Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Question de priorité

par Dadouche [1]


Ca sentait pas bon.

Que le Conseil constitutionnel, saisi d’une question prioritaire de constitutionnalité concernant les assesseurs du Tribunal pour enfants, soulève d’office la question de l’impartialité du juge des enfants présidant le tribunal pour enfants avait mis la puce à l’oreille des spécialistes. Surtout s’agissant d’une question que la Cour de Cassation avait refusé de transmettre au Conseil Constitutionnel.
Les spécialistes ne sont pas déçus du voyage.

En effet, si le Conseil constitutionnel,dans sa décision de ce matin valide la présence d’une majorité de magistrats non professionnels au sein du Tribunal pour Enfants, il considère que la présidence du Tribunal pour Enfants par le juge des enfants qui a instruit le dossier et décidé du renvoi du mineur devant la juridiction porte atteinte au principe d’impartialité des juridictions.

C’est un véritable pavé dans le marigot du droit pénal des mineurs, qui va faire grincer beaucoup de dents et, sans doute mettre un joyeux bazar. Mais parfois les pavés peuvent avoir aussi du bon.

Reprenons les choses dans l’ordre

Le 4 mai 2011, la Cour de Cassation a transmis au Conseil Constitutionnel une question prioritaire de constitutionnalité relative la constitutionnalité “des articles L. 251-3 et L. 251-4 du code de l’organisation judiciaire relatifs à la composition du tribunal pour enfants en ce qu’ils portent atteinte au droit à un procès équitable et à une juridiction impartiale dès lors qu’ils autorisent des juges non professionnels en proportion majoritaire dans une formation collégiale, à prendre part à une délibération susceptible de conduire à une peine privative de liberté”

En effet, le Tribunal pour Enfants, seule juridiction pour mineurs qui peut prononcer des sanctions pénales, est composé d’un juge des enfants et de deux assesseurs non professionnels.

Ces assesseurs ne sont pas des jurés tirés au sort comme en Cour d’Assises et bientôt (enfin, jamais si l’on en croit Robert Badinter) en correctionnelle.
Ils sont nommés pour 4 ans auprès d’un tribunal pour enfants par arrêté du Ministre de la justice, après avoir été choisis sur une liste présentée par le Premier Président de la Cour d’appel concernée et composée de personnes “qui se sont signalées par l’intérêt qu’elles portent aux questions de l’enfance et par leurs compétences”. Ils prêtent serment avant d’entrer en fonction.

Une précédente décision du Conseil Constitutionnel, relative aux juges de proximité, avait ouvert la voie à cette question prioritaire de constitutionnalité. En effet, dans sa décision du 20 janvier 2005 relative à la loi créant notamment les juges de proximité et prévoyant leur présence en correctionnelle, le Conseil avait raisonné ainsi :
- l’article 66 de la constitution dispose que c’est l’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, qui assure le respect du principe selon lequel nul ne peut être arbitrairement détenu
- cette disposition interdit que des mesures privatives de liberté puissent être prononcées par une juridiction qui ne serait composé que de juges non professionnels (et donc non membres de l’autorité judiciaire)
- cette disposition n’interdit en revanche pas que des juges non professionnels siègent dans une juridiction pénale de droit commun
- cependant pour garantir suffisamment à la fois l’indépendance de cette juridiction et sa compétence, la proportion de juges non professionnels dans les formations correctionnelles de droit commun doit rester minoritaire

En gros, un juge non professionnel ça va, deux ou trois, bonjour les dégâts.

Le suspense était donc à son comble : les assesseurs du TPE sont majoritaires dans la composition, mais le TPE n’est pas une juridiction de droit commun puisqu’elle a été créée spécifiquement pour juger les mineurs. De quel côté allait pencher le Conseil ?

Roulement de tambour…

Spécificité du droit des mineurs : 1 / Principes généraux de la procédure : 0.

Voici les considérants concernés :

4. Considérant qu’aux termes de l’article 66 de la Constitution : « Nul ne peut être arbitrairement détenu. - L’autorité judiciaire, gardienne de la liberté individuelle, assure le respect de ce principe dans les conditions prévues par la loi » ; que, si ces dispositions s’opposent à ce que le pouvoir de prononcer des mesures privatives de liberté soit confié à une juridiction qui ne serait composée que de juges non professionnels, elles n’interdisent pas, par elles-mêmes, que ce pouvoir soit exercé par une juridiction pénale de droit commun au sein de laquelle siègent de tels juges ;

5. Considérant, toutefois, qu’en ce cas, doivent être apportées des garanties appropriées permettant de satisfaire au principe d’indépendance, indissociable de l’exercice de fonctions juridictionnelles, ainsi qu’aux exigences de capacité, qui découlent de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 ; que, s’agissant des formations correctionnelles de droit commun, la proportion des juges non professionnels doit rester minoritaire ;

6. Considérant d’une part, qu’en vertu de l’article L. 251-1 du code de l’organisation judiciaire, le tribunal pour enfants est une juridiction pénale spécialisée qui « connaît, dans les conditions définies par l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, des contraventions et des délits commis par les mineurs et des crimes commis par les mineurs de seize ans » ; que, dès lors, en prévoyant que siègent dans cette juridiction, en nombre majoritaire, des assesseurs non professionnels, les dispositions contestées ne méconnaissent pas les exigences constitutionnelles précitées ;

7. Considérant, d’autre part, que l’article L. 251-4 prévoit que les assesseurs sont nommés pour quatre ans et « choisis parmi les personnes âgées de plus de trente ans, de nationalité française et qui se sont signalées par l’intérêt qu’elles portent aux questions de l’enfance et par leurs compétences[2] » ; que l’article L. 251-5 précise qu’ils prêtent serment avant d’entrer en fonction ; que l’article L. 251-6 dispose que la cour d’appel peut déclarer démissionnaires les assesseurs qui « sans motif légitime, se sont abstenus de déférer à plusieurs convocations successives » et prononcer leur déchéance « en cas de faute grave entachant l’honneur ou la probité » ; que, dans ces conditions, s’agissant de ces fonctions d’assesseurs, les dispositions contestées ne méconnaissent ni le principe d’indépendance indissociable de l’exercice de fonctions judiciaires ni les exigences de capacité qui découlent de l’article 6 de la Déclaration de 1789 ; que, par suite, l’article L. 251-4 du code de l’organisation judiciaire, qui ne méconnaît aucun autre droit ou liberté que la Constitution garantit, est conforme à la Constitution ;


Le Conseil Constitutionnel valide en effet la composition majoritairement non professionnelle du TPE en poursuivant ainsi le raisonnement de 2005 ;
- pour être conformes aux exigences constitutionnelles, dans les juridictions pénales de droit commun la proportion de juges non professionnels doit rester minoritaires
- le tribunal pour enfants est une juridiction spécialisée, qui connaît des infractions commises par les mineurs
- ce n’est donc pas une juridiction pénale de droit commun
- la présence d’une majorité d’assesseurs n’est donc pas en soi contraire aux exigences constitutionnelles
- et ce d’autant plus que la façon dont ils sont choisis (pour leur compétence en la matière), nommés (par arrêté, avec prestation de serment) et éventuellement révoqués (en cas de faute entâchant l’honneur ou la probité) garantit suffisamment leur indépendance et leur compétence

En gros, dans une juridiction pénale spécialisée qui fait appel à des compétences particulières (ici sur les questions relatives à l’enfance), on peut faire appel à des non professionnels, même majoritaires, pourvu qu’ils ne puissent pas être nommés par copinage et qu’on puisse s’en débarrasser s’ils sont malhonnêtes.

Ca aurait pu s’arrêter là et les esprits les plus tordus auraient pu immédiatement commencer à rêver à la future décision du Conseil Constitutionnel saisi aujourd’hui de la loi instituant la présence de jurés en correctionnelle.

Las.

Par une lettre du 9 juin, le Conseil Constitutionnel avait soumis aux parties un grief susceptible d’être soulevé d’office.[3]

Il s’agissait en réalité d’une QPC dont la Cour de Cassation avait refusé la transmission au Conseil Constitutionnel par le même arrêt qui avait transmis la QPC sur les assesseurs[4].
Voici la motivation de la Cour de Cassation sur cette non transmission:

Attendu que le demandeur argue de l’inconstitutionnalité de l’article 8 de l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante, en ce que le juge des enfants peut tout à la fois diligenter des poursuites en saisissant le tribunal pour enfants et présider cette juridiction, ce qui porte atteinte aux droits à un procès équitable et à une juridiction impartiale garantis par la Constitution ;
Attendu que la seule disposition législative invoquée n’emporte pas les conséquences juridiques critiquées par le demandeur[5] ;
D’où il suit qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la question au Conseil constitutionnel


C’est en réalité une question que beaucoup se posent depuis longtemps, et dont la résolution n’est pas simple.

Le juge des enfants est un juge spécialisé. Il a été “inventé” dans l’ordonnance de 45 pour avoir une plénitude de juridiction sur la situation d’un mineur, qu’il peut suivre aussi bien dans le cadre de l’assistance éducative qu’au pénal.
Au pénal, le juge des enfants, saisi par le Procureur de la République, est d’abord juge d’instruction. Il met en examen le mineur et peut procéder à toutes les investigations nécessaires non seulement sur la personnalité du mineur mais également sur les faits qui lui sont reprochés. C’est lui qui décide ensuite le renvoi du mineur devant une juridiction de jugement (juge des enfants ou Tribunal pour Enfants) ou un éventuel non lieu.
C’est ensuite lui qui juge le même mineur, dans le même dossier, soit en tant que juridiction “juge des enfants” en cabinet, où il ne peut prononcer que des mesures éducatives[6], soit en tant que président du Tribunal pour Enfants, qui peut prononcer des sanctions pénales.
C’est ensuite toujours le même juge des enfants qui exerce, à l’égard du même mineur, les fonctions de juge de l’application de peines.

Or, pour les majeurs, les dispositions du code de procédure pénale interdisent rigoureusement qu’un magistrat ayant poursuivi ou instruit un dossier puisse ensuite le juger[7].
Le juge d’instruction, qui mène l’enquête puis évalue s’il existe des charges suffisantes pour renvoyer devant une juridiction de jugement, ne peut en aucun cas siéger ensuite dans la juridiction qui décide si la culpabilité est établie.
Les dispositions de la CEDH sur le procès équitable et notamment l’accès à un juge impartial interdisent évidemment qu’il en soit autrement.
La décision du Conseil Constitutionnel du 2 février 1995 ne dit pas autre chose :

5. Considérant qu’en vertu de l’article 9 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, tout homme est présumé innocent jusqu’à ce qu’il ait été déclaré coupable ; qu’en vertu de l’article 66 de la Constitution, l’autorité judiciaire est gardienne de la liberté individuelle ; que le principe du respect des droits de la défense constitue un des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République réaffirmés par le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946, auquel se réfère le Préambule de la Constitution de 1958 ; qu’il implique, notamment en matière pénale, l’existence d’une procédure juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des parties ; qu’en matière de délits et de crimes, la séparation des autorités chargées de l’action publique et des autorités de jugement concourt à la sauvegarde de la liberté individuelle ;


Mais alors, personne n’avait lu l’ordonnance de 45 ou quoi ?

Que nenni chers lecteurs. C’est même un vieux serpent de mer.

Ainsi, par un arrêt du 7 avril 1993, la chambre criminelle de la Cour de Cassation avait validé la présidence du TPE par le juge des enfants qui a instruit le dossier, au motif que cette dérogation aux règles prévalant pour les majeurs était justifiée par “un souci éducatif” lié à la spécialisation du juge des enfants et qu’un éventuel soupçon d’impartialité était contrebalancé par la collégialité de la juridiction et la possibilité d’appel. Ce raisonnement a été repris dans un arrêt du 8 novembre 2000.

La position ultra majoritaire des juges des enfants était la suivante :
“le principe de spécialisation de la justice des mineurs est destiné à garantir que les décisions seront prises par un juge qui connaît bien le mineur, avec une certaine cohérence. C’est plus important que de garantir une séparation de l’instruction et du jugement, d’autant que les affaires de mineurs c’est jamais compliqué et qu’il n’y a presque jamais d’investigations supplémentaires sur les faits”.

En gros, comme une conversation avec un gamin :
- “Mais puisqu’on te dit que c’est mieux pour toi !”
- “Pourquoi c’est mieux ?”
- “Parce que c’est pour ton bien !”

