Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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Tout au bout de nos peines...

Billet écrit à quatre mains par Titetinotino, conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation, et votre serviteur. Des quatre mains, trois furent celles de Titetinotino, outre quatre bons doigts. Tout ce que ce billet contiendra de bon est la seule œuvre de Titetinotino, les maladresses, erreurs et approximations seront de mon seul fait.
Eolas


« Tout au bout de nos peines
Si le ciel est le même
Tout au bout de nos vies
Aurons nous tout écrit ?
De nos chagrins immenses
De nos simples violences
Qu’aurons nous fait de vivre ?
Qu’aurons nous fait de nous ?… »

Qu’aurons-nous fait de nous ?

C’est par cette chanson d’Isabelle Boulay, -ay, et non -et, que m’est venue l’idée de ce billet.

En effet, en cette période pré-électorale où il est de bon ton de parler de Justice et de sécurité, la question de la prison et des peines occupe régulièrement ceusses et celles qui s’interrogent sur leur efficacité (cherchent à récolter le maximum de voix – rayer la mention inutile).

Je suis conseillère pénitentiaire d’insertion et de probation (CPIP). On nous appelle SPIP (« je veux voir ma SPIP » revient régulièrement en détention alors que le SPIP, c’est le Service Pénitentiaire d’Insertion et de Probation) , travailleurs sociaux, éducateurs (c’était le cas dans un autre temps, avant 1999), c’est selon. On nous appelle également les bisounours, les gôchistes qui ne pensent rien qu’à faire libérer les personnes placées sous main de justice (PPSMJ) incarcérées. On parle très peu de nous, sauf quand un fait divers vient faire la une de l’actualité et qu’il s’avère que le mis en cause était suivi par le SPIP. Le scandale absolu !

Quoi ?
Comment est-ce possible ?
Comment la justice laxiste (ce qui est un pléonasme dans l’esprit de nombre de gens) a-t-elle pu ne pas prévoir que cette personne allait passer à l’acte ?
Comment le CPIP, avec sa boule de cristal de dotation, n’a t-il pas pu prévoir cette récidive ?
Comment le CPIP responsable de son suivi n’a pu l’empêcher d’agir ?
Comment le Juge de l’application des peines, cet inconscient, a t-il pu décider de la libération anticipée de cette personne ?
Ces questions alimentent sans cesse les débats, par besoin de chercher des responsabilités là où on peut en trouver, ou simplement parce qu’aujourd’hui, la part d’humanité et d’imprévisibilité qui siège en chaque être humain est de moins en moins tolérée. On veut tout prévoir, tout contrôler, même si ce qui ne peut l’être, parce que ça rassure.

Mais au fait, l’aménagement des peines est-il vraiment un signe de laxisme ? J’en vois certains qui, de prime abord, répondront forcément oui. Aussi, j’espère pouvoir leur faire changer d’avis. Derrière ce questionnement, c’est le sens de la sanction et son utilité sociale qui sont interrogées. Punir ! Oui, punir, mais pourquoi ? A une époque, on parlait de châtiment. Ah qu’il était bon ce temps où sur la place publique, les bonnes gens assistaient aux exécutions publiques, aux châtiments corporels. La sanction devait avoir un impact sur la société, devait faire peur pour soit-disant dissuader ceux qui auraient été tentés par le crime ou les délits. L’impétrant devait également expier pour ses péchés, ce qui donnait un sens particulièrement judéo-chrétien à la peine infligée. Arf, arrêtez donc de vous délecter de cette époque pas si lointaine, nous sommes en pays civilisé (enfin, il paraît) ! Il a donc fallu que des droits de l’hommistes (encore eux) considèrent qu’il n’était pas admissible de faire subir des sévices au nom de la Justice pour que progressivement la sanction pénale prenne une autre dimension, notamment par l’emprisonnement. C’est donc la prison, aujourd’hui, qui représente le summum de la sanction, celle qui enferme et tient à l’écart de la société tous ceux qui à un moment de leur existence n’ont pas respecté le pacte social qui nous permet de vivre (ou survivre, merci Daniel Balavoine) entre nous, sans que cela ne tourne à l’archaïsme. Mais ? Et oui, parce qu’il y a un mais. On en revient toujours à la même interrogation.

A quoi doit servir cette peine ? Punir ? Eduquer ? Réparer ? Protéger la société ? Prévenir une éventuelle récidive ? Permettre la réinsertion (oh le vilain gros mot!) ?

Un peu tout ça à la fois, je dirais. Et c’est là que le bât blesse. Oublier l’un de ces objectifs, c’est simplifier cette équation fragile qui pourtant est si nécessaire au vivre ensemble. C’est dans ce cadre que se situe l’aménagement des peines, qui n’est pas la mesure phare du laxisme, mais plutôt un pari sur l’avenir qui tient compte de ces multiples objectifs, et contribue, à terme, à la sécurité publique, terme si cher à une fange d’un certain électorat. Non, ce n’est pas une connerie que de dire cela !

Ce qui va suivre est tiré de mon expérience de CPIP. Le prénom, ainsi que certains éléments ont été modifiés, afin de préserver l’anonymat, sans que cela ne nuise à la réalité de la situation.

Jean-Pierre est incarcéré depuis 14 ans. Il a été condamné suite à des faits graves, il ne le nie pas. Avant son incarcération, il menait une vie d’errance, faite de larcins, de beuveries, et d’aller-retours en prison. Jamais il n’a pu vraiment se stabiliser, et… arriva ce drame. Imbibé d’alcool, de stupéfiants, il n’a pas pu se contrôler ce soir-là. Une dispute, une énième, et la violence laissa la place à la parole. Il se demande encore aujourd’hui comment il a pu en arriver là, ce n’est pas ce qu’il voulait. C’était son ami. Il partageait avec lui tous ses moments d’infortune, et pourtant… Cette sensation de ne jamais pouvoir réparer le hante. Il purge sa peine, comme on dit. Avec le crédit de réduction de peine accordé dès le début de sa détention et les remises de peine, il sort dans 3 ans. 3 ans, c’est loin, mais en même temps si proche.

Une première parenthèse s’impose ici sur le droit de l’application des peines, cette belle matière qui provoque bien des nœuds au cerveau des pénalistes qui préfèrent la lumière des Cour d’Assises que la petite salle à côté du parloir avocat qui sert de salle d’audience, au sein de l’établissement pénitentiaire. Beaucoup de mékéskidis ne comprennent pas que celui qui a été condamné à 10 ans ne les fassent pas (mais certains semblent tout aussi choqués que celle qui a été condamnée à 10 ans puisse les faire). A quoi diable riment ces réductions de peine ? Le tribunal a prononcé X ans, de quel droit réduit-on cette peine ? Et qu’est-ce que ces réductions à crédit, et ces réductions supplémentaires ? Y a-t-il des soldes dans la répression ?

La première question trouve sa réponse dans ce billet. Il s’agit de la lutte contre la récidive. On va y revenir avec Jean-Pierre.

La deuxième question a une réponse aussi simple : du même droit que celui avec lequel on a prononcé la peine : le droit pénal et sa cousine germaine la procédure pénale. Cette discipline couvre de la découverte de l’infraction et de l’enquête pour en identifier l’auteur jusqu’à l’exécution de la sanction, en passant bien sûr par le jugement des faits, qui n’est en réalité qu’une étape intermédiaire du droit pénal et en aucun cas son aboutissement (sauf en cas de relaxe ou d’acquittement bien sûr, qui n’est pas l’hypothèse la plus fréquente).

Quant aux deux dernières, voici. Jusqu’en 2004, la loi prévoyait des réductions de peine et des réductions de peine supplémentaires. Les premières étaient de fait systématiquement accordées, quitte à être retirées par la suite en cas de comportement problématique en détention. Les juges d’application des peines souffrant de tendinites à force de signer des ordonnances à la pelle, une réforme de 2004 (j’insiste sur l’année : c’est une réforme de droite) a créé le crédit de réduction de peine (CRP), accordé automatiquement au début de la peine, sans intervention du juge de l’application des peines (le crédit est appliqué directement par le greffe de l’établissement). Ce crédit est de 3 mois la première année, 2 mois les années suivantes et pour les durées inférieures à un an, sept jours par mois dans la limite de huit semaines. En outre des remises supplémentaires de peine (RPS) de 3 mois par année de peine à purger peuvent être octroyés par le juge de l’application des peines sous réserve d’avoir justifié d’efforts dans le parcours d’exécution de peine en terme de travail, de formation, d’obtention de diplôme, d’indemnisation des parties civiles, de soins…). Fin de la première leçon de droit de l’application des peines.

