu édifiant ( ainsi que la difficulté de la procureure lors de la cross-examination).

73. Le lundi 26 octobre 2009 à 14:13 par Switz

@Gemini

Lors de mon service militaire, on m’a enseigné un petit topo sur la légitime défense, accessible à l’intelligence moyenne d’un appelé de seconde classe et qui était de ce fait assez clair et synthétique.

Si je me souviens bien, deux conditions cumulatives sont nécessaires pour fonder la légitime défense: l’imminence d’une agression dirigée contre soi ou éventuellement contre autrui, proportionnalité des moyens utilisés pour sa défense par rapport aux moyens de l’agresseur (donc ne pas faire feu si l’on se dirige vers vous avec les poings pour seul arme).

@Maheu: votre pro du coutelas c’est Rahan, Rambo ou le général Alcazar reconverti en lanceur de poignards de music hall?

74. Le lundi 26 octobre 2009 à 15:12 par Maheu

@Switz :
non, c’est plutôt le tireur qui n’est pas Lucky Luke …
il faut 1.5 s pour dégainer et mettre en joue. Et 1.5 s pour parcourir 7m. D. Tueller, “How close is too close…]
et 0.33 s en moyenne pour tirer, arme dégainée, doigt sur la détente (sans parler du temps nécessaire pour décider si on va tirer …)
Alors les “12 to 14 feet” du cas présent …

75. Le lundi 26 octobre 2009 à 15:16 par Julien

@Switz: euh on parle pas d’un couteau a bout arrondi pas aiguise la… Si l’agresseur est proche de vous, le temps nécessaire pour sortir votre pistolet, mettre en joue et tirer est bien trop élevé; il vous aura déjà découpé le bide. Et pas besoin d’être un pro, le type court vers vous, soit plante le couteau soit fait un mouvement circulaire; avec 5-6cm de métal dans le ventre ou une entaille de 10 a 20cm de long pour 2 a 3 cm de profondeur, vous n’êtes plus guère en état de riposter (si tant est que vous soyez toujours conscient).

Comme le dit Maheu, 7-8m c’est en gros la distance qu’on considère nécessaire entre vous et l’agresseur pour rendre l’usage de votre arme a feu possible (si vous êtes entraîné…). En dessous, vous n’avez généralement aucune chance (vu les dégâts que peut faire même un petit canif, ça n’est pas étonnant). Un agresseur décidé a vous tuer ou blesser parcourt ces 7m de distance en 1.5s environ. Je vous laisse faire le calcul sur vos chances de survie.

76. Le lundi 26 octobre 2009 à 16:26 par Switz

@Maheu et Julien

Ok, Ok, je charriais un peu, mais c’était déplacé. Merci pour vos explications, même si a contrario elles indiquent que l’arme à feu peut ne pas être d’un grand secours en certains cas. Pourquoi pas alors… un sabre caucasien style shashka (datant de l’époque où l’ours russe n’avait pas encore semé sa merde dans ces nobles montagnes), le design de ces ustensiles, apparemment primitif au premier coup d’oeil, permettait néanmoins une riposte immédiate et assurément mortelle à toute agression rapprochée du style que vous décrivez.

77. Le lundi 26 octobre 2009 à 17:02 par francis

j’avoue avoir été surpris du verdict…
il me semble que, dans tous les pays européens,
un type qui se promène avec un flingue illégal de son véhicule,
qui tire et tue dès qu’il se sent menacé,
le tireur aurait été condamné,
avec des circonstances atténuantes sans doute…

78. Le lundi 26 octobre 2009 à 20:15 par Gari

Pour renchérir sur le post précédent, le plus étonnant, pour nous Français, c’est à aucun moment dans le procès, quelqu’un ait blâmé Vega d’avoir eu une arme mortelle dans sa voiture. Car sans elle, la «rencontre» des deux groupes d’amis au sortir de la boîte de strip-tease ne serait-elle pas terminé par une baston bien tranquille, comme certains supporteurs de l’OM et du PSG aiment pratiquer ? Des questions ont, certes, été posées à l’accusé pour savoir pourquoi il avait pris un flingue cette nuit là, mais je n’ai entendu aucune réelle désapprobation dans la bouche des procureurs (euses ?) quant à sa possession. Chez nous, la thèse de la légitime défense aurait certainement fait long feu, si je peux me permettre.