Cette position était en apparence confortée par une décision de la CEDH rendue le 24 août 1993 dans une espèce qui concernait la justice néerlandaise (Nortier c/ Pays Bas).
Dans cette affaire, le juge des enfants de l’autre pays du fromage avait statué sur le placement en détention provisoire du mineur à quatre reprises, avait ordonné un examen psychiatrique et s’était prononcé sur l’existence d’ “indices sérieux” contre le mineur, qu’il avait ensuite jugé et condamné.
La Cour avait considéré que l’on ne pouvait considérer comme objectivement justifiée la crainte que le juge manquât d’impartialité compte tenu de ce que les questions tranchées avant le jugement ne coïncidaient pas avec celles qu’il avait du traiter en se penchant sur le fond, même à juge unique.
Dans un bel ensemble (pas unanime mais presque), les juges français lancèrent un grand “ouf” et s’accrochèrent à l’idée que “aux Pays Bas c’est comme chez nous”.

En oubliant par exemple que la Cour avait relevé dans sa décision que le juge des enfants néerlandais n’avait, en l’espèce, pas usé de ses pouvoirs de juge d’instruction, d’autant plus que le mineur reconnaissait les faits.

L’alerte aurait pu venir de la décision rendue le 2 mars 2010 dans une affaire concernant la Pologne.

Pour ne pas me lancer dans un paraphrase stérile, je reproduis ci-après certains attendus de cet arrêt du 2 mars 2010 (Affaire Adamkiewicz c. Pologne, Requête n° 54729/00) :

102. La Cour observe que l’ordonnance rendue à l’issue de l’instruction préliminaire et par laquelle le juge aux affaires familiales a déféré le requérant au tribunal pour enfants se fondait sur le constat de ce magistrat selon lequel « les éléments rassemblés au cours de l’instruction indiquaient que le requérant était auteur des faits ». Vu la teneur de cette ordonnance, force est de constater que la question sur laquelle ce magistrat avait statué avant l’ouverture de la phase juridictionnelle de la procédure coïncidait dans une large mesure avec celle sur laquelle il a dû ensuite se prononcer en tant que membre de la formation de jugement du tribunal pour enfants. Ainsi, il peut difficilement être affirmé que ledit magistrat n’avait pas d’idée préconçue sur la question sur laquelle il a été appelé à se prononcer ultérieurement en tant que président de la formation de jugement du tribunal pour enfants (voir, en ce sens Werner c. Pologne, no 26760/95, 15 novembre 2001, § 41). Du reste, le Gouvernement l’a également admis dans ses observations. 103. La Cour relève également que dans l’affaire Nortier c. Pays-Bas citée ci-dessus, un problème s’est posé quant à l’impartialité du tribunal, dans la mesure où toute la procédure dirigée contre le requérant mineur s’était déroulée devant le même magistrat. Toutefois, dans cette affaire, il a été jugé que l’article 6 § 1 de la Convention n’avait pas été violé, dès lors notamment que le juge en question n’avait presque pas entrepris d’activité d’instruction, le requérant ayant reconnu sa faute dès le début de l’instance (Nortier, §§ 34-35 et 38). 104. Contrairement à l’affaire Nortier, dans la présente affaire le juge aux affaires familiales a fait durant l’instruction un ample usage des attributions étendues que lui conférerait la loi sur la procédure applicable aux mineurs. Ainsi, après qu’il ait décidé d’office de l’ouverture de la procédure, ce juge avait lui-même conduit la procédure de rassemblement des preuves à l’issue de laquelle il avait décidé du renvoi du requérant en jugement. 105. La Cour note également qu’en l’espèce, pour justifier la pratique consistant à confier au magistrat ayant conduit l’instruction préliminaire l’exercice subséquent de la fonction juridictionnelle au sein du tribunal pour enfants dans la même affaire, le Gouvernement s’est référé à la nature singulière de la procédure concernant les mineurs. 106. La Cour admet que, du fait de la nature spécifique des questions que la justice des mineurs est amenée à traiter, elle doit nécessairement présenter des particularités par rapport au système de la justice pénale applicable aux adultes. Toutefois, il n’incombe pas à la Cour d’examiner in abstracto la législation et la pratique internes pertinentes, mais de rechercher si la manière dont elles ont été appliquées à un requérant dans une affaire donnée ou l’ont touché a enfreint l’article 6 par. 1 (art. 6-1) (voir, entre autres, Hauschildt c. Danemark, précité, § 21). 107. La Cour se réfère ici à son constat de violation de l’article 6 de la Convention à raison de l’atteinte aux garanties d’équité lors de l’instruction conduite par le juge aux affaires familiales. Compte tenu de ce constat, la Cour ne décèle pas dans quelle mesure le fait que ce même magistrat ait subséquemment présidé la formation de jugement du tribunal ayant déclaré le requérant auteur des faits pouvait en l’espèce contribuer à assurer la meilleure protection de l’intérêt supérieur de l’enfant que le requérant était alors. 108. Compte tenu de ce qui précède, la Cour estime qu’il y a eu en l’espèce violation de l’article 6 § 1 de la Convention quant à l’exigence d’un tribunal impartial.

Ce qui donne, (très) grossièrement résumé :
- oui d’accord en 93 on a dit que le juge qui a renvoyé le dossier peut le juger, mais il n’avait pas contribué à rassembler les preuves de la culpabilité
- alors que là quand même il a signé une décision désignant le mineur comme l’auteur des faits avant de le juger pour ces faits
- vous êtes bien gentils les gars de tout justifier par la spécificité nécessaire de la justice des mineurs, mais faudrait quand même nous expliquer pourquoi c’est forcément mieux pour les gamins d’être jugés par quelqu’un qui a déjà une idée sur leur culpabilité
- il est pas impartial votre juge aux affaires familiales, allez zou circulez y’a plus rien à voir

Finalement, on s’aperçoit que la vraie question est la suivante : est-il davantage de l’intérêt du mineur d’être jugé par un juge qui ne connaît pas le dossier et est objectivement impartial ou d’être jugé par un juge qui le connaît bien, peut prendre les décisions les plus adaptées mais a déjà sa petite idée sur la culpabilité ?

Ce n’est pas une question simple.

Le droit pénal des mineurs français est fondé depuis 1945 sur la spécialisation du juge des enfants et sa connaissance de la personnalité du mineur, qu’il suit par ailleurs parfois en assistance éducative.
La primauté de l’éducatif, la nécessité d’une grande souplesse dans la mise en oeuvre des mesures pour coller le plus possible à la situation par nature évolutive du mineur, tout cela explique les choix qui ont été faits en 45 dans un texte assez révolutionnaire.
L’intérêt supérieur du mineur a justifié beaucoup de choses, y compris le non respect de la loi.
L’ordonnance de 1945 autorise en effet explicitement les juges des enfants à ne pas respecter les dispositions de droit commun du code de procédure pénale en permettant l’enquête “par voie officieuse”[8].
On avait donc admis dès le départ l’idée que les garanties procédurales apportées aux mineurs pouvaient être moindres que celles prévues pour les adultes quand c’était “pour leur bien”.

Elle est peut-être d’ailleurs finalement aussi là cette spécificité de la justice des mineurs qu’on évoque si souvent.

La décision rendue aujourd’hui va sans doute heurter bon nombre de juges des enfants, extrêmement attachés à ce principe cardinal de connaissance de la personnalité du mineur[9].

En voici les considérants sur ce point :

8. Considérant, d’une part, qu’aux termes de l’article 16 de la Déclaration de 1789 : « Toute société dans laquelle la garantie des droits n’est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée, n’a point de Constitution » ; que le principe d’impartialité est indissociable de l’exercice de fonctions juridictionnelles ;

9. Considérant, d’autre part, que l’atténuation de la responsabilité pénale des mineurs en fonction de l’âge, comme la nécessité de rechercher le relèvement éducatif et moral des enfants délinquants par des mesures adaptées à leur âge et à leur personnalité, prononcées par une juridiction spécialisée ou selon des procédures appropriées, ont été constamment reconnues par les lois de la République depuis le début du vingtième siècle ; que ces principes trouvent notamment leur expression dans la loi du 12 avril 1906 sur la majorité pénale des mineurs, la loi du 22 juillet 1912 sur les tribunaux pour enfants et l’ordonnance du 2 février 1945 sur l’enfance délinquante ; que, toutefois, la législation républicaine antérieure à l’entrée en vigueur de la Constitution de 1946 ne consacre pas de règle selon laquelle les mesures contraignantes ou les sanctions devraient toujours être évitées au profit de mesures purement éducatives ; qu’en particulier, les dispositions originelles de l’ordonnance du 2 février 1945 n’écartaient pas la responsabilité pénale des mineurs et n’excluaient pas, en cas de nécessité, que fussent prononcées à leur égard des mesures telles que le placement, la surveillance, la retenue ou, pour les mineurs de plus de treize ans, la détention ; que telle est la portée du principe fondamental reconnu par les lois de la République en matière de justice des mineurs ;

10. Considérant que l’ordonnance du 2 février 1945 susvisée, dont sont issues les dispositions contestées, a institué un juge des enfants, magistrat spécialisé, et un tribunal des enfants présidé par le juge des enfants ; que le juge des enfants est, selon l’article 7 de cette ordonnance, saisi par le procureur de la République près le tribunal dans le ressort duquel le tribunal des enfants a son siège et qui est seul chargé des poursuites ; qu’en vertu de l’article 8 de cette même ordonnance, le juge des enfants se livre à « toutes diligences et investigations utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et à la connaissance de la personnalité du mineur ainsi que des moyens appropriés à sa rééducation » ; que cet article dispose, en outre, qu’il peut « ensuite, par ordonnance, soit déclarer n’y avoir lieu à suivre et procéder comme il est dit à l’article 177 du code de procédure pénale, soit renvoyer le mineur devant le tribunal pour enfants » ; qu’aucune disposition de l’ordonnance du 2 février 1945 ou du code de procédure pénale ne fait obstacle à ce que le juge des enfants participe au jugement des affaires pénales qu’il a instruites ;

11. Considérant que le principe d’impartialité des juridictions ne s’oppose pas à ce que le juge des enfants qui a instruit la procédure puisse, à l’issue de cette instruction, prononcer des mesures d’assistance, de surveillance ou d’éducation ; que, toutefois, en permettant au juge des enfants qui a été chargé d’accomplir les diligences utiles pour parvenir à la manifestation de la vérité et qui a renvoyé le mineur devant le tribunal pour enfants de présider cette juridiction de jugement habilitée à prononcer des peines, les dispositions contestées portent au principe d’impartialité des juridictions une atteinte contraire à la Constitution ; que, par suite, l’article L. 251-3 du code de l’organisation judiciaire est contraire à la Constitution ;


Le Conseil Constitutionnel, rappelant les différentes dispositions de l’ordonnance de 1945 qui font du juge des enfants un juge d’instruction, constate qu’aucune disposition de l’ordonnance de 45 n’interdit au juge des enfants de participer au jugement des affaires pénales qu’il a instruites.
Il fait apparemment une différence entre le juge des enfants statuant en tant que juridiction de jugement, qui ne peut prononcer que des mesures éducatives et pourrait, semble-t-il, statuer dans des dossiers qu’il a instruits, et le juge des enfants président du TPE, juridiction qui peut prononcer des sanctions pénales, qui ne peut participer au jugement des affaires qu’il a instruites.
La frontière de l’impartialité se situerait donc non sur la déclaration de culpabilité mais sur la possibilité ou pas de prononcer une mesure privative de liberté.
C’est du moins ce que j’en comprends, mais je ne suis pas constitutionnaliste.

Dans cette deuxième mi-temps, on a donc spécificité de la justice des mineurs : 0 / principes généraux de la procédure : 1

Pour être complet, précisons que le Conseil Constitutionnel a ainsi déclaré que l’article L 251-3 du Code de l’organisation judiciaire, qui fixe la composition du TPE sans préciser l’impossibilité pour le juge des enfants qui a instruit le dossier d’être le juge des enfants qui préside le TPE, est contraire à la Constitution. en principe, Une disposition déclarée contraire à la constitution en application d’une QPC est en principe abrogée à compter de la publication de la décision du Conseil. En l’occurence, cela reviendrait à supprimer le Tribunal pour enfant (puisque le texte qui en définit la composition n’existerait plus). C’est pour éviter cette conséquence fâcheuse (et, pour le coup, très contraire à l’intérêt de tous les mineurs) que le Conseil a, comme la Constitution le lui permet, fixé au 1er janvier prochain 2013 la date d’abrogation.
Jusqu’à cette date, il serait à mon sens préférable que les juge des enfants appliquent immédiatement le principe défini sans attendre une nouvelle loi, mais je crains que cette position ne fasse pas l’unanimité.