— « Qu’est-ce que je vais faire ? Je n’ai rien : ni logement, ni soutien familial, ni travail. Cela m’angoisse. Je n’y arriverai pas tout seul, je vais replonger si je n’ai pas d’aide. Cela fait si longtemps que je suis incarcéré. »

Il a été compliqué pour Jean-Pierre de s’adapter à la détention, au règlement. Il avait envie de tout casser. C’était plus fort que lui. Le temps lui a permis au fur et à mesure de se saisir de l’utilité d’un suivi addictologique, d’un suivi psychologique, de prendre conscience de son impulsivité, puis de penser à son avenir. Tout au bout de la peine, il y a forcément la sortie. Les personnes détenues, entre elles, aiment à dire « la prison, c’est dur, la sortie, c’est sûr » (quoique certains seraient enclins à ce que celle-ci n’intervienne jamais, au détriment de la philosophie de notre droit pénal qui consacre le fait que nul ne peut être condamné pour ce qu’il pourrait être susceptible de commettre ou de penser). Mais la sortie, dans quelles conditions ? Voilà l’alpha et l’omega de la dynamique sous-jacente à un aménagement de peine.

Progressivement, à l’aide de son CPIP référent, Jean-Pierre sollicite des permissions de sortir pour rencontrer des structures qui pourraient le prendre en charge, et ainsi l’aider dans sa reconstruction. Il y a bien longtemps que sa période de sûreté est terminée, et qu’il est dans les délais pour prétendre à ce type de mesure.

Ressortez vos cahiers à spirale.
La période de sûreté est une période de la peine durant laquelle le condamné ne peut prétendre à aucune permission de sortir, ni aménagement de peine, ni fractionnement ou suspension de peine pour raison médicale. Néanmoins, en cas de circonstances familiales graves (oui, le législateur a tout de même eu une once d’humanité), il est possible de solliciter une autorisation de sortie sous escorte qui permet d’aller éventuellement au chevet d’un proche mourant ou d’assister à des obsèques. C’est le refus d’une de ces mesures qui avait provoqué il y a un an des désordres et le blocage de l’autoroute A1 par des Gens du voyage ; étant précisé que cette dernière peut être accordée à tout moment de la peine pour une personne n’ayant jamais obtenu de permission de sortir, et dont il apparaît que cette modalité soit la plus adaptée. Le plus compliqué, c’est d’obtenir une escorte disponible, ce qui, ne nous le cachons pas, n’est pas toujours simple.

Cette période de sûreté est de droit et court jusqu’à la mi-peine (sauf décision motivée de la juridiction qui peut l’allonger jusqu’au deux tiers de la peine, pas la réduire) pour les condamnations à 10 ans et plus d’emprisonnement ou de réclusion criminelle, relatives aux infractions spécialement prévues par la loi (meurtre aggravé, viol, faits de terrorisme etc…). La mi-peine s’entend du fait d’avoir purgé une durée égale à celle restant à purger, néanmoins, sachez que les CRP et RSP ne s’imputent que sur la partie postérieure à la sûreté. Les mineurs condamnés ne font pas l’objet de période de sûreté. Cette période est de 18 ans pour les condamnés à la réclusion criminelle à perpétuité (RCP, à ne pas confondre avec les CRP, vive l’administration et ses sigles) qui sont primaires (c’est à dire condamnés pour la première fois ou du moins sans être en état de récidive légale), 22 ans pour les récidivistes, et dans certains cas, peut aller jusqu’à 30 ans. Il est toujours possible de solliciter un relèvement de celle-ci en déposant une requête, si la personne condamnée justifie d’efforts exceptionnels, et de gages sérieux de réinsertion et de réadaptation sociale. Le Tribunal de l’application des peines, composé de 3 JAP, un greffier, un représentant du ministère public, et un représentant de l’administration pénitentiaire examine la situation du requérant. A l’issue des débats, et du délibéré, les magistrats peuvent décider d’un rejet, d’un relèvement partiel ou total. Concernant les permissions de sortir, il en existe divers types : maintien des liens familiaux (MLF – art D.145 du code de procédure pénale), préparation à la réinsertion sociale (art D.145 du code de procédure pénale|https://www.legifrance.gouv.fr/affichCodeArticle.do?idArticle=LEGIARTI000006515556&cidTexte=LEGITEXT000006071154) ; participation à une activité sportive ou culturelle, présentation devant un employeur, présentation dans un centre de soins, comparution devant une juridiction (art D.143 du code de procédure pénale).

La loi fait le distinguo selon que le condamné est incarcéré en maison d’arrêt (prévenus et condamnés à des courtes peines, ou en attente de transfert en établissement pour peines), ou en établissement pour peines : centre de détention (condamnés à 2 ans et plus, jusqu’à la perpétuité, au profil considéré comme peu dangereux) ou en maison centrale (profils considérés comme « dangereux », avec de très lourdes peines, souvent la perpétuité).

A présent, bienvenu dans le fameux casse-tête des délais !
L’octroi de ce type de mesure n’est subordonné à aucune condition de délai pour les condamnés à une peine privative de liberté égale ou inférieure à un an.
En maison d’arrêt, comme en maison centrale, pour les autres, ils doivent avoir effectué la moitié de leur peine et avoir un reliquat de peine inférieur ou égal à 3 ans.
En centre de détention, les personnes détenues sont permissionnables (oui je sais, ce n’est pas beau) à partir du tiers de peine pour les permissions Maintien des Liens Familiaux et préparation à la réinsertion sociale, mi-peine pour celles d’une journée relevant de l’article D.143 du code de procédure pénale. Pour les permissions Maintien des Liens Familiaux, elles peuvent être de 1 à 5 jours, et une fois par an, de 10 jours.
Les condamnés en aménagement de peine sous bracelet électronique, semi-liberté ou placement extérieur peuvent aussi bénéficier de permissions de sortir. Concrètement, le placé sous surveillance est dispensé de ses horaires de présence à domicile, le semi-libre, de réintégrer le centre de semi liberté le soir, et le placé à l’extérieur, de toute obligation lié à sa surveillance.

Revenons-en à Jean-Pierre.

Après 14 ans d’incarcération, le retour vers l’extérieur n’est pas si simple, tant la vie en prison diffère de la vie à l’extérieur. En plus, la société a changé. C’est le juge de l’application des peines qui décidera de lui octroyer ou non la permission de sortie, en Commission d’application des peines après avis du représentant du ministère public, du SPIP, de la direction de l’établissement et du gradé de détention. Oui, c’est comme une audience, mais sans le condamné et son avocat. Ça va plus vite. Durant la Commission d’Application des Peines, la situation de Jean-Pierre sera examinée sous toutes les coutures :
Que fait-il en détention ? Travail, formation, cours scolaires, suivi médical ? Quelle réflexion sur les faits ? Effectue t-il des versements volontaires pour indemniser les parties civiles ? Et la sortie, qu’est-ce qu’il envisage ? Il a du soutien ? Respecte t-il le règlement ? Vous voyez, le magistrat ne prend pas sa décision au petit bonheur la chance. Il s’entoure d’éléments qui lui permettront de prendre sa décision, tout en sachant que cela ne saurait préjuger de ce qu’il pourrait éventuellement se passer. Non, personne ne peut prédire l’avenir ! Il y a forcément une part de prise de risque, parce que les personnes détenues sont des êtres humains, comme vous et moi, et pas des machines programmables ou programmées. Lors d’un débat contradictoire (c’est comme une Commission d’Application des Peines, mais en présence du condamné et de son avocat ; ça va moins vite du coup) qui statue sur l’octroi d’un aménagement de peine, ce sont les mêmes enjeux.

Sur le parking de l’établissement, Jean-Pierre se sent mal. La vue sur l’horizon, les arbres, l’espace lui donnent le vertige. Il est trop habitué à évoluer dans un espace confiné, derrière de hauts murs. Mais cela lui fait du bien. Enfin, un pied dehors. Il attend l’éducateur de l’association qui serait susceptible de le prendre en charge ultérieurement. Il appréhende car il souhaite réellement être aidé. Il sait que dans 3 ans, il pourrait très bien se retrouver sur ce même parking, seul, avec ses bagages, et sans endroit où aller (Bien que cela reste possible de travailler une prise en charge à l’issue d’une peine, mais c’est souvent plus délicat faute de place disponible, et de financement. Sans rentrer dans des détails complexes, il existe des conventions entre les SPIP et certaines structures d’accueil qui permettent d’obtenir des places pour les personnes placées sous main de justice dans le cadre d’un aménagement de peine).