79. Le lundi 26 octobre 2009 à 22:42 par Laurentm

Je me demande si, comme les avocats de Vega, Eolas fête ses acquittements en trinquant avec son client dans une boite de strip tease ?

80. Le lundi 26 octobre 2009 à 22:48 par stellar

@ Laurentm (# 79)
D’autant que ladite boîte appartient à Dominique Gentile.
Eolas est-il actionnaire majoritaire du hustler?

81. Le lundi 26 octobre 2009 à 22:56 par stellar

@ Gari (# 78)
C’est pour cela que lors de l’interrogatoire des jurés, l’avocat leur a demandé leur attitude face aux armes, et s’ils en possédaient (scènes coupées visibles sur le site internet). Presque tous en avaient une ou plusieurs, sauf un qui “n’avait pas encore eu le temps d’en acheter une”.
La possession d’une arme par Zeus Vega et même le fait de la transporter étaient donc normaux pour le jury.
Notre réaction de français ne correspond donc dans ce domaine pas à celle de l’américain moyen.

82. Le lundi 26 octobre 2009 à 23:26 par geka

Comme l’a fait remarquer Stellar en #81, les deux parties ont demande aux jures quels etaient leurs sentiments vis a vis des armes… et des strip-clubs.

Apres “americain moyen” je ne suis pas du tout d’accord… l’etat d’esprit d’un habitant du Nevada n’est pas celui d’un habitant de New York… De facon generale, que l’on soit pour ou contre les armes a feu, ca ne change rien, ce qui compte c’est que dans cet endroit, le port d’armes est autorise et repandu, il ne faut pas perdre cela de vue. En France quelqu’un qui aurait un tel revolver dans sa voiture serait tout de suite soupconne de liens avec le grand banditisme.

L’arme n’est pas non plus illegale, elle n’avait juste pas ete encore declaree… meme l’accusation a du laisser le benefice du doute de ce cote-la d’ailleurs puisqu’elles n’insistent pas sur ce point, donc l’explication “je n’avais pas eu le temps” a ete acceptee. Il est evident que s’ils avaient trouve a Zeus des liens avec la pegre, les choses se seraient sans doute passees autrement. D’un autre cote, Zeus a sans doute un permis de port d’arme, sinon la remarque aurait ete faite…

83. Le mardi 27 octobre 2009 à 00:28 par Cat

En tout cas, c’est du très, très bon documentaire, et on tremble jusqu’au dernier moment à l’énoncé du verdict. Quel soulagement pour Brian Baker, qui n’avait vraiment rien à faire là.

Je trouve que la scène coupée avec les 2 proc’ en dit long sur la différence de mentalité entre elles et les accusés “Moi si j’étais coupable de meurtre alors que j’ai rien fait et que mon pote a tiré, je ne lui parlerais plus. Je n’aurais plus de contact qu’avec son avocat”. Ben c’est pas un vrai pote alors, ou bien finalement le motto militaire “You don’t leave another soldier behind” est moins nunuche qu’il n’y parait.

Quel dommage aussi que la famille ne voit pas la scène dans le restaurant ou Jesus regrette d’avoir tué quelqu’un et est le seul à compatir alors que les autres se moquent de la soeur et de la stratégie à l’émotion des procureurs.

J’ai trouvé que c’était là la différence fondamentale qui me fait avoir de l’empathie pour lui, alors que je n’avais pas réussi à en avoir pour De Rac dans l’épisode précédent…

Oui il a été mauvais à la barre, mais il sait qu’il risque tout. Comment être rationnel dans ce cas-là. Les proc’, heureusement pour lui, ont été plus mauvaises que lui.