Match nul ?

Est-ce la fin de la justice des mineurs, ou en tout cas un de ses jours les plus sombres, comme certains de mes collègues commencent à se lamenter[10] ?
Un coup-fourré pour démanteler le tribunal pour enfants, alors que le parlement vient d’inventer, sur idée du gouvernement, le tribunal correctionnel pour mineurs ?

Il me semble que cet affolement est prématuré.
D’abord parce qu’il n’est pas exact que les mineurs ne soient jugés devant le TPE que par le juge des enfants qui les connaissent. Dans les juridictions d’une certaine taille, il est instauré un système de permanence qui peut conduire un juge des enfants à mettre en examen et/ou juger en TPE un mineur qu’il ne connaît ni des lèvres ni des dents[11]. Ca n’est jamais très confortable parce que cela demeure rare, mais ça existe.
Ensuite, parce qu’on peut ressentir un réel malaise, dans des dossiers contestés, à présider une juridiction de jugement qu’on a soi même saisie. Quand l’avocat commence à plaider “Comme je l’avais indiqué, sans succès, à Madame le Président lors de la mise en examen”, c’est moyennement plaisant.
Enfin, parce qu’il me semble que l’ordonnance de 45 est un texte obsolète sur un plan purement procédural
Les exigences constitutionnelles et européennes en matière de libertés publiques et de procédure pénale n’ont en effet cessé d’évoluer depuis 1945. Les majeurs bénéficient de garanties toujours plus fortes, avec par exemple le développement du contradictoire dans la procédure d’instruction, qui sont de fait déniées aux mineurs pour lesquels on pratique encore beaucoup la “procédure officieuse”, qui relève de l’oxymore.
La société s’est judiciarisée, la réponse pénale aux actes délinquants des mineurs est systématique. Beaucoup de faits qui auraient donné lieu à une grosse engueulade par le maréchal des logis chef du coin finissent devant le délégué du procureur ou le juge des enfants. Les conséquences ne sont plus les mêmes. Les garanties apportées aux mineurs doivent en conséquence aussi évoluer.
Il nous appartient, à nous qui tentons de faire rentrer dans la tête de ces gamins à coup de mesure éducative voire de peines de prison, le caractère impératif de la loi, de la respecter nous mêmes, même si elle ne nous arrange pas, même si on trouve “ce serait tellement mieux si…”. Je crois que l’intérêt supérieur des mineurs est aussi là, particulièrement alors que certains encourent des peines planchers importantes.
Je suis la première à dire qu’on ne peut pas traiter les mineurs comme les adultes, que les principes qui fondent l’ordonnance de 45 (notamment la spécialisation des juges et la primauté de l’éducatif) sont essentiels et, qui plus est, les seuls efficaces pour lutter contre la délinquance des mineurs.
Mais il me semblerait paradoxal que, à force de traiter les mineurs différemment des adultes, on les traite moins bien.
Question de priorité.

NB : ne manquez pas de surveiller le blog Parole de Juge, où Michel Huyette, grand spécialiste de la justice des mineurs tendance légaliste, ne manquera pas (je l’espère ardemment) de faire une note sur le sujet

Edit le 9 juillet : Ne manquez pas non plus l’avis opposé mais passionnant et éclairé de Jean Pierre Rosenczweig, président du Tribunal pour Enfants de Bobigny

Notes

[1] avec le soutien du service de documentation du Conseil Constitutionnel, qui a mis en ligne un dossier très fourni. Parce que s’il fallait compter sur la Chancellerie…

[2] en pratique, on trouve parmi les assesseurs beaucoup d’enseignants, psychologues, éducateurs ou professionnels de santé

[3] j’ignorais qu’il pouvait faire ça, mais c’est en tout cas prévu par son règlement intérieur

[4] Si toi aussi tu trouves que ça se complique…

[5] et pour cause, puisque ce que le Conseil Constitutionnel va sanctionner, c’est en réalité l’inexistence d’une disposition dans le Code de l’organisation judiciaire

[6] pour un exemple concret, voir l’excellent “Soyez le juge” sur le sujet

[7] oui, il y a des articles de code quelque part, désolée, je les ai pas sous la main, je fais un peu ça dans l’urgence, mais please faites moi confiance

[8] article 8 de l’ordonnance de 45 : le juge des enfants procédera à une enquête, soit par voie officieuse, soit dans les formes prévues par le chapitre Ier du titre III du livre Ier du code de procédure pénale = soit en ne respectant pas le code de procédure pénale soit en le respectant. précisons que les actes qui conduisent à des mesures de contraintes (mandat, contrôle judiciaire, détention provisoire) doivent impérativement être faits selon les règles du CPP

[9] Beaucoup réagiront sans doute de manière épidermique, prenant celà comme un insulte à leur professionnalisme, qui leur permet évidemment de toujours rester objectif, comme les parquetiers ont pris l’arrêt Winner comme un crachat en pleine gueule

[10] j’ai même entendu “ah mais ça va faire beaucoup plus de travail, il va falloir passer plus de temps à préparer des dossiers qu’on ne connaîtra pas”. Je précise qu’il s’agit d’une position non pas minoritaire mais unique !

[11] Oui, je SAIS que c’est “ni d’Eve ni d’Adam” mais ça m’a toujours fait rire comme ça

Commentaires

1. Le samedi 9 juillet 2011 à 00:36 par B.

Article très intéressant, la justice des mineurs est effectivement compliquée ! Est-ce qu’on pourrait imaginer la chose suivante qui ménage la lèvre et le cou (pour continuer dans la transformation d’expression…) ?

  1. Le juge 1 fait office de juge d’instruction, donc instruit l’affaire.
  2. Le juge 2 juge.
  3. Le juge 1 revient, et joue le rôle de juge d’application des peines.

L’idée serait que le juge 2 assure un jugement équitable puisqu’il n’a pas son idée préconçue sur la culpabilité de l’enfant, et que le juge 1 connaît bien l’enfant, et donc est plus à même d’interpréter (ou adapter) le jugement qui a été fait. En gros, on pourrait se dire que le juge 2 décide de la culpabilité ou non, ainsi que d’un “ordre de grandeur” de la peine et de sa nature, tandis que le juge 1 adapte ça à l’enfant qu’il connaît bien.

Tout irait bien dans le meilleur des mondes avec ma solution ?


Dadouche :
C’est probablement en gros ce qui va se passer…Sauf si le long délai (j’avais lu et écrit trop vite 1er janvier prochain, en fait c’est 1er janvier 2013) est mis à profit pour une refonte totale du droit pénal des mineurs. Et là, danger…

2. Le samedi 9 juillet 2011 à 04:15 par cyel

En même temps, les enfants n’ont, notoirement, pas les mêmes droits que les adultes, il me semble : la libre-circulation, par exemple, leur est interdite : ne serait-ce qu’à l’école (disons : au collège), en vertu de règlements intérieurs qui, ce me semble, ne résisteraient pas à l’application stricte de la loi. La libre expression est tout aussi problématique (essayez de dire à un professeur ce que vous pensez de son cours – le tout sans injure, ni diffamation – dommage pour vous !).

Quand ils arrivent devant un tribunal, justement “pour enfants”, les enfants n’en sont déjà plus vraiment, mais ils le restent pourtant néanmoins. Toute la question est donc de savoir si l’on doit soudainement les traiter comme des adultes, ou au contraire perpétuer le traitement spécifique qui leur ait fait ; et si ce choix est neutre - ou non - dans la recherche de la vérité et le respect des droits des différents intervenants

3. Le samedi 9 juillet 2011 à 08:03 par Alex

Super billet, Dadouche !
J’ai juste une précision, sur le “refus” de transmission de la Cour de cassation.
En fait, la Cour n’avait pas refusé de saisir le Conseil constitutionnel de la question ayant donné lieu à censure.
Elle avait simplement constaté que l’article 8 de l’ordonnance de 1945 ne comporte aucune disposition relative à cette question de la présidence du TPE; s’agissant de la procédure devant le TPE, cet article se borne à dire que le juge des enfants peut renvoyer le mineur devant cette juridiction.
C’est pour cette raison que le renvoi a été refusé: le texte visé par l’avocat n’était pas le bon
Mais en aucun cas, la Cour de cassation, dans le cadre de cette QPC, n’a jugé que cette question précise sur l’impartialité était dépourvue de caractère sérieux.

4. Le samedi 9 juillet 2011 à 08:10 par marsan

à B

jusqu’à présent le juge des enfants faisait 1, 2 et 3.

il ne me semble pas stupide que les regles de droit s’appliquent aussi à la juridiction des enfants -

Dans tous les cas le juge qui instruit ou met en détention ne doit pas etre celui qui juge. Pourquoi en serait-il différemment pour les mineurs ?

Ceci dit bonjour le bazard pour ré-organiser le tribunal de grande instance - les présidents vont s’arracher les cheveux cet été d’autant que la réforme des hospitalisations sous contraintes se met en place dès avant le prochain 1er aout et que rien n’est pret.

5. Le samedi 9 juillet 2011 à 09:39 par st-antoine

Attention Eolas, votre blog est spammé ! (#5) !

6. Le samedi 9 juillet 2011 à 10:24 par Gascogne

Autre bizarrerie du droit des mineurs qui mériterait un petit passage devant le CC : pas de JLD en matière de procédure dite de présentation immédiate (délai rapproché, à l’époque), ce qui signifie que c’est le juge des enfants qui signe un éventuel mandat de dépôt. C’est comme cela que j’ai incarcéré un mineur, en tant que juge des enfants, chose qui m’était interdite en tant que juge d’instruction ! Il faudra un jour qu’on m’explique où est l’aspect éducatif, la dedans…

7. Le samedi 9 juillet 2011 à 10:38 par Ignare Heureux

Code de procédure pénale, article 49 alinéa 2 (sur Légifrance) :
Le juge d’instruction ne peut, à peine de nullité, participer au jugement des affaires pénales dont il a connu en sa qualité de juge d’instruction.

8. Le samedi 9 juillet 2011 à 15:30 par lambertine

Bizarre…

Si peu de commentaires ? A croire que la justice des “mineurs” n’intéresse pas grand monde…

9. Le samedi 9 juillet 2011 à 17:17 par loz

@lambertine
C’est que, quand ils n’ont rien à dire, certains - trop peu nombreux assurément - n’hésitent pas à le garder pour eux.

10. Le samedi 9 juillet 2011 à 17:51 par marsan

Lambertine nous sommes le 9 juillet et je ne suis pas sur que tous ces affreux qui sont partis en vacances alors que je continue à bosser aient emmené leur ordi - dommage car Dadouche (comme d’hab) a fait un superbe billet

11. Le samedi 9 juillet 2011 à 19:05 par marsan

pour tous ceux qui auraient des lectures autre que Le Monde, ci joint un article trouvé dans ce vénérable canard

http://jprosen.blog.lemonde.fr/2011…

comme quoi les avis divergent ce qui après tout est une excellente chose

12. Le samedi 9 juillet 2011 à 19:32 par lambertine

Qui parle d’ “affreux” ?

Je remarque simplement que la justice des “mineurs” (et je mets bel et bien mineurs entre guillemets) n’intéresse pas grand monde, parce que l’immense majorité des gens trouve normal que les enfants aient peu ou pas de droits. Et cela “pour leur bien”. C’est tout.
C’est assez frappant que pendant des décennies, personne ou presque n’ait trouvé anormal, et contraire aux droits de l’homme, qu’un individu, parce qu’il était mineur et donc objet de protection avant d’être sujet de droit puisse se voir juger et condamner (peu importe si c’est à une peine éducative)par la même personne qui avait instruit son “affaire”, et que cette même personne soit celle qui ait l’application de sa peine entre ses mains.

13. Le samedi 9 juillet 2011 à 19:52 par lambertine

PS : j’aime bien le juge Rosensweig, mais pour une fois, je ne peux ps être d’accord avec lui. La “protection des mineurs” ne peut être légitime quand elle est en opposition avec les droits fondamentaux de l’individu.

14. Le samedi 9 juillet 2011 à 20:53 par marsan

Lambertine

“affreux” était sur le mode de la plaisanterie - concernant les droits des mineurs je suis d’accord avec vous : il n’y a aucune raison qu’un mineur est un traitement différent.

allez un dernier lien pour la nuit : bon c’est une mauvaise nouvelle http://tempsreel.nouvelobs.com/actu…

le maitre en dira peut être quelques mots bien mieux que moi

15. Le dimanche 10 juillet 2011 à 08:49 par jojo

Vraiment intéressant.