Les entretiens se sont bien déroulés. Il a pu visiter les locaux, rencontrer l’équipe de travailleurs sociaux, l’équipe médicale, et certains autres résidents. Cela le rassure de savoir qu’il pourra être accompagné dans ses futures démarches. Il veut s’en sortir mais il a tellement de choses à faire : trouver un travail, un logement, ne plus retomber dans ses addictions. Il a conscience qu’il n’y arrivera pas seul, même s’il lui a fallu du temps pour l’admettre. La structure a donné son aval pour le prendre en charge sous la forme d’un placement extérieur probatoire à la libération conditionnelle dans 3 mois, ce qui va lui laisser le temps de préparer l’audience devant le Tribunal de l’application des peines. Cela fait un an et demi qu’il a déposé sa requête en aménagement de peine. Entretemps, il est allé dans un des trois Centres Nationaux d’Évaluation (CNE) qui a procédé à une évaluation de sa dangerosité pendant 6 semaines. A l’issue, la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté (CPMS) s’est réunie et a émis un avis, qui n’est que consultatif. Ne me demandez pas pourquoi, mais bien souvent, il est défavorable. Enfin, d’après mon expérience, ce qui n’est peut-être pas représentatif de la jurisprudence nationale.

Un peu d’explications.
A la mi-peine, tout condamné peut former une requête en aménagement de peine. Ceux qui relèvent du CNE et de la CPMS (condamnés à 10 ans et plus pour des infractions spécialement prévues, qui sont les mêmes que celles rentrant dans le champ d’application de la période de sûreté et plus largement de la rétention de sûreté) devront forcément satisfaire à une mesure probatoire de 1 à 3 ans : placement sous surveillance électronique (PSE), le fameux “bracelet électronique”; placement sous surveillance électronique mobile (PSEM), qui suppose de se déplacer avec un boitier qui indique en permanence sa position  ; semi-liberté (SL) où le condamné dort dans un centre de semi liberté et sort dans la journée pour exercer un travail ou suivre une formation par exemple, placement extérieur (PE), avant de bénéficier d’une libération conditionnelle – allez, un dernier petit acronyme pour la route, on aime bien, LC. On parle alors de mesure probatoire à la libération conditionnelle, mesure probatoire, car il s’agit d’une période durant laquelle il doit faire ses preuves. Mais, une mesure probatoire peut être prononcée également pour n’importe quel autre, si le juge de l’application des peines estime qu’il est préférable qu’il fasse d’abord ses preuves en étant plus encadré. Dans ce cas, elle peut être de quelques mois.
Mais, une mesure probatoire à la libération conditionnelle peut aussi être sollicitée avant la moitié de la peine par ceux ne relevant pas du CNE et de la CPMS, et qui devront alors être sous le régime de celle-ci au moins jusqu’à qu’à la date fatidique.

Mais… Mais, non, il n’y a plus de mais.
Quoique…

A deux ans de la fin de peine (un an pour les récidivistes), il est possible de se voir octroyer un PSE, une SL, ou un PE (maintenant que les acronymes n’ont plus de secret pour vous) « sec », sans LC à l’issue.
Et, depuis la réforme Taubira de 2014, la situation de chaque détenu est examinée aux deux tiers de peine pour que, potentiellement, une libération sous contrainte (LSC) puisse leur être accordée (peine ou cumul de peines inférieur ou égal à 5 ans), ou une LC (peine ou cumul de peines supérieur à 5 ans). L’exécution de ces dernières mesures s’effectue selon les mêmes modalités que précédemment, sauf qu’il n’y a pas de mesure probatoire sur la LSC, qui ne nécessite, selon la loi, que d’un lieu d’hébergement stable, alors que pour le reste, il convient nécessairement d’avoir un projet de sortie (travail, formation, prise en charge par une structure).
Indigeste, vous avez dit indigeste, le droit de l’application des peines ?



Jean-Pierre n’a pas pu demander de permissions maintien des liens familiaux, ce que généralement, les autres, ceux qui sont soutenus par leur famille, font. C’est tellement compliqué avec ses proches qu’il a préféré oublier. Tant pis ! Même si dans l’absolu, cela fait aussi partie de la préparation à la sortie, n’en déplaise à ceux qui pensent qu’il ne s’agit que de vacances accordées aux personnes détenues. Reprendre sa place auprès des siens n’est pas chose aisée, les parloirs n’étant bien souvent pas l’endroit pour parler de la réalité parfois dure du quotidien. Cela demande du temps.

Devant le tribunal de l’application des peines, Jean-Pierre revient sur les faits qu’il a commis, son parcours de vie, son parcours de détention qui au départ était fluctuant, le sens qu’il donne à la peine qu’il purge, ses futurs projets de vie, ses difficultés passées et ce qu’il en fait aujourd’hui. L’administration pénitentiaire (SPIP + direction de l’établissement) est favorable à sa requête en aménagement de peine sous la forme d’un placement extérieur probatoire à la libération conditionnelle dans la mesure où il justifie d’efforts sérieux dans sa détention, qu’il a pris conscience de ses fragilités, qu’il a mis en place des suivis médicaux et qu’il dispose d’un projet finalisé avec une prise en charge adaptée à sa situation qui lui permettra de se réinsérer dans la société de manière progressive ; le parquet est sans opposition pour les mêmes raisons même s’il relève que la réflexion sur les faits reste à approfondir (évidemment, cela lui ferait trop mal d’être favorable – bisous les parquetiers). Stressé, Jean-Pierre, qui était accompagné de son avocat commis d’office, quitte la salle d’audience (qui se trouve dans l’établissement), en attendant le délibéré qui sera rendu dans un mois.

Par jugement du tribunal d’application des peines de Trifouillis-les-Oies, Jean-Pierre est admis au bénéfice du placement extérieur probatoire à la libération conditionnelle à compter du 1er avril 2016. La placement extérieur durera 1 an, période durant laquelle il sera écroué et compté dans l’effectif de la maison d’arrêt compétente où se trouve la structure où il sera placé. On appelle ça les personnes écrouées, non hébergées. Durant cette année, il bénéficiera d’une prise en charge complète et devra respecter le règlement intérieur de la structure sous peine que le juge de l’application des peines soit alerté. Il devra poursuivre ses soins, rechercher un travail ou une formation, indemniser les parties civiles, ne pas paraître sur le lieu des faits, et justifier de ses démarches auprès du Conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation qui le suivra. Il pourra en profiter pour faire ses démarches de recherches de logement quand il sera stabilisé. Il aura également des horaires de sortie à respecter. A l’issue de cette année, si tout se passe bien et qu’il respecte ses obligations, il sera admis au régime de la libération conditionnelle, ce qui veut dire qu’il ne sera plus ce numéro d’écrou, le fameux matricule qui identifie toutes les personnes incarcérées de France et de Navarre. C’est symbolique mais cela sous-entend plein de choses, et n’est pas anodin dans le retour à la liberté. Encore une étape de franchie ! Le suivi du SPIP se poursuivra jusqu’à la date de fin de la peine. Il sera convoqué régulièrement pour faire le point. Le juge de l’application des peines se souciera du respect de ses obligations jusqu’à la même date. Si Jean-Pierre faillit, y fait défaut, il sera rappelé à ses obligations. Si cela lui arrive trop souvent, ou qu’il commet des infractions, il peut se voir retirer la mesure, ce qui implique une ré-incarcération pour qu’il finisse d’exécuter le restant de sa peine, et purger la nouvelle en cas de nouvelle condamnation. Comment ça ? L’aménagement de peine n’est donc pas qu’une mesure de faveur qui ne sert qu’à libérer les pôvres détenus avant la date prévue ? Tout n’est donc pas acquis ? Mince alors, ce n’est pas si laxiste que ça finalement. Mais sinon, qu’est-ce que cela apporte de plus à la société ?

Avant son incarcération, Jean-Pierre était isolé, et SDF. Il était parasité par ses addictions et son impulsivité. Il a profité de sa peine pour prendre en compte sa situation et mettre en place des choses en réponse à ses fragilités. Seulement, la prison n’est pas l’extérieur, et il y a tout un tas de difficultés auxquelles il va se retrouver confronté une fois sorti. Ainsi, ne vaut-il pas mieux qu’il bénéficie d’un encadrement et d’un accompagnement pour l’aider à faire face, tout en restant sous contrôle, que de sortir tout au bout de sa peine, qu’aurons nous fait de lui ?

Qu’aurons nous fait de lui, pour qu’il puisse réintégrer notre société dans de meilleures conditions ?
Qu’aurons nous fait de lui, pour éviter qu’il ne récidive ?
Qu’aurons nous fait de lui ?