Cat

84. Le mardi 27 octobre 2009 à 09:53 par Lyr

Bonjour à tous,

j’ai découvert la série après le premier épisode grâce au maître des lieux, et je l’ai suivie avec beaucoup d’intérêt et parfois un peu de stupeur.
Pour cet épisode, il me semble toutefois qu’un détail est assez peu évoqué : il est précisé au début qu’il y a eu une série de fusillades similaires à la sortie des établissements de strip-tease. On entend aussi que la victime était soupçonnée par la police de faits relativement similaires (demi tour en voiture et fusillade ?).
Ce qui n’apparait pas au procès c’est la possibilité que la victime et ses amis soient les auteurs des fusillades en question et aient été “repérés” comme tels par les patrons des boites de Vegas, qui se seraient armés en conséquence. Ce qui met un peu à mal la théorie de la panique de Vega et explique ces curieux écarts de perception : Brian voit une arme mais ne court pas, Vega va se préparer à un éventuel retour de la voiture comme s’il était évident qu’ils allaient revenir. Comme signalé même par son avocat, il va se préparer bien avant de les VOIR revenir. Il anticipe le retour de la voiture.
Et cette arme providentielle pour lui au bon moment dans son coffre, car il envisageait de la vendre à quelqu’un qui n’en a jamais entendu parler au final…

j’ai eu l’impression qu’on s’interrogeait très peu sur cette arme et sur les motivations de Vega à l’acheter. S’il était avéré qu’il l’avait achetée précisément car des menaces de ce type pesaient sur son milieu de travail et qu’il envisageait de s’en défendre, le verdict aurait-il été similaire ?

85. Le mardi 27 octobre 2009 à 12:58 par Praxis

Cet épisode démontre un peu le fait qu’il vaut mieux avoir réussi économiquement et socialement aux États-Unis pour se payer un bon avocat. Les avocats de la défense, il faut le souligner, sont particulièrement brillants. Dans les épisodes précédents, j’étais choqué par la faiblesse des arguments des avocats de la défense, nommés d’office. Ici, bien payés, ils sont particulièrement bons. Car, en face, le ministère public était bien meilleur que les jeunes insupportables de l’épisode précédent (qui se seraient fait démonter par ces avocats, par exemple).

Au cours des 5 épisodes de la série, j’ai pu mesurer la difficulté qui consiste à prononcer un jugement reposant sur son intime conviction. Il est parfois bien difficile d’être sûr des événements. Dans ces conditions, il m’a semble que les jurys étaient parfois un peu expéditifs aussi et n’hésitaient pas à charger la mule.

Enfin, dernier point, le système des peines est inhumain : elles plafonnent rapidement très haut et on ne voit pas en quoi elles sont “pédagogiques”.

Un documentaire passionnant qui a montré quelques-unes des facettes de la justice outre-atlantique.

86. Le mardi 27 octobre 2009 à 13:42 par iPidiblue et la justice du Nevada

“Au cours des 5 épisodes de la série, j’ai pu mesurer la difficulté qui consiste à prononcer un jugement reposant sur son intime conviction. Il est parfois bien difficile d’être sûr des événements.”

Praxis vous voulez dire, je suppose, qu’il est parfois bien difficile d’être sûr de ses préjugés ?
Pour le Jury de Las Vegas en une heure et demie dans la dernière affaire c’était bouclé, donc on peut supposer qu’eux du moins étaient tout à fait certains d’être droits dans leurs bottes !
Disons que votre conception française de la justice ne s’accorde pas avec le sens de l’efficacité américaine et particulièrement le goût des gens du Nevada pour la justice rendue promptement au bout de deux semaines de procès dans l’affaire Vega-Baker.
La praxis n’est pas la même …

87. Le mardi 27 octobre 2009 à 14:56 par DT

A Alice, commentaire 64.

Il faut bien comprendre que garder le silence est une stratégie qui, en France, ne vaut que pour la garde à vue. L’idée que l’accusé puisse ne pas s’exprimer à son propre procès, qui est totalement admise aux Etats-Unis car elle est un droit constitutionnel, est impensable ici. Un accusé qui se tairait serait à coup sûr considéré comme nécessairement coupable par les magistrats, la presse et le public…

En garde à vue aussi, il est considéré à priori comme suspect que l’on se taise, bien que se taire soit un droit. Ceci dit, si on est en garde à vue, c’est qu’on est déjà suspect… Donc l’être un peu plus ou un peu moins ne compte guère, en fait. D’autant que PEU IMPORTE CE QUE PENSENT LES FLICS. Ce sont les magistrats qu’il faut convaincre (d’ailleurs, n’hésitez pas à faire de la lèche à ces derniers en leur faisant comprendre que vous leur avez réservé vos déclarations car ce sont eux les gens importants. Ca marche bien en général)