On en revient à l’éternelle question bien française de la séparation des pouvoirs. Celui qui poursuit et celui qui juge ne doivent pas être la même personne.

N’oublions pas qu’à la différence des autres pays, en France, la séparation des pouvoirs n’existe dans le texte qu’entre pouvoir législatif et exécutif. Pour le judiciaire, c’est avant tout une construction non écrite. La séparation ne figure pas en tant que telle dans la Déclaration de 1789, ni dans la Constitution.

Ici, on tourne toujours autour du sujet, très distraitement, alors que la question de base, c’est l’éternel “mais quand coupera-t-on définitivement le cordon ombilical”.

Vaste sujet.

16. Le dimanche 10 juillet 2011 à 09:04 par Flop

  1. 8 Rien à dire lorsqu’il s’agit pour la justice française de se rapprocher des normes internationales. Même si le chemin qui reste à parcourir est encore bien long.

Sinon, à quand une justice européenne ?

17. Le dimanche 10 juillet 2011 à 10:20 par Schmorgluck

@Gascogne
Peut-être le législateur a-t-il souhaité donner au juge pour enfants la possibilité de coller la trouille au gamin qu’il a en face de lui, s’il a l’impression que c’est la meilleure manière de le dissuader de déconner à nouveau ? Dans cette optique, avoir l’incarcération à son arsenal n’est pas une mauvaise idée.

18. Le dimanche 10 juillet 2011 à 10:29 par phirenard

Cela dit, la décision sur les assesseurs non professionnels paraît singulièrement de circonstance, et l’argument trouvé pour ne pas censurer est bien faible : en quoi le fait qu’une juridiction soit spécialisée, et non de droit commun, peut s’opposer au principe résultant de l’article 66 de la Constitution ?
Le Conseil a eu la chance de pouvoir trouver dans une décision antérieure un terme auquel se raccrocher pour pouvoir justifier la décision qu’il souhaitait prendre, comme il le fait hélas souvent…

19. Le dimanche 10 juillet 2011 à 10:34 par DG

Oui Dadouche, ça sentait pas bon ! Oui, “ils” ont osé ! Oui, “ils l’ont fait” ! Après le tribunal correctionnel pour mineurs, attaquons-nous maintenant à la composition du TPE (des assesseurs non professionnels majoritaires ! Qui ne seraient pas par hasard trop laxistes eux aussi ? Des personnes “qui se sont signalées par l’intérêt qu’elles portent aux questions de l’enfance et par leurs compétences”, ça serait pas un peu louche ?) et puis à son président tant qu’on y est ! Yaka pas s’gêner….
Je suis assesseur en TPE depuis 4 ans et je peux témoigner au quotidien de la qualité des débats, du professionnalisme de ces assesseurs amateurs et que jusqu’à présent, les différentes casquettes portées par le Juge des enfants, ont toujours servi les intérêts des mineurs.
Les assesseurs ayant, jusqu’à ce jour, uniquement connaissance du dossier pénal ne peuvent juger en leur âme et conscience que sur leur connaissance de ce dossier. Et l’on comprend alors peut-être pourquoi le législateur a prévu une composition du TPE avec des assesseurs non professionnels majoritaires……

20. Le dimanche 10 juillet 2011 à 10:40 par Alex

@18: c’est une distinction ancienne et, il est vrai un peu bizarre, que l’on retrouve au moins depuis le commentaire publié par le CC dans ses Cahiers au sujet de la décision n°2010-10 QPC du 2 juillet 2010 (tribunaux maritimes commerciaux).
Le conseil valide des juridictions étrangement composées mais relevant de l’ordre juridique “existant”, au nom de… de je ne sais pas trop quoi en fait, et fait porter en revanche une exigence d’impartialité plus forte sur les juridictions de droit commun (tribunal correctionnel notamment).
Il n’y a aucune logique, aucune cohérence là dedans, mais au moins cette position arbitraire devrait nous valoir une censure du projet de loi sur les jurés populaires devant le tribunal correctionnel.
Les tribunaux vont pouvoir souffler de voir censurer cette usine à gaz.

21. Le dimanche 10 juillet 2011 à 14:51 par Michel Huyette

C’est demandé si aimablement qu’il aurait été difficile de refuser.

C’est donc ici : http://www.huyette.net/article-la-p…

22. Le dimanche 10 juillet 2011 à 15:46 par lambertine

les différentes casquettes portées par le Juge des enfants, ont toujours servi les intérêts des mineurs.

Pardonnez-moi, DG, mais permettez-moi d’en douter. Les Juges des Enfants, dont je ne conteste ni le professionnalisme, ni le dévouement, ne sont pas plus infaillible que n’importe qui. Alors, souvent, peut-être, mais toujours, sûrement pas. Même s’ils ont toujours cru et voulu le faire.

Et (et là, je sais que je risque la volée de bois vert, mais tant pis) le rôle du juge doit-il d’abord être de “servir l’intérêt des mineurs” plutôt que d’instruire ou (et pas “et”) de juger ? L’intérêt supposé du mineur doit-il s’opposer au Droit et à la Justice ? Je n’ai pas dit qu’il fallait juger et punir les mineurs comme les majeurs, mais que les mineurs doivent pouvoir être jugés (et le cas échéant, punis, de façon adaptée) de façon équitable, en ayant droit, eux aussi, à une défense pleine et entière, devant un tribunal impartial. Pas devant “Monsieur le Juge” qui les suit depuis cinq ans, qui a instruit l’affaire et qui les a renvoyés - ou pas - devant le TPE qu’il préside.

Le Juge des Enfants est un magistrat. Pas un éducateur. Même si son action participe à l’éducation de gamins qui ont dérapé. Je crois que vouloir en faire un “éducateur” (était-ce bien le but de l’ordonnance de 45), c’est risquer qu’il soit partial, et cesse de juger d’abord en Droit. Et qu’en fin de compte, il agisse contre les intérêts des gamins, dont le premier est, je crois, de voir leurs Droits respectés.

23. Le lundi 11 juillet 2011 à 15:52 par Jaqen

Oula, ça se complique…

Mais où est donc le royaume de Far Far Away……

24. Le lundi 11 juillet 2011 à 18:08 par cv

Je partage sur bien des points l’avis de lambertine.
Je crois qu’il y a dans cette affaire un téléscopage de deux problèmes bien distincts

- mettre en adéquation le fonctionnement du tribunal pour enfants avec des normes juridiques qui me semblent difficilement contestables. Certains le regrettent, expliquent à quel point cela fonctionnait bien avant. Je n’en doute pas comme je ne doute pas que la plupart des gardes à vues sans avocat se passaient de manière très respectueuses des droits des gardés à vues, mais il y a des principes qui sont faits pour être respectés par tous.
D’ailleurs la proposition de B. semble indiquer une voir raisonnable pour concilier principes constitutionnels avec l’objectif recherché de suivi des mineurs.

- la crainte que le gouvernement actuel essaie de détricoter un système protecteur pour les mineurs, système qui est à mon avis fondamental dans un vision “humaniste” de la justice et qui est parfaitement conforme aux principes généraux du droit et en particulier à la Convention Internationale pour les droits de l’enfant. Et crainte que la refonte des textes rendue nécessaires par la décision du Conseil Constitutionnel ne soit l’occasion d’une telle opération.

Faut-il sacrifier la conformité aux principes du droit pour essayer de faire obstacle à une attaque de la justice des mineurs. Prétendre que les mineurs n’ont pas droits aux mêmes protections constitutionnelles que les adultes ne me semble pas une défense de la justice des mineurs. Et l’actuel gouvernement a suffisamment montré que sa capacité à trouver des prétextes pour faire n’importe quoi n’est en rien tributaire des décisions du Conseil Constitutionnel.

25. Le lundi 11 juillet 2011 à 21:25 par lagun

Au nom de l’efficacité, certains refusent donc au mineur le droit à un juge impartial. Le même juge pourrait placer en détention provisoire (dans la procédure de présentation immédiate), instruire, juger, et ce X fois de suite, sans que l’on s’en émeuve alors que l’on craindrait pour n’importe quel majeur confronté à une telle situation qu’il ne vire parano (d’autant qu’au parquet, la place sera aussi, sauf dans les grandes juridictions, occupée généralement par le même substitut des mineurs).
Si certes, cette réforme va nécessiter des adaptations, notamment la constitution d’un véritable dossier de personnalité, et remettre en cause l’existence même des 34 juridictions pour enfants qui ne sont dotées que d’un seul juge des enfants, je ne vois pas en quoi le fait que le tribunal pour enfants soit présidé par un juge autre que celui habituel du mineur nuise en quoi que ce soit au suivi de ce dernier. Je ne doute pas qu’ils sauront échanger sur les cas qui le nécessiteront (pas sur la culpabilité bien sûr). Pour avoir exercé en tant que juge placé des fonctions de juge des enfants le temps d’un long congé de maternité, j’ai pu constater que les cas dans lesquels la culpabilité est sérieusement discutée sont loin d’être quantité négligeable. Et oui, un second regard n’est parfois pas inutile.

26. Le mardi 12 juillet 2011 à 08:59 par lagun

Cette décision du Conseil Constitutionnel tombe à un très mauvais moment, parallèlement au vote de la loi instaurant la création du Tribunal correctionnel des mineurs, sa saisine obligatoire quasi-systématique pour les délits commis en récidive et autres excécrables détricotages du droit pénal des mineurs. Considérer pour autant qu’au prétexte de respect des garanties minimales en matière de procédure pénale, elle est une décision politique visant à favoriser ce mouvement est au moins précipité. Puisque ladite loi est soumise au Conseil Constitutionnel, laissons lui le bénéfice du doute au moins jusqu’à sa décision.

27. Le mardi 12 juillet 2011 à 09:45 par DM

Au sujet de l’aspect éducatif : n’est-il pas mieux, pour un mineur délinquant mais qui minimise ses fautes (“c’est pas ma faute, c’est lui qui m’avait cherché”) de voir celles-ci visées par deux personnes différentes? Si l’on garde le même juge, la réaction mentale n’est-elle pas “de toute façon cette juge elle m’en veut”?

(Je n’ai aucune expérience en matière de justice des mineurs, c’est juste que ce phénomène psychologique est à l’œuvre dans des domaines divers : on accepte mieux la critique si elle vient de plusieurs individus, dont une personne un peu “extérieure”, que si on a l’impression d’une sorte de persécuteur.)

28. Le mardi 12 juillet 2011 à 10:57 par Jalmad

Je suis entièrement d’accord avec les propos de ce billet, et ceux de cv et lagun. J’ajoute que cette décision est d’autant la bienvenue que :

- les juges des enfants instruisent parfois (voire souvent dans certaines juridictions) des faits extrêmement graves, vu que le parquet saisi de moins en moins les juges d’instruction

- qu’il y a une inégalité de traitement selon que l’affaire est instruite par un juge d’instruction ou un juge des enfants ; or le critère de saisine du juge d’instruction est certes parfois la gravité/complexité des faits, mais parfois aussi quelques mineurs se retrouvent dans la procédure avec des majeurs, et c’est pour ça qu’ils ont affaire au juge d’instruction plutôt qu’au juge des enfants.

Je comprends la décision comme Dadouche, à savoir que le CC opèrerait une distinction selon la nature de la juridiction de jugement, à savoir Chambre du conseil (avec possibilité d’avoir le JE qui a instruit comme juge du fond) / TPE (incompatibilité), et ce en raison de la nature de la mesure (mesure éducative ou peine) qui pourra être infligé. Je suis quand même un peu sceptique sur cette distinction ; car j’entends bien l’intérêt théorique d’avoir un juge qui connaît le mineur (encore qu’on peut s’interroger sur la réalité pratique de cet intérêt : soit on a un mineur multiréitérant, et alors on peut imaginer qu’à la fois le juge qui instruit et à la fois le juge de jugement finiraient par connaître ce mineur, soit ce n’est pas le cas, et alors, faut pas se leurrer, le juge des enfants le rencontre une fois lors de la mise en examen, puis une fois au moment du jugement ; ce sont surtout les éduc qui l’ont suivi qui le connaissent, et leur rapport qui aura du poids au moment de la décision….). Mais il faut quand même rappeler que, même en cas de décision en chambre du conseil, il y a décision de culpabilité, donc inscription au casier judiciaire (avec certes disparition à la majorité, mais quand même), mais aussi inscription au STIC (qui entraîne des effets en terme d’accès à certains emplois), voire au FIJAIS. Par ailleurs, une mesure éducative, ce n’est quand même pas rien : avoir un éduc aux basques plusieurs années, être placé en foyer, même “pour son bien”, ce n’est pas rien. Et je me dis qu’avoir affaire à un juge impartial (on parle ici d’impartialité objective, bien sûr, de par les fonctions exercées par ailleurs), ce n’est pas du luxe.