Nota : Vous noterez que ce récit ne laissait pas la place à l’évocation des alternatives à l’incarcération qui, dans la pratique, ont la même essence philosophique que les mesures d’aménagement de peine, et qui renvoient, elles aussi, à l’utilité sociale de la sanction. Aujourd’hui, l’emprisonnement est la référence de notre système, mais il ne saurait être la réponse absolue, tant les conséquences qui en découlent ne permettent pas de dire qu’il est satisfaisant pour répondre à TOUS les objectifs dévolus à la sanction pénale. Il faut toujours conserver à l’esprit que toute personne incarcérée, en temps normal, à vocation à réintégrer notre société, toute la question étant de savoir dans quelles conditions. Seulement, dans notre société, sommes-nous prêts à accepter que la condamnation n’est pas destinée uniquement à « faire payer » le coupable pour le ou les faits qu’il a commis, comme une sorte de substitut de vengeance ? Tant que nous n’aurons pas dépassé cette idéologie… Autant dire que nous n’avons pas le cul sorti des ronces…

Commentaires

1. Le vendredi 2 septembre 2016 à 19:51 par krieghund

Excellent billet, cher Collègue !!

Krieghund, CIP 14 ;)

2. Le vendredi 2 septembre 2016 à 19:51 par krieghund

Excellent billet, cher Collègue !!

Krieghund, CIP 14 ;)

3. Le vendredi 2 septembre 2016 à 21:46 par Domy

Ah oué quand même… On n’imagine pô…

4. Le vendredi 2 septembre 2016 à 22:01 par baleine

“une fange d’un certain électorat” : j’ai bien ri !

5. Le vendredi 2 septembre 2016 à 23:04 par urchin

Billet passionnant, merci !
J’imagine que ce suivi n’est possible que pour une longue peine, pas pour la “délinquance du quotidien”  ?

6. Le vendredi 2 septembre 2016 à 23:42 par lapocompris

Voici le système vanté par certains qui au lieu d’aider à la réinsertion les ex-prisonniers leur met encore plus d’obstacles pour les punir.

https://www.youtube.com/watch?v=gJt…

7. Le vendredi 2 septembre 2016 à 23:57 par solea

Merci, cher CPIP de ce billet écrit à 3 mains, informatif et émouvant.

Peine = souffrance ; être peiné, avoir de la peine ; peine du corps, de l’esprit, du coeur ;

Affaire Sauvage, le jugement de refus : comprendre ce que l’on a fait, et accepter sa peine ;

Que faire des gens que l’on sait dangereux, a vie, par nature : pédophiles, violeurs (suivi médical et judiciaire défectueux) ; aucun traitement chirurgical ou chimique autorisé sans l’accord de la personne ?

Moralement, que faire des meurtriers d’enfants ou de gens incapables de seulement tenter de pouvoir se défendre. Faire une peine de prison suffit-il ?

L’oubli est possible, c’est une faculté humaine précieuse. Mais le pardon est-il possible dans ce monde ?

Des prisonniers très vieux, mourant de vieillesse en prison ?

“Effectue t-il des versements volontaires pour indemniser les parties civiles ? ” : avec 15 euros par mois ?

“terme si cher à une fange d’un certain électorat” : cher CPIP, ce petit plaisir était-il nécessaire ? Une corde a toujours deux bouts, deux extrèmes, deux fanges …

8. Le samedi 3 septembre 2016 à 07:54 par all

“La fange”. Vous nous avez fait la démonstration d’un biais politique dans vos jugements.

9. Le samedi 3 septembre 2016 à 08:41 par Stephane

Il n’y a pas de solutions pour lui car on a pas et ne veut deja pas trouver de solutions pour les sdfs, les inadaptes sociaux, et ceux qui releveraient de la psychiatrie qu’on laisse en liberte jusqu’a ce qu’ils fassent une connerie fatale.
La justice en fait n’a rien a voir la dedans. Et ne peut absolument rien faire non plus, ce n’est pas son domagine de traiter les problemes pre cites.

Et comme on se complique le probleme en prime avec une natalite toujours trop importante et immigration non controlee (souvent correlee), on est pas pret d’en trouver, des solutions.

Alors Jean Pierre, la dedans…on trouvait deja pas de solutions pour lui quand il etait marginal et SDF, alors maintenant, repris de jsutice, marginal et sdf..comment dire…pas de bol pour lui.

10. Le samedi 3 septembre 2016 à 09:26 par titetinotino

@krieghund en 1

Un CPIP ici, un CPIP !

@urchin en 5

En fait, la construction d’un projet d’aménagement de peine se fait autour de la PPSMJ, fonction de ses ressources, de ses faiblesses, et de ses besoins. Cela ne tient pas que de la longueur de la peine : un condamné à 2 ans peut très bien obtenir un placement extérieur d’un an ou de 6 mois, c’est selon.
Tout dépend de l’évaluation qui est faite de sa situation : est autonome ou pas, sait faire ses démarches seul, addictions anciennes, isolé ou pas, logement ou pas, ancrage dans la délinquance ou pas, est en couple ou pas, a des enfants ou pas etc… Sachant qu’une personne peut très bien ne pas adhérer aux orientations du SPIP. Un bracelet électronique peut très bien convenir à une personne ayant effectué 10 ans de détention, et pas à un autre qui n’en a effectué que 2.
Dans la même idée, une personne détenue peut demander un bracelet électronique, le SPIP estimer que c’est adapté, et le JAP décider que ce sera une semi-liberté, car jugée plus cadrante.

@solea en 7
Moralement, que faire…?
Rien que ça… Le droit n’est pas la morale. Demain, retirer le meurtre ou le viol du code pénal, ce ne sera plus l’objet de la Justice, même si une personne a été victime. De même, le pardon est un concept spirituel, certes louable, mais, ne rentrant pas dans son champs d’application, non plus.
Il faut rester lucide sur la nature humaine, certains ne changeront jamais parce qu’ils ne peuvent pas, ou qu’ils n’auront jamais cette occasion. D’autres mettront du temps, seront réincarcérés plusieurs fois, et un jour, auront un déclic. Le chemin vers la désistance (sortie de la délinquance) est parfois long, et est lié à tellement de facteurs, parfois indépendants de la personne.

@all en 8
Pardonnez moi j’ai péché. J’ai le droit à un aménagement de peine ?

11. Le samedi 3 septembre 2016 à 10:40 par solea

@10, titetinotino

Je pense que votre métier ne doit pas être facile, et vous semblez beaucoup aimez ce que vous faites. Soyez en remerciée !

Le droit fait appliquer la Loi, et n’est pas morale, heureusement mais aussi hélas.
A vous lire, on comprend que la privation de liberté s’organise comme une sorte de vengeance légale avec un barème mécaniquement adapté à celle/celui qu’il faut punir, une rééducation politique (la cité) et un reformatage social.
La récidive n’est présentée que comme une promesse de punition.

Le jugement des hommes est terrible, aucune perspective de “rédemption”, le seul espoir permis in fine étant la durée de la peine, rien d’autre en fait, les CPIP, les JAP, etc n’êtes que des rouages d’un système organisé principalement contre l’homme, et non pour et avec l’homme ?
Encore un fatalisme …

12. Le samedi 3 septembre 2016 à 10:56 par Teejee

Merci à vous deux pour ce billet, grâce auquel j’ai appris des choses, et que j’aurai mieux compris quand je m’y serai retrouvé dans les acronymes. :-)
Je me souviens que Titetinotino était gendarme il n’y a pas si longtemps, je me rappelle notamment le récit d’une procédure auquel avaient participé les contributeurs de ce blog, dont elle avait fourni la colonne vertébrale. Si ce n’est pas indiscret, qu’est-ce qui vous a fait évoluer vers un autre métier et passer des enquêtes à l’administration pénitentiaire ?

13. Le samedi 3 septembre 2016 à 21:29 par Alain38

“Sur le parking de l’établissement, Jean-Pierre se sent mal. La vue sur l’horizon, les arbres, l’espace lui donnent le vertige. Il est trop habitué à évoluer dans un espace confiné, derrière de hauts murs. Mais cela lui fait du bien”. Cette simple phrase m’a rappelé mon “séjour en prison” effectué grâce à une de vos collègue. Séjour bien court (1/2 journée) mais au combien étouffant. Les personnes qui n’ont jamais visité une prison ne peuvent pas se rendre compte. En plus c’était une vieille maison d’arrêt. Car les murs sont une réalité à laquelle on n’échappe pas. Le regard ne porte jamais à plus de deux mètres. Devant il y a toujours un mur, ou une grille, ce qui revient au même. J’y ai été, à l’invitation du SPIP, pour “offrir un moment d’évasion” aux incarcérés. En l’occurrence je leur avais présenté un voyage aux Kerguelen que j’avais réalisé quelques années auparavant. Et si vous, les CPIP avez tellement l’habitude des murs, que vous ne les voyez plus, moi j’avoue n’avoir vu que cela. Au point d’avoir “reproché” à la CPIP qui m’avait invité, la manière dont la salle avait été aménagée. En effet au lieu d’installer les chaises dans la longueur, elle avaient été installées dans la largeur. Je me prenais donc encore plus “le mur en pleine figure”.