En garde à vue, ne dites rien. Puis attendez que votre avocat ait eu le dossier en main pour faire votre première déclaration. Si on vous reproche de ne rien avoir dit en garde à vue, contentez vous d’affirmer que vous avez lu le blog de maître Eolas, que vous avez été convaincu par la justesse du “bill of rigths” américain, et que vous vous taisiez par principe, bien qu’évidemment vous soyez innocent.

88. Le mardi 27 octobre 2009 à 18:49 par tschok

DT,

Je vous trouve dur!

D’abord la première erreur à ne jamais commettre: prendre les fonctionnaires de police pour des cons.

Deuxième erreur à ne jamais commettre: prendre votre avocat pour une lumière.

Troisième erreur: croire qu’un magistrat est un type qui n’a que ça à foutre.

Vous avez cinq doigts. Il vous en reste deux pour compter les principes d’action intelligents.

Ces deux doigts, qui font toute la nuance, vous appartiennent.

89. Le mardi 27 octobre 2009 à 19:22 par DT

Cher monsieur Tshock,

premier doigt: ne pas parler à un policier ne signifie pas qu’on le prend pour un con, ça signifie seulement qu’on ne lui parle pas.

deuxième doigt: peu importe que votre avocat soit une lumière ou pas, du moment qu’il sait lire, et qu’il peut vous dire ce qu’il y a contre vous dans le dossier (NB: donc éviter si possible de prendre un avocat illettré).

troisième doigt: si le magistrat n’a pas le temps de vous écouter, qu’il vous relâche.

Quand à mes deux derniers doigts, monsieur Tshok, croyez bien que je sais en faire usage.

Au plaisir de ne pas vous croiser.

DT.

PS. L’intervention de monsieur Tshock, qui est sans doute fonctionnaire de police, illustre très bien mon propos. Au commissariat, on vous mettra ce genre de pression (“vous croyez que les magistrats n’ont que ça à foutre… vous nous prenez pour des idiots… allez, faites un truc intelligent, répondez à mes questions”). C’est simple: tout est faux. En gav, les flics mentent par principe, pour piéger le client. Ne croyez rien de ce qu’ils disent.

L’attitude est simple. Vous ne les prenez pas pour des idiots, vous n’avez juste rien à leur dire. C’est clair?

90. Le mercredi 28 octobre 2009 à 07:03 par Véronique

@ DT

En réalité, Tschok est avocat.

Concernant le droit au silence pour le prévenu je pense qu’on touche à quelque chose de profondèment culturel.

Si j’ai bien saisi les informations que j’ai recherchées, le 5 ème amendement, de nature constitutionnelle, a été ratifié en 1791. Nous parlons donc d’un droit fondamental qui imprègne l’imaginaire collectif américain depuis plus de deux cents ans.

En France il y a une tradition et une culture de l’aveu, qui fait qu’on perçoit d’abord celui qui se tait comme quelqu’un ayant forcément quelque chose à dissimuler.

91. Le mercredi 28 octobre 2009 à 10:32 par DT

Merci à Véronique, qui m’apprend que Tschok est avocat.

Mais alors je suis tschoké. Car si j’aurais bien compris qu’un policier intervienne pour défendre son job (y compris en utilisant le discours standard du flic qui cherche à obtenir des aveux), je ne comprends pas qu’un avocat puisse aller dans le même sens, sauf à penser que l’intérêt de son client n’est pas le souci premier de cet avocat.

Je suis d’accord avec ce que dit Véronique. Maintenant, je serais curieux de savoir au nom de quoi un magistrat oserait explicitement reprocher à un accusé ce qui n’est que l’exercice d’un droit.

92. Le mercredi 28 octobre 2009 à 12:11 par GroM

Tendance, je sais bien que l’accusé ne fait pas partie des forces de l’ordre. Il a néanmoins reçu un entraînement militaire, dans lequel il a du être conditionné pour agir d’une certaine manière dans ces circonstances, c’est-à-dire celles dans lesquelles le cerveau ne fonctionne plus correctement et seuls comptent les réflexes. Ce conditionnement pourrait expliquer ses actes - et explique ce n’est pas excuser.