29. Le mardi 12 juillet 2011 à 12:45 par lambertine

Permettez-moi, Jalmad, d’ajouter que ce n’est pas parce qu’un juge a affaire à un multiréitérant qu’il le “connaît”. je dirais plutôt que le plus souvent il “connaît son dossier”. Et que le fait qu’il le “connaisse” quand même mieux qu’un juge lambda peut être un gros désavantage pour le mineur “inculpé” parce que le juge peut partir avec de gros préjugés sur sa culpabilité ou sa part de culpabilité dans les délits commis. Il peut en avoir d’autant plus que ces jeunes multiréitérants peuvent être trèèèès horripilants. Mais on peut être multiréitérant, horripilant, totalement rétif à la justice et… parfaitement innocent, ou vague complice.

je rajouterai que j’ai du mal avec la différence mesure éducative/sanction pénale. La mesure éducative n’est peut-être pas au sens strictement juridique une “sanction” pénale, mais elle l’est dans les faits, et dans l’esprit de celui à qui elle est appliquée. Et c’est très bien ainsi : pour que ces mesures éducatives soient éducatives, il faut que le gamin en perçoive autre chose que “c’est pour ton bien” : “t’as déconné, t’es puni”. Mais il faut aussi qu’elles ne soient pas perçues comme injustes. Et pour qu’elles ne soient pas perçues comme injustes, il faut 1. Qu’elles ne le soient pas (ce n’est pas parce qu’un prévenu est mineur, et délinquant, qu’il ne peut pas être innocent) 2. Que l’inculpé mineur ait pu, comme un majeur, se défendre devant un tribunal impartial.

Une des choses qui me choque beaucoup dans le droit des mineurs français tel que je le perçois (et que je le lis), c’est qu’autant il y est question de l’intérêt de l’enfant, autant la culpabilité de ce dernier paraît acquise dès le départ. Or, comme le dit lagun, “les cas dans lesquels la culpabilité est sérieusement discutée sont loin d’être quantité négligeable.

30. Le mardi 12 juillet 2011 à 14:57 par Jalmad

@ Lambertine : je suis d’accord avec vous. Je pense que les juges des enfants ont une conscience très aigüe du fait qu’une condamnation ne doit pas être prononcée à la légère, et, même s’ils croient “connaître par coeur” un mineur, font attention à ne pas condamner, même à des mesures éducatives, à la légère. Parce qu’ils savent combien, peut-être encore plus qu’un majeur, un mineur vit mal une injustice et est capable de foutre un début de parcours positif en l’air pour un mot de travers d’un éduc, d’un juge, et, a fortiori, une condamnation à tort. mais les juges des enfants sont comme tout le monde, faillibles, et je crains que parfois, aveuglés par leur souci de “bien faire” et de “tellement connaître le jeune et ses mensonges et son histoire, etc…”, ils ne soient tentés de prononcer une mesure éducative qui semble très utile vu la situation du mineur, mais sur la base d’un dossier un peu faible en terme de culpabilité.

Personnellement, je trouve que les mineurs, d’une manière générale, sont traités très durement en terme de procédure. Cela me paraît assez net en terme de détention provisoire. J’ai l’impression que des mineurs font de la détention provisoire pour des faits pour lesquels personne ne songerait à y envoyer un majeur ; juste parce que, en terme de “parcours éducatif”, à un moment donné, on a l’impression d’avoir tout épuisé.

Maintenant, je pense que le Cons constit va être plus vigilant, et probablement bientôt laminer la “procédure officieuse”, qui est juste une négation des droits qui ne dit pas son nom, même s’il y a sans doute un juste milieu à trouver (amis législateurs, merci) entre cette procédure officieuse et la procédure d’information judiciaire. Et cette présentation immédiate à la con. Enfin, j’espère.

31. Le mercredi 13 juillet 2011 à 08:28 par Jalmad

oh p’tain, je viens voir, je vois 66 com, et je me dis “cool, soudain regain d’intérêt pour les mineurs à la veille du 14 juillet ?” ben non, en fait, de la pub. Et pub neutralisator, il est aussi en cances-va ?

32. Le mercredi 13 juillet 2011 à 11:58 par Oxymore

Apparemment pas! ^^
De nouveau 31 commentaires…
(et pi je précise qu’on peut être intéressé, suivre même les échanges en com et ne pas poster pour autant: d’autant plus si l’on est d’accord avec le billet.)

33. Le mercredi 13 juillet 2011 à 15:46 par bleu horizon

“Jean Pierre Rosenczweig, président du Tribunal pour Enfants de Bobigny” dadouche est ce une nouvelle fonction? il n’existe pas un président de TPE comme celui du TGI , un magistrat coordinateur oui , par contre il préside le tribunal en formation collégiale effectivement.

Très bon article
un assesseur


Dadouche :
Mr Rosenczweig se présente lui même sur son blog comme Président du TPE de Bobigny, fonction à laquelle il a été nommé en 1992 (Vice Président du TGI chargé de la présidence du tribunal pour enfants), bien avant qu’on imagine le concept de magistrat coordonnateur

34. Le mercredi 13 juillet 2011 à 21:42 par marsan

Comme je l’ai dit plus haut j’adhère tout à fait à cette remise en cause du Conseil constitutionnel.

Mais un mot quand même supplémentaire : si l’article L. 251-3 du code de l’organisation judiciaire est contraire à la Constitution pourquoi faut-il attendre le 1er janvier 2013 pour en tirer toutes les conséquences ? S’il y a inconstitutionnalité le juge des enfants ne devrait plus présider le TPE dès maintenant.
C’est quoi cette fiction ? et quelle légitimité aux décisions qui vont être rendues jusqu’à cette date ? J’ai beau creuser ma petite tête qui a besoin de vacances, je ne trouve aucune bonne raison.

35. Le jeudi 14 juillet 2011 à 09:55 par Jean-Paul de Mes Deux

J’ai lu deux lignes avant de me rappeler que j’avais une notice d’installation de tondeuse à gazon de 400 pages à finir. Désolé mais niveau lectures somnifériques il faut reconnaître ses priorités.

36. Le jeudi 14 juillet 2011 à 10:14 par Véronique

Merci Dadouche.

J’ai appris grâce à votre billet beaucoup d’aspects essentiels que j’ignorais totalement. Par exemple, je ne savais pas que dans la justice des mineurs, le juge qui instruit est celui qui juge.

Sur un plan général, au-delà des droits développés par Jalmad, je pense que la justice et les justiciables ( mineurs ou pas) ont toujours à gagner quand il y a une pluralité et une différenciation dans les regards portés sur un dossier.

37. Le jeudi 14 juillet 2011 à 10:18 par Djemaa

Bonne fin de semaine et merci pour ces articles ! Pascal.

38. Le jeudi 14 juillet 2011 à 12:17 par Nicolas Couchoud

@marsan (34)
Le seul pouvoir du Conseil constitutionnel est d‘abroger des dispositions législatives, pas d’en ajouter (ce qui est réservé au Parlement). Or ce qu’il reproche à la loi actuelle est l‘absence de dispositions imposant que le juge présidant le TPE ne soit pas celui qui a instruit. Pour réparer cela, il faut ajouter des dispositions, et sans doute fusionner les TPE n’ayant qu’un juge des enfants avec d’autres. Dans ces conditions, tout ce que peut faire le CC est de déclarer inconstitutionnel l’article qui définit la composition du TPE, mais il ne peut pas raisonnablement l’abroger parce que dans ce cas aucun texte ne définirait le TPE… L’abrogation à retardement est le moyen d’imposer au législateur de prendre les mesures appropriées, qui ne sont pas triviales et que le CC ne peut pas prendre à sa place.

En attendant, j’imagine que dans les TPE ayant plusieurs juges des enfants, ils vont dès maintenant veiller à ce que le JE présidant le TPE jugeant un enfant ne soit pas celui qui a instruit l’affaire, puisqu’aucun texte ne l’interdit.

39. Le jeudi 14 juillet 2011 à 14:41 par marsan

@ 38

d’accord avec vous mais j’ai du mal à comprendre qu’il faille 1 an 1/2 pour trouver la solution -

40. Le vendredi 15 juillet 2011 à 16:32 par lambertine

Ce que je peux remarquer, quand même, c’est que ni ici, ni chez Rosenscweig, ni chez Huyette, ni chez Bilger, le débat n’attire de monde. Mieux vaut parler des apéro cochon vin rouge, ou des cantnes scolaires, ou d’Eva Joly.

41. Le samedi 16 juillet 2011 à 00:24 par DCRI

Do yourself.

42. Le samedi 16 juillet 2011 à 09:27 par Tilleul

Pub neutralisator est en week-end aussi ?

43. Le mardi 19 juillet 2011 à 14:06 par Pyerch

Pourquoi la justice des mineurs intéresserait-elle si peu de monde ?
Question absurde : on est médiatiquement matraqué par les compte-rendus des faits et gestes de la délinquance faite jeune afin d’amener le bon peuple non pas à réfléchir sur les bonnes mesures d’une police de la jeunesse, mais pour applaudir à tous les discours sécuritaires et répressifs. Comme si la jeunesse d’aujourd’hui était plus dangereuse qu’hier et qu’il fallait par conséquent la faire passer sous les fourches caudines de la justice des majeurs ! Classes jeunes classes dangereuses.
Alors l’on construit des dispositifs d’encadrement, de surveillance, de répression de la jeunesse vagabonde qui décroche de l’école. On a ainsi construit un concept “le décrochage scolaire”.
Ainsi à l’occasion d’une QPC on va mettre en cause une loi d’orientation déjà bien attaquée, celle de 1945 sur la justice des mineurs. La mesure éducative va laisser la place à la mesure répressive.
Ici on ne parle pas des assesseurs de la vie civile : vont-ils disparaître ? Ces “juges sans atelier” comme je les appelle à la différence “des ateliers du juge” (cf le livre de L. Bellon) ont-ils encore leur utilité ?
Le débat est lojn de n’être que juridique

44. Le samedi 23 juillet 2011 à 08:58 par Et_les_placements_abusifs_de_mineurs

Cette décision du Conseil Constitutionnel va dans le BON sens. Il faut même aller plus loin en appliquant le principe “d’impartialité” aux services sociaux.

En effet, la procédure de placement est une violation flagrante de l’article 10 de la déclaration universelle des Droits de l’Homme qui indique que « Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial » car les articles L221-1, L221-4, L226-2-1, L226-3 et L226-4 ne garantissent pas le principe d’égalité des armes des parents face à l’Aide Sociale à l’Enfance qui fait le signalement, organise la soustraction des enfants, instruit le dossier à l’attention du Juge, évalue les parents, préconise le prolongement du placement, juge de la qualité de la prise en charge du mineur par ses propres services,…

En conséquence, j’invite tous les parents d’enfants placés à déposer la QPC suivante (faire un copier/coller):

Motivations de la QPC - Code de l’Action Sociale et des Familles.

Dispositions relatives aux placements des mineurs.

En vertu des articles 61-1 et 62 de la Constitution, nous avons l’honneur de déposer une question prioritaire de constitutionnalité.

1) Nous demandons que les articles L221-1, L221-4, L226-2-1, L226-3 et L226-4 soient déclarés - collectivement - inconstitutionnels. Bien que chacun de ces articles semblent anodins individuellement, leur agrégation ne permet pas le respect de l’égalité des armes des familles face à des services sociaux qui font le signalement, organise la soustraction des enfants, instruisent le dossier à l’attention du Juge, évaluent les parents, préconisent le prolongement du placement, jugent de la qualité de leur propre prise en charge du mineur,…

Ainsi, à l’audience devant le Juge des Enfants, les services sociaux cumulent - en quelque sorte - les rôles de juge d’instruction (ou de l’enquête), de procureur (ou d’avocat général) et de juge d’application des peines. Ceci est contraire au respect d’une procédure équitable et à la préservation de l’équilibre des droits des parties.

De plus, lors de la mise en place de la procédure en assistance éducative, ces articles confèrent à l’assistante sociale référente des pouvoirs excessifs, ce qui permet un certain nombre d’abus. (Voir le paragraphe “ Violation des droits de l’Homme ” du Mémoire).