Ce court séjour m’a aussi permis de me faire une idée de la “violence carcérale”. Pas seulement celle de l’administration (il semble que ce jour là, heureusement pour moi, elle était bien lunée). Mais aussi celle entre détenu(e)s. Car il y avait de la tension durant mon séjour, une des détenues présente venait de se faire refuser une permission. Et oui comme vous le dites si bien tout n’est pas automatique dans ce domaine. Et quand une “possibilité de sortie s’envole” cela fait visiblement très mal.

Mais, ce que je retiens surtout de ce séjour, c’est quelque chose qui ne sera pas compris de nombre de personnes auxquels vous faite allusion. Ceux que j’ai rencontré durant cette demi-journée sont des être humains. Je n’ai jamais su pourquoi elles (suite à des ratés d’organisation je n’avais que le quartier des femmes) étaient là, et j’avoue que je m’en moque. Tout ce que je retiens c’est que c’était un moment de convivialité dans un environnement très particulier.

14. Le samedi 3 septembre 2016 à 22:07 par H2O

Allez, les juges prévoient la période de transition en fin de peine quand ils fixent la durée de celle-ci.
Et ne serait-il plus économique d’embaucher des Cpip que de construire des prisons.

15. Le dimanche 4 septembre 2016 à 08:51 par titetinotino

@solea en 11

Permettez-moi de disconvenir. Notre système, effectivement, sanctionne ceux qui contreviennent à la loi. L’idée n’est pas tant de normaliser les comportements, mais plutôt de réguler ce qui ne peut être considéré comme acceptable pour vivre en société. Sans règle, l’Homme, malgré toute la croyance que je peux avoir en lui, ne pourrait pas vivre avec ses pairs. En revanche, il est vrai que de plus en plus, certains aimeraient cette normalisation, et tolèrent de moins en moins la différence parce qu’elle fait peur.
Si les aménagements de peine ou les alternatives à l’incarcération existent, c’est bien parce qu’il est permis de penser que quelqu’un peut avoir sa chance. Là, où je vous rejoins, c’est que d’un côté, on a ça, mais de l’autre, les fichiers, le casier judiciaire et les interdictions liées à l’existence de mentions sur celui-ci, pèsent toujours sur l’ex-condamné qui se voit ainsi rappelé à ses errements antérieurs.

@Teejee en 12

Caramba, me voilà repérée ! Parce que j’ai mal tourné ?
Je ne rentrerai pas dans les détails, mais sachez qu’il est toujours mieux de se retrouver dans un métier qui est en accord avec notre nature, nos aspirations.

@alain38 en 13

Merci ! On a besoin de gens comme vous pour apporter une fenêtre vers l’extérieur aux personnes détenues, raison pour laquelle les activités socio-culturelles sont essentielles en détention.

@H2O en 14

Je n’ai pas la réponse à votre question, et n’aime pas vraiment rentrer dans des considérations financières. Ceci dit, lors de la conférence de consensus sur la récidive, concernant le coût journalier, il a été fait état des chiffres suivants qui datent de 2011 :

en maison d’arrêt : 85, 44 €
en centre de détention : 98, 08 €
en maison centrale : 196, 14 €
sous bracelet électronique : 10, 43 €
en semi-liberté : 59, 19 €
en placement extérieur : 31, 32 €

Ces chiffres prennent en compte toutes les charges de fonctionnement et de personnel.
Un effort a été effectué sur le recrutement des CPIP ces 3 dernières années, mais nous ne sommes pas encore arrivé à la norme européenne qui prévoit 60 suivis max par agent de probation. La fourchette se situe entre 60 et 200 selon les services (pour info, en Suède-Danemark-Estonie, c’est de 35 à 50, en Suisse-Luxembourg, de 50 à 100). Si cela vous intéresse, voici une étude comparée des services de probation européens.

16. Le dimanche 4 septembre 2016 à 10:42 par Armand017

Impétrant : Celui (celle) qui a obtenu de l’autorité compétente ce qu’il (elle) avait sollicité (charge, titre, privilège) (Trésor de la Langue française)
Donc, on sollicite de se faire péter les membres à coup de hache ?

Judéo-chrétien : pourquoi “judéo” ? Ah, au fait, je ne suis pas spécialiste, mais la confession intervient avant, et du coup purifie le criminel, comme le bon larron d’ailleurs, AVANT l’exécution. Enfin, le larron c’était pendant. Mais donc la question de la mort par souffrance énorme et débauche de sang est plus en rapport avec la construction de l’Etat et de la personne royale. Cf. Surveiller et punir.

Sinon, merci pour ce billet très éclairant.

17. Le dimanche 4 septembre 2016 à 19:09 par solea

Vous disconvenez, c’est normal, vous êtes dans votre rôle.
Vous étiez OPJ, peut-être même officier, je le devine, dans l’erreur sans doute.
L’essentiel pour vous aujourd’hui comme pour nous tous, est d’aller au boulot avec “la banane” pour celles et ceux qui ont cette chance, donc bonne

continuation. Et portez-vous bien.

Je pense que la détention,la privation de liberté ne sont qu’une mise à l’écart de la société pour l’accomplissement d’une punition suite à une rupture du

“contrat social” A cela il faut ajouter la sureté, c’est-à-dire la capacité de la société de mettre à l’écart des individus reconnus particullièrement

dangereux, et dont on sait avec certitude pour certains d’entre eux qu’une récidive se fera après la remise en liberté, par nature, ou conviction, mais que

l’on doit remmettre en liberté parce sinon ce serait un traitement inhumain (dixit la LDH, CEDH et consorts), par manque d’espoir de fin de peine .

Le CPIP est en charge d’un détenu jusqu’à la date de la fin de la peine, mais après, le suivi ?
Il y a 40 ans, je m’étais interessé aux “éducateurs spécialisés”, auxiliaires de Justice, je ne sais pas si cela existe toujours, sous cette forme ou une

autre. Le but était, après la sanction, la réeducation, une réhabilitation, à vivre en société. J’ai même séjourné avec une énorme curiosité une nuit dans

la prison de Muret avant qu’elle ne soit “ouverte” peu de temps après à son public. De nos jours, qu’en est-il ? Entre les dérives de certains à gauche

comme l’(ex- ?)indépendantiste Taubira et celles de ceux à droite, il doit bien y avoir un positionnement non idéologique possible …

Ce qui m’inquiète, par fatalisme récurrent, c’est ce positionnement assez fréquent de certains en France qui tendrait à se/nous culpabiliser sur les

conditions des horreurs parfois commises par des criminels fanatiques, et pour lesquels la société devrait se remettre en cause avant, pendant et après.
Ainsi ce Breivik, ayant tué sauvagement près de 80 personnes et en ayant bessé 150 autres, qui a réussi à culpabiliser la société norvégienne pour cause de

traitement inhumain et pour cela a obtenu compensation ; à mettre en corrolaire avec le présumé innocent/coupable, peut-être coresponsable d’une tuerie,

avec sa mini mini salle de sport, et défendu par un avocat dont la seule mission est de défendre aussi parfois l’indéfendable, parfois même en défendant

celui qui va installer la corde pour nous pendre. Ces gens là sont allés au delà de ce que l’esprit humain peut concevoir, un indicible, une telle

inhumanité … Ainsi ce prêtre, le père Hamel au moment de se faire égorger, se défendant tragiquement avec ses pieds, ses derniers mots :”va t’en Satan”.
Que faire de ces gens : 30 ans de prison, et basta, ils auraient payé leur “dette” ?

La Loi n’est pas bonne ? Changeons la. La Constitution n’est pas adaptée ? Modifions la. La France est un état de droit, elle a une autorité régalienne,

qu’elle l’exerce. “Père, gardez-vous à droite; père, gardez-vous à gauche.” Mais n’est pas le Hardi qui veut le faire accroire …

Il y aurait tant de choses à échanger. Je ne vous enquiquinerai pas davantage, en cause votre devoir de réserve.

18. Le dimanche 4 septembre 2016 à 21:03 par Teejee

@ Titetinotino, 15
“Caramba, me voilà repérée !” Et pourtant, je ne suis pas enquêteur ! :-)
Je ne vous demande pas de détails, votre réponse me suffit amplement. Merci de me l’avoir adressée.

19. Le lundi 5 septembre 2016 à 06:46 par titetinotino

@solea en 17

Effectivement, il y a quelques dizaines d’années, il n’y avait pas de CPIP, mais des éducateurs ou assistants sociaux qui faisaient partie de ce qui était appelé comité de probation d’assistance aux libérés. Les missions étaient sensiblement les mêmes qu’aujourd’hui, et là, où vous vous méprenez, c’est que comme les CPIP, leur intervention s’achevait à la fin de la peine, que ce soit en prison, ou dehors (ce qu’on appelle le milieu ouvert). C’est le mandat judiciaire qui légitime notre action. Ensuite, les personnes relèvent du droit commun, comme tout à chacun.