Donc ce que je dis, c’est que tirer deux coups sur la victime, c’est cohérent. Vider son chargeur, cela ne l’est pas.

93. Le vendredi 30 octobre 2009 à 14:24 par tschok

@ DT,

Inutile de me donner du monsieur (maître suffira).

Vous nous parlez des Etats Unis où règnent des conceptions totalement différentes.

Ici, en France, le dossier pénal peut se construire sans l’accusé.

Dans sa grande générosité, L’Etat a néanmoins décidé d’associé l’accusé à la construction de son dossier pénal.

Il lui est donc permis de s’auto accuser (l’aveu). C’est ce que les policiers sont chargés de faire: ils doivent convaincre le gardé à vue qu’il lui est permis d’avouer et que c’est la seule liberté qui lui reste.

Corrélativement, jusqu’à une date récente, les droits de la défense étaient considérés comme une chose si sacrée qu’ils étaient exercés par le tribunal, l’avocat, cet être veule et naturellement suspect, ne pouvant qu’en faire un mauvaise usage, dans le but de dénaturer la justice.

C’est la raison pour laquelle nos pénalistes étaient de grands orateurs, de grands plaideurs, mais pas de grands juristes. Car tout l’art de la défense résidait dans le discours (c’est tout ce qui lui restait, mais c’était déjà pas mal).

Progressivement les choses ont changé.

Mais il reste de cette culture.

En France, la justice pénale est essentiellement répressive.

Je vais vous expliquer.

Vous avez trois degrés d’évolution dans les systèmes judiciaires:

- Les systèmes judiciaires oppressifs: ils participent au maintien de l’ordre par la punition en homologuant la décision de punir qui a été prise par l’autorité policière, c’est à dire l’exécutif. Ces systèmes ne se préoccupent absolument pas de savoir s’ils punissent LE coupable selon des règles justes, ils leur suffit juste d’UN coupable et leur rôle est de rendre la punition exemplaire afin de tenir les autres citoyens en respect.

La France a longtemps connu une justice oppressive. On vient de là. On revient de loin.

- Les systèmes répressifs: dans ces systèmes on veut punir LE coupable et on veut le faire en appliquant des règles justes. Mais la finalité reste la répression, pas la justice. C’est à dire que dans ces systèmes on recherche la manifestation de la vérité, mais seulement en tant qu’elle représente un élément à charge contre l’accusé, parce qu’on veut le punir et on veut le punir parce qu’on veut maintenir l’ordre, qui reste la finalité utilme, mais en y mettant cette fois si les formes.

Les systèmes judiciaires répressifs sont le symptômes de systèmes de pouvoir qui ont une peur absolue du désordre, vécu comme une perte de maîtrise de la situation.

Nous, en France, nous sommes encore largement dans ce système là.

Petite particularité: ces systèmes ont horreur des innocents au point de les évacuer des statistiques. En France, le taux de relaxe ou d’acquittement est inférieur à 5%, c’est à dire qu’il est statistiquement “non significatif”, comme le vote contraire dans les dictatures où le dictateur est élu avec +95% des votes.

Quand vous parlez avec un juge français, vous constatez qu’il est fier de vous dire que l’innocence, dans le système, c’est moins de 5%. Et vous vous rendez compte que son objectif de productivité, c’est de faire baisser encore ce taux.

- Les systèmes “justiciers”: dans ces systèmes, la répression est une finalité parmi d’autres, car ils poursuivent d’autres buts qui peuvent même être perçus comme plus importants. La réparation du préjudice pour la victime, par exemple. Le reclassement durable du délinquant. L’amendement moral des individus. La recherche du bonheur. La lutte contre les discriminations. L’exigence de moralité dans l’action. Etc.

Vous, aux Etats Unis, puisque vous semblez nous parler depuis les Etats Unis, vous êtes à ce stade supérieur de développement.