2) Nous demandons que l’article L223-5, relatif à l’élaboration d’un rapport pluridisciplinaire, soit déclaré inconstitutionnel car il est contraire au respect du contradictoire. En effet, ni la famille, ni l’avocat des parents, ni l’avocat de l’enfant ne sont présents lors de la préparation de ce rapport. En revanche, chef de service, attachée SPE, conseillère enfance,… participent aux synthèses même s’ils n’ont jamais vu l’enfant et s’ils ne le connaissent que par l’intermédiaire de la « référente » et du dossier de signalement (dont le contenu est forcément défavorable aux parents, mais pas forcément authentifié). La voix de la défense n’étant jamais prise en compte, il est assez courant que ces synthèses contiennent des contrevérités. Ces « erreurs » sont d’autant plus regrettables que le Juge des Enfants se base sur ce compte-rendu et qu’il arrive que le magistrat ne fasse qu’entériner ces conclusions. Le rapport pluridisciplinaire constitue donc, de facto, un dossier d’instruction mais rien ne garantit sa rédaction à charge et à décharge.

3) Nous demandons que la notion d’ “ intérêt de l’enfant ” (article L112-4) soit déclarée inconstitutionnelle et que la primauté de ses “ droits fondamentaux ” soit énoncée (notamment le droit fondamental de l’enfant de vivre, s’il le souhaite, avec ses parents). En effet, l’intérêt (supposé) de l’enfant est un concept évalué subjectivement par des travailleurs sociaux et des Juges qui n’ont qu’une connaissance très superficielle (voire même erronée) de l’histoire de l’enfant. Cette notion subjective ne saurait donc l’emporter sur les droits objectifs fondamentaux de l’enfant lorsque celui-ci exprime, librement et clairement, qu’il refuse d’être séparé de ses parents. Encore faudrait-il que tout enfant placé soit systématiquement représenté par un avocat qui recueille son témoignage (et qu’il puisse le rencontrer sans la présence de son assistante sociale référente).

Par ailleurs, cette notion d’“ intérêt de l’enfant (qui) (…) doit guider toutes décisions le concernant ” place un certain nombre de travailleurs sociaux en situation de conflit d’intérêts. Les assistantes sociales (cherchant à valoriser leur travail) n’ont pas “ intérêt ” à avouer qu’elles ont fait une erreur si elles s’aperçoivent que leur demande de placement en famille d’accueil était une erreur; les éducateurs (en CDD dans les foyers de l’enfance) n’ont pas “ intérêt ” à reconnaître que l’enfant doit retourner dans sa famille; les TISF (dont les emplois sont menacés dans les ADMR en difficultés financières) n’ont pas “ intérêt ” à admettre que les observations à domicile sont inutiles; le Président du Conseil Général (cherchant à optimiser le taux de remplissage des foyers de l’Aide à l’Enfance à 98% avant les prochaines réformes territoriales)* n’a pas “ intérêt ” à vider les structures d’accueil. Cette question du conflit d’intérêts mérite d’être posée car chaque enfant placé est l’enjeu d’importants transferts économiques: 6.000 euros/mois, sans compter la captation des allocations familiales au profit de l’Aide Sociale à l’Enfance (article L521-2 du Code de la Sécurité Sociale).

MEMOIRE

Objet: constitutionnalité du code de l’action sociale et des familles
Service de l’aide sociale à l’enfance

Mesdames et Messieurs les Hauts Conseillers,

J’ai l’honneur de vous alerter au sujet des dérives permises par les dispositions du Code de l’Action Sociale et des Familles.

Préambule

En France, environ 150 000 enfants sont soustraits à leurs parents pour être confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance. Certes, il ne s’agit pas ici de remettre en question le bien fondé de certains placements dans les cas avérés de maltraitance, toxicomanie, alcoolisme,… Hélas, comme le reconnaît lui-même Pierre Naves, Inspecteur Général des Affaires Sociales, dans la moitié des cas, ces placements ne se justifient pas. Ainsi, ce sont donc près de 75 000 enfants qui sont arrachés à leurs familles et qui garderont, toute leur vie, les séquelles de ce traumatisme.

Si un tel scandale est encore possible dans notre pays, malgré les rapports Naves-Cathala de 1984 et de 2000, c’est que le Code de l’Action Sociale et des Familles présente de graves lacunes et permet aux services sociaux de violer les Droits de l’Homme les plus élémentaires.

Inconstitutionnalité des textes et des pratiques

Au niveau de la procédure en assistance éducative

Les articles L221-1, L221-4, L226-2-1, L226-3 et L226-4 confient à l’Aide Sociale à l’Enfance des pouvoirs très importants. C’est, en effet, une seule et même institution qui évalue: les capacités des parents, la nécessité du placement, la pertinence de son action, la qualité de son propre travail auprès des enfants placés et des parents,… Lors de la procédure en assistance éducative, les services sociaux cumulent - en quelque sorte - les rôles de juge d’instruction (ou de l’enquête), de procureur (ou d’avocat général) et de juge d’application des peines.

Sans doute cette concentration des missions a-t-elle été voulue par le législateur dans un souci d’efficacité de l’action sociale au service des intérêts supérieurs de l’enfant. Néanmoins, cette confusion des pouvoirs est tout à fait contraire au respect d’une procédure équitable et à la préservation de l’équilibre des droits des parties. Beaucoup de parents d’enfants placés considèrent qu’ils sont victimes d’une instruction à charge, de la part de services sociaux à la fois juge et partie, sans même avoir la faculté de demander un dessaisissement pour suspicion légitime.

On pourrait rétorquer que la décision de placement est prononcé par un Juge des Enfants indépendant et impartial. Certes. Mais, dans la réalité, le Juge des Enfants se contente souvent d’entériner les propositions des services sociaux. En effet, au fil des années, les Juges des Enfants ayant l’habitude de travailler avec les services sociaux (à qui ils confient les missions d’observation et de mise en oeuvre des mesures d’assistance éducative), une certaine relation de confiance s’établit entre Juges et services sociaux. Cette confiance se transforme, petit à petit, en complicité (allusions implicites en forme de clin d’oeil entre Juge et travailleurs sociaux lors de l’audience), voire même en connivence. Ainsi, il est assez courant que le Juge des Enfants reçoive les services sociaux, en catimini, quelques minutes avant l’audience, pendant que la famille patiente dans la salle d’attente. Cette pratique devrait être strictement interdite par la loi car elle est contraire au respect du contradictoire.

Par ailleurs, les travailleurs sociaux ont rarement le courage de lire aux parents les rapports qu’ils ont envoyés au Juge (pour notre part, une seule fois au bout de… quatre ans). De plus, par certaines pratiques, il est facile de contourner l’article 1187 du Code de procédure civile et d’empêcher aux familles d’avoir accès aux dossiers les concernant: convocation tardive, pièces communiquées in extremis, consultation dans des délais brefs et des horaires restreints (dans notre cas, une heure pour consulter un dossier de plusieurs centaines de pages),… Les familles se retrouvent alors en face d’un Juge qui possède un rapport dont elles ne connaissent même pas les termes exacts. Ceci est une violation flagrante du respect des droits de la défense (cf. article 15 du code de procédure civile). Les travailleurs sociaux devraient obligatoirement envoyer une copie de leurs rapports aux familles afin que celles-ci puissent les étudier.

Dans ces conditions, l’audience devant le Juge tourne au procès stalinien. Les familles ont la très désagréable impression que tout est joué d’avance. Les parents doivent alors courber l’échine et reconnaître le bien-fondé de la mesure éducative dans l’espoir de susciter la clémence du Juge.

Le parcours est balisé: placement en famille d’accueil avec visites en lieu neutre, visites encadrées à domicile, visites semi-encadrées, placement en foyer avec droits d’hébergement progressifs avant de pouvoir, enfin, envisager un retour de l’enfant dans le cadre d’une Assistance Educative en Milieu Ouvert.

Point de raccourci possible sur ce long chemin de croix. Même si les visites encadrées se passent très bien, même si l’enfant hurle sa détresse d’être privé de ses parents, impossible d’envisager un retour direct. En effet, cela reviendrait à reconnaître que le placement n’était pas nécessaire. Alors, pour ne pas perdre la face, Juges et travailleurs sociaux prolongent les « périodes d’observation » en se drapant dans le principe de précaution.

Ce n’est qu’en se montrant « coopératifs » (c’est-à-dire en reconnaissant la qualité du travail des services sociaux), que les parents peuvent espérer une amélioration de leurs droits de visites puis d’hébergement. Mais, si les familles ont l’impudence d’essayer de prouver leurs capacités éducatives et de réfuter les conclusions des travailleurs sociaux, ces derniers ont alors beau jeu d’expliquer au Juge que les parents sont dans le « déni » de leurs propres difficultés, ce qui entraîne un retour en arrière avec rétablissement des visites en lieu neutre. Le système est machiavélique.

Pour sortir de cette situation kafkaïenne, certaines familles font des démarches pour que leur enfant soit représenté par un avocat lors des auditions. Elles espèrent ainsi donner du poids à la parole de l’enfant qui souhaite retourner dans sa famille. Naïvement, elles pensent que la voix de l’avocat de l’enfant, jointe à celle de leur propre avocat, pourra un peu rééquilibrer un rapport de force largement favorable aux tout-puissants services sociaux. Hélas, à la lecture du dossier (essentiellement constitué par les rapports de l’Aide Sociale à l’Enfance), l’avocat de l’enfant se fait rapidement une idée négative de la famille. Il reçoit ensuite l’enfant accompagné de son assistante sociale référente (puisqu’elle est la représentante légale de l’enfant). Lors de ce rendez-vous, il est impossible pour un jeune enfant de s’exprimer librement: l’assistante sociale référente reformule les questions que lui adresse l’avocat, elle le guide dans ses réponses, elle réinterprête ses mots,… quand elle ne s’exprime pas directement à la place de l’enfant. Tout cela sous le regard médusé de la famille qui, elle, n’a pas le droit de s’exprimer pour donner sa version des faits, car l’avocat de l’enfant ne peut pas entendre les parents pour cause de conflit d’intérêt. L’avocat de l’enfant se range donc aux arguments de l’assistante sociale; la messe est dite. Ce dispositif est absurde. Tout enfant placé devrait obligatoirement être assisté d’un avocat et devrait être libre de le rencontrer sans la présence de son assistante sociale référente: l’avocat est là pour recueillir la parole de l’enfant, pas celle des services sociaux.

Quand les Juges des Enfants ont peu de faits concrets à reprocher aux parents, ils se déchargent de la responsabilité du placement en demandant une expertise psychologique des parents et/ou de l’enfant. Sur la base de cette expertise, ils pourront trouver des arguments pour étayer les motivations du jugement. Hélas, l’expertise psychologique est un art plus qu’une science: point de normes ou de protocoles stricts qui définissent une bonne pratique. De plus, les expertises sont largement biaisées: elles évaluent des parents et des enfants mortifiés par la rupture des liens familiaux, pas leurs états antérieurs. Ainsi, une expertise bâclée en un quart d’heure permettra à un Juge, en toute bonne conscience, d’arracher un enfant à sa famille pendant des années. Dans l’affaire d’Outreau, on a parlé d’expertises de « femme de ménage »; nous sommes beaucoup à penser que certaines femmes de ménage sont plus consciencieuses que certains « experts ».

Enfin, beaucoup de placements sont motivés pour « carence éducative », sans autre précision. Hélas, aucun texte juridique ne définit concrètement ce qu’on entend par carence éducative. Ce motif devrait donc être déclaré inconstitutionnel. Si un Juge estime que des parents sont inaptes au point qu’il faille leur enlever leur enfant, il devrait être capable d’énoncer des faits circonstanciés et incontestables pour justifier une telle mesure (enfants laissés seuls durant tant d’heures, absentéisme scolaire tant de jours sans justificatif, vagabondage le soir jusqu’à telle heure,…). Imagine-t-on condamner quelqu’un pour vol sans être capable de préciser ce qu’il a volé ? Cela ne tiendrait pas deux secondes devant un tribunal. Imagine-t-on licencier quelqu’un pour faute grave sans être capable de préciser la nature de la faute ? Cela ne tiendrait pas deux secondes devant les Prud’hommes. Pourtant, depuis des années, en France, on peut arracher un enfant à sa famille sans avoir à préciser la nature exacte des faits reprochés aux parents.

D’ailleurs, l’article L226-2-1 relatif au recueil des informations préoccupantes n’impose pas aux personnes qui mettent en oeuvre la politique de protection de l’enfance d’apporter la preuve des révélations qu’elles transmettent au Juge. La notion même d’information préoccupante n’est pas définie. Ainsi, le travailleur social peut transmettre une rumeur sans fondement ou bien son sentiment personnel; peu importe, c’est son avis qui fait foi. Pour un Juge, les rapports de l’ASE sont paroles d’Évangile… Cet article n’est pas conforme à la présomption d’innocence (article 11 des Droits de l’Homme). La charge de la preuve devrait incomber à l’ASE; les parents ne peuvent pas se défendre contre les impressions d’une assistante sociale.