20. Le lundi 5 septembre 2016 à 12:23 par un physicien

Tout ceci est tellement moins croustillant que le burkini …

21. Le lundi 5 septembre 2016 à 12:53 par loberia

Juste une remarque : ” Une dispute, une énième, et la violence laissa la place à la parole.”

N’est-ce pas plutôt l’inverse ? La parole qui laisse la place à la violence ?

22. Le lundi 5 septembre 2016 à 13:52 par le fataliste

Un questionnement ici

23. Le lundi 5 septembre 2016 à 13:57 par Ahem

Titetinotino, me permettriez vous de vous reprendre sur ce ‘tout à chacun’ qui me blesse ?

http://www.academie-francaise.fr/to…

Merci pour ce texte !

24. Le lundi 5 septembre 2016 à 19:47 par Mumut

Bonjour et merci pour ce billet très pédagogique.

En le lisant, je me suis demandé si cette complexité du droit de l’application des peines ne nuisait pas à l’objectif de réinsertion (question de pur béotien, je n’ai jamais eu l’occasion d’entrer dans un lieu de rétention). N’y a-t-il pas des réactions du genre “même si je fais des efforts, je ne sais pas si la réduction de peine/permission de sortie sera accordée, alors autant ne pas faire d’effort” ?

Et d’où provient cette complexité ? Du (grand méchant) législateur, qui empile les réformes sans évaluer ni abroger les précédentes?

25. Le mardi 6 septembre 2016 à 08:49 par Stephane

N’y a-t-il pas des réactions du genre “même si je fais des efforts, je ne sais pas si la réduction de peine/permission de sortie sera accordée, alors autant ne pas faire d’effort” ?

Un prisonier n’a pas a faire ‘d’effort’, mais simplement de respecter les regles en prison. Si il est pas foutu faire ca, on devrait meme la ralonger, vu qu’il est pas foutu vivre en societe. Car la prison en est une aussi.

26. Le mardi 6 septembre 2016 à 13:42 par Rémi

Maître,
cela fait deux articles que vous commetez sur la recidive et l’aménagement de peine.
Comment osez-vous poursuivre ce dessein criminel?
C’est à cause de gens comme vous que le grand dessein ne peu pas être réalisé en France.
Sans vous il y aurait plus de millionnaires ou milliardaires en France et ces gens là sont fréquentables contrairement aux sans dents que vous défendez.
Car franchement à quoi sert le sans dents? A dépenser des deniers de l’état? Passe encore lorsque cela permet via un gentil PPP de les donner à Bouygue, Eiffage ou autres amis. Mais pour payer des salaires à des CPIP? Quelle honte.
il fut un temps où la peine du sans dents avait une utilité. Les frêres d’Aunay par exemple, leur punition par Philippe le Bel a au moins procuré une heure de beau spectacle aux gens de qualité. Ah bénissons les mânes du président Curval qui n’hésitat jamais à régaler le peuple de beaux spectacles si il faut en croire le divin marquis son Biographe.
Mais là votre Jean Pierre de Trifouilly les oies? Qu’en attendre? Va-t’il fréquenter le boulevard saint Germain? Venir aux diners? Que neni.. Le gueux ne sers á rien sachons donc nous montrer forts et modernes (Que ces adjectifs sonnent bien dans un discours quand on agite le menton)
Alors de grâce cessez cette propagande pro bisounours et revennez aux vraies duretés de ce monde: Les milliardaires font des pertes, Bygmalion n’a touché que quelques dizaines de milllions d’euros et la monstrueuse injustice faite à notre ami Dominique qui a juste commis quelques amours ancillaires.

27. Le mardi 6 septembre 2016 à 23:05 par Panouf

Très intéressant et fais évoluer mon regard sur la question, notamment sur l’opinion: “les remises de peines ne devraient en aucun cas être automatique, si on mets une durée de peine, c’est pas pour les caniches” (je suis contre l’automaticité, pour les remises de peine comme pour les peines planchers: adapter l’application de la loi au cas particulier devant lui, c’est le boulot du juge, alors que les politiques arrêtent de lui dire comment il doit le faire, et commencent par apprendre à faire le leur correctement!!!!)
Mais j’ai une question: le législateur a t’il tenu compte, en pratique, des remises de peines dans la définition de la durée maximale légale de la peine?

28. Le mercredi 7 septembre 2016 à 10:08 par pierre

@Stéphane : Certaines remises de peine sont conditionnées à des efforts exceptionnels du détenu, comme l’explique titetinotino.
Seule les remises de peine automatique se contente du “bon comportement” du détenu.

29. Le mercredi 7 septembre 2016 à 17:55 par le fataliste

@titetinotino en 19
Ce que je disais, en 17 (solea), sur les éducateurs spécialisés (de la liberté surveillée), se rapporte aux mineurs souvent APRES l’exécution de la peine, EOLAS en parle très bien , jusqu’à leur majorité.
Ce métier m’aurait bien plu, mais j’étais trop jeune, 20 ans, pas assez de maturité, et aussi un boulot très dur (blindage). Je me souviens de cas extra-ordinaires, des gamins étant allés très loin dans la délinquance.

30. Le jeudi 8 septembre 2016 à 09:24 par hohoho

@28 pierre
Inutile de tenter la nuance, le gars n’est manifestement jamais passé à la couleur. :)

31. Le jeudi 8 septembre 2016 à 21:26 par Stephane

@hohoho: et vous croyez tjs au pere noel vu votre pseudo….

32. Le vendredi 9 septembre 2016 à 17:46 par epbg

@ hohoho (30)

Oh l’insupportable mépris de classe gaucho-bobo qui croit détenir la vérité.
A mettre dans le même sac que les islamiste

33. Le vendredi 9 septembre 2016 à 19:24 par titetinotino

@mumut en 24

Je ne pense pas que l’application des peines soit plus concernée par l’empilement des textes que le reste de la procédure pénale. De manière générale, Justice et sécurité sont des sujets largement impactés par la pression médiatique, mais aussi politique, au détriment de la cohérence.
J’ai en mémoire l’exemple de la Finlande qui, confrontée à la surpopulation carcérale il y a des dizaines années, a mené un vaste chantier sur la politique pénale, la politique carcérale en décidant d’éloigner ces questions du populisme. Cela leur a pris 30 ans, en restant sur la même ligne, et ils ont eu du résultat.
La Finlande n’est peut-être pas la France mais bon…

@panouf en 27

Concernant le crédit de réduction de peine, je ne suis pas magistrate mais il me semble que lors du prononcé de la peine, ils y pensent. Je pense bien que c’est expliqué aux jurés également dans les Cours d’Assises.

34. Le vendredi 9 septembre 2016 à 21:00 par le fataliste

le twitter de titetinotino
en 33, la réponse attendue était de savoir si le législateur avait pris en compte les remises de peine dans la définition de la durée maximale de la peine.
A savoir que sert de prévoir une durée maximale de peine à 30 ans par exemple si le détenu est certain de n’en faire au pire que les 2/3 (les récidivistes, dans votre exemple finlandais, 340000 km² et 26 prisons pour 5millions d’habitants, gens du Nord de l’Europe, tous cousins entre eux, pas de chiffres sur les fonctionnaires affectés ; la France elle a le double en surface, 67 millions d’habitants, gens du Sud de l’Europe, et combien de prisons, les fonctionnaires ? ).
Ici, les peines planchers ont été supprimées et remplacées par des mesures “bienveillantes”, sans que cela je crois ait désengorgé les prisons, bien au contraire.

Chacun fera dire ce qu’il veut aux chiffres, ils sont là pour cela. Mais dites-moi (non, je sais, vous ne pourrez pas, votre obligation de réserve), honnêtement, les moyens matériels, juridiques, humains sont-ils correctement adaptés ?
Non, tous nous savons que non.

35. Le samedi 10 septembre 2016 à 09:51 par titetinotino

Cher @Le fataliste, je vous invite à lire ceci . Vous aurez des éléments de réponse.

36. Le samedi 10 septembre 2016 à 10:48 par le fataliste

@35 titetinotino
“En revanche les recommandations de cette même cour sont souvent déconnectées de la réalité” dixit la CGT … Quelle prétention !
Je regrette, mais je ne peux aller plus loin que cette phrase, placée dans l’entame de leur commentaire revendicatif très orienté : aller plus avant ne m’apporterait rien. Fuyez celui qui a des certitudes, rapprochez vous de celui qui doute !
J’espérais une source d’information plus crédible.
Merci tout de même. Je vais donc rester en tête-à-tête avec mes certitudes et mes incertitudes.