Nous, on y entre tout juste. On commence tout juste à se poser des problèmes “évolués”. Avant la justice pénale était dans la position du sous traitant du pouvoir et le droit pénal était conçu pour s’appliquer dans ce cadre.

Depuis grosso modo 20 ans, soit une petite génération, nous assistons à une évolution graduelle de notre système judiciaire vers un stade supérieur de développement.

Maintenant, attention, cela ne signifie pas que le stade supérieur est le paradis. Chaque degré d’évolution, chaque type de justice a ses avantages et ses inconvénients.

D’autre part, le système du degré supérieur n’est pas forcément meilleur que le système du degré inférieur: il est clair que votre système judiciaire est plus sophistiqué que le nôtre, mais pour autant, nous ne sommes pas des demeurés.

Mais une chose est sure: plus on va vers le haut, plus les systèmes sont complexes. C’est un peu comme si on comparait un Airbus A 300 à un Airbus A 320: ça vole, mais plus du tout de la même façon.

Accessoirement, la différence de stade d’évolution fait que l’industrie audiovisuelle ne produit pas les mêmes séries policières ou judiciaires des deux côtés de l’Atlantique.

Vos séries traitent de problèmes beaucoup plus sophistiqués que les nôtres: nos séries restent très “provinciales” finalement.

Dernière remarque: même intuitivement, et en raison du rayonnement culturel de la production audiovisuel US, n’importe quel Français connait le système judiciaire américain, parfois mieux que le système judiciaire français.

Mais l’inverse n’est pas vrai. Les Ricains ne nous connaissent pas.

C’est pourquoi je ne sais pas si vous pouvez plaquer vos conceptions américaines de la justice sur notre système judiciaire et policier sans dire une bêtise.

94. Le vendredi 30 octobre 2009 à 18:23 par DT

à Maître Tschok,

je vous assure que vous faites erreur. Je ne suis pas américain et ne parle pas depuis les Etats-Unis, et surtout (car la question de là d’où on parle est un peu anecdotique) je ne considère pas le système américain comme “meilleur”, ni même comme plus évolué.

J’ai cru que vous étiez un digne représentant de la maison poulaga et que, dans votre commentaire 88, vous défendiez l’idée qu’il faut tout avouer en garde à vue. Mais je me suis peut-être trompé, dont acte. Toujours est-il que je maintiens qu’en France, il vaut mieux se taire en garde à vue, et c’est en tant que pratiquant du système français que j’exprime cette opinion.

Par ailleurs, j’ai beaucoup apprécié votre distinction entre systèmes “oppressifs”, “répressifs” et “judiciaires”. Maintenant, je vais vous livrer le fond de ma pensée: tous les systèmes, quels qu’ils soient (français, américain ou guatémaltèque, peu importe) se disent du troisième type, et sont en réalité du premier.

95. Le lundi 2 novembre 2009 à 13:31 par DMonodBroca

Cette justice ressemble plus à une ordalie, à un « jugement de dieu », à une joute entre les champions de chaque camp, le coupable étant le perdant, qu’à une recherche sereine de la vérité puis d’une sanction proportionnée à l’acte commis.

J’ai bien compris que l’angle d’attaque ne permettait que le tout ou rien mais la justice n’y trouve pas son compte. La légitime défense était une circonstance atténuante, la peine aurait pu n’être que symbolique, mais pas de culpabilité du tout pour celui qui a tué, cela n’est guère satisfaisant.

La justice idéale dit au pécheur « va et ne pèche plus », elle ne dit pas « va, tu n’as pas péché ».

L’accusé, persuadé que sa vie était en jeu, a attaqué et tué. Comme les USA de Georges Bush attaquant l’Irak au prétexte d’armes de destruction massive…

Le choix véritable est « tuer ou ne pas tuer », et la bonne réponse est « ne pas tuer », « tu ne tueras pas ». Croire que le choix est « tuer ou être tué » et que la bonne réponse est « tuer » est l’erreur de toujours. C’est celle qu’a faite Jesus Vega, et qu’a entérinée la justice de Las Vegas.

L’accusé avait pour prénom Jésus et pour surnom Zeus. Jésus confondu avec le dieu païen par excellence : 2000 ans d’errements de la chrétienté contenus dans un léger glissement sémantique…

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