De la même façon, la motivation du placement pour « absence de collaboration avec les services sociaux » devrait être bannie. Jusqu’à preuve du contraire, le placement est une solution de dernier recours lorsque l’enfant est en danger moral ou physique au sein de sa famille. Le placement doit donc être motivé par une incapacité avérée des parents, pas par l’existence d’un conflit entre la famille et les services sociaux. Certains parents ont pourtant des raisons objectives de se plaindre de l’Aide Sociale à l’Enfance. Mais, dans la logique ubuesque des travailleurs sociaux, si une famille n’accepte pas le placement, il faut alors prolonger le placement afin qu’elle comprenne mieux les raisons du placement ! Il est permis de s’interroger si, dans quelques cas, la prolongation du placement n’est pas, en fait, une méthode pour museler des parents qui seraient tentés de porter plainte contre les services sociaux pour propos diffamatoires, faux témoignages, extorsions de signature, violation de l’autorité parentale, harcèlement moral,…

Pour compléter le tableau, ajoutons que les audiences se déroulent à huis-clos dans le bureau du Juge des Enfants. Celui-ci prononce ce qu’on appelle pudiquement des mesures « d’assistance éducative ». De cette façon, contrairement à un prévenu qui n’encourt qu’une simple amende au Pénal, les parents - qui eux risquent pourtant d’être privés de leurs enfants pendant des mois - n’ont même pas droit à un véritable procès, avec un débat publique contradictoire, avec la possibilité d’appeler des témoins à la barre, avec la faculté pour les grands-parents ou les beaux-parents, par exemple, de participer à la procédure aux côtés des parents,… Avec la procédure actuelle, le Juge des Enfants n’est pas forcé de s’embarrasser à auditionner des témoins de moralité qui voudraient attester des capacités des parents ou bien des membres proches de la famille qui pourraient prendre en charge l’enfant. (Pendant deux ans et demi, mon mari a vainement demandé à être auditionné dans le cadre de l’assistance éducative au profit de son beau-fils). D’après la loi, le Juge ne doit prononcer le placement qu’en dernier recours; mais, en pratique, aucun texte ne le contraint à rechercher des solutions alternatives. Services sociaux et Juges des Enfants peuvent donc continuer tranquillement à alimenter les foyers de l’enfance. Le Juge des Enfants devrait être obligé de recevoir toute personne qui souhaite être auditionné (avec l’accord des parents). Ces témoignages auraient alors une solennité telle que le Juge ne pourrait pas se permettre de les ignorer ou de les classer (comme il peut le faire actuellement avec de simples attestations sur l’honneur).

Bref, le placement est la procédure de facilité pour un Juge des Enfants qui ne veut pas se fatiguer à procéder à un contre-interrogatoire de la famille et/ou à rechercher des solutions alternatives. Le Juge pourra dire qu’il a suivi les recommandations de l’ASE; l’ASE pourra dire qu’elle n’a fait qu’appliquer les décisions du Juge. Tout le monde « se couvre » mutuellement; aucun risque… sauf pour un enfant sur deux qui est détruit. Le bénéfice du doute ne profite jamais aux familles. Tout cela au mépris du droit fondamental de l’enfant de vivre avec ses parents. La Convention des Droits de l’Enfant ne reste qu’une belle déclaration incantatoire. L’article L 223-4, relatif au recueil de l’avis du mineur, n’est pas contraignant.

Les Juges peuvent se dédouaner de leur désinvolture en se réfugiant derrière la possibilité, pour les familles, de faire appel. Mais, en réalité, les recours sont illusoires: les mesures de placement sont longues à l’échelle d’un jeune enfant, mais très courtes à l’échelle de la Justice: renouvelables par échéances de six mois à un an. Si bien que, si les parents veulent vraiment voir leurs droits de visite progresser, il est beaucoup plus rapide d’attendre la prochaine audience en priant plutôt que de se lancer dans une procédure d’appel longue, paralysante, coûteuse et hasardeuse.

En conclusion, la procédure de placement est une violation flagrante de l’article 10 de la déclaration universelle des Droits de l’Homme qui indique que « Toute personne a droit, en pleine égalité, à ce que sa cause soit entendue équitablement et publiquement par un tribunal indépendant et impartial » car les articles L221-1, L221-4, L226-2-1, L226-3 et L226-4 ne garantissent pas le principe d’égalité des armes des parents face à l’Aide Sociale à l’Enfance qui fait le signalement, organise la soustraction des enfants, instruit le dossier à l’attention du Juge, évalue les parents, préconise le prolongement du placement, juge de la qualité de la prise en charge du mineur par ses propres services,…

Au niveau de la mise en application du jugement en assistance éducative

L’inconstitutionnalité au niveau de la procédure d’assistante éducative ne serait, finalement, pas tellement grave si les très importants pouvoirs de l’Aide Sociale à l’Enfance étaient confiés à des agents irréprochables qui se montrent aussi exigeants envers eux-mêmes qu’avec les parents.

Mais, à chaque professionnel sa façon de faire. Certains respectent les familles, les écoutent et essayent de les comprendre. Malheureusement, point d’inspecteur pour contrôler le travail sur le terrain et harmoniser les pratiques. Alors, beaucoup peuvent perpétuer des habitudes détestables héritées d’un autre temps.

Des parents qui se sentent bafoués

Quiconque n’ayant jamais été confronté à l’Aide Sociale à l’Enfance ne peut pas s’imaginer ce que les familles doivent endurer.

Les travailleurs sociaux commencent par lire la décision de Justice mais les parents ne peuvent pas faire de remarques, demander d’explication sur le fond ou avoir une copie du rapport de l’ASE sur lequel s’est appuyé le Juge (en violation du nouvel article L223-5). Les travailleurs sociaux sont là pour appliquer une décision de justice, pas pour la commenter (même s’ils ont eux-mêmes lancé la procédure ou préconisé un prolongement du placement). Finalement, les parents ne savent pas ce qu’on leur reproche concrètement. À chaque question, c’est le même refrain: « C’est une décision de Justice ». Drôle de pédagogie. Peut-être espère-t-on que les parents réellement défaillants vont progresser grâce à cet argument d’autorité ?

Les travailleurs sociaux sont dans leur logique: ils sont persuadés que les enfants sont placés pour leur bien et que les parents sont inaptes. La plupart des assistantes sociales, sans même s’en rendre compte, ont une attitude de dames patronnesses condescendantes tout à fait exécrable. Si elles se mettaient à la place des parents viscéralement attachés à leurs enfants, peut-être comprendraient-elles la violence de ce que l’on fait subir aux familles.

Les services sociaux ne sont pas là pour écouter la souffrance des parents injustement séparés de leurs enfants et la détresse des enfants qui ont l’impression d’avoir été abandonnés par leurs parents. Tels des membres de « l’Arche de Zoé », les travailleurs sociaux s’imaginent en sauveur des enfants sans concevoir qu’ils agissent parfois en pompiers-pyromanes: ils séparent des fratries, cassent les liens entre les enfants et les grands-parents, dénigrent les capacités des parents en présence des enfants (« Tu sais, ta maman, elle ne peut vraiment pas s’occuper de toi »), cherchent à faire dire à l’enfant du mal de ses propres parents (« Ton papa n’est pas gentil avec toi, hein ? »). Peut-on imaginer plus destructeur ?

Les parents se sentent humiliés, discrédités, infantilisés; ils doivent se plier aux procédures de l’ASE car seule l’ASE détient la vérité. Ce sont eux les professionnels: ils savent ce qu’il faut faire même s’ils n’ont jamais vu l’enfant. (Conseillère enfance, attachée au Service de Protection de l’Enfance, directrice du foyer… ne connaissent l’enfant que par l’intermédiaire des rapports de l’assistante sociale référente ou des éducateurs). On prétend aider les parents dans leur mission éducative, mais on leur conteste toute capacité.

Tout dialogue est impossible. Selon les circonstances: soit les parents n’ont pas le droit de s’exprimer, soit ils le peuvent mais on les dénigre ou on remet en cause leur parole (« C’est vous qui le dites »), soit ils n’osent pas s’exprimer car ils savent que leurs propos seront retranscrits et transmis au Juge sans qu’ils aient un droit de relecture.

Que dire des réunions parents-profs où c’est l’assistante sociale qui rencontre l’enseignant pendant que les parents patientent dans une autre salle avant que, finalement, la famille ne soit invitée à entrer.

Pas étonnant que certaines familles ne perdent plus leur temps à se rendre aux convocations des services sociaux: ils connaissent la musique. De toutes façons, c’est l’ASE qui a raison et on ne les écoute pas. Alors, à quoi bon ? Les services sociaux auront alors beau jeu d’informer le Juge sur le thème: « Vous voyez bien que les parents sont irresponsables; on veut les aider, ils ne viennent même pas ! Dieu merci, les enfants sont placés ». Seules les familles les plus solides résistent à l’envie de claquer la porte et assistent stoïquement aux rendez-vous.

Une formation obsolète

Les travailleurs sociaux n’ont qu’une formation très sommaire en pédo-psychiatrie; leurs connaissances semblent se limiter à la théorie de Bettelheim. (Ancienne théorie selon laquelle tout trouble chez l’enfant est dû à une déficience de la mère; les soins passent donc par une « parentectomie »). Le problème, c’est qu’aujourd’hui cette théorie est considérée par tous comme obsolète. (D’ailleurs, Bettelheim s’est suicidé; selon les uns, parce qu’il avait réalisé la monstruosité de son erreur; selon les autres, parce qu’on avait prouvé qu’il avait falsifié ses observations cliniques).

Conclusion: tous les comportements des enfants sont analysés par le prisme de Bettelheim. Les parents sont forcément coupables et, s’ils n’avouent pas, c’est qu’ils sont dans le déni. En conséquence, les placements se prolongent (et les traumatismes des enfants s’aggravent).

Des rapports favorables… aux travailleurs sociaux

On peut douter de l’objectivité de certaines évaluations.

D’abord, les familles n’assistent pas aux synthèses ! (Imagine-t-on un conseil de classe sans délégués des élèves, un comité d’entreprise sans représentants syndicaux,… bref, n’importe quel système sans contre-pouvoir). Tout repose sur le témoignage de l’assistante sociale référente qui est forcément d’une infaillibilité papale. (Même les TISF, qui interviennent directement dans les familles, ne sont pas obligés d’assister aux synthèses).

Il faut casser ce culte du secret. D’ailleurs, les articles L221-4, L223-5, L226-2-1 et L226-5 sont régulièrement violés; souvent, on « omet » d’informer les parents. Les services sociaux doivent procéder à leur révolution culturelle comme les médecins qui, en leur temps, ont dû accepter l’accès des patients à leur dossier médical.

Une assistante sociale référente ne risque pas d’établir un rapport reconnaissant qu’elle a fait une erreur d’appréciation et qu’il faut immédiatement rendre l’enfant à sa famille. Pour valoriser son propre travail, elle a tout intérêt à expliquer que les parents sont responsables de tous les problèmes; cela permettra, par contraste, de mettre en lumière l’action du travailleur social qui a bien du mérite de gérer des familles si difficiles. Pour certaines, la défense de la carrière professionnelle vient avant la défense des enfants.

D’ailleurs, les éducateurs en CDD dans les foyers de l’enfance et les TISF (dont les emplois sont menacés dans les ADMR en difficultés financières) sont également dans une situation de conflit d’intérêts. « L’intérêt de l’enfant qui (…) doit guider toutes décisions le concernant » (article L112-4) n’est pas forcément le leur si l’enfant doit quitter le foyer ou si les observations à domicile sont inutiles.

Aucun recours

Les services sociaux peuvent crucifier une famille; mais ils n’aiment pas qu’on les égratigne. Le simple fait de poser des questions précises pour démontrer la vacuité du dossier entraîne l’irritation de l’assistante sociale. Et, quand on ose affirmer qu’il y a des contre-vérités dans ses rapports, on déchaîne les foudres. Si on a la morgue de se défendre, on est accusé d’avoir une attitude de défiance. Les parents qui se risquent à critiquer l’action des services sociaux peuvent être sûrs que le Juge en sera averti. En bon professionnel, le travailleur social sait quels mots feront mouche pour discréditer les parents récalcitrants qui ne veulent pas rentrer dans le rang: « parents dans le déni », « parents qui refusent de collaborer »,…

Alors, pour que leurs droits de visite ne soient pas restreints, les parents sont obligés de se taire et d’obéir.