37. Le samedi 10 septembre 2016 à 11:08 par le fataliste

Oups !
J’oubliais : le référé de la Cour des comptes, omis par nos amis de la CGT.
J’aimerais connaître, sans connotation partisane, le nombre de prisons en France ( avec leur destination : centre de détention, etc), et le nombre de personnels affectés (dans chaque spécificité des différends métiers), leur formation, leur finalité, leurs moyens.
Là, ensuite on pourra commencer à discuter sur de bonnes bases.
Pour les SPIP, on peut compter sur notre hôtesse à trois mains.
Elle est gâtée d’ailleurs, moi je n’ai que deux mains droites.

38. Le lundi 12 septembre 2016 à 13:26 par urbi

twitter.fr/maitre_eolas ce matin
“✏️ ‏@Maitre_Eolas
Bonne fête de l’Aïd.”

Ah? et la fête de la Nativité de la Vierge Marie le 8, et demain, le 14, la Croix Glorieuse ?
Noël, Pâques, Pentecôte, l’Ascension, Haggim, Moadim, Yom, pas politiquement correct ?

39. Le lundi 12 septembre 2016 à 13:40 par troispommes

“les bonnes gens assistaient aux exécutions publiques, aux châtiments corporels. La sanction devait avoir un impact sur la société, devait faire peur pour soit-disant dissuader ceux qui auraient été tentés par le crime ou les délits. L’impétrant devait également expier pour ses péchés, ce qui donnait un sens particulièrement judéo-chrétien à la peine infligée. Arf, arrêtez donc de vous délecter de cette époque pas si lointaine, nous sommes en pays civilisé (enfin, il paraît) ! Il a donc fallu que des droits de l’hommistes (encore eux) considèrent qu’il n’était pas admissible de faire subir des sévices “

En dehors des Droits de l’homme, les châtiments publiques n’étaient pas d’une ultime efficacité pour décourager les gens d’être violent, de tuer…. D’ailleurs les pays où la peine de mort est toujours appliquée ne brille pas par leur douceur de vivre.

40. Le lundi 12 septembre 2016 à 15:45 par Tandhruil

Bonjour,
Il y avait un blog sur rue89 il y a 1 an ou 2 qui relatait le suivi d’un prisonnier en semi-liberté et le difficile parcours de la réinsertion.

J’ai personnellement l’impression que ce parcours de réinsertion devrait être obligatoire.

http://rue89.nouvelobs.com/blog/sem…

41. Le mercredi 14 septembre 2016 à 10:28 par Simon

La mention de versements pour dédommager les parties civiles m’a intrigué, est-il possible d’avoir plus de précisions ? On sait que les revenus d’un détenu ne sont pas vraiment conséquents, et il semble difficile de leur en vouloir s’ils utilisent une partie pour cantiner vu leur ordinaire. Du coup, est-ce une condition déterminante ou un petit bonus ? De quels ordres de grandeur parle-t-on ? Et en dehors de la question qui nous concerne, les remises de peines, est-ce une pratique courante ? J’avoue que ça ne m’était jamais venu à l’esprit…

42. Le mercredi 14 septembre 2016 à 11:50 par journal-la-mee

Bonjour Maître Eolas, voudriez-vous me donner l’autorisation de reprendre en partie cet article, pour le journal La Mée, petit journal hebdo bénévole de la région de Châteaubriant ? Merci d’avance !

43. Le jeudi 15 septembre 2016 à 11:04 par epbg

@ 42 ( journal-la-mee)

Je vous conseille plutôt de demander au Maître de ces lieux sur “http://www.maitre-eolas.fr/contact

Vous aurez à mon sens plus de chance de réponse

44. Le vendredi 16 septembre 2016 à 01:05 par chester denis

Merci pour l’article, cela était un témoignage très utile. Mais … :
@33 titetinotino (qui répond @ panouf 27). C’est un des éléments importants de l’affaire Sauvage. Le procureur s’est trompé dans ses calculs et a dit : “si vous dites 10 ans elle est libérable en avril 2017, et si neuf ans en février 2016”. Il a trompé les jurés et on ne sait pas si cela a été rectifié en délibération (Voir l’article de Me Eolas “De grâce” et les commentaires). Je trouve personnellement que 10 ans c’est 10 ans et tout le reste est conditionnel. Même le crédit automatique, ne débouche-t-il pas sur une procédure de demande de libération, donc de passage en CNE (évaluation des reins et des coeurs par des experts psychologiques) et CPMS ? (dans le cas de Mme Sauvage). Elle a failli renoncer à toute nouvelle demande pour ne pas subir à nouveau ces interrogatoires suspicieux (une torture). Et donc votre affirmation selon laquelle l’évaluation CNE est presque toujours négative pose question !
Car la vision inverse à la votre (sur l’utilité de votre rôle) peut être tenue : l’appareil répressif joue avec le détenu, par le bâton et la carotte, sans contrat clair, avec une part énorme d’arbitraire et souvent des erreurs de suivi des SPIP débordés. Et on condamne le détenu à de trop longues peines dont la moitié est consacrée à ce jeu de “conditionné”. C’est une aide, mais aussi une menace.
Il est parfaitement compréhensible que Mme Sauvage assume son geste (“j’ai tué, je suis là pour en répondre”) mais n’en ait aucun regret. Or on veut, par la conditionnalité, changer sa conscience. En croyant qu’on la libérera anticipativement (donc en se donnant bonne conscience), mais c’est l’obliger à simuler, à tromper l’administration. Voilà, la “bonne conscience” des acteurs de la justice est un biais important (même si le désir répressif de la société est aussi un biais important).

45. Le vendredi 16 septembre 2016 à 14:48 par le fataliste

“Les mineurs de moins de 16 ans peuvent maintenant être placés en détention provisoire pendant deux voire trois ans. Ce délai était fixé à un maximum d’un an auparavant.
Si leur implication est confirmée, en fonction des charges retenues contre eux, ils comparaîtront devant un tribunal pour enfants ou devant une cour d’assises des mineurs. La peine encourue sera alors moitié moins que celle d’un adulte.” (FranceTVinfo)
Qu’en est-il des aménagements et réductions de peine, où et comment sont-ils privés de liberté, le suivi, etc ?

46. Le vendredi 16 septembre 2016 à 23:46 par Sir yes sir

Très beau billet
Je ne suis pas connu en tant que juge pour être un bisounours, les avocats grincent même un peu des dents quand je fais partie de la composition en comparution immédiate…
Et pourtant quand j’étais au parquet et que je prenais des réquisitions en débat contradictoire, j’étais souvent favorable aux aménagements de peine. Il faut savoir dire quand la peine n’a pas eu de sens, quand on ne note aucune progression, aucun effort ; il faut plus encore savoir dire qu’on est prêt à refaire confiance. Même (et surtout) au parquet, où on représente la société. Bisous aux CPIP

47. Le mardi 20 septembre 2016 à 17:49 par minidrazgon

au cas ou cela peu être utile, une petite enquête et interview sur le sujet : https://www.youtube.com/watch?v=AtI…
il s’agit de la chaine youtube “dataguele”

