Journal d'un avocat

Instantanés de la justice et du droit

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samedi 12 juillet 2008

samedi 12 juillet 2008

Ton juriste en tongs à la plage

Par Dadouche



C'est l'été. Calendairement parlant en tout cas, parce que du point de vue météorologique, ça peut se discuter.
Pour certains, c'est donc les vacances. Et l'occasion de se plonger sans vergogne dans les romans de plage. Chacun place ce qu'il veut dans cette catégorie, mais pour beaucoup, cela peut se résumer en "ouvrages qui tiennent dans une poche, qui distraient, que l'on peut délaisser le temps d'un baignade sans perdre le fil du récit".
Bien sûr, pour d'autres, c'est les oeuvres complètes d'Eolas reliées pleine peau de Troll, mais après tout les psychopathes aussi ont droit à des vacances.
Les romans policiers, et particulièrement ceux de la collection Grands Détectives chez 10/18, rentrent assurément dans ma définition personnelle du roman qu'on lit toute l'année à la plage, à la montagne, au coin du feu ou dans un bain plein de bulles.
Hors sujet sur ce blog de juristes obsédés me direz-vous ? Non : certains de ces héros ne sont ni détective, ni psychanalyste, ni libraire, ni colporteur, ni moine herboriste, ni journaliste/héritier ou marchand d'art. Ils sont juristes.

Le premier, par ordre d'apparition éditoriale chez 10/18, est le très chinois Juge Ti, héros de Robert Van Gulik.
Jen-Tsie TI a véritablement vécu de 630 à 700, sous la dynastie T'ang. On découvre dans les romans, outre la société chinoise de l'époque, la fonction de magistrat (qui tient à la fois du juge, du commissaire de police et du préfet), et un système judiciaire fondé sur l'aveu, forcément obtenu sous la torture, et où la personnalisation de la peine tient souvent dans le choix du mode d'exécution.

Soeur Fidelma de Kildare, créée par Peter Tremayne est une contemporaine irlandaise du Juge Ti.
Religieuse de l'Eglise celtique d'Irlande, elle est surtout dálaigh, avocate de haut rang des anciennes cours de justice d'Irlande, formée pendant de nombreuses années aux subtilités de la loi des brehons, codifiée au Vème siècle.
Souvent accompagnée de Frère Eadulf, moine saxon lui même ancien gerefa (juge), Fidelma parcourt au gré de ses aventures l'Irlande mais aussi les royaumes gallois, poussant même jusqu'à Rome, résolvant au passage enquêtes criminelles et crises diplomatiques. Le système judidique décrit est notamment très protecteur des femmes, tout comme l'Eglise à laquelle appartient Fidelma, qui mit plusieurs siècles à se plier aux standards romains.
Les curieux anglophones peuvent cliquer ici pour en découvrir davantage...

C'est au Ier siècle (après JC), sous le règne de Vespasien, que se situent les enquêtes de Marcus Aper, avocat romain d'origine gauloise, un des héros du Dialogue des orateurs de Tacite, ressuscité par Anne de Leseleuc.
La civilisation gallo-romaine expliquée au (plutôt jeune) lecteur, dans l'un des berceaux de l'éloquence et de la rhétorique judiciaire.

Un juge aveugle peut être un visionnaire. C'est ce que prouve Sir John Fielding, magistrate au tribunal de Bow Street au XVIII ème siècle. Les fictions de Bruce Alexander retracent les avancées que ce personnage bien réel, qui avait succédé à son demi-frère le romancier et magistrate Henry Fielding, a permises dans les techniques judiciaires. On lui doit un embryon de police judiciaire avec les Bow Street Runners, qui ne se contentent plus d'appréhender contre prime les suspects désignés par les victimes, mais sont salariés du tribunal et procèdent à des investigations. Il faisait publier dans la presse des descriptions de criminels recherchés et d'objets volés, annonçait ses audiences pour susciter des témoignages et s'est comporté comme un juge d'instruction, actif dans la recherche de la vérité, davantage que comme le magistrate traditionnel, simple récipiendaire des déclarations des victimes.
Pour plus d'éléments historiques, il y a cet article en anglais, mais les romans retracent bien cette démarche, ainsi que sa conviction que la lutte contre la délinquance passait, outre l'efficacité policière, par l'éducation et la lutte contre les inégalités.

Si le rabbin est un figure essentielle de la vie juive et une autorité religieuse en tant que ministre du culte, ce titre était anciennement délivré aux érudits jugés aptes à enseigner la Loi aux profanes et à siéger au sein du Beth Din, tribunal jugeant selon la loi religieuse. Et c'est bien en cette qualité d'érudit juriste, formé aux subtilités du pilpoul, forme de logique talmudique, que le Rabbin David Small, créé par Harry Kemelman, s'attache à exercer ses fonctions au sein de la communauté juive conservatrice de Barnard's Crossing (Massachussets) à partir des années 60, même si ses ouailles attendent souvent de lui un peu plus de sens politique. Ses dialogues (fréquents, compte tenu de sa propension à se trouver mêlé à des affaires criminelles de diverse importance) avec le catholique chef de la police Lanigan sont le prétexte à de passionnantes explications sur la religion juive, décrite davantage comme une éthique de vie qu'une affaire de foi.

Voilà donc quelques juristes devenus enquêteurs, par leurs fonctions ou par la force des choses, et propices au bronzage. Quand on vous dit que le droit est partout...
Il y en a probablement beaucoup d'autres, chez d'autres éditeurs, n'hésitez pas à les signaler...

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