Si une famille a l’outrecuidance de déposer une plainte en diffamation contre les travailleurs sociaux qui colportent des dénonciations calomnieuses, celle-ci reçoit une lettre menaçante du Président du Conseil Général. Plutôt que d’ouvrir une enquête sur ses dysfonctionnements internes, le Conseil Général s’empresse d’avertir le Procureur de la République. Ce dernier, oubliant probablement son rôle de garant des libertés individuelles, classera courageusement la plainte (il est vrai qu’il avait avalisé le jugement en assistance éducative).

Pas étonnant, dans ces conditions, que certains pères perdent leurs nerfs et s’en prennent à ceux qui les ont privés de leurs enfants ou bien que certaines mères retournent la violence du système contre elles-mêmes et tentent de se suicider. Plutôt que de réaliser que, dans certains cas, ils sont à l’origine du problème, les travailleurs sociaux sont alors confortés dans leur analyse: le père était violent, la mère était instable psychologiquement, heureusement que nous sommes intervenus pour protéger les enfants.

Des violations des Droits de l’Homme

Aucun article du Code de l’action sociale et des familles ne limite l’immixtion des services sociaux dans la vie privée (ce qui est contraire à l’article 12 des Droits de l’Homme). (Pour notre part, nous avons dû subir la présence d’une Technicienne en Intervention Sociale et Familiale lors de notre mariage. Vu les circonstances, le mariage civil a dû se tenir en petit comité: 8 adultes dont deux professeurs agrégés, un ingénieur, un notaire honoraire,… Bref, rien ne justifiait la présence d’une TISF à part probablement la volonté d’humilier les mariés).

L’article 375-7 du code civil, qui permet au juge de fixer la nature et la fréquence des droits de visite et d’hébergement des parents, porte atteinte à la liberté religieuse (article 18 des Droits de l’Homme). En effet, le juge peut s’opposer à la présence des enfants lors de cérémonies religieuses (mariage,…) et les services sociaux refusent d’encadrer des visites le dimanche ce qui prive les familles du droit d’assister à la messe dominicale avec leurs enfants. Les parents qui le souhaitent ne peuvent même pas confier leurs enfants à Dieu pour les aider à supporter cette terrible séparation.

De toutes façons, les jours de visites sont imposés (dans notre cas, le vendredi) et peu importe si les rencontres parent-enfant ont lieu sur le temps scolaire: quand c’est l’ASE qui déscolarise l’enfant, ce n’est pas une « carence éducative ».

Même quand les parents jouissent encore de l’autorité parentale, ceux-ci n’ont pas leur mot à dire sur le choix de l’école de leurs enfants. C’est l’ASE qui décide en violation de l’article 26 des Droits de l’Homme qui stipule pourtant que les parents ont, par priorité, le droit de choisir le genre d’éducation à donner à leurs enfants.

Quand les éducateurs ou les assistantes sociales ont des documents à faire signer aux parents, ils leur tendent généralement une liasse de papiers à parapher sur le champ. Difficile de prendre le temps de les lire sans que le travailleur social vous fasse sentir son exaspération. Difficile, sous la pression, de refuser de signer le « projet pour l’enfant » (défini à l’article L223-1). Difficile également de ne pas donner son autorisation pour administrer des « traitements médicamenteux non-urgents »: soit on ne signe pas et les travailleurs sociaux pourront accuser les parents de défaut de soins; soit on signe et les parents n’ont plus la capacité de s’opposer à ce que l’on mette leur enfant sous Ritaline par exemple. C’est de l’extorsion de signature. Pour notre part, alors que notre enfant souffrait d’une simple dysphasie, nous avons dû nous résigner à autoriser son hospitalisation dans une unité psychiatrique où il a été en contact avec des enfants atteints de pathologies très lourdes (beaucoup d’autres enfants placés d’ailleurs). C’était ça ou la menace d’une demande de retrait de l’autorité parentale; les services sociaux auraient alors eu les pleins pouvoirs.

L’ASE s’en prend souvent à des familles qui n’ont pas fait d’études supérieures et qui n’ont pas les moyens intellectuels de se défendre face à une structure administrative puissante. Il s’agit généralement de parents en difficultés financières, qui dépendent de l’aide juridictionnelle, et qui n’ont pas les moyens matériels de choisir un avocat expérimenté qui s’investira dans le dossier. De plus, les parents sont déstabilisés, rongés par des nuits sans sommeil, privés de leur seule source de bonheur: leurs enfants. Des parents prêts à signer n’importe quoi pour peu qu’on leur promette une heure de visite hebdomadaire supplémentaire. C’est un abus de faiblesse ignoble.

Un triste bilan comptable

Dans le cas de familles démunies, il coûterait beaucoup moins cher à la collectivité d’aider les familles en leur faisant l’avance de quelques centaines d’euros ou bien en leur apportant une caution pour les aider à accéder au parc locatif privé (lorsqu’il y a pénurie de logement HLM). Mais non. On préfère payer des familles d’accueil, des assistantes sociales référentes, des TISF, des directrices de foyer, des éducateurs,… Pour certains, le social est un « business » qui rapporte.

À cela, il faut ajouter le coût de l’aide juridictionnelle (pour des parents démunis) et l’encombrement des tribunaux, sans compter celui des CMPP car, pour finir, la sécurité sociale devra prendre en charge un pédo-psychiatre pour tenter de réparer les dégâts psychologiques que l’on a infligés à l’enfant. Triste bilan comptable.

Conclusion

Mesdames et Messieurs les Hauts Conseillers, j’ai essayé d’alerter le législateur, par l’intermédiaire de ma députée, mais ma démarche est restée lettre morte. À l’initiative de nombreuses autres familles désemparées, des pétitions circulent sur Internet pour tenter d’éveiller le pouvoir exécutif (ministres, premier ministre, président de la République); sans plus de résultat.

Mesdames et Messieurs les Hauts Conseillers, vous êtes le dernier recours de dizaines de milliers de parents, bien-traitants et aimants, injustement privés de leurs enfants. En déclarant inconstitutionnels quelques articles - anodins individuellement, mais dont l’agrégation permet tous les abus - vous seuls pouvez imposer la réforme d’un système qui est une honte au pays des Droits de l’Homme.

Je vous prie d’agréer, Mesdames et Messieurs les Hauts Conseillers, mes salutations les plus respectueuses.

Brest, le 4 juillet 2010
Mme JAFFRY Emmanuelle
jaffryemmanuelle@hotmail.fr

45. Le dimanche 24 juillet 2011 à 10:16 par francois

En vertu de quoi, un enfant serait-il privé du DROIT d’être jugé par un juge IMPARTIAL !

Imaginez que l’on vous interpelle, qu’un juge A instruise votre dossier, que le même juge A prononce un jugement et qu’ensuite - toujours le même juge A - suive l’application de votre peine. Et qu’en plus, si vous avez déjà eu affaire à la justice, il se trouve que ce fameux juge A, c’est celui que vous avez déjà croisé il y a 2 ans et qui vous a déjà fait condamner. Et, quoi que vous fassiez, vous retombez toujours sur ce juge A !

Comprenez qu’il y a de quoi à devenir paranoïaque et que l’on peut se poser une question de «suspicion légitime ».

La séparation des pouvoirs est un principe de BASE de la démocratie. Ceux qui ne sont pas d’accord peuvent aller vivre en Corée du Nord où ils auront droit à des procès staliniens où tout est joué d’avance (comme dans le bureau du juge des enfants).

46. Le mercredi 27 juillet 2011 à 16:22 par récap59

Bonjour Et_les_placements_abusifs_de_mineurs (44)

Dans l’ensemble d’accord avec vous, je ne formulerai que deux réserves :

Il y a un cas, hélas non anecdotique, où il peut être justifié de séparer un enfant de ses parents même quand ils s’entendent très bien : c’est celui où l’enfant cause une nuisance permanente et insupportable au voisinage (agressions, insultes, vandalisme, incendies, vols, cambriolages…) et où les parents le défendent systématiquement, refusant d’indemniser les victimes, voire les menaçant quand elles osent se révolter (“Si tu touches à mon gosse, je te tue !)

Il vaudrait mieux encore que ces enfants là n’aient pas de famille du tout.

“Dans le cas de familles démunies, il coûterait beaucoup moins cher à la collectivité d’aider les familles en leur faisant l’avance de quelques centaines d’euros ou bien en leur apportant une caution pour les aider à accéder au parc locatif privé (lorsqu’il y a pénurie de logement HLM)”

Vous proposez une énième règle de gestion de la pénurie de logements.

Non ! Il faut arrêter de changer l’ordre dans la file d’attente. Il ne faut pas gérer la peste, il faut l’éradiquer. Il faut construire de toute urgence les centaines de milliers de logements qui manquent dans nos villes.

Il faut abolir les normes d’urbanisme malthusiennes.

Avec votre proposition tout ce qu’on récoltera, c’est un peu plus de jeunes sans enfants à la rue pour un peu moins de familles dans la même situation. C’est absurde : il ne faut pas encourager les gens à avoir des enfants si la société leur refuse le droit de vivre une fois qu’ils sont grands.

Élever des enfants pendant des années pour qu’ils finissent une fois adultes par crever la bouche ouverte sur le trottoir n’est qu’un immense gâchis.

47. Le lundi 1 août 2011 à 10:39 par Et_les_placements_abusifs_des_mineurs

Bonjour récap59 (46),

Dans le cas des mineurs délinquants (agressions, insultes, vandalisme, incendies, vols, cambriolages…), le juge a parfaitement la possibilité de condamner le mineur et sa famille (qui est légalement responsable) au civil et au pénal. Dans ce cas, les défaillances éducatives des parents sont AVEREES (et non supposées) et il n’est pas choquant d’envisager des mesures d’éloignement.

Mon article vise la majorité des placements qui concerne des mineurs non délinquants et des familles, sans histoire, dont le seul tort est d’être incapable de se défendre contre un signalement abusif (vengeance d’un ex, calomnie, mauvaise appréciation d’une assistante sociale,…)

N.B. Pour la pénurie de logements, je persiste à penser qu’accorder une avance pour payer une caution (de quelques centaines d’euros) pour permettre à certaines familles d’accéder à un logement privé coûterait moins cher à la collectivité que de placer un enfant (coût: 6000 à 7000 euros par enfant et PAR MOIS).

48. Le lundi 1 août 2011 à 11:03 par récap59

Bonjour Et_les_placements_abusifs_des_mineurs (47)

“Pour la pénurie de logements, je persiste à penser qu’accorder une avance pour payer une caution (de quelques centaines d’euros) pour permettre à certaines familles d’accéder à un logement privé coûterait moins cher à la collectivité que de placer un enfant (coût: 6000 à 7000 euros par enfant et PAR MOIS).”

Ce que je propose coûterait encore moins cher à la collectivité : abolir les normes d’urbanisme malthusiennes (surfaces inconstructibles, hauteurs limites de construction, densités maximales d’occupation des sols…) pour résorber la pénurie de logements.

Ce que vous proposez revient à subventionner la demande. Tant qu’on n’a pas le droit de construire, cette politique ne peut conduire qu’à une nouvelle flambée des loyers au seul profit des propriétaires en place.

D’un point de vue économique, c’est la même chose que de faire tourner la planche à billets.

Votre argument sur le coût pour la collectivité ne tient que par une seule raison : les jeunes qui crèvent sur nos trottoirs ne coûtent rien à la collectivité.

Quand on a le droit de construire par contre, subventionner la demande peut avoir un effet positif, mais nous sommes très loin de ce cas de figure : en France il y a une énorme demande parfaitement solvable qui n’est pas satisfaite, uniquement à cause des normes d’urbanisme malthusiennes.

49. Le dimanche 7 août 2011 à 09:10 par Major_MacLambert

Pas d’inquiétude : j’ai lu ce billet, lors de sa publication, billet excellent comme tous les autres, félicitations à l’auteur (acceptez-vous “auteure” ? perso j’aime pas trop ces féminisations à outrance mais passons)

Chacun sa question de priorité, et cet été un peu pourri a éveillé l’âme créatrice de certains employés à La Défense : http://lci.tf1.fr/tendance/l-ete-le…

Je sais que votre priorité est aussi les moyens, et que vous coupez bien mieux les cheveux que les post-it © en quatre… (en faisant référence à d’autres de vos billets)

C’est juste un commentaire pour sourire un peu dans ce monde de brutes.

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