48. Le mardi 20 septembre 2016 à 20:30 par Trob

Maître,

Premièrement, une petite remarque de forme : je trouve que votre crédibilité de pénaliste en a pris un sacré coup après votre condamnation en justice pour injure et diffamation.
Je ne remets pas en cause vos qualités de procédurier, mais vous devriez visiblement revoir votre droit pénal de fond. Comment pouvez-vous prétendre faire la morale à ceux qui ne partagent pas votre idéologie de gauche, quand dans un même temps vous commettez vous même des délits ?
Fais ce que je dis, et non ce que je fais…
Deuxièmement, je tenais à vous signaler que je n’ai que peu d’estime pour ceux qui, comme vous, se servent du Droit comme d’un prétexte pour mettre en place des tribunes politiques. Il existe des partis pour cela, inutile d’encombrer la sphère juridique de votre propagande léniniste.
Quant au fond des choses, le contentieux de l’application des peines est à mon sens une aberration de la matière pénale.
D’une part, le juge d’application des peines a le pouvoir de détricoter une décision pénale définitive, en la vidant de sa substance. A quoi bon condamner un délinquant à dix ans d’emprisonnement sans sursis, si au final c’est pour le laisser sortir post sentence ? L’autorité de chose jugée est-elle passée à la trappe ?
D’autre part, j’aimerais rappeler que la première caractéristique du droit pénal est la punition. “Poena” signifie le “châtiment”. Ce n’est pas pour rien.
La société est une grande communauté dans laquelle des individus très différents les uns des autres doivent s’efforcer de cohabiter. Dans un monde utopique, chacun y mettrait de sa bonne volonté pour ne pas nuire à autrui.
Nous ne sommes pas et ne serons jamais dans un tel monde. L’homo sapiens est un animal, un primate plus exactement, et il est dans sa nature d’avoir recours à la violence. Chacun a une éducation, une morale, des intérêts bien différents qui s’avèrent parfois incompatibles avec ceux du voisin.
Le simple fait de dire à un tueur “ce n’est pas bien, ce que tu as fait” n’a généralement aucune efficacité.
Le citoyen est à la société ce que l’enfant est au parent. Il va constamment chercher à savoir où sont les limites, il va les dépasser pour en connaître les conséquences.
Répéter à un enfant “ce n’est pas bien” sans autre conséquences va entraîner l’indiscipline de l’enfant. Il ne respectera rien ni personne, il sera le maître.
Un pédiatre renommé a dit “élevez votre enfant comme un démocrate, il deviendra un fasciste. Elevez-le comme un fasciste et vous en ferez un démocrate”.
Tout est dit, et on peut transposer ce raisonnement au citoyen.
A quoi bon dire à un criminel que ce n’est pas bien ? Sauf trouble psychique ayant aboli son discernement, il sait parfaitement que la société condamne l’homicide volontaire… Sans punition, il ne sera pas incité à s’arrêter. Le propre du châtiment, c’est de faire comprendre au délinquant qu’il s’expose à pire s’il commet son méfait, que s’il ne le commet pas.
Or, notre droit pénal fait l’inverse. Commettez des infractions, des crimes mêmes, et soyez simplement l’objet d’une restriction de votre liberté d’aller et venir, en allant en prison. Otez la vie d’un être humain, détruisez les existences de sa famille, engendez la désolation autour de vous, et vous serez nourri, chauffé, logé au frais du contribuable. Ne faites pas de vague et vous finirez même par sortir. Perpétuité ? Mais ne vous inquietez pas : au bout de trente ans purgés, vous sortirez. Car le droit français estime qu’un être comme vous a une “dignité”. Détruire des vies en toute conscience, causer la souffrance et le malheur, répandre la tristesse et la violence, et la haine, ne vous prive pas de votre dignité.
Avec la pensée de gauche, même Hitler aurait été gracié et aurait eu une “dignité”.
Voilà le système que vous défendez, monsieur Eolas.
Honte à vous.

49. Le mardi 20 septembre 2016 à 20:50 par Trob

PS rectificatif :

J’apprends que vous avez fait appel de votre condamnation pour injure et diffamation.
Vous êtes donc toujours présumé innocent, et je retire donc mon propos suivant : “vous commettez des délits”.
Mais tout de même… Quand on lit ce qui vous a valu une condamnation en première instance, on s’interroge sur la rigueur de votre raisonnement de juriste…

50. Le mardi 20 septembre 2016 à 22:13 par le fataliste

@47 minidrazgon
Lien récupéré sans doute sur le compte twitter de notre hôte loase triplée ?
on y voit un discours mettant en exergue un coût de l’emprisonnement pour un résultat in fine présenté comme négatif au vu des récidives, récidives d’ailleurs causées par les insuffisances culpabilisantes de la société.
Je note une agitation croissante de la bienpensance de gauche (et extrème gauche, pardon gauche de la gauche, et ceux de terra nova et consorts), ils tirent tous azimuts : plus ils s’agitent plus ils montrent leur certitude d’être écartés l’an prochain.
Regardez, ici même : autant les juristes avocats et même juges aficionados progressistes sont prompts à commenter avec délectation un “viol de la loi” par ceux qui la font (le fax qui marche pas, le papier de l’imprimante, La Poste qui n’est plus qu’une pâle image de ce qu’elle a pu être, etc). Posez une question de mekeskidi, pas de réponse …
Comme le dit très bien Trob en 48, vous faites de la politique en détournant le droit, vous avez beau dire que le droit et la morale sont deux choses différentes, mais pourtant le droit n’est qu’un outil de propagande, et de revenus, pour vous.

Quelle tristesse, mais aussi quelle révolte dans les coeurs et les esprits !

Serais-je anti-trollé comme pendant le mois d’août ?

51. Le mercredi 21 septembre 2016 à 16:03 par Pilote de Châsse d'Os

Désolé de ne pas faire un hors sujet (d’autant plus savoureux que l’auteur de l’article n’a pas fait l’objet d’une tentative de condamnation à géométrie variable), mais je voudrais rappeler que le rôle des cpip -et ils sont loin d’être laxistes- est peu connu:

j’ai eu quelques informations sur le système de probation français dans http://moreas.blog.lemonde.fr/2013/… et peut être les ai je comprises, malgré ma lenteur et le bruit qui perturbait les commentaires sérieux.

Cependant, je ne sais comment on peut mesurer l’efficacité d’une politique de probation -et a fortiori, l’efficacité d’un cpip, qui devrait rentrer dans son salaire si on pouvait définir et mesurer une efficacité-:

  • est ce en comparant des régions voisines des EU (qui peuvent avoir des politiques de probation différentes, ou des moyens différents)
  • est ce en comparant les EU et le Canada -ont globalement des politiques pénales différentes, tout en ayant une culture et une économie extrêmement proches

Je sais qu’il est très difficile de mettre un chiffre en matière de délinquance/ criminalité : pendant des lustres, le viol n’était presque jamais enregistré et la tendance à le signaler est récente : la croissance du nombre de plaintes pour viols (voire de condamnations) peut être simplement liée à une évolution des pratiques policières en matière d’accueil des victimes, et pas du tout à la bisonoursification de nos sociétés.

A l’inverse, des statistiques fiables concernent les morts violentes, que les médecins sont tenus de signaler depuis 200 ans environ; la baisse spectaculaire (malgré l’abandon de châtiments grand guignolesques) sur cette période peut être liée:

(a) à l’amélioration des programmes de télé, les violents préférant regarder une série à leur goût -ou un match de foot- plutôt que de se quereller
(b) aux progrès de la médecine et des urgence, un suriné pouvant se faire recoudre, transfuser et avoir des antibiotiques -si on blessait quelqu’un lors d’une bagarre, et qu’il mourait d’une scepticémie, on pouvait se faire étêter pour amuser et dissuader les citoyens-
(c) à la bonification de l’espèce humaine..
(d) à une efficacité croissante de la police , dont les délinquants sont conscients (les gens réfléchissent avant de se quereller, c’est bien connu, et se sont renseignés sur l’efficacité de la police) …

52. Le mercredi 21 septembre 2016 à 20:31 par titetinotino

@Simon en 41

Les ressources des personnes détenues sont très variables, entre ceux qui reçoivent des mandats, ceux qui n’en reçoivent pas, ceux qui travaillent, ceux qui ne travaillent pas… On doit avoir une fourchette entre 20 euros (qui correspond à l’aide indigence concédée aux personnes sans revenus) et 400 euros, voire un peu plus, mais c’est à la marge. La moyenne est plutôt de 200 euros environ.

Le minimum demandé est généralement de 10% des ressources mensuelles, ce qui correspond souvent à 10, 20, 30 euros ; certains choisissent de faire plus. Cela peut paraître ridicule au regard des sommes dont certains sont redevables, surtout quand cela se chiffre à des milliers d’euros, mais c’est au moins un geste qui est pris en compte pour l’octroi éventuel de permission de sortir, d’un aménagement de peine, ou de remises supplémentaires de peine (RSP). Pour ces dernières, la situation des personnes détenues est examinée chaque année (travail, formation, versements volontaires, incidents, démarches de préparation à la sortie etc…) en commission d’application des peines (CAP). En fonction des éléments, peuvent leur être octroyés jusqu’à 3 mois de RSP.

Dans tous les cas, c’est un peu le jeu de la carotte et du bâton, ce qui parfois peut laisser planer le doute sur la sincérité des démarches mises en place. Très clairement, certains connaissent le système et font des efforts uniquement dans ce but. D’autres, motivés par cet aspect, vont aussi en prendre la mesure pour engager quelque chose de plus authentique.

53. Le vendredi 23 septembre 2016 à 15:56 par Holmes

  • “Autant dire que nous n’avons pas le cul sorti des ronces…”

- Avec un léger parfum de SWIFT :

“…Vite ! Il y a du papier hygiénique à la papeterie ! J’ai retenu ma place dans la queue. (…) Deux heures plus tard, nous revenions à la maison, heureux, couverts de chapelets de rouleaux de papier hygiénique.”

L’avenir radieux - Alexandre Zinoviev

54. Le vendredi 23 septembre 2016 à 18:44 par le fataliste

Holmes en @53
Merci pour l’avenir radieux !

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“Le type qui a le coeur sur la main et le cul entre deux chaises ne peut que finir à l’hôpital.” Pierre Perret
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